Nordarikets Strid

Greve

31/01/2020

Purity Through Fire

Je ne suis pas certain d’avoir été fasciné par un album de Black symphonique depuis les chefs d’œuvre intemporels d’EMPEROR. J’ai été fasciné dans les années 90 par In The Nightside Eclipse et Anthems To The Welkin At Dusk, par cette technique incroyable soulignée d’aspirations de grandiloquence, mais le mélange d’arrangements synthétiques, de violence outrancière a vite montré ses limites. Non que je me contente d’efforts plus bruts, plus underground et réclamant une connaissance approfondie des bases, mais j’avoue me pencher plus facilement sur les efforts avant-gardistes et expérimentaux qui selon moi apportent bien plus à la cause qu’une énième digression mystique et cosmique se contentant de répéter les recettes déjà utilisées, de façon plus ou moins pertinente. Mais, puisqu’il y en a un, je ne refuse pas les ambiances étranges, les errances occultes, si tant est qu’elles s’accompagnent d’une musique créative et fertile, ce qui m’amène au sujet du jour, GREVE. Fondé par deux habitués et figures bien connues de la scène suédoise, ce projet qui pourrait être annexe propose aujourd’hui son premier longue-durée, faisant suite eu EP Nidingsdad Utav det Uraldriga, publié plus tôt dans l’année. Après avoir lâché deux titres en carte de visite, le groupe se fend donc d’un véritable premier album, qui ne fait que confirmer un potentiel déjà largement entrevu précédemment. Mais rien d’étonnant à cela lorsqu’on constate qui forme l’ossature du combo. Duo donc, composé de l’omnipotent Swartadaubuz au chant, à la guitare, basse et claviers, accessoirement pilier du label Ancient Records avec ses nombreux projets (AZELISASSATH, BEKËTH NEXËHMU, DIDERDÖGEN, GNIPAHALAN, MUSMAHHU, MYSTIK, TROLLDOM, DAUDADAGR), et de Lik au chant (BEKËTH, NEXËHMÜ, HELGEDOM), GREVE est donc l’association de deux hommes se connaissant parfaitement, et se complétant de la même façon.

Leur unique but avoué : jouer du Black scandinave de seconde génération. Et sous cet aspect-là, Nordarikets Strid est plus qu’un premier album, il est une assertion. Une déclaration d’amour passionnée à un style, une absence totale de compromission, mais aussi un plongeon dans le temps, aux alentours de 1996, pour retrouver l’essence des pionniers qui à l’époque, avaient compris que le Black Metal n’était pas qu’un simple exutoire de violence mais bien une forme artistique musicale aboutie. Inutile donc de vous attendre à un énième ersatz underground d’une bestialité infondée et cacophonique, ces huit morceaux (dont une intro et une outro) cherchent donc le point de convergence parfait entre la brutalité et la musicalité, en confrontant les mélodies aux rythmiques puissantes, tout en cherchant constamment le petit détail qui fera la différence. Détail ou arrangement, puisqu’on sent que Swartadaubuz ne s’est pas contenté de répéter ad nauseam des philosophies déjà exploitées dans ses projets autres. Ainsi, un morceau aussi monstrueux (dans tous les sens du terme) que « I Svarta Solens Magi » définit à merveille les aspirations de son auteur. Batterie qui blaste à tout va, nappes de synthé qui se superposent en des strates solides, chant en arrière-plan, soudainement réduit à l’état d’incantations en gargouillis, pour une plongée dans des abysses personnels dont nul ne sort indemne. Sorte de version très condensée et simplifié d’ARCTURUS et EMPEROR, GREVE rappelle aussi les missions d’OPHTALMIA, avec cette propension à conférer à sa musique une patine mystique sur une trame très concrète. Nous retrouvons donc les fameux riffs concentriques qui ont fait la trademark du genre, mais aussi la volonté de s’extirper d’un contexte trop rigide.

Musicalement, GREVE ne révolutionnera pas grand-chose, mais tel n’est pas son but. Le sien est plutôt de s’inscrire dans un formalisme traditionnel et de redonner ses lettres de noblesse au Black symphonique humble, par l’entremise de morceaux misant sur la cohésion et non la dispersion. Les néophytes auront parfois du mal à faire la différence entre les chapitres, mais c’est cette homogénéité qui permet au projet de se montrer plus hypnotique que répétitif, même si les lignes mélodiques ont tendance à répéter les mêmes mantras. On aime par-dessus tout ce chant classique, geignard, légèrement enterré dans le mix qui laisse soudainement place à des hurlements bestiaux, cette batterie en programmation qui reproduit les figures du tentaculaire Hellhammer, et ces évolutions pas forcément très marquées sur l’instant, mais qui au long cours finissent pas imposer des accélérations, des changements d’humeur, et des cassures Heavy du plus bel effet. Avec une production claire qui ne cède pourtant pas à l’envie de devenir abordable (même la basse est discernable, ce qui en dit long), Nordarikets Strid est donc une tranche de vie suédoise qui nous ramène des années en arrière. On pourra regretter le systématisme des harmonies, qui ont tendance à se répéter sans varier d’un pouce, mais on soulignera le côté majestueux et emphatique du groupe lorsqu’il se laisse aller à la lenteur et la mélancolie (« Ur Nordiskt Vrede » avec son travail à la guitare qui empile les couches claires et saturées avec flair). « Offerbål till Gudarna » en final offre le déferlement que l’on est en droit d’attendre d’un tel projet, avec cette rythmique en mid qui rappelle IMMORTAL, et au bout de trente-huit minutes, Nordarikets Strid a atteint son but sans forcer, à savoir nous ramener à la source et nous abreuver de sonorités passées, mais pas passéistes pour autant.

