Pas facile de se manger « Be Cadaver » à huit heures trente du matin. Douze minutes de souffrance musicale, sous la forme d’un pavé Doom/Death au moins aussi réjouissant qu’une veillée funèbre en Sibérie. Mais telle est la méthode du Doom/Death, étirer la durée, accentuer le désespoir, grossir la gravité jusqu’au grotesque, pour mieux marquer les esprits et singer l’attitude de la mort qui vient vous rendre visite parfois à l’improviste, mais souvent des années après s’être annoncée via une douleur insupportable.
SPECTRAL VOICE vient de Denver, Colorado, et multiplie depuis son émergence les formats, privilégiant l’underground par une multitude de démos et de splits. Les exigences de la scène sont ce qu’elles sont, et le quatuor américain en a très bien compris les enjeux, et les aboutissants. Ce qui ne l’empêche guère de sonoriser nos cauchemars d’un nouveau longue-durée, sept ans après nous avoir provoqués d’un Eroded Corridors of Unbeing déjà relativement corsé.
Morris Kolontyrsky & Paul Riedl (guitares), Jeff Barrett (basse) et Eli Wendler (batterie/chant) nous immergent donc dans leur monde de claustrophobie, de caves anciennes, et d’exploration de sentiments durables. La lancinance de l’ensemble, morbide à souhait, créé une hypnose étrange, comme un coma artificiel durant lequel les rêves se transforment en cauchemars. La réalité dépeinte par les quatre musiciens est évidemment horrible, infecte, nauséeuse et tragique, mais elle correspond bien à la réalité de nos faits, et à l’actualité d’un monde qui a soudainement décidé de compiler ses catastrophes humaines et naturelles sur une période très courte.
Est-ce à dire que Sparagmos est la traduction musicale d’une apocalypse proche ? Oui et non, les sons utilisés par les américains tenant plus lieu de dernier avertissement avant terminus. La lourdeur de l’ensemble, les répétitions des guitares, les arrangements de claviers et les pauses en respiration dessinant le tableau d’un futur en monochrome, uniquement parsemé de quelques gouttes de sang séché. Comme tout bon VRP Doom/Death qui se respecte, SPECTRAL VOICE joue avec les codes, mais les respecte à la lettre près. En découlent évidemment des chansons interminables, éprouvantes, ténébreuses et vraiment méchantes, quelque part entre la mélancolie tardive et le dernier souffle s’échappant d’une bouche trop fatiguée.
Sparagmos est donc le parangon d’un style qui se doit d’être extrême en toute circonstance. Et sur ces quatre pistes aussi longues qu’elles ne sont lentes, le paroxysme est atteint en plus d’une occurrence. Capables de faire passer INCANTATION pour un chantre AOR, les SPECTRAL VOICE se rapprocheraient bien d’un cousinage entre DISEMBOWELMENT, ENCOFFINATION et EVOKEN, qui se retrouveraient chaque hiver pour célébrer la désolation, la solitude, et les longues périodes de deuil.
De fait, l’expérience reste éprouvante, mais délicieuse pour les masochistes qui sont incapables de concevoir la vie autrement que comme un concept futile, et simple passage d’un état de néant à un autre. S’adressant uniquement à un auditoire conquis d’avance, SPECTRAL VOICE n’édulcore en rien son propos, et semble vouloir creuser de plus en plus profondément dans la terre consacrée pour y déterrer les souvenirs les plus putrides. Ce qui n’empêche nullement quelques accélérations bien senties qui hument l’air vicié de la Floride, pour un « Sinew Censer » qui retombe vite dans les travers immuables d’un Doom aux accents Funeral, mais encore plus renoncé que les pires ascètes du bruit et de la fureur.
Si vous pensiez que PRIMITIVE MAN était encore beaucoup trop gai pour votre état d’esprit, si TERRA TENEBROSA vous arrachait des sourires de complaisance, Sparagmos sera le remède à votre manque de répétitions et autres itérations. Les motifs semblables, cette insistance à n’utiliser que la partie la plus grave de la palette sonore, et ce chant évidemment mixé comme une deuxième ligne rythmique font de ce deuxième album un mausolée érigé en la mémoire des mises en terre les plus célèbres, celles qu’ENCOFFINATION présidait sur ses œuvres les plus premier degré.
Volontiers plus Doom/Death que l’inverse, SPECTRAL VOICE est une éclipse qui plonge dans l’ombre une planète entière. Les efforts consentis en termes de production permettent à l’album de fricoter avec les extrêmes les moins corruptibles, et ces accélérations soudaines soulignées par des riffs concentriques permettent de penser à autre chose qu’une procession passant sous vos fenêtres.
Il n’en reste pas moins que le quatuor peut s’apparenter à un role-model pour tous les fondus de douleur auditive. Avec une joie en berne, une tristesse constante qui enserre le cœur comme un étau, et une propension à n’entrevoir l’art que sous un jour opaque et pessimiste, SPECTRAL VOICE s’adresse aux paumés, à ceux qui déambulent dans la vie comme des âmes perdues, et qui finissent un jour raides dans un fossé anonyme, bouffés par un hiver trop rude.
