Monsters

L'homme Absurde

25/10/2016

Fono Ltd

Quel nom étrange pour une formation de Post BM Russe…Venant de Moscou, L'HOMME ABSURDE (pléonasme, quand tu nous tiens…) a été fondé en 2015 en tant que one-man band, par le mystérieux A. batteur de la plupart des formations locales de Doom (MARE INFINITUM, WHO DIES IN SIBERIAN SLUSH, COMATOSE VIGIL), mais aussi maître d’œuvre du combo de Doom/Downtempo A YOUNG MAN’S FUNERAL.

Rejoint quelques temps plus tard par trois autres membres (Georgiy Bykov de MARE INFINITUM à la guitare, Isod à la guitare aussi et Yuri S. à la basse), pour compléter son line-up, A. s’est alors fendu d’un premier EP éponyme, paru l’année dernière lui aussi.

Quelques mois plus tard, les musiciens s’attèlent donc à ma réalisation d’un premier longue durée que j’ai donc eu la chance d’écouter ce matin, Monsters, qui s’avère représenter une synthèse toute personnelle de tous les courants inhérents au Post Black contemporain, en gardant comme trame de fond l’abrasivité du Black le plus impitoyable, pour l’orner de digressions plus contemplatives et introspectives. Mais pas d’inquiétude à avoir, malgré une longueur de morceaux somme toute assez large, le concept du groupe n’a pas occulté la violence indispensable à ce genre de réalisation, et reste un des espoirs les plus probants d’une scène qui a souvent tendance à tourner en rond autour de la queue fourchue de Lucifer.

En substance, Monsters s’accorde du patronyme de ses géniteurs, pour nous présenter une nature humaine concrète et objective. Oui, l’homme est une créature absurde vouée à l’extinction de sa propre race, un monstre à plusieurs facettes qui n’a cure de l’espoir mais conçoit l’empathie, et qui fait preuve d’un égoïsme forcené pour satisfaire ses plus bas instincts, tout en sachant de temps à autres se soucier de ses congénères.

Ce que la musique de ce quatuor Russe illustre avec pertinence et logique déviante.

En choisissant de se focaliser sur les aspects les plus nihilistes et glacials d’un BM vraiment terrifiant, L'HOMME ABSURDE a fait le bon choix, celui de s’inspirer des racines nordiques du genre pour y insuffler un esprit de l’est fatalement sombre et pessimiste. Mais sans se départir d’une volonté mélodique manifeste (encore plus sur des segments comme le superbe « Apathy »), le quatuor n’est pas tombé dans le piège de la redondance hypnotique à outrance, et propose de véritables morceaux agencés comme tels, proposant des digressions et progressions logiques et intelligentes, et pour le moins envoutantes.

Nous sommes donc loin d’un simple assemblage de sons qu’on laisse dériver selon son manque d’inspiration, mais bien proches d’un concept viable et efficace, qui oppose la laideur la plus repoussante à la beauté la plus saisissante, dans la plus grande tradition d’un Post Black Metal intelligent et mature, mais néanmoins profondément misanthrope.

A l’écoute de ce Monsters, plusieurs références s’imposent, comme celle de BOSSE DE NAGE, ou même de WOLVES IN THE THRONE ROOM, mais pour être franc, ces noms sont plus cités pour poser un contexte que pour établir un parallèle vraiment probant.

En effet, la musique des Russes est suffisamment personnelle pour se situer par rapport à elle-même, même si parfois, une union frigorifiante entre un BURZUM des premières années et un OPETH malmené par sa propre poésie semble être l’image la plus frappante.

Dire que L'HOMME ABSURDE n’a pas choisi la facilité est d’un doux euphémisme. Une seule piste sous la barre des quatre minutes, pour le final « Wires », qui en effet tend des câbles entre l’outrance d’un EMPEROR et le désir d’harmonie d’un SOLSTAFIR, avant de cavaler sur les traces d’un pur BM ultraviolent et fort peu apprivoisable.

A l’exact opposé de cet exemple se situe le très long « Wanderer », qui pendant près de huit minutes s’ingénie à développer de belles qualités acoustiques pures sur une longue intro de cent-vingt secondes, avant de retomber dans des travers abrasifs terrassants.

Double grosse caisse omniprésente et écrasante, blasts qui simulent une tempête de l’âme, et chant sous mixé en arrière-plan qui hurle ses litanies d’une voix possédée, pour mieux casser le moule sans prévenir et osciller entre BM vraiment ténébreux et Post Metal beaucoup plus lumineux, et pas si éloigné que ça d’un ALCEST vraiment très minimaliste.

« Disillusion » se taille aussi la part du démon, avec son timing presque aussi étiré, et son inspiration qui ne l’est pas moins.

Travail rythmique fabuleux et puissant, riffs toujours aussi rigides et dénués de tout souffle de vie, et multiplicité des plans qui se succèdent avec fluidité et logique, pour une danse enivrante autour du destin humain qui n’en finit plus d’attendre que quelqu’un allume la flamme sous son bûcher de vanité.

Passages en mid accrocheurs et séduisants, presque Post Wave dans le rendu, harmonies de guitares discrètes mais efficaces qui rappellent les errances d’un THE GATHERING, pour un Post BM progressif efficient et non suffisant.

Tout fonctionne, chaque idée est à sa place, et les notes s’envolent sans que l’on puisse les attraper, se voulant calquées sur la nature de l’homme, tantôt acides, tantôt acoustiques et douces, mais toujours expressives.

