The Liar The Saint

Let It Die

16/11/2016

Autoproduction

Brexit ou pas, les forces musicales Anglaises continuent de faire partie de l’Europe artistique, et il serait malvenu de leur rappeler que les frontières virtuelles qu’ils ont choisi de ranimer les empêchent de diffuser leur musique hors de leur propre pays…

Et puis, dans de nombreux cas, la perte serait énorme niveau qualité de ton et de son. La musique ne fait pas de politique ? Pas toujours en effet, alors acceptons de considérer que ce triste évènement ne concerne que l’Europe économique et non les musiciens qui après tout, n’ont pas demandé forcément à faire machine arrière pour revenir en des temps reculés de protectionnisme.

Qui plus est, eut égard au sujet matinal, le protectionnisme n’a que peu de prise avec la réalité. Car le trio LET IT DIE n’a pas de terrain de jeu cloisonné et peut se targuer d’emprunter les affaires du voisin pour s’aménager sa propre piste ludique.

Déjà responsables d’une démo en 2011, et d’un simple éponyme en 2012, puis d’un split partagé avec les MONOLITHIAN, Alex (batterie), Ben (Guitare et chœurs) et xRedx (chant) nous offrent donc aujourd’hui des vues un peu plus développées sur leur art consommé de l’exploitation bruitiste, qui au passage, balaie quelques poncifs et établit de nouveaux standards de brutalité et de lourdeur.

Simple d’accès, la musique du trio est pourtant ardue à définir. On sent en filigrane de multiples références au Crust Anglais le plus véhément et crasseux, mais les retouches sont très personnelles et plus ouvragées que la violence générale du ton ne le laisse présager.

Certes, le trio est rapide, très, mais aussi lourd, très, compact, moite, assez traumatique dans sa conception de la pesanteur musicale, et alterne avec flair les parties instrumentales chaotiques et les longues litanies Heavy qui font mal à la vie.

Le tout est enrobé dans une production riche mais pas étouffante, qui permet de faire gronder les graves et de polir les médiums, pour une compréhension optimale et une efficacité radicale. Des points faibles dans cet étalage de qualités intrinsèques ?

Il semblerait que non, mais tout dépend de la sensibilité de chacun après tout…

Admettons que le fond de l’air The Liar The Saint est plutôt froid, et bouillant à la fois. L’héritage Crust local n’est jamais très loin, mais il est supporté par une charpente Lowcore conséquente, qui permet aux trois ouvriers de bâtir leur cathédrale sonore en toute quiétude. Mais l’inquiétude de l’auditeur est quant à elle mise à rude épreuve par ce jeu de cache-cache brutal qui ne ménage ni les soudaines accélérations, ni les décélérations inopinées qui nous écrasent et nous lapident sans aucune empathie. Si les allusions au patrimoine national sont patentes, ils convient de souligner aussi les accointances des LET IT DIE avec d’autres entreprises de déconstruction fameuses, comme les TRAP THEM ou NAILS, sans que les trois musiciens ne se permettent des emprunts trop poussés et flagrants.

Voix rocailleuse et gravissime, guitares trois tons en dessous et batterie qui s’accorde parfaitement des changements d’humeur, c’est une structure éprouvée qui trouve ici de nouvelles limites à dépasser. Ça fait mal, et encore plus mal, et le Hardcore fortement industrialisé des Anglais trouve un écho inattendu dans le Sludge ricain le plus touffu, ce qui rend leurs morceaux encore plus abrasifs.

Mais pour être totalement honnête, ou presque, tout est dit et prédit dès l’entame fort peu empathique « Release », qui effectivement libère les démons dans un décorum digne du GODFLESH le plus récent. Pesanteur, moiteur, son qui prend à la gorge et qui occupe tout l’espace, on se croirait presque transporté dans un univers Induscore déshumanisé, jusqu’à ce qu’un mid tempo écraseur à la ENTOMBED des mauvais jours n’accélère un peu le pas. Mais ce pas est décidé, quoiqu’un peu irrégulier, et le tempo joue au chat et à la souris avec vos nerfs, dans un jeu de « 1,2,3 soleil » démoniaque.

Et puis « One Hundred Days » de ruiner à grands coups de Crust intense les velléités de modération, alors même que le feedback, les stridences et autres coupures rythmiques ne mettent à mal la régularité monstrueuse du projet. Et là est véritablement la nature de ce trio décalé, qui ne sait se contenter d’une direction simple et claire, et qui préfère les errances qui aboutissent là où on ne les attend pas forcément pour prendre leur public à la gorge.

Et si « Punish » reste sur le même déroulement, l’intensité monte d’un cran, et les guitares se transforment en mur de gravité en arrière-plan, avant une fois de plus de laisser filtrer un feedback assourdissant, dans la plus grande tradition de l’Anarcho-Core national.

Une touche de Doom, une allusion Sludge, et le mélange est parfait, mais vraiment douloureux.

On pense aussi aux WORLD NARCOSIS qui une fois leur stage chez les flingués de NOISEAR terminé, valident leur acquis en passant une semaine à certifier leurs qualités sous l’égide des PIGS bien décidés à leur apprendre les mauvaises manières Core.

Une synthèse de tout ce que l’underground peut proposer de plus abject, de plus violent, de plus nauséeux, pour finalement se démarquer plus que la moyenne des acteurs de la scène, et qui aboutit à un résultat dont votre psyché musicale n’est pas prête de se remettre.