« Death's Knell Rings in Eternity » joue donc la sécurité pour refermer les portes de l’inconscient, et use de voix spectrales et désincarnées, de mélodies maladives, et de blanches à la caisse claire qui tapent comme un marteau sur le crâne.
Un disque qui n’est ni du matin, ni de l’après-midi, ni du soir, mais bien de la nuit. Une nuit éternelle, horrible, conscrite à quelques centimètres carrés, la taille d’un cercueil une fois le corps plongé à l’intérieur.
Le vôtre peut-être.
Titres de l’album:
01. Be Cadaver
02. Red Feasts Condensed Into One
03. Sinew Censer
04. Death's Knell Rings in Eternity
@Ivan : la scène metal est un ehpad géant, aucun intérêt de suivre de vieux grigous qui sucrent les fraises.
09/07/2025, 13:52
Bonjour, moi je serais dans les premiers à réclamer plus de femmes sur scène, et éventuellement plus de diversité ethnique, mais je préfère largement un festival du type Fall of Summer, au Hellfest, et ce depuis 2015....
09/07/2025, 13:52
News à mettre en regard de celle sur le dernier concert de Black Sabbath, nous assistons à l'agonie d'une certaine idée de la scène metal, celle qui arrivait à faire consensus autour d'une musique de qualité et qui avait du succès. F(...)
09/07/2025, 13:16
"Avec qui en tête d'affiche? Radiohead ou Oasis?" bah ça n'a plus rien de choquant aujourd'hui. Barbaud parle de Placebo en tête d'affiche donc bon... Va falloir s'y faire, les fans de Metal ne sont plus du tout le public vis&eacut(...)
09/07/2025, 12:20
Si je voulais être méchant, je dirai : "Y a-t-il encore des fans de Metal au HELLFEST ?"
09/07/2025, 10:30
Avec qui en tête d'affiche? Radiohead ou Oasis? Plus sérieusement, je me de mande encore comment le festival peut afficher complet avec l'affiche qu'ils ont réalisée pour 2025. Comment les fans de metal peuvent encore leur faire confiance ?
09/07/2025, 10:13
@DPD : on te vois beaucoup t'attaquer aux groupes de croulants mais on ne te vois jamais la ramener sur tes groupes du moment, ce que tu aimes ou les groupes qu'il faut désormais en lieu et place de ces formations vieillissantes que tu dénonces tant...
09/07/2025, 06:45
@Jus de cadavreGenre ils on payés les frais de déplacement et l'hôtel, me fait pas rire, les enfoirés part 2. Au moins le juif Patrick Bruel tiens debout.
09/07/2025, 01:12
Très bon album avec 3/4 titres vraiment excellent et un bon niveau global.Quelques Slayeries comme sur Trigger Discipline mais rien de méchant. D'autant que le titre Gun Without Groom est vraiment terrible, en effet. Un très bon cru
08/07/2025, 23:59
Pour moi je vois c'est l'équivalent que de voir 2pac en hologramme (qui était homosexuel), peut-être même pire parce que l'illusion tiens mieux le coup, je reste sur cette position.
08/07/2025, 22:44
Les bénéfices du concert était entièrement reversés à une œuvre caritative. Aucun des groupes présents n'a palpé pour leur concert (en même temps c'était 20 minutes de live par groupe...). Après ça (...)
08/07/2025, 22:42
@SalmigondisJe sais pas si tu veux quelque chose qui fait plus l'unanimité j'ai vu Morbid Angel au bout et c'était de la merde, une prestation robotique au possible, j'ai pris plus de plaisirs sur des trucs plus locaux à la con. Il faut savoir tourn(...)
08/07/2025, 22:28
Mais quelle bande de clodos...tout le monde se branle du batteur sans déconner. Se faire du fric de cette manière c'est franchement pathétique. Massacra est mort et enterré...qu'il le reste pour conserver son statut CULTE. Honte &agrav(...)
08/07/2025, 21:54
Avant d'aller me faire voir ailleurs, je partagerai avec vous cet hommage Fernandelien :"Aux adieux de Black Sabbath, il tremblait pas mal d'la patte.Fais l'Ozzy, assis."
08/07/2025, 21:31
Ben tu m'étonnes, DPD, d'être passé à autre chose. En même temps, quand on a eu ces groupes là comme entités fétiches, on ne peut qu'aller de l'avant. C'est comme partir de zéro (je plaisante
08/07/2025, 21:26
Je comprends juste pas cette envie adolescente permanente de revoir ses groupes de jeunesse. Je veux dire je suis de la génération qui est passé par Korn Slipknot et compagnie mais je suis passé à autre chose.
08/07/2025, 19:55
Lors du dernier concert de Motorhead auquel j'ai assisté, Lemmy était... pathétique (mais pas loin). Et pourtant il était planté sur ses quilles. Alors jouer assis avec Parkinson en bandoulière ? Business is business, la machine à biftons DEVA(...)
08/07/2025, 19:23