Devil's Hand

Devil's Hand

07/12/2018

Frontiers Records

Notre cher ami Serafino Perugino continue donc ses expériences génétiques de croisement de boutures internationales en nous proposant en ce mois de décembre une nouvelle association de stars. Cette fois ci, le boss a réuni deux valeurs sûres de la scène Hard Rock mondiale, et a construit un pont virtuel entre l'Angleterre et les États-Unis, provoquant une collaboration inopinée entre un guitariste au CV chargé et un chanteur devenu une référence sur la scène. Évidemment, cette collaboration respecte en tous points le cahier des charges de son label en proposant un Hard-Rock mélodique hargneux mais duveteux, aux coins arrondis et à la couette cotonneuse. Pourtant, point de doutes à avoir, une fois encore, le leader italien ne s'est pas trompé et a misé sur les bons poulains, ce que ce premier album éponyme s'évertue à démontrer en un temps imparti. Alors, quels sont les héros du jour qui une fois ensemble, voient leurs superpouvoirs décuplés sous l'émulation d'une performance collective ? D'un côté, un artiste aux multiples casquettes, qui non content d'avoir fait partie d'un des groupes les plus précieux des années 80 s'est ensuite lancé dans une brillante carrière de producteur, et de l'autre, l'un des chanteurs les plus flamboyants de ce siècle, qui depuis quelques années s'est parfaitement intégré à une bande de vieux briscards bien décidés à faire perdurer l'esprit de leur ancien mentor. Mike Slamer d'abord, qu'on retrouvait dans les rangs de STREETS, l'un des groupes les plus honteusement sous-estimés des eighties, dans lequel officiait aussi le célèbre Steve Walsh de KANSAS, et qui a produit deux albums de grande qualité il y a une trentaine d'années. Le parcours du guitariste anglais compte aussi quelques autres traces illustres (Steelhouse Lane, Seventh Key, Slamer, et Terry Brock), ainsi qu'une entame sous la bannière des CITY BOY dans les seventies, ce qui fait évidemment de lui l'homme de la situation, puisqu'en guise de sidekick, Frontiers lui a accolé la présence vocale d'Andrew Freeman, gorge des LAST IN LINE, faux tribute band des pistoleros Vivian Campbell (Def Leppard, Whitesnake), Vinny Appice (Black Sabbath) et Jimmy Bain (Rainbow), ce qui au final nous donne une équation pas si simple à résoudre.

Car une fois encore, malgré la collaboration entre deux poids-lourds (ou presque) de la scène, le résultat est tout sauf garanti. On connaît les travers d'accolage de musiciens au passé chargé, et leur travail prend parfois des airs d'autosatisfaction en musique, et non de réel travail de fond pour satisfaire l'addiction de leurs fans. Sauf que depuis quelques années, Frontiers semble être très attentif aux produits qui sortent de son usine, et ce projet DEVIL'S HAND a bénéficié d'un contrôle pointilleux, puisqu'il se présente sous la forme d'un LP finement ciselé, à l'énergie endiablée, et aux mélodies prononcées, soit la quintessence du Hard Rock mélodique que ses deux acteurs impliqués affectionnent tant. Et l'exubérance de cette musique associée à sa perfection immaculée nous offre un LP de très haute volée, de ceux qui s'imposaient il y a une trentaine d'années, à l'instar de ceux de WINGER auxquels Devil's Hand semble parfois emprunter une partie de son vocable. Mais impossible à l'écoute des onze morceaux de cet album de ne pas reconnaître la patte professionnelle de Mike Slamer, qui livre une fois encore une prestation au-dessus de tout soupçon, en tant que musicien évidemment, mais aussi dans le costume de compositeur qui lui colle si bien à la peau. Le tout n'est pas forcément diabolique comme le nom du groupe semble le laisser penser, mais diablement efficace par contre, et synthétique de tout ce que le courant Hard harmonique a pu proposer lors de ces quatre décades bien tassées. Et si l'on trouve trace, même en quantité infime, du passé des deux intervenants (et parfois même le souvenir du Rock explosif si cher au cœur d'Andrew Freeman, au sein des THIRTY STONES, de HURRICANE et même d'OFFSPRING, le côté Punk mis de côté évidemment), l'association des deux instrumentistes donne lieu non à un passage en revue de leur back-catalogue, mais bien à une œuvre nouvelle, certes assez formelle dans les faits, mais d’une fraîcheur indéniable et d'une envie appréciable, ce qui permet d'écouter des compositions agréables et souvent énergiques qui méritent toute l'attention des fans d'un Rock certes classique, mais si bien joué qu'on en pardonne quelques facilités.

