Impossible Orbits

Dephosphorus

15/06/2017

Selfmadegod Records

J’avoue que ces grecs ont raison. On s’emmerde toujours à vouloir coller de jolies étiquettes sur les albums, mais finalement, est-ce que ça a vraiment une utilité quelconque ? J’en suis même venu à en créer de toute pièce, histoire de rendre le jeu un peu plus amusant. Mais parfois, ce sont les artistes eux-mêmes qui se livrent à ce petit amusement, certainement fatigués de devoir répondre à la sempiternelle question :

« Et toi, à quoi tu joues ? »

Les DEPHOSPHORUS eux, jouent de l’Astrogrind. Rien à voir avec Astro Boy, ce petit super-héros impudique au torse nu, quoique niveau vitesse de propulsion, les deux doivent partager des poussées en commun. Non, les originaires d’Athènes ne se sont pas pris la tête pour être comparés à un mini-héros de bande dessinée juste pour faire les malins. Mais il est certain que leur créneau est du genre multiple, mais toujours extrême. C’est d’ailleurs ce qui lie leurs morceaux entre eux, cette glu extra-forte qui les fait s’empêtrer sur la palette collante de la violence, du Death au Grind, en passant par le Crust, le Powerviolence, et finalement, tout ce qui fait vite et qui va mal. Ou l’inverse, mais c’est pareil.

Et puis finalement, comme ce sont souvent les principaux intéressés qui se présentent le mieux, je leur laisse la parole sur quelques lignes pour vous éclairer :

« Avec six vinyles entre 2011 et 2015, les athéniens se sont embarqués dans un voyage cosmique. Leur concept et leur esthétique tirent leurs influences de la cosmologie, de l’astronomie, de la littérature de science-fiction comme de la sociopolitique et des répercussions existentielles. Le groupe définit simplement ce style comme étant de l’Astrogrind »

Vous me direz qu’avec ça vous n’en savez pas plus, et vous n’aurez pas vraiment tort. Alors affirmons, comme eux le font d’ailleurs, qu’Impossible Orbits est leur troisième longue durée, mais aussi leur effort le plus sombre et violent. Distribué par les mercenaires polonais de Selfmadegod (ce qui en dit déjà assez long en soi pour que vous chopiez l’importance du truc), ce nouvel LP a été enregistré et mixé analogiquement aux studios Unreal, et caché sous un artwork signé par Viral Graphics, et à l’écoute de ses pistes ébouriffantes, on comprend que les athéniens tiennent à garder une certaine patine vintage dans leur développement d’outrance. Alors oui, tout y passe, un peu comme d’habitude. Le Grind le plus velu, le Death le plus charnu, le Crust le plus bourru, et même le D-beat le plus ardu. Ils mélangent le tout dans un grand shaker de haine, et font gicler le tout en grandes gerbes qui vous éclaboussent les tympans sévère. Ça ne bricole pas, et pourtant ça n’est pas dénué de nuances, comme le prouve la grosse bourrade « The Light of Ancient Mistakes », qui s’éloigne un peu des systèmes solaires battus, pour se concentrer sur des circonvolutions plus lourdes et même parfois un peu Sludge sur les bords, sans tomber dans le statisme gênant. Il est toutefois difficile de se faire une idée précise sur les qualités et la diversité de DEPHOSPHORUS en se contentant de l’entame « Above The Threshold », qui tout en jouant franc jeu, se permet quand même quelques cachoteries sur le reste du contenu du voyage.

Ce voyage est éminemment rapide, chaotique, et souvent ultrasonique, mais sait aussi ralentir la cadence pour ne pas vous laisser KO avant l’arrivée.

Thanos Mantas (guitare), John Votsis (batterie), Panos Agoros (chant) et Costas Ragiadakos (basse) ont relativement bien assimilé le concept « d’extrême », et abordent tous les excès avec le manque d’empathie nécessaire pour transformer leurs morceaux en satellites tournant à une vitesse folle, mais stabilisant leur orbite d’une solide assisse rythmique concassante, qui leur permet de ne pas trop dévier de leur trajectoire. Chaque millimètre compte, et chaque impulsion aussi, ainsi, rien n’est laissé au hasard, comme le prouve la belle intro tournoyante de « Micro-Aeons Of Torment », qui débouche sur un couplet qui fera tourner en bourrique les NAILS de son mid tempo martelé comme des astéroïdes frappant de plein fouet la coque d’un Deathcore étrange et diffus.

Il n’est d’ailleurs pas interdit à ce moment-là du trip de penser à une version condensée et impitoyable d’ENTOMBED, tout du moins jusqu’à ce que la diagonale bifurque vers un Grind de plus en plus épileptique.

Neuf morceaux pour moins d’une demi-heure, il faut aller à l’essentiel sans s’interdire quelques fioritures. Mais avouons que dans un créneau pluriel, Impossible Orbits donne une sacrée leçon à tous les spationautes de l’extrême qui pourraient en tirer quelques enseignements.

En choisissant de ne pas choisir, mais en triant les aspects les plus violents et véhéments de chaque sous-genre, les DEPHOSPHORUS atteignent des sommets d’intensité, tout en jouant constamment sur la dualité lourdeur/cadence, avec un indéniable brio et une créativité remarquable.

« Rational Reappraisal » nous indique même que les athéniens connaissent la scène Core de l’Est sur le bout des combinaisons, même si une fois de plus ils ne résistent pas à tout envoyer valdinguer de blasts déchaînés.

