Le Kintsugi, l’art du beau dans l’imperfection, sublimer les blessures et renaitre de ses cendres. Nous sommes imparfaits, nous avons fauté, nous avons failli, mais nous avançons en pétrissant la matière noire de notre être pour affronter un futur que nous devons embrasser - ou accepter notre sort et périr.
Aujourd’hui, ma mère sera mise en terre. Ne croyez-pas que j’invente ça pour les besoins d’une chronique, c’est la triste réalité. Ma mère, que j’aimais plus que tout au monde, enfermée dans un cercueil et reposant six pieds sous terre, est une image qui me hante depuis son décès. Ne croyant pas au hasard, j’ai compris que la chronique du jour avait un lien avec cet évènement tragique. DEMANDE A LA POUSSIERE. Je vais lui demander en effet pourquoi il a fallu que l’être le plus merveilleux de cette planète retourne à la poussière. Mais pas seulement.
Ce troisième album du projet parle en effet de résilience, et de cette force que nous trouvons au fond de nous-même lors de tragédies, et qui nous permet d’aller de l’avant. De continuer à se battre, même le cœur noirci par la tristesse. Sublimer les blessures et renaitre de ses cendres. Nous sommes en plein dedans.
S'arrêter, c'est mourir.
C’est le leitmotiv de Vincent Baglin (batterie), Neil Leveugle (basse), Edgard Chevallier (guitare, arrangements) et Simon Perrin (chant, guitare). Un leitmotiv qu’ils suivent aveuglément depuis la sortie de ce premier album éponyme sorti en 2018. Venus de THE GREAT OLD ONES, SPECTRALE, OMRADE et WÜRM, les musiciens ont depuis construit un monde où cohabitent dans le chaos la détresse et l’espoir, l’envie et la résignation. Et évidemment, une forme étrange de beauté qui s’épanouit dans le désordre et la laideur Noisy. Un monde qui finalement ressemble beaucoup à celui dans lequel nous vivons, avec ses crises de paranoïa, de colère, de haine, d’amour, et…de résilience.
Nouveau chanteur, mais enregistrement au Lower Tones Place studio (NATURE MORTE, ECR.LINF, KORSAKOV) pour respecter la tradition. Et « Inapte » de se faire réformer du service Post-Hardcore sans inscription au dossier, pour une reprise de contact au moins aussi traumatique que n’importe quelle headline de journal. Le son est immense, la rage toujours tapie dans l’ombre, et la puissance a de quoi souffler n’importe quel barrage ou forêt, ce qui en dit long sur les effets de ce disque sur vos tympans.
Onze morceaux, autant de tranches d’une vie que nous allons tous quitter un jour. Mais en attendant cette échéance fatidique, il nous faut affronter l’adversité, et accepter de perdre des êtres chers. Et dans ce cas précis, il est tout à fait légitime d’exprimer des sentiments contraires, entre abandon et ulcération. Après tout, pourquoi notre histoire devrait-elle être écrite à l’avance, et non par nous-mêmes de la façon que nous avons choisie ? Deux écoles qui s’affrontent, mais le résultat est le même : « Kintsugi », qui nous explique la procédure, entre Post-Black totalement implosif, et Sludge/Doom maladif, pesant et éprouvant.
Le groupe n’a rien perdu de ses facultés à transcender le classicisme pour en offrir une relecture plus contemporaine. Dans un crossover de taille gigantesque, le quatuor francilien mélange les genres, confronte le Doom au Black Metal, trempe le Sludge dans le fiel du Post-Hardcore, et nous sert encore bouillant un « La Parabole des Aveugles » qui s’écoute comme on lit un acte de décès. La douleur est immense, on la sent dans notre épine dorsale, mais la catharsis dépend justement de notre capacité à encaisser les coups, et à les dépasser. Tout le monde n’en est pas capable, mais encore faut-il essayer.
Enrobé dans une production monstrueuse qui pourrait faire école, Kintsugi suit la même trajectoire que celle de ses deux aînés, et nous trimbale dans un univers de contrastes, de noirs prononcés et de blancs souillés, pour bien nous faire assimiler ce fameux concept de résilience dont nous parlons tant depuis quelques années.
Résilience : Capacité à surmonter les chocs traumatiques.
Kintsugi EST un choc traumatique. Et un sacré même. Car même si de temps à autres le groupe ménage quelques espaces négatifs apaisants, l’ensemble reste un monolithe compact, qui essuie les pires tempêtes. Mais les combinaisons de « Ichinawa » et ses allusions NEUROSIS, les arpèges amers de « Le Sens du Vent », ou la densité éprouvante de « Vulnerant Omnes, Ultima Necat » permettent à ce troisième tome de dépasser et d’ignorer les clivages, et de jouer sur le même terrain que les artistes extrêmes les plus ouverts d’esprit.
« Attrition », notre défaut à tous ou presque. Nous regrettons nos pêchés par obligation, dans l’espoir d’obtenir le pardon divin, comme des lâches incapables d’assumer leur manque de foi et leur attachement à des valeurs triviales. Lorsque le rythme ralentit, lorsque les breaks sont plus prononcés, DEMANDE A LA POUSSIERE se montre terrifiant et convaincant à la fois, ce qui est sa marque de fabrique depuis ses débuts.
