Ça a un petit goût de reviens-y ton truc.
Cette expression imagée, souvent prononcée sur le zinc ou en tablée, peut aussi trouver son utilité dans le domaine de la musique. Ainsi, après avoir bouffé au râtelier des américains de TENTACULT et leur nom magique, j’ai ressenti cette sensation de plaisir immédiatement suivie d’un manque terrible, tant le goût de cet album était prononcé et addictif. Alors, bien sûr, je l’ai usé jusqu’à la moelle, et arrive ainsi un temps où l’on souhaite renouveler l’expérience avec de la viande fraîche. 2025 a donc entendu ma plainte inconsciente, et m’offre ce matin la possibilité de retrouver cette spontanéité dans l’horreur que TENTACULT prône avec beaucoup de malice.
Lacerating Pattern était goûtu, Untamed Revulsion est ventru. Avec seulement six compositions et une grosse demi-heure, ce sophomore ne rend pas les armes, et reste sur un plan de bataille assez clair. Pilonner, pilonner encore, rester attentif, enfoncer, exhumer les restes et enfumer les naseaux. Dans un registre de Death old-school beaucoup plus fin que la moyenne, le quatuor de Sacramento (Siino - basse, Chung Leung - batterie/chœurs, Tyler Baldwin - guitare/claviers/chœurs et Anton Em - chant) se donne corps et âme, au point d’incarner la relève Death/Doom tant attendue depuis les années 90. Cette insistance, cette manière de ne conserver que les plans les plus moisis et pollués, cette tendance à défier l’underground d’une vilénie fort à propos sont la marque de fabrique d’un groupe qui croit en ce qu’il fait, et qui le fait terriblement bien.
TENTACULT est donc toujours ce poulpe démoniaque entre la pieuvre défigurée et le Kraken un poil énervé. Rongé par l’acide, son ADN est ancré dans une tradition morbide mais salvatrice, qui nous évite les recopiages des sous-doués vintage.
« Scorching Eclipse » ne fait d’ailleurs pas grand mystère des inclinaisons renouvelées, et se traîne sur un down tempo à faire rougir de honte INCANTATION. Les choses sont donc rapidement mises au point, et ces réflexes conditionnés entre dISEMBOWELMENT et AUTOPSY permettent de creuser la terre à la recherche de dépouilles à profaner, dans un hommage rendu à Ed Gein et son œuvre. Avec un travail d’arrangements et de percussions notable, les californiens évitent l’écueil énorme de la répétitivité lourde, et se permettent même des inserts mélodiques, une gestuelle presque tribale, et des hommages qui sortent de la zone de confort. On se délecte donc de ce Death presque progressif qui utilise toutes les armes à sa disposition, et qui les manie avec la facilité fluide de ses tentacules mortels.
La qualité est donc gardée à niveau, et Untamed Revulsion est à n’en point douter le digne successeur de son aimable aîné. Les complications sont toujours de saison, avec cette alternance de titres courts et incisifs et de longues digressions macabres et pesantes, mais lorsque la machine s’emballe un peu, le Death de ces furieux se fait encore plus haineux (« Geometry of Shadows »).
Les mecs se permettent même des accès de Hard n’Roll aigu, dans la plus droite lignée d’un CARCASS catchy et sevré, via l’entrainant et déhanché « Rays of Sinister Star ». Les surprises sont donc là, malgré un tracklisting réduit au maximum, ce qui est encore plus admirable.
Les attaques sont rudes et crues, et parfois, la tradition qui a du bon se fraie un chemin vers le banquet, pour rappeler au projet sa genèse et son essence même. « Untamed Revulsion », title-track gravissime et impitoyable nous injecte une dose mortelle de Death à l’américaine, celui-là même qui a régit la scène avec ses règles très précises. Mais ce catalogue de grimaces effrayantes ne serait pas ce qu’il est sans ces circonvolutions magiques s’étalant sur de longues et souffreteuses minutes.
La première, « Fulgurous Manifestation » est d’un statisme qui le confine presque au Stoner décharné et zombifié. Une voix à faire pâlir le regretté Chuck, une guitare qui marche à l’économie, une rythmique stable et solide, l’expérience est éprouvée, mais les sensations magnifiées. Echo d’une caverne oubliée par l’histoire, « Fulgurous Manifestation » est blindé de réverb’ comme un poivrot de studio, et se teinte de Doom, de Sludge, et d’une bonne couche de moisissure, pour bien relever la saveur d’une pâte déjà faisandée.
La seconde, encore plus imposante, « Voices of Entropy », clôture l’album avec une emphase admirable. Longue intro évolutive, qui passe de cordes acoustiques délicates à une lancinance de métronome fatigué, ce dernier chapitre est la conclusion rêvée pour une aventure hors du commun. Si les atours sont classiques, si le discours est parfois formel, ce sont ces petites trouvailles qui rendent TENTACULT unique en son genre, refusant de se laisser cloîtrer dans un vieil aquarium pour retraités.
TENTACULT, reviens-y, j’y suis j’y reste. Mon palais est enfin rassasié, jusqu’à la prochaine fois. Yummy, but deadly.
Titres de l’album:
01. Scorching Eclipse
02. Geometry of Shadows
03. Fulgurous Manifestation
04. Rays of Sinister Star
05. Untamed Revulsion
06. Voices of Entropy
J'avoue avoir délibérément censuré cette information de premier choix... ... ...
26/05/2025, 07:32
@LeMoustre : alors grand-père, t'as réussi à sorti des soins palliatifs?
24/05/2025, 07:15
Une plaque bien méritée ! Mes deux premiers albums de death metal, Blessed are the Sick de Morbid Angel et Tomb of the Mutilated de Cannibal Corpse, deux albums que j'adore toujours autant, après plus de 30 ans passés dans ma discothèque, y ont &eacut(...)
23/05/2025, 19:55
Je chiais encore dans des couches à la grande époque du Morrisound, et pourtant si je fais un top 10 de mes albums de chevet tous styles confondus, la moitié (au moins) aura été enregistré dans ce studio. Le genre de lieu qui a marqué notre sc&egra(...)
22/05/2025, 17:52
Si ce qu'il dit est vrai c'est quand même bien bas comme méthode de "licenciement", surtout venant d'un groupe qui prône ouverture, tolérance et respect à longueur de show (ironiquement par sa propre voix en plus...).
21/05/2025, 17:13
J'aime bien ce groupe... c'est dommage que cette collaboration se termine ainsi... En tous cas, faut que je jette une oreille à Downstater...
21/05/2025, 16:13
Groupe Polack + thrash ! On pense immanquablement a Turbo. Et ici ce n'est pas complétement faux avec un son abrasif et des vocaux bien criards. Pas mal du tout cette affaire
21/05/2025, 07:33
Euh... si cet uploading particulier ne date que de 2 semaines, le morceau a, quant à lui, été dévoilé le 30 janvier dernier ! (Bon morceau au passage !)
20/05/2025, 22:13
Yes, c'est en cours de rédaction. Au camping, nous n'avons pas été impacté par l'orage, pas de dégâts en tout cas.Merci à toi de t'être présenté à moi, c'est toujours cool de croiser des pa(...)
17/05/2025, 18:12