D'ailleurs, Andrew Freeman loin d'être dupe affirme avec beaucoup d'honnêteté que l'album a été enregistré avec le plus grand dénominateur commun en tête. Le chanteur déclare sans ambages :

« Mon approche du chant a été la même que celle que j'ai utilisée sur tous les albums que j'ai enregistrés. J'essaie insuffler la même passion et la même conviction dans tout ce que j'écris. Certes, les morceaux co-écrits avec Mike sont peut-être un peu plus commerciaux, mais ils ont la même intensité et le même esprit anthémique que l'album de LAST IN LINE. Beaucoup de refrains à reprendre en chœur et de guitares hurlantes! Et je pense que le morceau "Devil's Hand" résume assez bien l'ensemble. Il a les mêmes éléments que les meilleures chansons de Rock que j'ai pu entendre! »

Certitudes, fanfaronnade ou réalisme musical ? La première et dernière option sont les bonnes, et il est indéniable que les deux hommes (supportés dans leur tâche par Chet Wynd à la batterie) se sont méchamment fait plaisir en enregistrant un lot de morceaux Classic-Rock qui tiennent admirablement bien la route, et qui semblent passer en revue toutes les digressions agressives et mélodiques possibles. On balance donc sans vergogne mais avec cohérence du Heavy léger au Hard-Rock incendié, laissant filtrer quelques allusions à la scène Rock des années 70, le tout mis en scène comme un produit contemporain qui ne renie en rien son passé. Si l'ouverture aux claviers proéminents de « We Come Alive » sonne comme l'introduction parfaite d'une production estampillée Frontiers avec ses couplets rageurs allégés d'une patine synthétique, « Falling In » nous replonge dans l'heure de gloire de la seconde vague de Hard-Rock US menée par un WINGER à l'appétit décuplé (d'ailleurs le chant d'Andrew prend des accents du beau Kip sur les pré-chorus), et impose un refrain que le BON JOVI le plus populaire aurait pu larguer sur les charts. Mais loin de se contenter de séduire les masses nostalgiques d'un certain esprit en vogue dans une décade hédoniste, DEVIL'S HAND  se frotte aussi au Hard Rock le plus affirmé, et laisse les guitares rugir sur des interventions musclées de la trempe de « Devil's Hand » qui fond la hargne et l'harmonie dans un équilibre des forces assez admirable. Nous avons donc droit à un melting-pot d'une qualité indiscutable, et les onze titres de cette première livraison sont autant de déclarations d'amour au genre. Touches bluesy et boogie, rythmique appuyée pour burner dévoyé (« Another Way To Fly »), tempo trépidant pour tube intemporel saignant (« Drive Away »), émotion brute pour fausse balade qui atteint son but (« One More Time »), douceur progressive qui nous ramène aux plus grandes heures du Billboard (« Heartbeat Away »), et volutes de sensibilité pour cassure romantique authentique (« Justified »), et un bilan sans tâche qui fait honneur au pedigree de deux musiciens qui n'ont jamais fonctionné autrement qu'en laissant leur passion s'exprimer. 

Et si certains regretteront l'absence de prise de risque, et un caractère Classic-Rock très prononcé, les esthètes du Hard-Rock le plus honnête et mélodique sauront reconnaître les leurs et célébrer un concept qui a parfaitement sa place dans une époque vouée à la nostalgie d'une musique pure et sans artifices. Et Devil's Hand d'apparaître sous son vrai jour, inondé d'une lumière de sincérité et de s'imposer comme la célébration parfaitement méritée du talent indéniable de deux musiciens aussi intègres qu'impliqués.    

    

Titres de l'album :

                         1.We Come Alive

                         2.Falling In

                         3.One More Time

                         4.Another Way To Fly

                         5.Drive Away

                         6.Justified

                         7.Rise Above It All

                         8.Devils Hand

                         9.Unified

                         10.Heartbeat Away

                         11.Push Comes To Shove


par mortne2001 le 02/01/2019 à 16:24
88 %    1111
Derniers articles

Walls of Jericho + Get Real

RBD 02/07/2025

Live Report

Voyage au centre de la scène : PARADISE LOST

Jus de cadavre 15/06/2025

Vidéos

Aluk Todolo + Spirit Possession

RBD 10/06/2025

Live Report

SWR Barroselas Metalfest 2025

Mold_Putrefaction 08/06/2025

Live Report

Anthems Of-Steel VII

Simony 30/05/2025

Live Report

Clinic LI-SA X et Paul GILBERT

mortne2001 29/05/2025

Live Report

The Sisters of Mercy + Divine Shade

RBD 21/05/2025

Live Report

Great Falls + Kollapse

RBD 04/05/2025

Live Report

Chaulnes MÉTAL-FEST 2025

Simony 27/04/2025

Live Report

Star Rider/Blaze Bayley

mortne2001 24/04/2025

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
DPD

Je comprends juste pas cette envie adolescente permanente de revoir ses groupes de jeunesse. Je veux dire je suis de la génération qui est passé par Korn Slipknot et compagnie mais je suis passé à autre chose.

