Tout bon album de Hardcore sale et impoli se doit de frapper fort, et vite. La demi-heure semble être la barre fatidique avant délitement, et les vingt minutes suffisent amplement pour exposer un plan d’attaque sans trop en révéler sur ses effets secondaires.
Les premiers NEUROSIS, UNSANE, METZ, et une liste longue comme le bras de musiciens influencés par la violence urbaine et la décadence des grandes villes de silence. De Philadelphie nous revient donc l’un des groupes les plus portés sur la résignation et la colère retenue, EYE FLYS, qui quatre ans après s’être présenté au monde via Tub of Lard, revient nous exposer ses vues sur une époque corrompue, gangrénée, qu’il transpose dans un double langage Hardcore et Sludge.
Le résultat est évidemment aussi joyeux qu’un banquet d’assureurs comparant leurs taux d’amortissement, et aussi galvanisant qu’une fièvre aphteuse en pleine mégalopole surpeuplée. Mais à vrai dire, vu les temps qui courent et qu’on ne rattrape pas, ce deuxième album se met au diapason d’une ère de grève des sens et des émotions positives.
Kevin Bernsten (basse), Patrick Forrest (batterie) et Jake Smith (chant/guitare) se replongent donc dans les affres des nineties, alors que l’écho des années Reagan n’était plus qu’un murmure sur les lèvres des yuppies. Quelque chose de Seattle dans les désillusions, de New-York pour cette lucidité rythmique, et de Portland pour le désespoir en filigrane qui ruine les rêves les plus modestes.
Evidemment, tout ceci est classique, autant que peut l’être un Hardcore noisy joué par des fans de Sludge. Mais plus que de Sludge, parlons de Hardcore insistant et persistant, avec ses fascinations morbides pour les aspects les plus craspec de l’existence. Un Hardcore joué les dents serrées, le chant raclé, et les guitares souvent muselées pour ne pas exploser en plein vol.
Belle réussite en cohésion majeure, ce deuxième album prouve que les EYE FLYS ont évité la lobotomie créative. Si chaque titre semble relié au précédent par un thème partagé, l’ensemble dégage une énergie centripète, qui bouffe tout sur son passage de sa gueule grande ouverte. Les thèmes sont d’usage, la distorsion excessive, mais l’urgence palpable. Et les inserts lourds et obsédants ne font d’ajouter au malaise ambiant.
A l’image d’un été interminable quelque part dans une zone résidentielle de masse laissée à l’abandon, Eye Flys est une fin de non-recevoir, un constat d’échec, la prise de parole des parias qui ne savent plus vraiment où aller. Une désolation en gravité majeure, qui accentue une distorsion déjà bien rouillée, et qui oblige la rythmique à revoir ses bases pour frapper fort, longtemps et sans écho.
L’album ne joue que très peu avec les effets. On a le sentiment d’une prise live en plan séquence, et lorsque le charleston s’ouvre et se referme sur le traumatique « Bananarchy Zoo », on pourrait presque en sentir les respirations et l’odeur des baguettes usées.
Il n’est guère difficile de s’imaginer en pleine répète avec ces musiciens qui ne travestissent pas leur réalité. La production, épaisse mais lucide accentue ce sentiment de proximité, et les motifs arrachés par Jake Smith à sa guitare épuisée sont autant de symboles gravés sur les murs d’une prison mentale. Un peu CROWBAR et EYEHATEGOD lorsque le malaise s’accentue, respectueux de la NOLA tout en saluant le legs new-yorkais, Eye Flys est de ces produits symptomatiques d’une période bien définie, qui attend l’avenir en tremblant comme un enfant de chœur la bite du curé.
Rien de beau, un monochrome déprimant, une lancinance qui le confine au mal de tête que rien ne vient apaiser, pour un bilan réaliste. Notre époque est un tas de merde qui sent de plus en plus fort, que les éboueurs humanistes ne viendront jamais ramasser. Pas de quoi sourire, mais le sourire est presque une folie de nos jours.
Les grimaces sont par contre recommandées. Comment réagir autrement face à l’agression d’un monde qui n’a de cesse d’écraser les plus faibles pour que les plus riches continuent d’avancer sur leurs cadavres ?
Titres de l’album:
01. Trepanation Summer
02. Sleep Forever
03. Tuck & Roll
04. Draining Pus
05. Feeding Regression
06. What's That Behind Your Ear?
07. Tear Away Face Plaster
08. Bananarchy Zoo
Avec Massacra legacy, ça commence nettement à avoir plus de gueule ! Reste à voir la suite des annonces. Mais je crois que je vais plus préférer le Westill le mois suivant au même endroit cette année, déjà Elder et Wytch Hazel de confi(...)
13/05/2025, 07:48
Mea culpa....J'avais pas vu la news en première page - j'ai été directement te répondre.
12/05/2025, 14:33
S'il est du même acabit que le The Cthulhian Pulse: Call From The Dead City sorti en 2020, Mountains of Madness risque d'être un allday listening pour moi.J'ai hâte, bordel !
12/05/2025, 13:44
J'étais passé totalement à côté de cette petite pépite de Death Suédois!Vieux moutard que jamais!Puteraeon glisse de belles ambiances lovecraftiennes sur cet album et les arrangements apportent un plus à l'ensemble.
12/05/2025, 13:42
Necro est sympa, avec de bons passages groovy et d'autres où le groupe envoie du bois.Pas sûr de l'écouter durablement, d'autant plus que le prochain Puteraeon sort le 30 avril prochain.
12/05/2025, 13:40
Sentiment mitigé pour ma part Le chant de Johan Lindqvist n'atteint pas un pouïème de ce qu(...)
12/05/2025, 13:38
Au vu de la dernière vidéo-ITW en date du gonze sur ce site, pour ce qui est de "feu sacré", il a toujours l'air de l'avoir le mec.Je pars donc confiant.
08/05/2025, 09:17
@ MobidOM :oui, pas faux pour la "captation d'héritage" ! :-/ En même temps, s'il a encore le feu sacré et propose un truc pas trop moisi... De toute façon la critique sera sans pitié si le truc ne tient pas la(...)
07/05/2025, 11:52
Ah ce fameux BRUTAL TOUR avec Loudblast / MASSACRA / No Return et Crusher en 95 ! LA PUTAIN de bonne époque
07/05/2025, 11:04
@ Oliv : Montpellier étant une ville et une agglomération plus petite que Lyon, il n'y a véritablement de la place que pour deux petites salles orientées Rock-Metal-Punk-etc, à ce qui me semble après vingt-cinq ans d'observation. Au-delà,(...)
06/05/2025, 20:29
"Death To All", à chaque fois que je les ai vu ils avaient un line-up tout à fait légitime (dont une fois tous les musiciens qui ont joué sur "Human", à part Chuck bien sûr)Et puis la phrase "Chris Palengat pr(...)
06/05/2025, 20:28
Je ne vois pas beaucoup l'intérêt, et je ne comprends pas pourquoi ils n'ont pas attendu les trente ans de l'album l'an prochain. Ces dernières semaines je me retape les premiers, et ça reste un bonheur.
06/05/2025, 19:29
Vénérant ces albums et n'ayant jamais vu la vraie incarnation de Massacra, hors de question de louper ça (si ça passe à portée de paluche, pas à Pétaouchnok). Un peu comme un "Death To All"...
06/05/2025, 17:11
Ils sont juste trop faux-cul pour assumer le statut de tribute band, voilà tout.
06/05/2025, 16:15