Si les segments les plus Heavy les rapprochent d’un Death sludgy vraiment bourrin et dense, voire d’un Chaotic Core qui danse, le Grind reste quand même leur came, et suggère quelques accointances dans les plan de vol avec les ASSUCK et autres NASUM (« Impossible Orbits »).

C’est de temps à autres méchamment lugubre et accrocheur (« Suspended In A Void Universe »), un peu comme si UNSANE se payait un stage de simulateur de vol du côté de la base NOLA, avant de s’en trouver ennuyé et de partir comme des dératés Grind.

Dissonances éparses, riffs toujours noirs comme l’espace, chant qui égosille ses ordres en arrière-plan, mais thèmes qui déménagent et réaménagent façon Hardcore brisé (« Blessed In A Hail »), pour un trip dans les étoiles qui bouscule et bascule d’une galaxie à une autre.

Impossible de ne pas se montrer bluffé par cette troisième démonstration de force des grecs, qui semble effectivement être la plus intense et probante de leur carrière. Du Grind, du Death, Du Hardcore, du Crust, enfin un bon kérosène explosif pour traverser le ciel à la vitesse de la lumière, celle-là même qui n’éclaire jamais leur musique.


Titres de l'album:

  1. Above The Threshold
  2. Micro-Aeons Of Torment
  3. Rational Reappraisal
  4. Αστερόσκονη (Asteroskoni)
  5. Impossible Orbits
  6. Imagination Is Future History
  7. The Light Of Ancient Mistakes
  8. Suspended In A Void Universe
  9. Blessed In A Hail

Site officiel


par mortne2001 le 10/07/2017 à 18:44
75 %    1388

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Voyage au centre de la scène : BLOODY RITUAL

Jus de cadavre 17/03/2024

Vidéos

Crisix + Dead Winds

RBD 20/02/2024

Live Report

Abbath + Toxic Holocaust + Hellripper

RBD 21/01/2024

Live Report

1984

mortne2001 10/01/2024

From the past

SÉLECTION METALNEWS 2023 / Bonne année 2024 !

Jus de cadavre 01/01/2024

Interview
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
DPD

Tant mieux pour ceux qui aiment moi ils me font chier avec cette fétichisation du metal old school.

18/03/2024, 17:37

stench

J'aime bien le principe de réenregistrer des classiques pour voir ce que ca donne avec un son actuel. Le problème est double ici : réenregistrer des morceaux récents n'a que peu d'intérêt, et surtout en me basant sur le titre mis en é(...)

18/03/2024, 13:13

Gargan

Oui, et non. Dans le sens que s'ils veulent vendre leur compile qui sent très fort le réchauffé, il vaut mieux qu'ils écoutent un minimum la base de fans qui seraient potentiellement intéressés par l'objet (et ils ne sont pas Maiden qui peu(...)

18/03/2024, 08:05

pierre-2

Pourquoi tout ce venin ???Y font ce qu'ils veulent non ?

17/03/2024, 14:26

Fran

J ai adoré ce film qui m'a fait connaître ce groupe. Depuis je me repasse  leurs tubes.

17/03/2024, 14:07

Nounours dit grizzly le magnifique

J’ai pris la version cd version digipack plutôt que le vinyle car il y avait 3 titres bonus .trop tôt pour donner un avis mais je ne m’ennuie pas, sans être transcendant mais on peut pas exigeant avec ce groupe et une telle carrière. Cela dit il fai(...)

16/03/2024, 11:55

Sphincter Desecrator

UHL: un groupe qui, quand il n'est pas là, manque.Désolé...

14/03/2024, 19:31

Humungus

Bon...Pour l'instant, je ne l'ai écouté qu'une seule fois...Mais dans l'ensemble, j'ai été quelque peu déçu.La faute à un côté Power bien trop présent tout au long de l'album.

13/03/2024, 07:24

Désanusseur de mère

groupe de petites gauchiasses qui crisent si on n'emploie pas le bon pronom. FOUR

13/03/2024, 06:17

jo666

ça a l'air bien ce truc, en plus ils passent en mai à Grrrrnd Zero (69)

12/03/2024, 14:33

Cupcake Vanille

Vraiment une bien triste nouvelle...  RIP Blake 

12/03/2024, 08:25

MV

Sympa la fowce <3 

11/03/2024, 18:24

LeMoustre

Commande faite direct au label.Hâte d'écouter les nouvelles versions de The Song of Red Sonja ou The Thing in the Crypt.Meilleure nouvelle de la semaine,Merci pour la chronique en plus hyper favorable 

11/03/2024, 15:32

LeMoustre

Terrible.Déjà que le EP envoyait sévère dans la veine Wotan, early Blind Guardian ou Manowar, voici l'album !Achat obligatoire

11/03/2024, 14:55

senior canardo

toujours pas de Phobia à l'affiche.... j'y ai cru pour les 25 ans et tout  ...

11/03/2024, 07:39

LeMoustre

Miam

08/03/2024, 14:22

Seb

Titre ultra-classique, mais c'est bon !

08/03/2024, 11:23

Gargan

Plus de 400 bpm pur le deuxième extrait ? Pas hyper convaincu mais ça reste tout de même impressionnant par moments ! &nb(...)

08/03/2024, 06:03

Saddam Mustaine

Jay Weinberg remplace dans ce groupe le mec qui est parti dans un autre groupe remplacer le mec qui est parti pour le remplacer dans son ancien groupe.Clair.

07/03/2024, 18:37

Buck Dancer

Le mercato des batteurs

07/03/2024, 13:08