A Gentleman’s Legacy

The Murder Of My Sweet

10/12/2021

Frontiers Records

C’est déjà l’heure du sixième album pour les suédois de THE MURDER OF MY SWEET, et ce pauvre chéri doit maintenant ressembler à un cadavre en décomposition. N’y voyez pas là une métaphore douteuse sur la carrière d’un groupe que je suis avec plaisir depuis son premier album, car malgré un parti-pris artistique assez personnel et propice à la division, les suédois ont toujours fait preuve d’ambition, et ont toujours refusé de se reposer sur leurs lauriers pourtant chèrement acquis.

2022, l’année de l’explosion pour Daniel Flores et ses troupes ? Au jugé du contenu de ce nouvel album, il y a fort à parier que THE MURDER OF MY SWEET va s’attirer un nouveau public avide de sensations tout en renforçant sa fanbase, puisque A Gentleman’s Legacy est sans doute son œuvre la plus riche, la plus dense et la plus complexe. Rien que le tracklisting fait baver de ses soixante-six minutes, mais la durée n’ayant jamais été synonyme de qualité, la méfiance modérée reste de mise, même si Brave Tin World nous avait laissés sur une note plus que positive.

Tous ceux connaissant Daniel savent quel musicien/compositeur et producteur il est. Cette réputation le précède, et est due à un travail acharné, pour repousser sans cesse ses limites. Aujourd’hui, Daniel a choisi de faire la jonction entre deux époques de sa vie, différentes mais qui s’assemblent dans la continuité, et de fondre dans un même élan créatif son ancien groupe MIND'S EYE et son combo actuel. Les fans de MIND'S EYE n’ont en effet pas pu oublier A Gentleman's Hurricane, avant-dernier album qui proposait un concept assez simple dans les faits, et A Gentleman’s Legacy n’est rien de moins que la suite de cette histoire, que je vous résume ici brièvement :

Adam Evangelista est un ancien agent de la C.I.A et tueur professionnel travaillant en solitaire. Nous suivons ses pérégrinations au travers de confessions faites au prêtre qui l’a élevé, lui infligeant des punitions très sévères. Cette éducation a contribué à faire de lui ce tueur implacable et froid qu’il est devenu.

Pitch simple, digne d’un film d’action avec Jason Statham, A Gentleman's Hurricane nous proposait donc de suivre la vie de ce personnage sombre, à l’âme torturée, et c’est donc très logiquement que la suite nous est proposée aujourd’hui. A Gentleman’s Legacy est donc l’occasion pour Daniel de suivre le fil d’Ariane de sa propre vie, et cette jonction a tout de la mise en abime artistique. Le pari est risqué, mais on connaît le talent du bonhomme, et c’est donc sans surprise que ce sixième longue-durée s’inscrit parfaitement dans son parcours. Toujours accompagné par Angelica Rylin au chant, épaulé par Mike Palace à la guitare depuis quelques mois, et par Patrik Janson à la basse, Daniel a donc laissé parler ses ambitions, et s’est retourné vers ses influences progressives les plus manifestes, désirant réunir dans un même creuset d’inspiration GENESIS et QUEENSRYCHE.

Tâche ardue s’il en est, le Metal proposé par THE MURDER OF MY SWEET étant connu pour ses gimmicks cinématographiques et son sens de l’emphase, mais après quelques écoutes attentives, on peut effectivement affirmer que ce nouveau chapitre est bien le plus évolutif de la bande. Un morceau comme « Winged » aurait d’ailleurs pu trouver sa place sur l’un des albums de DREAM THEATER, avec son approche mi-grandiloquente et mi-émotionnelle, et les prouesses techniques plus appuyées permettent de s’éloigner des facilités les plus évidentes utilisées par le compositeur dans le passé.

Avec des titres qui dépassent tous ou presque les cinq minutes et un final épique de près de dix, Daniel s’est mis des bâtons dans les roues, et inutile de souligner que quelques passages faibles viennent encombrer inutilement l’album. Mais globalement, et malgré la somme d’idées conséquente, A Gentleman’s Legacy tient toutes ses promesses, et fait le lien entre le Daniel d’hier et celui d’aujourd’hui. On s’en rend clairement compte sur certains morceaux, qui contiennent l’ADN le plus pur du groupe, avec ces claviers atmosphériques en soutien, ces riffs saccadés en embuscade, et ces lignes de chant puissantes, à l’image de « Kill Your Darlings » ou « A Ghost Of A Chance », classiques, mais terriblement bien ficelés.

Entre émotion sombre et accroche rythmique, THE MURDER OF MY SWEET parvient à progresser et à se réinventer sans se trahir, et à nous proposer une bande-son digne des comédies musicales de Broadway les plus primées (« Trick Of The Devil »). La fin de l’album est d’ailleurs un modèle du genre, avec son durcissement de ton et ses ouvertures vers des influences extérieures, et c’est donc l’esprit aiguisé et la curiosité à bloc que nous abordons le dernier virage d’un travail de titan. L’album ayant nécessité trois mois d’écriture et cinq d’enregistrement a donc été figé en assez peu de temps, mais le résultat est là, et nous retrouvons donc le personnage de Pandora, enfant devenue femme, qui suit les traces de son père en traquant ceux l’ayant engagé et transformé en monstre glacial et sans pitié.

