Le Fléau du Rocher

Darkenhöld

06/06/2025

Les Acteurs De L'ombre Productions

Que la congrégation se réunisse à l’aune de la pleine lune, les capuches baissées et le regard tourné vers le sol. Les épées brillent d’une lumière aveuglante, défiant ainsi le linceul nocturne qui enrobe la nuit dans son manteau de mort. Le silence impose son absence et les cris commencent à se faire entendre. Ceux sont ceux poussés par cette horde de fidèles qui attendent encore une fois cette narration magique qui transforme les aïeuls en héros d’aujourd’hui. Oyez, oyez, frères de campagne, DARKENHÖLD est de retour avec tout son décorum, et va une nouvelle fois nous transporter par le passé pour nier le consumérisme d’une époque gangrénée par les fausses idoles et les veaux d’or illusoires.

Cinq ans après sa dernière visite, la tribu reprend donc le chemin des croisades, bande ses arcs, et brandit son fer vers les étoiles qui pâlissent. Arcanes & Sortilèges, bien qu’ancien, est encore très présent dans les mémoires, et il convenait de lui offrir suite sans soucis, fidèle, mais prospective. On peut en effet s’ancrer dans l’ancien tout en regardant vers l’avenir. Les deux ne sont pas incompatibles, même si un certain statisme se remarque dans ce laps de temps écoulé.

Le Fléau du Rocher tient bonne place dans la discographie des niçois. En tant que sixième né d’une longue fratrie, il honore ses aînés de sa violence persistante et de ses accès mélodiques aigus. On y retrouve la patte du trio de tête (Aboth - batterie/claviers, Aldébaran - guitare/claviers/basse/chœurs et Cervantes - chant) qui s’accroche à sa tradition comme un chien à son os trouvé quelque part dans les ruines d’un vieux château. L’essence même de ce Black Metal d’obédience épique et médiévale est incrusté dans l’ADN d’un groupe qui n’a jamais dévié de sa trajectoire, mais qui n’a eu de cesse de perfectionner son approche pour en faire une référence absolue : sous cet angle, Le Fléau du Rocher est une nouvelle allégeance, une foi sans failles accordée aux racines et aux pousses les plus enfouies, un langage séculaire parlé couramment entre initiés, et plus simplement, un disque superbe, d’un port de tête altier, et d’une fierté totalement justifiée.

Mixé par Aldébaran et masterisé par Ben Lesous & B-Blast Records, ce nouveau tome dispose d’un son brut, sans artifices, cru et aride, qui convient parfaitement à l’orientation de morceaux qui sont d’une grandeur académique. La guitare y sonne assez pure, alors que la basse refuse tout effet inutile, laissant le chant aux avant-postes hurler ses histoires à grimacer debout, dans un torrent de brutalité. Si quelques arrangements permettent d’enrichir la trame de base, avec toujours en bonne place ces interventions acoustiques médiévales que l’on retrouve avec délice sur le final du dantesque « L’ascension du Mage Noir », le fond et la forme s’accordent d’une ultraviolence intelligente, qui ne se contente pas de pousser pour avancer. En contournant les obstacles de la répétition malheureuse, DARKENHÖLD fait honneur à son rang de chevalier, et poursuit sa croisade personnelle contre le Black édulcoré ou trop alambiqué.

Découpé en onze segments de durées variées, Le Fléau du Rocher fait toujours la part belle aux accents métissés, allant jusqu’à provoquer un Thrash de tradition sur le monstrueux « Dans l’antre de la Vouivre » qui explose ses percussions comme un canon transperce les défenses ennemies. Ce chaos qui glisse dans les meurtrières permet de pénétrer les rangs des adversaires et de leur faire plier genou. Imposant, impressionnant et grandiloquent, ce sixième album est de proportions gigantesques, et laisse les synthés imiter les flûtes, les cordes, pour tisser un rideau cramoisi sur une campagne désolée. Et peu importe que ces affrontements soient racontés à posteriori. On les vit comme s’ils se déroulaient sous nos yeux, et la cruauté musicale les rend tout à fait crédibles. Avec des toms au son de tambour, des breaks syncopés qui aèrent le récit, et un panache irréfutable au moment d’imbriquer les plans, DARKENHÖLD atteint une maîtrise globale le confinant à l’obsession du détail.

