La virilité. Je m’en souviens comme si c’était hier, durant mon adolescence, je n’étais qu’un pauvre petit gars pas vraiment impressionnant, qui essayait de faire son trou dans la jungle hostile du collège. Une faune dangereuse, hargneuse, toujours prompte à vous en mettre un coup derrière les oreilles pour peu qu’elles soient légèrement décollées. Pas facile de vivre sa jeunesse lorsqu’on n’a pas un corps d’athlète et du répondant dans les poings. Pourtant, cette satanée virilité qui m’échappait revenait le temps d’un album, que j’écoutais en pensant aux superpouvoirs qu’il pouvait m’accorder.
Et quand un vinyle de SLAYER ou de KREATOR tournait sur la platine, je me sentais invincible. Cette montée de testostérone me transformait en balèze capable de défier les têtes brûlées, qui évidemment, auraient ri de tant de confiance déplacée.
Aujourd’hui, j’ai pris du gras et des muscles, et personne ne vient plus m’embêter dans la cour de récré. Je suis suffisamment imposant pour faire subir à mes contemporains mes goûts musicaux, mais cette période de fragilité et de faiblesse me revient par vagues parfois, au point de me transformer de nouveau en ce petit gamin frêle. Lorsque ce phénomène se produit, je fouille dans l’actualité pour y trouver une solution. Et celle du jour s’appelle CORPORAL SHRED.
D’ailleurs, leur second long porte le bon nom. Thrashtosterone. La définition parfaite pour un ado fragile qui soudainement voit ses poils pousser et des embryons de biceps onduler. Cette sensation, procurée à parts égales par les Etats-Unis et l’Allemagne trouve en 2024 son illustration la plus parfaite sous la forme de neuf morceaux concentrés, fluides et déchaînés, qu’un quatuor sympathique joue avec la plus grande des convictions.
Ceci étant dit, le quatuor (Etsche - basse/chœurs, Basti - batterie, Patze - guitare et Maddin - guitare/chant) ne s’est pas montré particulièrement bavard depuis son émergence. Plus d’une décennie d’existence pour à peine deux albums, c’est assez maigre et franchement dommage. Car les loustics en ont sous la semelle, et peuvent prétendre à une bonne place sur le podium old-school. En combinant justement le meilleur des deux écoles amies/ennemies, le radicalisme en vogue dans l’Allemagne des années 80, et la précision américaine de la même période. En découle un album très joyeux, fun dans la forme, mais très travaillé dans le fond.
Evidemment, tout ceci est hautement prévisible. On peut facilement anticiper les breaks et autres ralentissements, mais le panache dans la mise en place est tel qu’on pardonne ces quelques facilités, le genre étant très difficile à faire vraiment évoluer. Alors, de la hargne, un chant vraiment rauque et ferme dont tout groupe estampillé Thrash a besoin, et des compositions ambitieuses. Le tout bien secoué pour vous faire remuer.
Pour autant, se sent-on comme ce frontman géant bouffant la moitié de la pochette ? Oui, et oui, et si ce disque était sorti à l’époque décrite plus haut, il est évident qu’il m’aurait galvanisé plus efficacement qu’un compliment de Dolph Lundgren. Très carré, dynamité, azimuté, Thrashtosterone est une séance de sport intensive avec coach sans pitié et fonte bien plombée. Steps, haltères, pompes, abdos, endurance sur le vélo, tout y passe pour muscler ce petit corps chétif, et ainsi devenir le bodybuilder de ces dames. Quoiqu’elles soient plutôt rares dans le monde du Thrash.
Mais même en restant entre mecs, le résultat est probant. En ingérant cet album, votre masse musculaire va augmenter de façon significative, et votre stature va en impressionner plus d’un. « My Arena » définit le champ d’action et marque le territoire, alors que « Worthless » vous fait suer d’un effort acharné. Doté d’un excellent son bien grave et gras, ce deuxième album est remarquable de constance et d’intensité, la machine ne ralentissant qu’en de rares occasions.