Et si Pandora ne sort pas indemne de son aventure, nous ressortons grandi de l’écoute de cet album, qui trouve son acmé avec le superbe « Finding Closure », et ses neuf minutes de Metal moderne progressif sensible et puissant. Sans aller jusqu’à évoquer QUEENSYRYCHE et son chef d’œuvre Operation Mindcrime, THE MURDER OF MY SWEET grave son nom dans le marbre des concept-albums Metal les plus réussis, et nous embarque dans une aventure musicale passionnante.

Si la voix d’Angelica manque parfois d’expression pour suggérer les émotions, si certains passages en pilotage automatique gênent encore un peu la bonne progression, A Gentleman’s Legacy reste un héritage dont Daniel Flores peut être fier, et une suite tout à fait à la hauteur de son chapitre précédent.

  

                                                                                                                                                                                                        

Titres de l’album:

01. Six Feet Under

02. A Ghost Of A Chance

03. Damnation

04. The Wheels Of Time

05. Winged

06. Kill Your Darlings

07. Fathers Eyes

08. Rise Above

09. Trick Of The Devil

10. Heads Or Tails

11. Please, Don’t Wait Up

12. Finding Closure


Site officiel

Facebook officiel


par mortne2001 le 23/12/2021 à 18:03
80 %    506

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Enslaved + Svalbard + Wayfarer

RBD 20/03/2024

Live Report

Voyage au centre de la scène : BLOODY RITUAL

Jus de cadavre 17/03/2024

Vidéos

Crisix + Dead Winds

RBD 20/02/2024

Live Report

Abbath + Toxic Holocaust + Hellripper

RBD 21/01/2024

Live Report

1984

mortne2001 10/01/2024

From the past
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Simony

C'est justement ce relent de Hardcore qui en fait du Thrashcore en condition live qui m'a dérangé. Le placement du chant fait vraiment moderne, c'est con mais ça m'a un peu rebuté, dommage parce que musicalement c'est vraiment pas mal.

28/03/2024, 16:07

Tourista

L'album de Pâques !  

27/03/2024, 19:56

MorbidOM

Découvert l'an dernier dans un mini festival à Toulon avec Aorlhac en tête d'affiche, j'avais bien accroché et acheté leur cd (le précédent du coup) qui m'avait un peu déçu (difficile de redre justice à une m(...)

27/03/2024, 00:16

Saul D

Ben si Cannibal Corpse est une légende, Immolation aussi, non? Ils avaient tourné ensemble en 1996 ( je les avais vus à la Laiterie, avec Inhumate en première partie...)...

26/03/2024, 13:16

Bulbe

Enorme !

26/03/2024, 08:06

Vivement le prochain Ep. Ça envoie du lourd

Putain c'est vachement bien 

26/03/2024, 00:15

Gargan

Je viens de tomber par hasard sur ce docu à leur sujet, je sais que deux-trois ici pourraient être intéressés : TULUS - 3 DECADES OF UNCOMPROMISING BLACK METAL (FULL DOCUMENTARY) (youtube.com)

25/03/2024, 20:05

Humungus

C'est très loin d'être pourri, mais j'préfère tout de même de loin "Ozzmosis", "Down to earth" ou "Black rain"...

25/03/2024, 09:21

RBD

Tout le mérite en revient à notre hôte, je n'ai influé en rien sur les choix successifs. Autrement dit, cela me convenait aussi.

24/03/2024, 19:53

Buck Dancer

J'aime beaucoup. Parcours sans faute jusqu'au septième morceau. Du death classieux moins extrême que le premier album mais plus varié. Les délires vocaux de Vincent passent aussi très bien (ce qui n'aurait pas été le cas chez Morbid).(...)

24/03/2024, 13:34

Humungus

Je plussoie à mort ta bande son d'after hé hé hé...

23/03/2024, 11:02

Antidebilos suce mon zob

@antidebilos : t'es vexé, sac à foutre.

22/03/2024, 15:49

Oliv

Et le plan r fest ! 

22/03/2024, 15:21

antidebilos

"groupe de petites gauchiasses qui crisent si on n'emploie pas le bon pronom" : allez, retourne écouter tes groupes de NSBM de fond de toilettes et épargne-nous tes commentaires ridicules

22/03/2024, 09:04

Ivan Grozny

Tournée vue à Paris, merci pour le report.

21/03/2024, 21:01

Orphan

Tres bonne news des le matin. 

21/03/2024, 08:08

LeMoustre

A minima c'est assez inutile, rarement intéressant même si l'idée n'est pas nouvelle. Voivod l'a fait y'a peu, c'est quand même assez anecdotique sur le rendu final. Les morceaux en version d'origine se suffisant a eux mêmes.

20/03/2024, 12:18

Gargan

Ce son de toms n’existe plus depuis schizophrenia

19/03/2024, 22:06

LeMoustre

Il prend corps au fil des écoutes, et s'il paraît moins immédiat que Firepower, il ne me déçoit pas tant les compositions restent solides et dignes du Priest. Pas encore totalement poncé mais j'encourage à y revenir et chaque écoute(...)

19/03/2024, 14:50

LeMoustre

Superbe ce papier avec un chroniqueur qui, ça se sent, a vécu l'époque Roadrunner et sa superbe compilation (a la non moins superbe pochette) Stars on Thrash.Achat obligatoire.P.S : Euh moi une ex m'appelle pour prendre de mes nouvelles et me proposer (...)

19/03/2024, 12:13