Les japonais ne sont jamais les derniers à se montrer sadiques et à en vouloir à notre audition. Je ne parle pas ici de Yoko Ono, bien que je reste persuadé que dans certains pays, le fait de brailler des horreurs enfermé dans un sac de toile de jute soit passible de la peine de mort, mais bien des deux marsouins infâmes d’ANATOMIA, qui depuis 2002 nous assomment de leur Death/Doom si cryptique que même les LUSTMORD en ont les foies. De Tokyo nous en reviennent donc les effluves nauséabonds de ce tandem si cher au cœur de tous les apprentis pathologistes du monde, quatre ans après la secousse sismique Cranial Obsession, qui en 2017 avait causé un glissement important des plaques tectoniques. Ce qui ne veut pas dire que Jun Tonosaki et Takashi Tanaka soient resté les mains dans les poches entre-temps. Non, comme à leur sale habitude, les deux zigues ont produit un nombre conséquent de formats divers, nous inondant d’un tsunami de démos, de splits, de compilations, dans un désir constant d’occuper le terrain de l’ignominie bruitiste la plus infecte.
Et c’est donc le label anglais Me Saco un Ojo Records, en collaboration avec Dark Descent Records qui s’est occupé du sort funeste de ce quatrième album, pas plus complaisant avec notre santé mentale que ses prédécesseurs. Mais si ma prose vous semble ironique et distanciée, sachez que les ANATOMIA sont tout sauf des psychos en liberté ou des charcutiers à la retraite en mal de barbaque bon marché. Les deux musiciens connaissent leur boulot et la non-musique, et nous proposent donc une fois encore la quintessence d’un Death/Doom vraiment rigide, froid, cadavérique, mais qui fait appel au ressenti le plus viscéral des années 90 les plus macabres.
En tentant d’imaginer une collaboration fantôme entre ENCOFFINATION, INCANTATION, dISEMBOWELMENT, AUTOPSY et ce cher Mories de GNAW THEIR TONGUES, vous approcherez de très près de la sublimation morbide des deux japonais. Toujours aussi glauque, gras, sombre, lancinant et souffreteux, le Death des deux amis conserve cette patine amateur que l’on apprécie tant, et encore une fois, autant dire que Jun et Takashi se sont retroussé les manches pour aller puiser au fond d’une fosse commune de quoi alimenter leurs fantasmes les moins avouables.
Alors que Cranial Obsession s’obstinait pendant plus d’une heure et huit morceaux, Corporeal Torment joue l’économie, mais propose quand même une sacrée tranche de mort de plus de vingt minutes en tant qu’épilogue. Fidèles à la recette qui a fait leur réputation d’équarisseurs de l’underground japonais, les deux ANATOMIA nous livrent donc une épaisse sauce qui prend incroyablement bien, les deux musiciens n’hésitant pas à se pousser eux-mêmes dans leurs derniers retranchements. On reconnaîtra donc ces riffs monolithiques tenant plus d’un feedback grave que de motifs reconnaissables, ce tempo pachydermique qui de temps à autres s’affole sans que l’on ne comprenne bien pourquoi, et ce désir de confronter le Death et le Doom dans un match à mort.
Pour comprendre la philosophie du groupe, autant y aller carrément, et se plonger dans les abysses de l’enfer éternel de « Mortem », qui illustre en effet le caractère sans fin d’une mort qui nous attend tous au tournant. Cet épilogue dantesque s’apparente d’ailleurs plus à un Doom atmosphérique très vilain, voire à un Ambient à la IN SLAUGHTER NATIVES déformé par la putréfaction, et nous tire par les cheveux dans un vieux caveau vidé de son précédent occupant. Sourd, lourd, pesant, éprouvant, ce morceau est une synthèse parfaite de l’art sournois et vil des deux musiciens, qui cherchent toujours l’angle le plus abrupt pour vous initier à leur méthode. On peut trouver ça redondant, on peut trouver ça fatiguant à la longue, mais les amateurs se laisseront hypnotiser par ce mantra de l’impossible, qui réussit la gageure d’insister sans se lasser.
La voix est évidemment incompréhensible, les effets réduits au minimum de borborygmes souterrains, mais ANATOMIA n’est pas qu’une machine de pesanteur implacable qui pervertit tout sur son passage. J’en veux pour témoignage « Dismemberment », plus alerte et moisi, qui en ouverture place les pions avant l’agonie. Intro rampante et grouillante de rigueur, mais tempo montant dans les tours, blasts épars et totalement efficaces, cette entame ravira les amateurs de Death poisseux des années 90, lorsque ICANTATION régnait sur le putride qui empeste. Bien sûr, « Slime of Putrescense » a tôt fait de ralentir la cadence pour se frotter à un Blackened Doom tétanisant, mais en quatre morceaux seulement, Corporeal Torment fait preuve d’une diversité et d’une créativité assez bluffantes.
Moins douloureux qu’une aria de menstruations live from Budokan de Yoko Ono, mais assez terrifiant quand même.
Titres de l’album:
01. Dismemberment
02. Slime of Putrescense
03. Despaired Void
04. Mortem
Ozzy sur sa chaise hé ben.Bon l'âge nous aura tous mais bon quand même c'est pas cool de voir ça.Moi ça m'aurait emmerdé.Autant un Anthrax, un Maiden ont toujours la peche après tant d'années (quitte &a(...)
07/07/2025, 13:18
j'ai eu l'occasion de les voir en première partie de Seum mi Juin. vraiment bien prenant !
07/07/2025, 12:48
Je m'attendais vraiment pas à ce qu'Ozzy tiennent 30 min sur chacun de ses shows...Bon, on peut pas dire que c'était "beau" à voir mais si j'avais eu la chance de gauler une place, j'aurai tout de même été bien con(...)
07/07/2025, 07:36
Putain je suis fan de Slayer mais c'était bien dégueulasse. Ça devient une parodie. Et oui merci pour tout Ozzy et tommy.
06/07/2025, 21:25
Oui c'est bien beau mais étaient ces gars durant l'ère Obama ou il a absolument tout trahis ? Trump on connait son histoire personnelle et ses financements. c'est sans surprise..
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Pardon pour les fautes, mais quitte à écouter ce genre de trucs, Anna von Hausswolff le faisait beaucoup mieux il y a 10 ans. C'est ce qu'on appelle l'avant-garde je suppose.
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Le problème de de Kayo Dot c'est qu'il dépend de l'envie du moment de Toby Driver et de qui l'entoure, tu peux avoir un album de drone/post-rock suivit d'un album de death metal, il n'y a pas de groupe et aucune identité. C'est dommage parce(...)
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