Souhaitons juste que le concept prenne plus d’ampleur et ne se limite pas à une autocitation permanente, et que le prochain album se débarrasse de quelques réflexes encore un peu encombrants.         

        

Titres de l’album :

                             01. Intro

                             02. Vid Dödens Tröskel

                             03. Nordarikets Strid

                             04. I Svarta Solens Magi

                             05. Det Gamla Rikets Ruin

                             06. Ur Nordiskt Vrede

                             07. Offerbål till Gudarna

                             08. Outro


par mortne2001 le 21/02/2021 à 18:38
75 %    562

Commentaires (1) | Ajouter un commentaire


POMAH
membre enregistré
22/02/2021, 08:04:05

Franchement la musique est bonne et je rejoins la chronique, mais la voix est juste insupportable, je comprends pas trop le chant. On dirait un ado qui les couilles coincé dans sa braguette.

Mais comme Deogen c'est sympa à écouter. 

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Midnight + Cyclone + High Command // Paris

Mold_Putrefaction 24/04/2024

Live Report

DIONYSIAQUE + JADE @La Chaouée

Simony 23/04/2024

Live Report

Enslaved + Svalbard + Wayfarer

RBD 20/03/2024

Live Report

Voyage au centre de la scène : BLOODY RITUAL

Jus de cadavre 17/03/2024

Vidéos

Crisix + Dead Winds

RBD 20/02/2024

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
roulure

true norwegian roue libre

26/04/2024, 13:40

Simony

Yes, et demain samedi, c'est WITCHTHROAT SERPENT et ORBIS au Nirvana Pub-Club de Nancy.Si j'avais le temps de renseigner la partie gigs de ce site....

26/04/2024, 13:35

Simony

Yes, et demain samedi, c'est WITCHTHROAT SERPENT et ORBIS au Nirvana Pub-Club de Nancy.Si j'avais le temps de renseigner la partie gigs de ce site....

26/04/2024, 13:35

Humungus

Putain !Si j'avais été au jus de cette date, j'aurai fait le déplacement boudiou...Pis je vois que tu causes de BARABBAS à Nancy ?!Et c'est... ... ... Ce soir.Re-Putain !

25/04/2024, 13:28

Tut tut!

25/04/2024, 12:44

Gargan

ça me fait penser à moi ivre mort parodiant Maurice Bejart, sur fond de Stravinski. Plus glucose, tu meurs. Mauriiiiice !

25/04/2024, 10:28

DPD

Mes confuses malgré mon instinct qui tapait dans le juste, rien avoir avec le gaillard à qui je pensais.

24/04/2024, 14:26

RBD

Vu récemment avec Napalm Death, et ça faisait plaisir de voir que beaucoup de gens connaissent leur Histoire du Death Metal car il y avait de vrais fans. Surtout, la formule D-Beat basique et efficace du père Speckmann fonctionne bien en live 

23/04/2024, 09:55

LeMoustre

Excellent disque avec un gros point fort sur le riffing atomique. La pochette m'évoque clairement celle de Nothingface, version bio-mécanique

22/04/2024, 18:04

Arioch91

Ca fleure bon le vieux Kreator période Pleasure to Kill ! Prod' crade, aux antipodes des trucs surproduits de certains groupes et quand ça speede, ça rigole pas.

21/04/2024, 19:52

Poderosos/Magnificencia/Técnica Suprema

Los Maestros del BRUTAL DEATH GRIND

21/04/2024, 19:50

Pomah

+1 Gargan, influence Mgla je trouve par moment. 

21/04/2024, 09:20

Jus de cadavre

Là clairement le label est dans son droit à 100%. Warner a racheté l'ancien label de Kickback, ils en font ce qu'ils veulent du catalogue. Après, l'élégance, une telle multinationale elle s'en beurre la raie. Mais je peux comprendre qu(...)

20/04/2024, 23:36

Tourista

Mouiii, pas faux. Les gonzes ont signé.Mais ça me rappelle Peter Steele qui avait voulu défenestrer un type dans les bureaux de Roadrunner après avoir découvert que le label ressortait les albums de Ca(...)

20/04/2024, 20:06

Tourista

Devinez où il se Lemmy. (ne me raccompagnez pas, je sors tout seul)

20/04/2024, 19:58

Grosse pute

Attention, les mecs ne se font pas "enfler". C'est juste que Warner ne leur a pas demandé leur avis pour rééditer le bazar et les mecs parlent donc d'édition pirate, alors que Warner a bien les droits sur le disque. Après, Kickback, ce ne son(...)

20/04/2024, 06:26

Tourista

Désolé pour les coquilles monstrueuses.  Merci la saisie automatique.

19/04/2024, 20:51

Tourista

Non bien sûr je plaisantais, M'sieur Heaulme. Un artiste qui se fait enfler a mille fois raison d'en parler !   Et je sais malheureusement de quoi je parle.Respect pour Kickback. Content que tu les pu voir ce docu.

19/04/2024, 18:08

Humungus

@Tourista :- "On s'en cogne"Bah non...- Tu t'es achement bien rattrapé avec ce docu qui était totalement passé à côté de mes radars.Exceptionnel.C'est pas C8 qui passerait ça bordel...

19/04/2024, 15:54

grosse pute

Au lieu d'aller baiser des gamines et des ladyboys à Bangkok, Stephan aurait dû apprendre à lire les contrats qu'il signe.

19/04/2024, 15:20