Un peu plus d’ambitions, un registre plus coton, c’est l’heure des présentations. Les américains d’URAKKA ne sont pas exactement des jeunes premiers, mais ils connaissent la chanson. Celle jouée et chantée par DREAM THEATER dans les années 90, et reprise aujourd’hui par une kyrielle d’artistes à la technique rodée. Oui, nous parlons bien ici de Metal Progressif, genre exigeant au possible, qui entre de mauvaises mains devient démonstratif et rébarbatif. Alors que John Petrucci et les siens sont revenus sur le devant de la scène avec leur excellent Parasomnia, d’autres moins exposés leur emboitent le pas pour profiter de ce regain d’intérêt tout à fait mérité.
URAKKA réside à Rochester, New York, et se présente sous la forme d’un quintet soudé, et assemblé en 2024. On retrouve au line-up Finny (chant), Skromak & Professor (guitares), Tasty Cakes (basse) et Pounde (batterie), de vieux briscards qui connaissent bien les règles, et qui adorent s’amuser avec. On aurait pu s‘attendre à des influences seventies, mais si elles sont bien présentes au détour d’un break improbable, le groupe les noie dans une inspiration plus moderne pour ne pas paraitre trop emprunté et académique. « Flutes of the Void » fait justement partie de ces inserts allusifs à de nombreuses périodes et courants, de sa puissance manifeste et de sa fluidité preste. La cohésion est donc bien là, mais la liberté de ton aussi. Ce qui aboutit à une sorte d’hybridation entre avant et maintenant, tout en échappant la plupart du temps au…temps.
Ceux inscrits sur la partition sont respectés. Comme tout orchestre de Metal progressif, URAKKA a classé ses idées mais gardé une part de spontanéité pour ne pas perdre en authenticité. Entre voyage intersidéral et pataphysique bien concrète, Drain The Sky vide le ciel de ses intentions agressives, et s’aménage des espaces de folie non négligeables. Il est en effet assez rare d’entendre un titre comme « Reconnoitre », dont l’entame est plus Thrash que la moyenne. Ce formalisme foulé du pied est l’atout majeur d’une première réalisation bluffante de naturel. Si la production est parfois discutable dans ses moments les plus intenses, le rendu musical est quant à lui au-dessus de tout soupçon. Les cinq américains se sont fait plaisir, et on le sent à la moindre déviation ou cassure.
URAKKA se démarque donc par cet esprit frondeur, qui permet des allusions d’ordinaire inexistantes ou carrément proscrites. On sème du RUSH, du Zappa, du METALLICA, du SHINING, un peu de KING CRIMSON, et on observe ensuite la peinture couler sur la toile blanche et former des motifs bizarroïdes, laissés à la libre interprétation de l’auditeur.
Très logiquement, et peut être avec un peu de complaisance, je m’attendais à un énième exercice de style de conservatoire. Je me retrouve avec un premier jet plein de spontanéité et de fureur, qui surclasse la concurrence de sa folie sévère et contagieuse. Le plaisir retiré n’en est que plus grand, d’autant que l’orchestre parvient à garder cet esprit chafouin intact jusqu’au petit matin.
Les guitares, la plupart du temps branchées sur triphasé, permettent même des clins d’œil extrêmes, lorsque la voix de Finny se veut plus mécontente et inquiétante. Si le background instrumental est échafaudé à partir d’idées toutes plus libres, les lignes vocales sont la clé qui permet au groupe d’ouvrir la porte de l’affranchissement absolu des impératifs. Nous sommes donc très loin des acteurs majeurs de la scène, qui peuvent prendre quelques leçons de bouillonnement créatif. En plus de dix minutes, « Reconnoitre » synthétise tout ce que le style incarne de plus poussé, avec en exergue cette basse en constant roulement et ces arrangements de guitares qui sonnent comme des samples revenant à intervalles réguliers. URAKKA ose même achever la progression par deux minutes de feedback, ce qui est pour le moins incongru.
Mais avec eux, tout l’est plus ou moins.
Le côté démonstratif a été totalement occulté. Si les musiciens en sont, et de très bons, ils ont la politesse et l’humilité de ne pas le faire remarquer pour se faire mousser. Ils préfèrent en effet explorer des recoins sombres, presque dadaïstes, en fouinant dans les poubelles de la scène Death autrichienne de l’orée des nineties pour en sortir du recyclable cacophonique. « Drain » ne reprend pas les rennes de la logique, et poursuit sur cette voie épidermique et agitée, entre deux breaks spontanés et deux coupures pas si nettes.
