Dans les années 80, les groupes chantaient le mal-être de la grande Amérique des années Reagan. Le Hardcore s’en donnait à cœur joie, tandis que la Pop et le Soft Rock détournaient le regard des gens vers le soleil Californien et les plaisirs hédonistes de la vie aux USA. Dans les années 90, les rappeurs, East et West coast chantaient la violence des rues, le réalisme du deal, le racisme ambiant dans la violence du LAPD, tandis que Seattle se repaissait de son propre ennui. La parenthèse Obama a permis de reprendre un peu de souffle, mais depuis l’avènement du perruqué et orangé Trump, la donne est revenue sur le tapis, plus implacable que jamais. L’homophonie, la xénophobie, les injustices, le capitalisme galopant, l’avidité, le néo-libéralisme acharné ont transformé le pays en usine à cauchemars, le peuple se scindant en deux parties : les fanatiques et les révoltés. Les premiers s’enivrent de leur propre bêtise, rechargent leur gun en se demandant sur qui ils vont tirer, tandis que les seconds se battent becs et ongles pour que la nation revienne sur les bons rails…considérant qu’elle les a déjà empruntés. Difficile de se sentir à l’aise dans une Amérique dirigée par un clown ancien animateur de télé-réalité, et entrepreneur sans scrupules se moquant de l’intégration, de la pollution, et multipliant les saillies publiques confirmant sa stupidité crasse et son sens de la formule misogyne. Dans ce contexte, pas étonnant que les artistes nationaux se retournent sur leur passé pour faire table rase d’un présent peu réjouissant, et c’est en pleine révolte que les DESTROYED IN SECONDS ont vu le jour à la fin des années 2000. Fondé en 2008 à North Hollywood, ce quintet (Jon Tomala - chant, Bruce Reeves & Christian La Rocca - guitares, Kyle Hertz - basse et Sean Vahle - batterie) a mis à peine deux ans à publier son premier LP, Critical Failure, qui dénonçait déjà pas mal de problèmes. Deux ans plus tard, c’est Becoming Wrath qui appuyait encore plus sur la plaie de la colère, mais après quelques ajustements de line-up le groupe semblait avoir trouvé sa vitesse de croisière. Pourtant, ce furent huit années supplémentaires qui furent nécessaire à l’élaboration d’un troisième LP, et les californiens fêtent enfin en 2020 leur retour…fracassant.
En substance, la formule utilisée par DESTROYED IN SECONDS est assez simple. Se baser sur la crudité du Hardcore américain le plus véhément, et corser la trame d’une énergie D-beat à la suédoise. Le mélange est donc sacrément relevé, et fait penser à une union entre DISCHARGE, URSUT, et AGNOSTIC FRONT. Soit la quintessence de la violence Punk teintée de Metal, puisque le groupe ne rechigne pas à épaissir sa colère de riffs plus purement Thrash et Hardcore. L’application de cette recette est elle aussi très simple. Un beat de base, rapide, des influences/références respectées à la croche près (DISCHARGE, ANTI-CIMEX, VENOM, BLACK FLAG, ENTOMBED, MOTORHEAD, THE GERMS, SLAYER, WOLFBRIGADE, DISFEAR, VICTIMS, SKITSYSTEM), pour un résultat qui ne manque ni de mordant, ni de souffle. Des Américains qui apprécient l’héritage des pays nordiques, et qui troussent de petites bombes artisanales d’une poignée de minutes pour ne pas perdre en puissance. C’est ainsi qu’à l’exception d’une entame de quatre minutes et d’une clôture de trois, les titres restent toujours entre les balises de deux minutes et quelques secondes pour frapper fort et vite. C’est bien évidemment assez linéaire dans les faits, avec pas mal de titres qui se ressemblent, mais pris comme un bloc mangé en pleine face, Divide and Devour bouffe tout ce qui passe à sa portée et laisse de vilaines cicatrices. Méthode classique, des riffs qui se souviennent du legs anglais des années 80, un Jon Tomala qui beugle à s’en arracher les tripes, et une section basse/batterie imperturbable. Pourtant, de temps à autre, le quintet ose quelques idées un peu plus légères et Punk, comme ces petits licks mélodiques sur « No Respect ». De même, les BPM grimpent parfois légèrement dans les tours, pour produire des bourrasques Hardcore du plus bel effet (« Only Throats »).
