Non mais là c’est trop facile : vous me prenez par les sentiments. Les mecs m’envoient un mail, et se présentent sous le nom de SALACE. Ils savent pertinemment que je ne vais pas résister, ayant un esprit du même nom, et une inclinaison naturelle pour tout ce qui est éprouvant, sale et méchant. Savigny-le-Temple doit d’ailleurs souffrir d’héberger en son sein telle créature uniquement intéressée par les égouts, les effluves nauséabonds, et l’insistance dramatique d’une époque gangrénée, et sujette à des crises à répétitions et autres suicides de masse. Oui, avec une majuscule, SALACE pourrait être rallongé en SALE RACE, de rongeur évidemment, ou tout autre vecteur propageant les virus les plus dramatiques.
Dragged Into Rot est déjà le deuxième album de cette formation, qui avec Down Below s’était présentée sous son pire jour. Ou le meilleur selon le point de vue. Nous avions déjà remarqué des qualités naturelles à la saleté incrustée, et des déviances très pointues : oppression, paranoïa, gravité et un chouïa de méchanceté. En 2025, le collectif pousse le bouchon encore plus loin, et nous traîne au fond du baril des bas-fonds, et en extirpe cette matière noire comme de la poix et poisseuse comme de la cire humaine. Pour l’optimisme et l’humanisme, nous repasserons.
Après une intro qui met dans le bain, les choses sérieuses commencent. Les éléments se mettent en place très rapidement, et nous sommes séchés par cette énorme basse en coup fourré, aussi distordue qu’un reflet dans le palais des glaces d’une fête foraine fantôme. Le chant exhorté comme des glaires épaisses, cette guitare qui se coltine sa déprime de riff en riff et cette enclume servant de rythmique sont autant d’éléments à charge pour un groupe qui se rattache au mouvement Sludge, l’un des plus vilains de l’underground. Et aussi convaincants que les américains - les rois du genre - les SALACE réagissent avec professionnalisme, et nous appuient salement sur la tête pour l’enfoncer dans la boue.
De loin, et avec un peu de fatigue, on se croirait dans un mauvais rêve d’UNSANE trippant sa race dans un orchestre estampillé NOLA. Aussi Hardcore qu’il n’est Metal, Dragged Into Rot n’est que dégoût, titres lapidaires et insistance le confinant à la perversion. Comme un stalker décidé à commettre son premier crime, SALACE avance à couvert, repère sa proie, et ne la lâche plus. Le seul problème est que cette proie, c’est vous : alors, regardez bien autour, devant et derrière vous, car la sentence tombe comme un couperet :
Tu crèves, et tu en redemandes.
Cette musique aussi lancinante que dissonante est un plaisir masochiste qu’on ne peut refuser, même sans travers connu. On y retrouve toutes les composantes d’un Doom gras, résigné, la tête qui penche vers l’avant, et le muscle ramolli. Mais encore suffisamment dur pour débiter du lick sans problème, et pour dégueuler son amertume un soir de semaine, alors que les lumières de la ville clignotent d’incertitude. Pourtant, tout est assez convenu dans ce monde froid et robotique, dont la seule humanité réside en une équipe de musiciens habiles et bons compositeurs. Le spectre de la Nouvelle-Orléans agite ses chaînes dans la banlieue parisienne, l’une des plus glauques et bétonnées, et la rencontre est aussi épuisante qu’une journée de travail derrière un bureau anonyme. « Silence » évoque cette chape de plomb qui s’abat sur un open space où la concurrence et la défiance sont les deux seuls mots d’ordre. On se dit que NEUROSIS a encore de beaux jours devant lui en tant qu’influence, et qu’ISIS reste un point de repère important.
Mais on déniche aussi sous le tapis des traces d’ACID BATH et FETISH 69, et quelques poussières soufflées par PRIMITIVE MAN et IRON MONKEY. La propreté n’est donc pas irréprochable loin de là, mais quelques coups de balais Post-Punk et Post-Metal permettent de nettoyer une surface non négligeable, celle qu’occupe avec beaucoup d’emphase ce milieu d’album perméable aux mélodies curistes et aux dépressions incurables.
Mieux vaut remiser sa joie de vivre dans le tiroir des couteaux. Sont exigées des qualités perverses, le voyeurisme, l’égoïsme, et l’absence totale d’empathie, pour supporter une charge aussi éprouvante que « Brain Crack ». Percussions tribales et riff concentrique, pour une apnée des sens prolongée. Le propos est clair, et traduit dans un langage pluriel, avec ce Doom à peine allusif qui se fait une petite place à la lumière de l’ombre.