Si le BM le plus assourdissant vous sied le mieux, jetez-vous sur le tétanisant « Villains », qui semble vouloir incarner à lui seul les caractéristiques les plus néfastes de notre espèce, mais si l’ouverture d’esprit et la versatilité sont plus en phase avec vos inclinaisons, alors « Escapist » saura vous donner le ton, en mélangeant des influences Doom, Post Metal, Black et Heavy, dans une farandole apaisée qui vous permettra de vous voir tel que vous êtes, complexe, mais semblable à tous vos contemporains, comme un miroir fidèle à une image trouble, mais inamovible.

Pour un premier album, Monsters fait avancer la cause d’un Post Black qu’on devine toujours aussi affranchi de toute contrainte. Se montrant aussi créatif qu’audacieux, aussi violent que délicat, ce premier effort de L'HOMME ABSURDE est aussi libre qu’il n’est logique, et reste dans un créneau défini tout en s’en extirpant de ses désirs de multitude. 

 Une autre façon de concevoir l’absurdité d’une nature humaine qui se veut sommet de la chaîne naturelle, d’une intelligence indéniable, mais d’une stupidité incroyable.


Titres de l'album:

  1. Sold
  2. Villains
  3. Apathy
  4. Disillusion
  5. Wanderer
  6. Strayed
  7. Escapist
  8. Wires

Bandcamp officiel


par mortne2001 le 20/02/2017 à 15:25
78 %    1114

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Ratos de Porão + All Borders Kill

RBD 22/07/2024

Live Report

HELLFEST 2024 / Clisson

Jus de cadavre 15/07/2024

Live Report

Escuela Grind + BMB

RBD 08/07/2024

Live Report

The Mandrake Project Live 2024

Simony 05/07/2024

Live Report

Hatebreed + Crowbar

RBD 18/06/2024

Live Report

Nostromo + Nwar

RBD 03/06/2024

Live Report

Dvne + My Diligence

RBD 29/05/2024

Live Report

Anthems Of Steel VI

Simony 24/05/2024

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Totoro

Voilà, Chair de poule pour moi ! Et énormément de fierté ressentie pour le groupe, pour le Metal français, et la scène Metal dans son ensemble. J'ai adoré ! Et la scénographie était top ! Puis c'était du Gojira pur ju(...)

27/07/2024, 01:13

RBD

Pas tout regardé, pas tout aimé mais... ce truc-là était historique.

26/07/2024, 23:12

Jus de cadavre

C'était fou, point barre.

26/07/2024, 23:01

Wildben

Il y aura toujours des pisse-froid pour critiquer mais putain, quelle carrière !

26/07/2024, 20:01

Saul D

Et Lars jouera dans un film d'art et essai de Glen Danzig? Just joking...

26/07/2024, 14:21

Capsf1team

A retrouver en live au Puy du Fou

26/07/2024, 10:24

Humungus

La drogue c'est mal, m'voyez... ... ...

23/07/2024, 07:58

Humungus

J'ai rien contre Agell, mais passer après Wagner, c'est une putain de gageure...A voir (ou plutôt à entendre) ce que cela vaut avec Reagers... ... ...

23/07/2024, 07:43

RBD

L'intermède du projet parallèle Corrupter annonçait assez bien cette suite pour le principal. C'est une forme de retour aux sources du Death le plus obscur, mais par un chemin un peu différent que les premières publications du groupe Cévenol au (...)

22/07/2024, 19:23

totoro

ce serait sympa un nouvel album de Tiamat !Tiens d'ailleurs, quelqu'un aurait-il un retour à faire de leur concert au Hellfest ?Merci d'avance !

21/07/2024, 13:53

Gargan

La signature chez Prophecy laissait supposer un changement de style, on n’est plus en effet sûr du black up tempo. Pas sûr qu’ils aient dû garder le même nom.

20/07/2024, 14:45

Ivan Grozny

Ah mince alors :(

20/07/2024, 11:20

petite catin

En même temps, fallait pas espérer qu'ils reprennent 666 millions d'esclaves et de déchets de Peste Noire.

19/07/2024, 15:49

grinder92

la vidéo du bidule : https://www.youtube.com/watch?v=t0K2EVnkhC0

19/07/2024, 08:12

Jus de cadavre

On me dit dans l'oreillette que la femme de Rob (qui est française) est fan d'Indochine et qu'elle ne serait pas étrangère à cette décision de reprise... L'amour rend aveugle, mais sourd aussi apparemment.

18/07/2024, 14:59

Humungus

Monument.

18/07/2024, 13:39

Humungus

"Kirk et Rob reprennent "L'Aventurier" d'Indochine"... ... ...Le groupe qui aime à se tirer une balle dans le pied quoi !Après l'ignominie de la reprise de Johnny il y a quelques années...A la prochaine date franç(...)

18/07/2024, 09:35

Alain MASSARD

juste excellent!!!!

17/07/2024, 16:30

Tourista

''Shoot the babies in the nest, that's the real hunting''

17/07/2024, 08:37

Ivan Grozny

Pour ma part :Jeudi : Ashinhell / Immolation / Brujeria / Megadeth (aïe aïe) / Shining (le groupe norvégien) / Sodom / Cradle of FilthVendredi : Fear Factory / Savage Lands / Kanonenfieber / Satyricon / Emperor / Machine Head (la fin vite fait pour boire un coup) / (...)

17/07/2024, 01:16