Eye of the Storm

Beastmaker

21/06/2019

Shadow Kingdom

La boulimie est une maladie. Evidemment, d’instinct tout le monde l’associe à un dérèglement psychologique et un amour inconsidéré pour la nourriture, mais cette pathologie peut prendre d’autres formes, moins dangereuses pour la santé, mais tout aussi concrètes. Ainsi, les musiciens en sont parfois atteints, se dispersant dans un, deux ou trois groupes, chacun publiant une quantité non négligeable d’œuvres parfois intéressantes, souvent dispensables. Les exemples sont fréquents, de Jack White à Dave Grohl, en passant par les maniaques du Grind qui accumulent les performances olympiques. Mais les amoureux de la lourdeur ne sont pas des exceptions, bien au contraire, et les rois du Doom américains de BEASTMAKER en sont une preuve flagrante. Outre leur discographie assez riche malgré leur formation récente, ces allumés ont accompli la performance unique de lâcher sur un marché médusé pas moins de dix EP en une seule année, ne prenant même pas la peine de les baptiser autrement qu’avec un numéro. Joli tour de force qui venait compléter la lignée de deux longue-durée, et d’une bordée de compilations, mais en dehors de cette productivité interne, un autre élément à prendre en compte vient alourdir le dossier à charge. Car deux des trois membres de BEASTMAKER ont aussi formé en 2016 l’entité HAUNT, dont vous avez déjà lu les exploits musicaux dans ces colonnes, se divisant donc en deux sans freiner leur fringale de Heavy’n’Doom. Mais le projet HAUNT prenant de plus en plus de temps à John Tucker (basse) et Trevor William Church (guitare/chant), c’est donc sous la forme d’un au-revoir que le groupe se montre à notre bon souvenir cette fois-ci, avec un ultime EP pour tirer sa noble révérence.

Toujours accompagnés d’Andres Alejandro Saldate (batterie), John et Trevor s’en retournent donc travailler leur partition pesante, avec une petite livrée de quatre morceaux bien tassés, qui ne surprendront pas leurs fans les plus acharnés. C’est évidemment sur l’estimé label Shadow Kingdom (qui héberge aussi HAUNT tant qu’à faire) que les retrouvailles se fêtent, avec cet Eye of the Storm qui renoue avec les débuts de la vague vintage Doom US dont les BEASTMAKER ont toujours fait partie. Quatre morceaux de facture classique, et d’obédience nostalgique, qui nous ramènent dans le giron de Lusus Naturae (2016) et Inside The Skull (2017), et surtout, au creux d’un Metal joué comme à la grande époque des sabbats et autres candélabres noirs, imitant à la perfection les tics de BLACK SABBATH, TROUBLE, mais aussi de la NWOBHM la plus oppressante et lancinante. Pas grand-chose à dire qui n’a déjà été dit à propos de nos amis, puisqu’ils continuent d’explorer le versant le plus hypnotique de notre musique préférée, trouvant toujours cet équilibre parfait entre appui et envolée, enveloppant leurs montées de fièvres dans des serviettes mélodiques humides, pour nous éviter d’avoir à trop souffrir de la chaleur rythmique. Du pas vraiment neuf avec du sévèrement vieux, et des accointances avec la vague US des années 90, celle de la NOLA évidemment, en version plus authentique et moins éthylique. Une musique que les mots peinent à décrire tant elle est connue, reconnue, appréciée, et toujours aussi striée de tierces, de lignes de basse serpentines, et de montées vocales un peu étouffées. On se retrouve en terrain connu, perdu dans la lande tôt dans la matinée, à la recherche d’une princesse en robe noire errant dans la forêt, mais le tout est tellement bien fait, très bien produit, et parfaitement joué qu’on accepte une fois encore de jouer le jeu, au risque de balbutier les règles.

Le but était donc de boucler la boucle, et d’offrir à BEASTMAKER les funérailles que la vie de HAUNT paraissait mériter. Pour mieux transformer leur side-project en groupe officiel, Trevor et John ont donc décidé de refermer le chapitre BEASTMAKER avec quatre petites histoires de qualité égale, même si les fans purs et durs sauront reconnaître la séduction immense du final « Celestial Glow ». Pas d’amertume pour autant, mais la joie de jouer, la cohésion, et quelques regrets, celui de ne pas pouvoir mener deux carrières de front, les deux groupes étant pourtant différents et immédiatement identifiables. Pas de déclaration tapageuse, pas de révélation sur le chemin de Damas, juste un dernier salut de la main puriste mais ouvert, doublement tourné vers le passé, mais regardant logiquement vers l’avenir. Difficile de se sentir triste de par ce décès annoncé, puisqu’on sait très bien que les deux têtes pensantes du groupe vont continuer leur chemin, vers d’autres horizons, mais avec la même foi. Et si jamais la nostalgie vous étreint à l’écoute de cet Eye of the Storm, vous pouvez toujours vous replonger dans l’œuvre pléthorique du trio, qui a laissé derrière lui de multiples traces et autres éléments artistiques concrets. Si ça ne suffit toujours pas à calmer votre peine, repassez-vous les seize minutes de ce testament, qui prouvent pour la dernière fois à quel point BEASTMAKER était l’un des héros les plus authentiques de l’underground. Pas de quoi être morose du tout, mais plutôt satisfait de voir que parfois, les appétits les plus féroces savent se recentrer sur leur nourriture la plus essentielle.