Et entre les valses bétonnées de « Oderint Dum Metuant » qui appuie encore un peu plus Sludge là où ça Hardcore, et le final cauchemardesque de « Heaven And The Eternity Of Tears (Part II) », qui Indus et Doom là où le Crust commence à couler une bielle, les choses sont complexes et claires à la fois, et une seule opportunité se dégage avec clarté, celle de la malséance harmonique qui pique et fait saigner les chairs au lieu de cautériser la plaie.

Tout ce charabia pour vous dire clairement que The Liar The Saint, le premier LP du trio LET IT DIE est une alternative dangereuse aux convenances d’usage. Avec une grosse poignée de titres brefs qui se concentrent sur la vitesse d’un Crust épais, ou qui alternent les humeurs ébouriffantes et les accalmies pesantes, et une ou deux pièces plus conséquentes, mais pas plus rassurantes, c’est une première tentative qui essaie de se mettre à la hauteur d’un patronyme ne laissant planer aucun doute.

Lapidaire comme du Crust Allemand, lourd comme du Sludge ricain, dissonant comme de l’Indus Anglais, mélange disharmonieux, mais efficace.

 Une jolie façon de traiter le mal par le mal, et de constater l’état d’un monde à l’agonie par la douleur de la lucidité.


Titres de l'album:

  1. Release
  2. One Hundred Days
  3. Punish
  4. Take All The Heads Of The People, And Hang Them Up Before The Lord Against The Sun
  5. Dysphoria
  6. Oderint Dum Metuant
  7. Pathetic
  8. Soul Deceiver
  9. Choke
  10. The Last Monument
  11. Heaven And The Eternity Of Tears (Part I)
  12. Heaven And The Eternity Of Tears (Part II)

Bandcamp officiel


par mortne2001 le 14/11/2016 à 20:25
80 %    1014

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Enslaved + Svalbard + Wayfarer

RBD 20/03/2024

Live Report

Voyage au centre de la scène : BLOODY RITUAL

Jus de cadavre 17/03/2024

Vidéos

Crisix + Dead Winds

RBD 20/02/2024

Live Report

Abbath + Toxic Holocaust + Hellripper

RBD 21/01/2024

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Grosse pute

Attention, les mecs ne se font pas "enfler". C'est juste que Warner ne leur a pas demandé leur avis pour rééditer le bazar et les mecs parlent donc d'édition pirate, alors que Warner a bien les droits sur le disque. Après, Kickback, ce ne son(...)

20/04/2024, 06:26

Tourista

Désolé pour les coquilles monstrueuses.  Merci la saisie automatique.

19/04/2024, 20:51

Tourista

Non bien sûr je plaisantais, M'sieur Heaulme. Un artiste qui se fait enfler a mille fois raison d'en parler !   Et je sais malheureusement de quoi je parle.Respect pour Kickback. Content que tu les pu voir ce docu.

19/04/2024, 18:08

Humungus

@Tourista :- "On s'en cogne"Bah non...- Tu t'es achement bien rattrapé avec ce docu qui était totalement passé à côté de mes radars.Exceptionnel.C'est pas C8 qui passerait ça bordel...

19/04/2024, 15:54

grosse pute

Au lieu d'aller baiser des gamines et des ladyboys à Bangkok, Stephan aurait dû apprendre à lire les contrats qu'il signe.

19/04/2024, 15:20

Humungus

Ouhlala miam miam !!! !!!! !!!

19/04/2024, 10:35

Tourista

Désolé, c'est bien SODOM et non....   Putain de correcteur !  

19/04/2024, 07:52

Tourista

On s'en cogne.   Non j'en profite juste pour dire à ceux qui ne l'auraient pas encor(...)

19/04/2024, 07:52

Arioch91

J'aime bien ! Ajouté à ma shopping list.

18/04/2024, 19:48

Saul D

" Marianne" c'est pour miss Schiappa? ok je sors :-)

18/04/2024, 17:12

Gargan

Y'a du riff polonais.

17/04/2024, 08:12

grinder92

Pas de groupes irlandais alors ! 

16/04/2024, 11:24

Gargan

Faudrait descendre un peu et faire la prochaine édition au stade rochelais   

16/04/2024, 08:30

Tourista

Au delà du commerce qui brûle, ce qui est ÉVIDEMMENT regrettable pour l'entrepreneur et la clientèle, il est difficile de ne pas voir le côté comique de l'événement... Au pays des clochers qui ont servi si souvent de barbecues.  (...)

15/04/2024, 18:21

Simony

Oh ça va on rigole ! Pour une musique qui se dit en désaccord avec le concept de religion, je trouve que l'on sacralise et idolâtre un peu trop de choses dans cette scène.C'est dommage c'est sur mais c'est que du matériel, ça va !

15/04/2024, 16:14

Labbé

je plussoie ! cet album est effectivement fort fort bon... mention spéciale pour Howl of Gleaming Swords. Merci pour la découverte ! 

15/04/2024, 15:01

LeMoustre

Le niveau des commentaires ici ça fait peur

15/04/2024, 14:25

LeMoustre

Oh purée !!! Merde !Moi qui ai eu la chance de pouvoir y trainer une demi journée entière (il les fallait) a la recherche de perles d'époque, émerveillé par ce magasin-musée, c'est bien fâcheux cette news.U(...)

15/04/2024, 13:47

Humungus

Y'a des gens ici qui sont trop "Trve".

15/04/2024, 06:54

Satan

Y a des gens ici qui n'ont aucun sens de l'Histoire et un sens de l'humour franchement bas-de-plafond.

14/04/2024, 23:29