Loin d’un simple side-project justement, ce groupe est devenu une entité à part entière, et un ensemble redoutable. Point de tergiversation, point de recul, une course en avant qui est la seule échappatoire à la peur. On se sent parfois comme cassé, désassemblé, « Fragmenté ». Les idées se mélangent, les croyances se fondent, mais il faut constamment regarder vers l’horizon pour ne pas laisser le passé nous bouffer. C’est ce qu’expriment ces morceaux qui plombent l’air, qui polluent le ciel, mais qui finalement, nous obligent à voir la vérité en face.
Et ça fait mal. Très mal.
On se sent « Brisé ». Le corps et le cœur vide, comme des spectres refusant leur appartenance à l’autre monde. Cette lancinance suprême, ces accès de beauté gracile et mélancolique découlent sur « Partie », dernier au-revoir avant l’absence.
Une absence que ne vais pas pouvoir supporter. Sans le savoir, DEMANDE A LA POUSSIERE m’a raconté ma propre histoire. Une histoire banale de deuil, de perte, et de questionnement. A quoi bon continuer ?
Pour que de là où ils sont, nos défunts soient rassurés de nous voir combattre encore ce destin qu’ils n’ont plus à affronter.
Titres de l’album:
01. Inapte
02. Kintsugi
03. La Parabole des Aveugles
04. Ichinawa
05. Le Sens du Vent
06. Vulnerant Omnes, Ultima Necat
07. Attrition
08. Fragmenté
09. Miserere
10. Brisé
11. Partie
Votre article sur le kintsugi est un véritable hommage à l’art de reconnaître la beauté dans la fragilité et les cicatrices : mentionner son origine au XVe siècle et sa philosophie wabi‑sabi renforce la profondeur culturelle de cette pratique . Vous décrivez avec justesse la manière dont la laque mêlée à de l’or transforme une casse en un miroir, non pas d’un défaut mais d’une histoire vivante. En évoquant aussi bien l’esthétique que la résilience – faire de la réparation un message, une métaphore de vie – vous ouvrez un chemin vers la réflexion personnelle et la guérison possible via ce processus . Pour ceux qui veulent prolonger cette démarche symbolique au‑delà de la métaphore, proposer des articles de deuil permettrait un usage concret et mémoriel, pour matérialiser ce que l’on chérit. Enfin, un rappel sur la montée en Occident et dans l’art contemporain – expositions, ateliers et adoption comme philosophie de résilience – viendrait enrichir un propos déjà riche et inspirant .
Pardon pour les fautes, mais quitte à écouter ce genre de trucs, Anna von Hausswolff le faisait beaucoup mieux il y a 10 ans. C'est ce qu'on appelle l'avant-garde je suppose.
05/07/2025, 06:51
Le problème de de Kayo Dot c'est qu'il dépend de l'envie du moment de Toby Driver et de qui l'entoure, tu peux avoir un album de drone/post-rock suivit d'un album de death metal, il n'y a pas de groupe et aucune identité. C'est dommage parce(...)
05/07/2025, 06:47
Merci à Clawfinger pour ce grand moment de transgression validée par l’ordre moral dominant. C’est rassurant de voir que la “rébellion” moderne consiste à tirer sur une cible usée jusqu’à la corde, avec des punchlines dignes (...)
04/07/2025, 07:16
Il tourne pas mal chez moi ce disque, et c'était un vrai plaisir de revoir le groupe live récemment après les avoir un peu mis de côté. Un autre concert en tête d'affiche ne serait pas de refus !
03/07/2025, 16:57
Morceau décevant et sans surprise. La présence de Chris Kontos dans le groupe y fait pour beaucoup dans mon intérêt pour ce retour, mais pour le moment bof.
03/07/2025, 16:47
Je n'ai jamais aimé ce groupe, mais j'étais passé devant durant un Hellfest et en effet c'était juste insupportable toutes ces harangues (littéralement toutes les 10 secondes). Moi je m'en beurre la raie, mais pour les fans ça doit &ec(...)
03/07/2025, 12:55
Vu à Toulouse et je n'ai pas du tout accroché, pourtant vu 2 ou 3 fois depuis 2005. Et j'avais bien aimé. Rien ne surnage, ça bastonne mais pour moi aucuns titres ne sort du lot.Par contre j'ai adoré Slapshot
02/07/2025, 16:01
Votre article sur le kintsugi est un véritable hommage à l’art de reconnaître la beauté dans la fragilité et les cicatrices : mentionner son origine au XVe siècle et sa philosophie wabi‑sabi renforce(...)
02/07/2025, 15:38
@Abrioche91 : la canicule t'a trop tapé sur la tête, mon pauvre vieux. Parce que se faire à répondre aux trolls, je n'avais plus vu ça depuis VS.
02/07/2025, 12:25
@Ultra Pute, t'es bien limité comme garçon. Et tu dois sacrément bien te faire chier pour venir commenter connement ce que les autres écrivent.Moi aussi, j'aime bien les commentaires gratuits (la preuve) mais je suis surtout là pour commenter l&(...)
02/07/2025, 08:50
Pas trop mal dans l'idée.Vocalement on s'y tromperait aussi.A voir sur tout l'album, le précédent, mis à part l'opener, m'avait bien déçu
01/07/2025, 15:38
ça tartine ! bien cool cool cette grosse basse @niquetoncul oui ça doit te changer de Jinjer
01/07/2025, 14:19