La plupart des morceaux prennent d’ailleurs leur temps pour donner leurs instructions. Souvent longs de cinq minutes, ils déploient un nombre appréciable d’idées, tout en restant très formels. Mais les enchaînements intelligents, les montées en puissance et les écrasements font que le temps passe très vite, malgré des séances de gainage en torture. « Lies » pointe du doigt les grosses feignasses en mode tempo alourdi, « A Friend To You » s’amuse de sa technique et de ses contretemps pour chatouiller la génération Techno-Thrash et défier MEGADETH, et « Hate » referme la porte de la salle non sans avoir pris soin d’examiner votre feuille de route.
Une relecture précise et exhaustive qui comprend une basse grondante, des saccades diaboliques, et des breaks explicites. Ce titre est d’ailleurs une synthèse tout à fait crédible de cette méthode, et nous laisse flapi, mais heureux d’avoir tout donné sur les tapis.
En 1985/1986, CORPORAL SHRED m’aurait transformé en machine à casser des bouches. Personne n’aurait osé me contredire, et je serais devenu le maitre du collège. Mais même en 2024, Thrashtosterone m’a fait son petit effet. Et il m’a donné envie de me débarrasser au plus vite de mes bourrelets et autres disgrâces corporelles.
Alors faites gaffe.
Titres de l’album:
01. My Arena
02. Regained Terror
03. Thrashtosterone
04. Worthless
05. Chaos
06. Lies
07. A Friend To You
08. Hard Night
09. Hate
Oui c'est bien beau mais étaient ces gars durant l'ère Obama ou il a absolument tout trahis ? Trump on connait son histoire personnelle et ses financements. c'est sans surprise..
06/07/2025, 14:20
Pardon pour les fautes, mais quitte à écouter ce genre de trucs, Anna von Hausswolff le faisait beaucoup mieux il y a 10 ans. C'est ce qu'on appelle l'avant-garde je suppose.
05/07/2025, 06:51
Le problème de de Kayo Dot c'est qu'il dépend de l'envie du moment de Toby Driver et de qui l'entoure, tu peux avoir un album de drone/post-rock suivit d'un album de death metal, il n'y a pas de groupe et aucune identité. C'est dommage parce(...)
05/07/2025, 06:47
Merci à Clawfinger pour ce grand moment de transgression validée par l’ordre moral dominant. C’est rassurant de voir que la “rébellion” moderne consiste à tirer sur une cible usée jusqu’à la corde, avec des punchlines dignes (...)
04/07/2025, 07:16
Il tourne pas mal chez moi ce disque, et c'était un vrai plaisir de revoir le groupe live récemment après les avoir un peu mis de côté. Un autre concert en tête d'affiche ne serait pas de refus !
03/07/2025, 16:57
Morceau décevant et sans surprise. La présence de Chris Kontos dans le groupe y fait pour beaucoup dans mon intérêt pour ce retour, mais pour le moment bof.
03/07/2025, 16:47
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03/07/2025, 12:55
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Votre article sur le kintsugi est un véritable hommage à l’art de reconnaître la beauté dans la fragilité et les cicatrices : mentionner son origine au XVe siècle et sa philosophie wabi‑sabi renforce(...)
02/07/2025, 15:38
@Abrioche91 : la canicule t'a trop tapé sur la tête, mon pauvre vieux. Parce que se faire à répondre aux trolls, je n'avais plus vu ça depuis VS.
02/07/2025, 12:25
@Ultra Pute, t'es bien limité comme garçon. Et tu dois sacrément bien te faire chier pour venir commenter connement ce que les autres écrivent.Moi aussi, j'aime bien les commentaires gratuits (la preuve) mais je suis surtout là pour commenter l&(...)
02/07/2025, 08:50
Pas trop mal dans l'idée.Vocalement on s'y tromperait aussi.A voir sur tout l'album, le précédent, mis à part l'opener, m'avait bien déçu
01/07/2025, 15:38
ça tartine ! bien cool cool cette grosse basse @niquetoncul oui ça doit te changer de Jinjer
01/07/2025, 14:19