« Troubadour » est d’ailleurs un détail intéressant. De ses chœurs emphatiques à son riff virevoltant, il incarne le message le plus clair quant aux intentions des niçois, qui n’ont jamais caché leur aversion pour le Metal travesti et transposé. Ici, la tradition est un cheval de bataille, et celles décrites sont sanglantes, sans pitié, et tendant parfois vers le carnage.

De plus en plus à l’aise avec sa langue et son vocabulaire, le trio infernal impose des atmosphères ténébreuses et dignes d’une superproduction médiévale supervisée par Paul Verhoeven. Entre le formalisme nordique et la créativité à la française, « Le Fléau du Rocher » est un title-track d’une noblesse écrasante, accumulant les figures de style et pirouettes rythmiques comme un noble les écus dans ses coffres. Aussi agressif qu’il n’est perfectionniste, le groupe se transcende sans changer sa nature, et continue de trousser des tableaux colorés, entre le rouge sang et le noir d’ébène. On y voit des flèches transpercer des armures, des couteaux trancher des gorges, des chevaux s’écrouler sous le poids des blessures mais aussi des bardes et des trouvères souffler dans leur instrument pour mieux nourrir la légende.

« La Cavalerie Fantôme » s’autorise même un regard en arrière fascinant, la légèreté de son intro n’ayant d’équivalent que la tradition de ses harmonies suggérées en arrière-plan. Les débordements sont bien présents, les accalmies aussi, les traversées dans la forêt et l’organisation des troupes, pour mieux couvrir le maximum de terrain et ne laisser aucune chance à l’adversaire.

« Pour le Royaume » fait démonstration de cette fidélité d’une délicatesse acoustique qui vaut bien des promesses et des baisers. L’honneur, la valeur qui ne s’échange contre aucune pièce d’or en ressort une fois de plus grandi, et incarné par cette passion envers un style hybride, que peu pratiquent avec un tel brio. DARKENHÖLD a donc choisi de se hisser à la hauteur de cette sublime pochette signée Claudine Vrac, en lui offrant la bague de mariage qu’elle mérite. Tons bleutés, ciel orangé, flore automnale et épées qui se dressent, le tableau est superbe, et en phase avec le contenu musical.

Le rocher est sans doute un fléau, mais DARKENHÖLD est son libérateur.   


Titres de l’album

01. Codex de la Chevalerie

02. Le Cortège Royal

03. Temps Enfouis

04. L’ascension du Mage Noir

05. Dans l’Antre de la Vouivre

06. Troubadour

07. Le Fléau du Rocher

08. Gardienne des Dryades

09. Sortilège Ancestral

10. La Cavalerie Fantôme

11. Pour le Royaume


Facebook officiel

Bandcamp officiel

par mortne2001 le 01/06/2025 à 17:30
88 %    212

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Defeated Sanity + HM 2

RBD 09/07/2025

Live Report

Walls of Jericho + Get Real

RBD 02/07/2025

Live Report

Voyage au centre de la scène : PARADISE LOST

Jus de cadavre 15/06/2025

Vidéos

Aluk Todolo + Spirit Possession

RBD 10/06/2025

Live Report

SWR Barroselas Metalfest 2025

Mold_Putrefaction 08/06/2025

Live Report

Anthems Of-Steel VII

Simony 30/05/2025

Live Report

Clinic LI-SA X et Paul GILBERT

mortne2001 29/05/2025

Live Report

The Sisters of Mercy + Divine Shade

RBD 21/05/2025

Live Report

Great Falls + Kollapse

RBD 04/05/2025

Live Report

Chaulnes MÉTAL-FEST 2025

Simony 27/04/2025

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
LeMoustre

Le troll DPD (quel beau nom !) en tête de gondole dans la fosse. Comment c'est possible ça genre de gus ?

11/07/2025, 13:36

LeMoustre

Mdr y'en a qui ont un niveau de goûts musicaux digne de la fosse des Mariannes. JPP de lol quand je lis ça Tout est dit.