08/07/2025, 19:55

Salmigondis

Lors du dernier concert de Motorhead auquel j'ai assisté, Lemmy était... pathétique (mais pas loin). Et pourtant il était planté sur ses quilles. Alors jouer assis avec Parkinson en bandoulière ? Business is business, la machine à biftons DEVA(...)

08/07/2025, 19:23

DPD

@HumungusJe fais une exception pour Motörhead (que je n'apprécie pas plus que ça) parce que Lemmy était sous un haut dosage de drogue/alcool pour tenir le coup et pas s'écrouler sur une chaise.

08/07/2025, 17:31

DPD

Je vois pas ce qui est légendaire à un trubo grand-père qui tiens péniblement sur une chaise. Je dois manquer quelque chose. Pour ma part c'est autant ridicule que les concerts avec des stars mortes en hologrammes. Faut vraiment être con.

08/07/2025, 17:18

DPD

C'est profondément pathétique.

08/07/2025, 17:12

FDP

@LeMoustre : espèce d'abruti... le but du concert, outre le fait que c'était un évènement caritatif, c'était qu'Ozzy puisse faire des adieux en bonne et due forme à la scène, chose qu'il n'avait pas pu réaliser (...)

08/07/2025, 06:08

Buck Dancer

J'ai pas encore tout regarder mais y a t'il un groupe qui a joué le morceau Black Sabbath ?LeMoustre, pour ce concert je pense que l'émotion et la communion entre groupes et public était plus importante que le reste. A voir les vidéos j(...)

07/07/2025, 22:26

War

La dernière du Madman ! Déjà vu en live debout et il chantait moins bien que la ! 

07/07/2025, 18:34

Humungus

@LeMoustre :Effectivement... Point de vue totalement respectable que celui de ne pas vouloir payer un prix de dingue pour mirer un show proche du pathétique.Mais perso, face à des légendes comme celles-ci, je mets mon impartialité de côté et (...)

07/07/2025, 17:42

LeMoustre

Bravo pour ton travail ! 

07/07/2025, 14:48

LeMoustre

Ozzy sur sa chaise hé ben.Bon l'âge nous aura tous mais bon quand même c'est pas cool de voir ça.Moi ça m'aurait emmerdé.Autant un Anthrax, un Maiden ont toujours la peche après tant d'années (quitte &a(...)

07/07/2025, 13:18

labbe

j'ai eu l'occasion de les voir en première partie de Seum mi Juin. vraiment bien prenant ! 

07/07/2025, 12:48

Humungus

Je m'attendais vraiment pas à ce qu'Ozzy tiennent 30 min sur chacun de ses shows...Bon, on peut pas dire que c'était "beau" à voir mais si j'avais eu la chance de gauler une place, j'aurai tout de même été bien con(...)

07/07/2025, 07:36

Benstard

Putain je suis fan de Slayer mais c'était bien dégueulasse. Ça devient une parodie. Et oui merci pour tout Ozzy et tommy. 

06/07/2025, 21:25

Oliv

C’est toujours parodique ou c’est mieux 

06/07/2025, 19:11

Oliv

Merci Ozzy pour tous 

06/07/2025, 19:10

DPD

Oui c'est bien beau mais étaient ces gars durant l'ère Obama ou il a absolument tout trahis ? Trump on connait son histoire personnelle et ses financements. c'est sans surprise..

06/07/2025, 14:20

metalrunner

Les chutes de Symbolic

05/07/2025, 08:26

DPD

Pardon pour les fautes, mais quitte à écouter ce genre de trucs, Anna von Hausswolff le faisait beaucoup mieux il y a 10 ans. C'est ce qu'on appelle l'avant-garde je suppose.

05/07/2025, 06:51

DPD

Le problème de de Kayo Dot c'est qu'il dépend de l'envie du moment de Toby Driver et de qui l'entoure, tu peux avoir un album de drone/post-rock suivit d'un album de death metal, il n'y a pas de groupe et aucune identité. C'est dommage parce(...)

05/07/2025, 06:47