Lorsqu’on voit la photo promo du duo WRETCHED BLESSING, on pense plus volontiers à un nouveau plan fumeux Indie, ou un démarquage sur les WHITE STRIPES. C’est vrai, entre ces vieux blousons achetés chez Emmaüs, ces mines totalement dénuées d’émotion et ce cadre champêtre avec arbre branchu, il est rigoureusement impossible d’imaginer que cet équilibre mixte s’épanche dans un registre bruitiste, et pas des moindres. Alors, on doute. On se dit que les arcanes du net ont parfois leur logique propre, et que l’algorithme a commis un impair.
Et puis on écoute le disque en question.
WRETCHED BLESSING est donc l’association de deux petits malins qui aiment brouiller les pistes et jouer avec les genres. D’un côté, Rae Amitay, au chant et à la batterie. De l’autre, Kayhan Vaziri, au chant et à la guitare. Entre les deux, très peu d’espace, pas de bassiste, et une noirceur qui le confine au rejet d’un monde qui décidément court à sa perte avec une célérité impressionnante.
En six morceaux seulement soit un EP bien trop court, Rae et Kayhan démontrent que la colère la plus primale peut s’accompagner d’un indiscutable métissage, aussi vilain soit-il. En combinant divers éléments, inhérents à des styles comme le Death Metal, le Black Metal, le Punk et le Hardcore, les deux musiciens mettent leurs obsessions en musique en collant au plus près à l’humeur mondiale. L’actualité est donc passée en revue, et les massacres de Gaza mis en avant, mais pas seulement. Le duo s’intéresse aussi de très près aux individualités, au mal-être, et même à la dépression, qu’ils jugent argument négociable entre les mains d’un praticien peu à cheval sur l’éthique ou la compétence.
Pour aborder ces sujets, il convenait de jouer une musique plurielle et complexe. Impossible pour les WRETCHED BLESSING de se contenter d’un Punk/Hardcore virulent mais prévisible, ou d’un Death Metal old-school de saison. Non, il leur fallait tripatouiller les boutons, torturer leur instrument pour en sortir les sons les plus abrasifs, et finalement incarner une nouvelle génération bruitiste aux ambitions bien réelles.
Je vous mets donc au défi de leur coller une étiquette quelconque. Mais attention, si les affinités sont claires, le résultat l’est moins. Avec tous ces sous-genres cités à la volée, il eut été facile de penser le rendu limpide, ce qui est loin d’être le cas. Car même lorsque le groupe joue méchant et saignant, la balance ne penche pas vraiment d’un côté ou de l’autre, et si le chant subit cet écho caractéristique du BM le plus cru, si la batterie s’emballe comme les guiboles d’un pendu, ce qui en découle n’est pas facile à décrire. Sauf en parlant d’une sorte de proto-Extrême joué avec les moyens du bord par des frappés qui refusent la facilité.
On pourrait imaginer un ermite misanthrope de Chicago blindé dans sa cave en train de triturer un quatre pistes pour sonner plus Trve que ses collègues. Un mec qui n’a pas vu la lumière du jour depuis l’arrêt de Casimir à la télé, et qui pense encore que les programmes sont annoncés par Catherine Langeais. Mais non, les deux acteurs de cette pièce sont des gens normaux, que l’on est susceptible de croiser tous les jours, et qui en acceptent la lumière comme une composante de leurs humeurs massacrantes.
Cette belle déclaration ne doit pas occulter le fait que Wretched Blessing est vraiment vilain. Très vilain. Le son est énorme mais sale, l’attitude bravache, et l’envie d’en découdre bien tangible. « Spurious Ovation » est un coup de semonce comme on en subit un une fois par an, et le mixage de l’ensemble avec cette voix traitée enterrée dans les pistes permet d’entrevoir l’opinion d’un duo qui ne mâche pas ses mots. Mais je vous renvoie aux textes pour en savoir plus sur les arguments et thématiques abordées, dont j’ai déjà un peu parlé.