Dans le fond et la forme, et malgré l’influence suédoise marquée, on a parfois le sentiment d’un Hear Nothing, See Nothing, Say Nothing réactualisé, délocalisé à Stockholm pour en accentuer la froideur brute. Et si l’ensemble dégage une énergie incroyable, on se prend à regretter que le groupe n’ait pas proposé plus de titres conséquents comme « Divide And Devour », ce qui aurait permis d’aérer un peu le tout, et proposer des plans moins systématiques. Car lorsque les musiciens se décident à jouer sur l’alternance entre la lourdeur et la vitesse, ils se montrent terriblement convaincants. Mais ne boudons pas notre plaisir et acceptons cette démonstration de force pour ce qu’elle est, un cri de révolte, un ras-le-bol D-beat de première bourre, et la constatation d’un pays fonçant droit dans une impasse mortelle. Avec ce troisième LP intervenant sur le tard, DESTROYED IN SECONDS continue son travail de sape et son entreprise de destruction de l’Amérique moderne, qui ne trouve sa grandeur que dans la mesquinerie et la bêtise.
Titres de l’album :
01. Divide And Devour
02. The Tower
03. The Badge
04. Wraiths
05. Disarm
06. American Carnage
07. World War When
08. No Respect
09. Only Throats
10. Buzzards
11. Sulfur
Mes confuses malgré mon instinct qui tapait dans le juste, rien avoir avec le gaillard à qui je pensais.
24/04/2024, 14:26
Vu récemment avec Napalm Death, et ça faisait plaisir de voir que beaucoup de gens connaissent leur Histoire du Death Metal car il y avait de vrais fans. Surtout, la formule D-Beat basique et efficace du père Speckmann fonctionne bien en live
23/04/2024, 09:55
Excellent disque avec un gros point fort sur le riffing atomique. La pochette m'évoque clairement celle de Nothingface, version bio-mécanique
22/04/2024, 18:04
Ca fleure bon le vieux Kreator période Pleasure to Kill ! Prod' crade, aux antipodes des trucs surproduits de certains groupes et quand ça speede, ça rigole pas.
21/04/2024, 19:52
Là clairement le label est dans son droit à 100%. Warner a racheté l'ancien label de Kickback, ils en font ce qu'ils veulent du catalogue. Après, l'élégance, une telle multinationale elle s'en beurre la raie. Mais je peux comprendre qu(...)
20/04/2024, 23:36
Mouiii, pas faux. Les gonzes ont signé.Mais ça me rappelle Peter Steele qui avait voulu défenestrer un type dans les bureaux de Roadrunner après avoir découvert que le label ressortait les albums de Ca(...)
20/04/2024, 20:06
Attention, les mecs ne se font pas "enfler". C'est juste que Warner ne leur a pas demandé leur avis pour rééditer le bazar et les mecs parlent donc d'édition pirate, alors que Warner a bien les droits sur le disque. Après, Kickback, ce ne son(...)
20/04/2024, 06:26
Non bien sûr je plaisantais, M'sieur Heaulme. Un artiste qui se fait enfler a mille fois raison d'en parler ! Et je sais malheureusement de quoi je parle.Respect pour Kickback. Content que tu les pu voir ce docu.
19/04/2024, 18:08
@Tourista :- "On s'en cogne"Bah non...- Tu t'es achement bien rattrapé avec ce docu qui était totalement passé à côté de mes radars.Exceptionnel.C'est pas C8 qui passerait ça bordel...
19/04/2024, 15:54
Au lieu d'aller baiser des gamines et des ladyboys à Bangkok, Stephan aurait dû apprendre à lire les contrats qu'il signe.
19/04/2024, 15:20
On s'en cogne. Non j'en profite juste pour dire à ceux qui ne l'auraient pas encor(...)
19/04/2024, 07:52