       

Titres de l’album :

                      1.Eye of the Storm

                      2.Shadows

                      3.My Only Wish

                      4.Celestial Glow

Facebook officiel

Bandcamp officiel


par mortne2001 le 07/09/2019 à 14:20
75 %    901

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Midnight + Cyclone + High Command // Paris

Mold_Putrefaction 24/04/2024

Live Report

DIONYSIAQUE + JADE @La Chaouée

Simony 23/04/2024

Live Report

Enslaved + Svalbard + Wayfarer

RBD 20/03/2024

Live Report

Voyage au centre de la scène : BLOODY RITUAL

Jus de cadavre 17/03/2024

Vidéos

Crisix + Dead Winds

RBD 20/02/2024

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
roulure

true norwegian roue libre

26/04/2024, 13:40

Simony

Yes, et demain samedi, c'est WITCHTHROAT SERPENT et ORBIS au Nirvana Pub-Club de Nancy.Si j'avais le temps de renseigner la partie gigs de ce site....

26/04/2024, 13:35

Simony

Yes, et demain samedi, c'est WITCHTHROAT SERPENT et ORBIS au Nirvana Pub-Club de Nancy.Si j'avais le temps de renseigner la partie gigs de ce site....

26/04/2024, 13:35

Humungus

Putain !Si j'avais été au jus de cette date, j'aurai fait le déplacement boudiou...Pis je vois que tu causes de BARABBAS à Nancy ?!Et c'est... ... ... Ce soir.Re-Putain !

25/04/2024, 13:28

Tut tut!

25/04/2024, 12:44

Gargan

ça me fait penser à moi ivre mort parodiant Maurice Bejart, sur fond de Stravinski. Plus glucose, tu meurs. Mauriiiiice !

25/04/2024, 10:28

DPD

Mes confuses malgré mon instinct qui tapait dans le juste, rien avoir avec le gaillard à qui je pensais.

24/04/2024, 14:26

RBD

Vu récemment avec Napalm Death, et ça faisait plaisir de voir que beaucoup de gens connaissent leur Histoire du Death Metal car il y avait de vrais fans. Surtout, la formule D-Beat basique et efficace du père Speckmann fonctionne bien en live 

23/04/2024, 09:55

LeMoustre

Excellent disque avec un gros point fort sur le riffing atomique. La pochette m'évoque clairement celle de Nothingface, version bio-mécanique

22/04/2024, 18:04

Arioch91

Ca fleure bon le vieux Kreator période Pleasure to Kill ! Prod' crade, aux antipodes des trucs surproduits de certains groupes et quand ça speede, ça rigole pas.

21/04/2024, 19:52

Poderosos/Magnificencia/Técnica Suprema

Los Maestros del BRUTAL DEATH GRIND

21/04/2024, 19:50

Pomah

+1 Gargan, influence Mgla je trouve par moment. 

21/04/2024, 09:20

Jus de cadavre

Là clairement le label est dans son droit à 100%. Warner a racheté l'ancien label de Kickback, ils en font ce qu'ils veulent du catalogue. Après, l'élégance, une telle multinationale elle s'en beurre la raie. Mais je peux comprendre qu(...)

20/04/2024, 23:36

Tourista

Mouiii, pas faux. Les gonzes ont signé.Mais ça me rappelle Peter Steele qui avait voulu défenestrer un type dans les bureaux de Roadrunner après avoir découvert que le label ressortait les albums de Ca(...)

20/04/2024, 20:06

Tourista

Devinez où il se Lemmy. (ne me raccompagnez pas, je sors tout seul)

20/04/2024, 19:58

Grosse pute

Attention, les mecs ne se font pas "enfler". C'est juste que Warner ne leur a pas demandé leur avis pour rééditer le bazar et les mecs parlent donc d'édition pirate, alors que Warner a bien les droits sur le disque. Après, Kickback, ce ne son(...)

20/04/2024, 06:26

Tourista

Désolé pour les coquilles monstrueuses.  Merci la saisie automatique.

19/04/2024, 20:51

Tourista

Non bien sûr je plaisantais, M'sieur Heaulme. Un artiste qui se fait enfler a mille fois raison d'en parler !   Et je sais malheureusement de quoi je parle.Respect pour Kickback. Content que tu les pu voir ce docu.

19/04/2024, 18:08

Humungus

@Tourista :- "On s'en cogne"Bah non...- Tu t'es achement bien rattrapé avec ce docu qui était totalement passé à côté de mes radars.Exceptionnel.C'est pas C8 qui passerait ça bordel...

19/04/2024, 15:54

grosse pute

Au lieu d'aller baiser des gamines et des ladyboys à Bangkok, Stephan aurait dû apprendre à lire les contrats qu'il signe.

19/04/2024, 15:20