La folie pour ces deux-là dépend aussi de votre thérapeute. S’il est au fait de vos obsessions, et qu’il s’implique de façon conséquente, alors la guérison est possible. S’il est un jean-foutre, vous pouvez bien vous paumer dans le dédale de votre complexité, il n’en aura cure. De là à penser que WRETCHED BLESSING s’est offert (et nous a offert par extension) une thérapie en musique, il n’y a qu’un cri que je pourrais pousser.
En écoutant « Pseudoascension » par exemple, type même de brulot Death/Punk qui cavale Crust et qui beugle Doom. En traînant ma misère sur le chaotique « Anathematic ». Et de fil en aiguille, en passant ce premier EP plusieurs fois entre mes oreilles au risque de devenir encore plus paranoïaque que je ne le suis déjà.
WRETCHED BLESSING donne une belle leçon d’efficacité, et en même temps, une autre sur les apparences et la réalité des faits. On peut porter une veste moche et faire une musique magnifiquement créative. L’éternel débat entre le ramage et le plumage.
Titres de l’album :
01. Incubation
02. Spurious Ovation
03. Pseudoascension
04. Here on Earth?
05. Anathematic
06. Mirror Vulture
Pardon pour les fautes, mais quitte à écouter ce genre de trucs, Anna von Hausswolff le faisait beaucoup mieux il y a 10 ans. C'est ce qu'on appelle l'avant-garde je suppose.
05/07/2025, 06:51
Le problème de de Kayo Dot c'est qu'il dépend de l'envie du moment de Toby Driver et de qui l'entoure, tu peux avoir un album de drone/post-rock suivit d'un album de death metal, il n'y a pas de groupe et aucune identité. C'est dommage parce(...)
05/07/2025, 06:47
Merci à Clawfinger pour ce grand moment de transgression validée par l’ordre moral dominant. C’est rassurant de voir que la “rébellion” moderne consiste à tirer sur une cible usée jusqu’à la corde, avec des punchlines dignes (...)
04/07/2025, 07:16
Il tourne pas mal chez moi ce disque, et c'était un vrai plaisir de revoir le groupe live récemment après les avoir un peu mis de côté. Un autre concert en tête d'affiche ne serait pas de refus !
03/07/2025, 16:57
Morceau décevant et sans surprise. La présence de Chris Kontos dans le groupe y fait pour beaucoup dans mon intérêt pour ce retour, mais pour le moment bof.
03/07/2025, 16:47
Je n'ai jamais aimé ce groupe, mais j'étais passé devant durant un Hellfest et en effet c'était juste insupportable toutes ces harangues (littéralement toutes les 10 secondes). Moi je m'en beurre la raie, mais pour les fans ça doit &ec(...)
03/07/2025, 12:55
Vu à Toulouse et je n'ai pas du tout accroché, pourtant vu 2 ou 3 fois depuis 2005. Et j'avais bien aimé. Rien ne surnage, ça bastonne mais pour moi aucuns titres ne sort du lot.Par contre j'ai adoré Slapshot
02/07/2025, 16:01
Votre article sur le kintsugi est un véritable hommage à l’art de reconnaître la beauté dans la fragilité et les cicatrices : mentionner son origine au XVe siècle et sa philosophie wabi‑sabi renforce(...)
02/07/2025, 15:38
@Abrioche91 : la canicule t'a trop tapé sur la tête, mon pauvre vieux. Parce que se faire à répondre aux trolls, je n'avais plus vu ça depuis VS.
02/07/2025, 12:25
@Ultra Pute, t'es bien limité comme garçon. Et tu dois sacrément bien te faire chier pour venir commenter connement ce que les autres écrivent.Moi aussi, j'aime bien les commentaires gratuits (la preuve) mais je suis surtout là pour commenter l&(...)
02/07/2025, 08:50
Pas trop mal dans l'idée.Vocalement on s'y tromperait aussi.A voir sur tout l'album, le précédent, mis à part l'opener, m'avait bien déçu
01/07/2025, 15:38
ça tartine ! bien cool cool cette grosse basse @niquetoncul oui ça doit te changer de Jinjer
01/07/2025, 14:19