Dès lors qu’on aborde le cas éminemment complexe du Raw Black, les sourcils se froncent, les regards se font interrogatifs, et les moues dubitatives. Il est d’usage de considérer le style comme un exutoire personnel, s’adressant au plus petit dénominateur commun, une façon de concevoir le bruit sans s’embarrasser de questions de principe, d’agencement ou de créativité. La musique devient alors une dualité catharsis/Némésis, et chacun d’y trouver son compte ou son purgatoire, selon l’imaginaire des musiciens impliqués. J’avoue moi-même y perdre souvent mon latin, devant faire face aux délires à peine réfléchis d’instrumentistes n’en étant pas vraiment, et trop désireux de s’affirmer en tant que figures de controverse à peine capables de manier un instrument, et misant tout sur un ascétisme dissimulant avec peine une pauvreté d’inspiration le confinant à la fumisterie la plus totale. Le problème étant le suivant. A-t-on encore besoin de fantoches publiant des œuvres qui n’en sont même pas de nom, et qui nous refont sans cesse le coup de la démo plus underground et inaudible que le cri de naissance d’un nourrisson refusant sa nouvelle existence ? A-t-on besoin de groupuscules qui confondent logo et police de caractère élaborée par un graphiste à la psyché aussi torturée que sa calligraphie ? La réponse, comme vous vous en doutez certainement, est négative. Depuis les origines du genre, de nombreux « musiciens » ont pris un malin plaisir à mélanger lo-fi et abomination auditive, crédibilité et fumisterie, et intransigeance et incapacité. Alors, à l’heure de me pencher sur une énième réalisation sur Tascam fatigué, je m’interroge sur la pertinence de ma démarche. Pourtant, les américains de DUNNOCK méritent toute l’attention que j’ai pu leur porter, non que le résultat de leurs errances musicales et intellectuelles représente une épiphanie de violence, mais au moins ont-ils le mérite de réfléchir, et d’avoir un minimum d’ambitions.
En tant que projet, Little Stories Told by Ghosts ne manque pas d’intérêt et pique la curiosité au vif. Se basant sur quatre morts fictionnelles narrées du point de vue de la victime, ce second album des originaires de Berkeley, Californie pousse les choses un peu plus loin que le simple gimmick « Untrue Black Metal » dont ils se revendiquent et qui au final, ne veut pas dire grand-chose. Proposant graphiquement et thématiquement un développé un poil plus intéressant que leurs collègues toujours un peu trop focalisés sur une provocation cheap et éculée, Jacob Thomas (guitare, batterie, claviers, percussions, samples, chant) et Aidan O'Flynn (violon, claviers) n’en oublient pas pour autant de travailler leur partition musicale, beaucoup moins absconse qu’elle n’en a l’air. Certes, les quatre morceaux/faits divers de cet album se concentrent principalement sur des attaques soniques que le plus grand dénominateur commun aura beaucoup de mal à assimiler, mais en choisissant de confronter les dogmes les plus radicaux du Raw Black à une inspiration voguant sur les vagues de l’Ambient, de la musique concrète, du Trip-Hop et du classique adapté à un format raisonnable, le duo parvient sans peine à instaurer une ambiance mystique, un peu comme un vieil album de coupures de journaux revenant à la vie, souhaitant certainement trouver la paix dans une création de l’au-delà. Et l’au-delà des DUNNOCK est particulièrement étrange, dérangeant, et pour le moins intriguant.
Se basant sur sa propre enfance, Jacob Thomas a donc élaboré quatre histoires de cadavres retrouvés sur des plages diverses, et à traité son imaginaire en le collant à une réalité tangible. En naviguant temporellement entre les 60’s et le nouveau siècle, le compositeur/auteur s’est replongé dans les traumas de sa jeunesse pour en extirper des histoires tragiques, racontées du point de vue des victimes qui voulaient par procuration livrer leur propre version des faits. En résulte donc quatre chapitres abondamment développés, atteignant presque systématiquement le quart d’heure de jeu, mais se montrant suffisamment loquaces et éloquents pour ne jamais lasser, ou presque. Musicalement parlant, si le BM le plus cru sert de trame de fond à des structures évolutives, les samples, le piano, le violon, les spoken-words, les intermèdes Ambient font bien plus que boucher des trous ou simplement apporter des nuances différentes, et s’intègrent à des scénarii bizarres, qui ont le mérite de s’approprier l’histoire de ces pauvres victimes fictionnelles que Jocob a déterrées de sa mémoire. En alternant les mélodies les plus éthérées et les exactions bruitistes les moins complaisantes, DUNNOCK joue la carte de la variété, mais adapte aussi son discours aux évènements qu’il se plait à décrire avec force détails. Ainsi, le troublant « Teen Girl’s Body (Clam Beach, 1963) » et son entame en musique de fête foraine aux accents mélodiques surannés, nous évoque à merveille l’image d’une pauvre adolescente déambulant dans les allées d’un parc, les yeux fixant avec émerveillement les attractions qui l’entourent, sans savoir que son funeste destin allait la faire échouer sur le sable d’une fin d’existence pitoyable. Pour suggérer cette carte postale tragique, les musiciens combinent une harmonie décharnée à l’extrême et des strates de sons abrasifs et irritants, comme pour mieux concrétiser la dualité innocence/tragédie.