La nuit, URAKKA ment, mais la journée aussi. Difficile donc de tirer le vrai du faux, et de ne pas penser à un Proto-Thrash progressif, à cheval entre le Jazz et le Classique sans déshonorer ses racines californiennes. Je n’aurais même pas été étonné de retrouver ce disque sur Ipecac, tant on sent que Patton aurait pu s’en accommoder avec beaucoup de goût.
Alors, si le Progressif le plus classique vous ennuie au plus haut point, offrez-vous quarante-cinq minutes de délire avec les américains. Vous ne regretterez ni le chaos, ni les surprises, et encore moins les étonnements et grimaces prononcées. Un poil à gratter qui met de l’ambiance, entre deux coussins péteurs placés sous les fesses de Neal Morse et Devin Townsend.
Vous connaissez la chasse au dahu ?
Titres de l’album
01. Spite Club
02. Flutes of the Void
03. Reconnoitre
04. Drain
05. Nugas ad Noctua (The Third Thing)
Avec Massacra legacy, ça commence nettement à avoir plus de gueule ! Reste à voir la suite des annonces. Mais je crois que je vais plus préférer le Westill le mois suivant au même endroit cette année, déjà Elder et Wytch Hazel de confi(...)
13/05/2025, 07:48
Mea culpa....J'avais pas vu la news en première page - j'ai été directement te répondre.
12/05/2025, 14:33
S'il est du même acabit que le The Cthulhian Pulse: Call From The Dead City sorti en 2020, Mountains of Madness risque d'être un allday listening pour moi.J'ai hâte, bordel !
12/05/2025, 13:44
J'étais passé totalement à côté de cette petite pépite de Death Suédois!Vieux moutard que jamais!Puteraeon glisse de belles ambiances lovecraftiennes sur cet album et les arrangements apportent un plus à l'ensemble.
12/05/2025, 13:42
Necro est sympa, avec de bons passages groovy et d'autres où le groupe envoie du bois.Pas sûr de l'écouter durablement, d'autant plus que le prochain Puteraeon sort le 30 avril prochain.
12/05/2025, 13:40
Sentiment mitigé pour ma part Le chant de Johan Lindqvist n'atteint pas un pouïème de ce qu(...)
12/05/2025, 13:38
Au vu de la dernière vidéo-ITW en date du gonze sur ce site, pour ce qui est de "feu sacré", il a toujours l'air de l'avoir le mec.Je pars donc confiant.
08/05/2025, 09:17
@ MobidOM :oui, pas faux pour la "captation d'héritage" ! :-/ En même temps, s'il a encore le feu sacré et propose un truc pas trop moisi... De toute façon la critique sera sans pitié si le truc ne tient pas la(...)
07/05/2025, 11:52
Ah ce fameux BRUTAL TOUR avec Loudblast / MASSACRA / No Return et Crusher en 95 ! LA PUTAIN de bonne époque
07/05/2025, 11:04
@ Oliv : Montpellier étant une ville et une agglomération plus petite que Lyon, il n'y a véritablement de la place que pour deux petites salles orientées Rock-Metal-Punk-etc, à ce qui me semble après vingt-cinq ans d'observation. Au-delà,(...)
06/05/2025, 20:29
"Death To All", à chaque fois que je les ai vu ils avaient un line-up tout à fait légitime (dont une fois tous les musiciens qui ont joué sur "Human", à part Chuck bien sûr)Et puis la phrase "Chris Palengat pr(...)
06/05/2025, 20:28
Je ne vois pas beaucoup l'intérêt, et je ne comprends pas pourquoi ils n'ont pas attendu les trente ans de l'album l'an prochain. Ces dernières semaines je me retape les premiers, et ça reste un bonheur.
06/05/2025, 19:29
Vénérant ces albums et n'ayant jamais vu la vraie incarnation de Massacra, hors de question de louper ça (si ça passe à portée de paluche, pas à Pétaouchnok). Un peu comme un "Death To All"...
06/05/2025, 17:11
Ils sont juste trop faux-cul pour assumer le statut de tribute band, voilà tout.
06/05/2025, 16:15