11/07/2025, 13:34

LeMoustre

@Humungus : mdr. On s'est compris.@Buckdancer : oui j'imagine que tu as raison 

11/07/2025, 13:32

MorbidOM

Un troll sur metalnews.fr c'est comme un exibitioniste dans le désert, il peut arriver à capter l'attention de quelqu'un de temps en temps mais tu sens que niveau stratégie c'est pas optimal. 

11/07/2025, 13:28

LeMoustre

Le Hellfest n'est plus qu'un fest mainstreem comme tant d'autres et n'a plus rien à voir avec ses origines.Le nombre de blaireaux au M2 y est devenu affolant au point qu'il n'y a que ça.Pour ma part, je préfère aller dans les(...)

11/07/2025, 12:42

Humungus

Je pense que là, tout est dit... ... ...

11/07/2025, 10:01

DPD

Deafheaven > Black Sabbath d'ailleurs, aucune hésitation. quelle chanson de Black Sabbath atteint le niveau d'intensité de Dream House ?

10/07/2025, 21:43

DPD

T'aimes ça hein le cuir et le metal salace, je préfère Patrick Sébastien, je le trouve moins pédé. Le petit bonhomme en mousse on s'en rappelle, ça c'est une chanson qu'on oublie pas, comme ce que te chantais ta maman..

10/07/2025, 21:36

DPD

Désoler si j'en ai rien à foutre du dernier groupe Brésiliens de war metal.

10/07/2025, 21:29

Alain Akbar

@DPD : putain, cette merde de Chat Pile, de la noise bâtarde gay friendly qui pompe Godflesh et Korn. Et dans un autre post, tu parles de Deafheaven. Mais mec, arrête de donner des leçons et va donc faire une Bun Hay Mean.

10/07/2025, 21:20

DPD

Et ce qui s'est fait de marquant question death c'était le dernier Dead Congregation et le surprenant Reign Supreme de Dying Fetus. Et qu'on me parle pas de Blood Incantation tout est impeccable, il y a beaucoup de travail derrière, mais aucune symbiose entre les part(...)

10/07/2025, 15:17

DPD

L'underground est pas une qualité en lui-même, le dernier concert que j'ai vu t'avais les groupes qui enchaînent les plans thrash-death-black sans aucune cohérence, du sous Deathspell Omega (désolé mais dans le black dissonant tu seras toujou(...)

10/07/2025, 15:09

Ivan Grozny

Oui très bon groupe, je recommande également !

10/07/2025, 14:36

Ivan Grozny

C'est à peu près le constat que nous sommes plusieurs à faire me semble-t-il, mais je mettrais tout de même Converge, The Dillinger Escape Plan ou Botch ailleurs que dans le metalcore. Mais pourquoi pas. ;-)@Jus de cadavre "Je crois qu'il faut acce(...)

10/07/2025, 14:34

DPD

Sinon j'aime beaucoup Chat Pile comme groupe récent.

10/07/2025, 14:27

DPD

@GPTQBCOVJe suis  horrifié par l'idée de finir comme ça, voir Darkthrone se réduire aux lives jouant la fameuses trilogie pour payer les affaires courantes notamment des frais de santé, la social-démocratie m'en sauvera j'imagin(...)

10/07/2025, 14:16

DPD

Non mais même le metalcore t'avais la grande époque de Converge, Dillinger Escape Plan, Botch et compagnie...certains parleraient de hardcore chaotique mais bon. T'avais pas que de la musique lisse à refrain, ce n'est pas le diable que certains veulent peindre.&(...)

10/07/2025, 13:47

Humungus

Si le Metalcore était à la mode il y a 20 ans, disons alors que (malheureusement) cela perdure car 1/4 des groupes jouant dans de gros et moyens fests ont un qualificatif se terminant par "core".

10/07/2025, 13:22

RBD

Cela m'espante toujours de voir des festivals complets (ou presque) un an à l'avance sans avoir annoncé aucune tête d'affiche.Le public est devenu très friand des gros festivals. Je pense évidemment à toute cette frange de festivalier(...)

10/07/2025, 12:23

DPD

Certains commentaires sont à côté de leur pompes, la grande mode du metalcore c'était il y a quoi ? 20 ans ? la bizarrerie c'est que pas mal de ces gens sont passés au black-metal pour une raison que j'ignore ce qui donne toute cette scene en -post(...)

10/07/2025, 12:04