Messieurs, votre art est laid. Très laid. Mais la beauté se cache aussi dans la laideur, et « Curse » d’opposer de beaux arguments Southern Lord à la vindicte populaire. Un peuple qui aura du mal à s’identifier à ce désespoir, mais qui y reconnaitra son destin. Un avenir pourri pour une conclusion moisie, que le nostalgique et amer « Sadness », pose juste là, au cas où.
SALACE ne l’est pas vraiment. Il serait plutôt vache, menaçant, insidieux et insolent. Mais qu’importent les qualificatifs, puisque le ciel s’assombrit de jour en jour en dépit des prières et des vœux pieux. Le seul que formulent ces mecs est que le réalisme triomphe des illusions. C’est bien parti.
Titres de l’album :
01. Madness
02. Icarus
03. Lies
04. Pariah
05. Silence
06. Confession
07. Brain Crack
08. Curse
09. Sadness
Pour donner une précision que personne ne sollicitait, la photo est prise à la collégiale des Roches Tranchelion (qui a même servi pour un clip de Gérard Blanchard, oui, celui-ci), hameau près du très beau village de Crissay-sur-Manse, dans le sud T(...)
26/08/2025, 09:21
Super édition de ce festival, et vivement l'année prochaine.Billets déjà dans la pocheJe t'ai rencontré par hasard avec tes potes sur une table en mangeant un morceau, vous êtes très drôle.A bientôt
25/08/2025, 11:46
C'est généralement soit un comportement tyrannique, soit un amour immodéré du saucisson à l'ail.
25/08/2025, 10:28
Titre malheureusement un peu mou du genou...En espérant que tout l'album ne soit pas comme cela car il y a vraiment de purs joyaux dans toute leur pléthorique discographie.Quelqu'un sait pourquoi c'est désormais un one-man band au fait ?
25/08/2025, 09:23
Merci pour le report.Pas pu y aller cette année, en espérant que le festival conserve son esprit et ne succombe pas à la folie des grandeurs...
25/08/2025, 08:00
Merci pour les coms !Magma c'est le genre de groupe que j'adorerais aimer, mais j'ai encore du mal... ça fait chier, mais les goûts etc...Et c'était en plus en même temps que Kataklysm. Mais les retours étaient plut&oc(...)
24/08/2025, 18:00
Très cool comme report ! Content que tu aies apprécié Dool et surtout Green Lung (qu'est-ce que j'ai pu poncer leur dernier disque) ! Pas un petit retour sur Magma ?
24/08/2025, 09:05
1) "J'ai bu de la Faxe à 10° en canette et de la sangria chaude en cubi, à un emplacement digne d'un camp de gitans sans lumière, en écoutant du Bonnie Tyler. Je ne sais pas si ça valait le coup de passer"Putain c'est pour ce (...)
22/08/2025, 14:00
Au vu des deux morceaux dévoilés, c'est franchement pas un album que j'attends avec un enthousiasme démesuré.J'attends largement plus les nouveaux Coroner et Forbidden.Mais bon, sait-on jamais... Sur un malentendu...
21/08/2025, 11:57
Un album que j'attends avec impatience, au même titre que le nouveau Forbidden dont la date n'a pas encore été annoncée.
21/08/2025, 11:54
Pas de mauvaise surprise, au contraire, ça donne vraiment envie d'écouter le reste !
21/08/2025, 09:22
Production un peu moderne en effet je trouve aussi pour Coroner mais le morceau bastonne carrément comme il faut.
21/08/2025, 00:01
Sorry if i made a typo, i am not a writer for the prestigious outlet Metalnews.
20/08/2025, 18:06
rassuré par ce 3eme extrait solide, ça sentirai bon en tete d'affiche du Superbowl ou Riip fest l'été prochain ! vivement la tournée entre 2 ;)
20/08/2025, 10:44
Pas faux Grip Inc. En effet, quoique du coup on peut se dire que Grip a eu les Suisses en influence aussi. Bref, en tout cas très impatient d'autant que dans le sequencing ce titre est placé en avant dernière position, soit pas en tête de gondole du tout. En princi(...)
19/08/2025, 19:13
Entre eux, Violator, Coroner et Condition Critical on devrait se régaler en thrash en ce début d'automne.
19/08/2025, 19:06