Il eut été plus simple pour les californiens de se contenter d’un album sans envergure, répondant en cela au besoin viscéral de masochistes musicaux en mal de torture auditive. Mais les cinq années passées à l’élaboration de ce second LP ont transformé la réussite en échec merveilleux, comme ils se plaisent à le décrire. Tout n’est évidemment pas parfait, tout n’est pas réussi, mais lorsque la symbiose atteint son apogée, le résultat n’en est que plus perturbant, comme cette longue litanie violence/nuisance sur le terminal « Middle Aged Man’s Body (Fish Creek, 2002) ». Le chant de Jacob, hurlé, manque de nuances, les riffs sont parfois méchamment indiscernables, et la trame globale pâtit d’une production défectueuse ne permettant pas d’apprécier les finesses d’imbrication. Et si l’humeur minimaliste générale confère au projet une patine surréaliste, on se prend à regretter que l’optique n’ait pas été plus ouverte, et la production plus « propre », ce qui aurait permis à cet étrange album de devenir une œuvre définitive et référentielle. Mais en termes de BM cru et sans pitié, Little Stories Told by Ghosts se montre d’une audace rare, et d’une absence de complaisance qui fait vraiment plaisir à entendre. Il n’y a pas de mal à prôner des valeurs tout en les mettant en exergue d’une façon un peu plus ambitieuse que la moyenne. Et les morts de revenir à la vie pour entonner une dernière litanie transformant leur décès en sacrifice au nom d’un art plus difficile à pratiquer qu’il n’en a l’air.
Titres de l’album:
1.Young Woman’s Body – Fell’s Point – 1988
2.Young Boy’s Body – Deritis Playground – 1996
3.Teen Girl’s Body – Clam Beach – 1963
4.Middle Aged Man’s Body – Fish Creek – 2002
Très chouette quand le boulot de mortne2001 est reconnu par les artistes eux-mêmes !
18/07/2025, 19:45
Pink Floy et Black Sabbath sont sans doutes les groupes les plus surestimés de tout les temps.
16/07/2025, 08:53
Si tu veux des vieux trucs qui tiennent le coup tu as Joy Division Pornography de The Cure, ou le premier Christian Death. Il y a bien plus intéressant.
16/07/2025, 08:51
Mais quel troll ? au mieux je vous fait chier et j'en rajoute parce que ça me fait marrer, mais je pense tout ce que je poste. J'en ai jamais eu rien à foutre de Iron Maiden que j'ai toujours trouvé médiocre, de même que Black Sabbath dont la quali(...)
16/07/2025, 08:43
@DPD : Tu passes beaucoup trop de temps à justifier tes trolls, mon jouvenceau.
16/07/2025, 07:47
Sinon oui j'apprécie déjà pour les news ou ils sont généralement au taquet, pour les chronique j'ai parfois des goûts différents mais ils font le boulot. Je suis pas là pour sucer mais je suis venu parce qu'il manquait un manqu(...)
15/07/2025, 22:07
Bouhou le monsieur a dit du mal d'un groupe que j'aime il doit être pédé (j'ai du mal à faire le lien mais ok).
15/07/2025, 20:24
@dpd : non, t'es là car c'est le dernier webzine où tu peux commenter et troller sans inscription avec une modération proche du néant. Partout ailleurs, tu te serais fait dégager et tu n'aurais plu qu'à tirer des pipes dans un bois que(...)
15/07/2025, 20:18
Si tu veux du troll tu as un post qui parle de Liturgy (que je n'écoute pas), et de la personnes transgenre derrière le projet en inventant une fantaisie sexuelle bizarre dans laquelle je serais impliqué. ça c'est du troll. Pas ce que je poste.
15/07/2025, 20:04
Pleurs pas tout ira bien, ils s'en remettront. J'ai des critiques, certaines virulentes envers la scène (enfin ce qu'il en reste), et un côté provoc assumé (ceci dit je ne mens pas, je pense vraiment ce que je dit), et je pense que ce soit une mauvaise ch(...)
15/07/2025, 19:59
Quand je vois la quantité et la qualité du travail qui est abattu par ceux qui tiennent ce site comparées à certains commentaires qui s'apparentent au fond de cuve d'une vieille fosse à merde... ça me rappelle que certains webzines / sites sont (...)
15/07/2025, 19:42
Je sais qu'il faut se reconvertir à un certain âge de nos jours, le marché du travail est mouvant et tout sauf garantit dans certaines professions, ceci les animateurs club med sont décidément mal formés de nos jours. Je vais leur en toucher un mot.
14/07/2025, 19:53
@DPD : fais gaffe, avec ton jeune âge, tu pourrais être une cible de choix pour un pédophile de LFI. Remarque, ça te ne choquerait pas beaucoup, vu que tu dois être du genre à sucer en fond de gorge le travelo de Liturgy.
14/07/2025, 19:38