Beaucoup d’artistes se sont plu à mettre l’apocalypse en musique, lorsqu’ils n’ont pas consacré leur musique elle-même à une certaine forme d’apocalypse artistique. Si pour beaucoup, un solo vocal de Yoko Ono incarne avec beaucoup de pertinence l’illustration parfaite de la fin du monde, les expérimentations de John CAGE, les errances de THROBBING GRISTLE, les turpitudes d’ABRUPTUM, les horreurs appréciatives des HALF JAPANESE, les atrocités de LOW, les hululements christiques de Diamanda GALAS sont aussi de parfaites incarnations des derniers instants de l’humanité, ce qui laisse un choix assez vaste pour élaborer la playlist de nos dernières minutes. De son côté, le BM s’est toujours satisfait d’incarner en personne le mal absolu, et donc le pendant disharmonique de l’arrivée de l’Antéchrist sur terre, malgré une évidente confusion entre mal pur et grotesque achevé. On ne compte plus les œuvres lo-fi hérétiques qui en tamisant leur production sous une épaisse couche de graviers se pensaient bêtement métaphores ultimes, et autant dire que le style n’a que très peu inquiété, et plutôt fait sourire, spécialement lorsque ses intentions et ambitions étaient largement au-dessus de ses moyens. Il est vrai que pour l’auditeur lambda, le genre peut se prévaloir de choix d’un goût douteux, mais pour les spécialistes de la cause déviante, il y a peu de chances que des musiciens fardés de corpsepaint étalé à la brosse à maroufler puissent passer pour des dévots de Satan en reconquête du monde, et pourtant, en fouillant bien et en restant attentif, certains de ses représentants pourraient se voir ouvrir une voie diplomatique au travers de l’issue finale nous amenant au bord du gouffre. Et pour étayer cette théorie somme toute assez culotée, je dispose d’arguments irréfutables en la présence du premier LP du projet cosmopolite DEVIL WORSHIPPER, qui cache de son intitulé générique un créatif au cerveau fertile et à l’imagination féconde. Et aux aspirations réellement néfastes.
DEVIL WORSHIPPER, sous des atours internationaux, cache en fait le nouveau concept du musicien américain Reuben Christopher Jordan aka Matron Thorn, soit le frère caché de Damien Thorn, l’Antéchrist de de la trilogie des années 70. Et rien qu’un coup d’œil au parcours de l’homme en dit long sur son implication dans la scène extrême actuelle, puisqu’il fait ou a fait partie de groupes comme ANDACHT, BENIGHTED IN SODOM, CROWHURST, DEATH FETISHIST, KADOTUKSEN PORTTI, MATRON THORN, PRÆTERNATURA, ÆVANGELIST, MIDWINTER STORM, BLIGHT, CARRIE WHITE BURNS IN HELL, CARRION BLUES, CATHAARIA, DISENCHANTRA, PALINDROME, VAGRANT STARSCAPE, BETHLEHEM, CHAOS MOON ou LEVIATHAN, ce qui lui permet de présenter à ses potentiels employeurs un CV plus que fourni. Décidément peu à l’aise dans l’oisiveté, l’américain très occupé à donc monté un nouveau projet en 2018, pour exprimer ses vues sur l’incendiaire comeback de l’ange déchu, prêt à affronter une dernière fois la colère divine. Pour ce faire, il s’est occupé de toute l’instrumentation (guitares lead et rythmique, basse, batterie, arrangements, synthés), et a confié les postes de vocalistes à un tandem européen constitué des deux portugais Frater A.A. (alias Marcos Martins, guitariste des VAEE SOLIS) et Erethe Arashiel (alias Sofia Magalhães Loureiro, chanteuse des HICKS KINISON, de LODGE et VAEE SOLIS aussi), combinant leurs voix pour offrir à ce premier album une texture plus riche et une théâtralité accrue, ce qui permet aux compositions de sonner comme autant d’actes d’un opéra tragique, nous racontant avec force détails l’effondrement de l’humanité, et la mort de tous les croyants dans un feu de colère diabolique. Et si cette illustration est d’une difficulté ténue à mettre en scène sur le papier, elle l’est encore plus sur partition, à moins d’admettre que la démesure totale dont elle a besoin se doit d’être respectée et amplifiée, au risque de sombrer dans la parodie susceptible de faire rire ou bailler les plus fidèles serviteurs du Malin et de Dieu. Sauf qu’à l’écoute du résultat, personne ne baillera, personne ne se plaindra, et tout le monde reconnaîtra que Matron Thorn a méchamment bien réussi son coup en signant l’un des albums de BM avant-gardistes les plus bruyants et chaotique de la création. Ce qui, juste avant les fêtes de fin d’année est d’un génie qui le confine à l’ironie la plus totale.
Premier indice sur la qualité intrinsèque du produit en question, le fait qu’il soit signé sur la très respectable maison italienne I, Voidhanger. Le label n’ayant pas pour habitude de finir ses fins de mois avec des groupes de troisième zone, on peut lui faire confiance lorsqu’il cautionne un tel concept sans sourciller. Et c’est donc avec satisfaction que l’on constate à l’écoute de Music For The Endtimes qu’il ne s’est pas trompé en défendant de son contrat paraphé ce premier album aussi ésotérique qu’un discours de Sylvain Durif dans un ancien temple abandonné, puisque les dix pistes de ce LP aussi aventureux que sombre et impénétrable sont autant de déclarations d’amour à une apocalypse qui apparaît plus que séduisante entre les mains de ce trio américano-lusophone. En se fixant sur une trame de Black moderne ne crachant pas sur quelques influences plus anciennes, DEVIL WORSHIPPER s’autorise toutes les déviances possibles, en lâchant la bride à un duo de chanteurs incarnant avec conviction leurs personnages, et en laissant les arrangements diaboliques occuper l’espace pour en vicier la moindre portion d’air pur. Ici, c’est l’oppression qui règne, et surtout, le mélange des genres, puisque l’auteur n’a pas hésité à solidifier son BM d’ossatures Indus, de Dark Ambient, mais aussi de Drone, pour tisser des textures sonores très épaisses, aux orchestrations ambitieuses et au rendu parfaitement claustrophobique. On a sincèrement du mal à reprendre son souffle en tendant les oreilles sur ce magma sonore qui ne tolère aucun silence ni aucune respiration, et qui remplit chaque interstice d’un lot d’idées complet, sans jamais paraître excessif, puisque l’excès est justement la thématique derrière le concept qui valide toute théorie du « jamais assez ». Alors, évidemment, le tout paraîtra très chargé aux esthètes et ascètes, et les fans les plus puristes se demanderont sans doute si tout ceci peut encore être affilié à leur musique préférée, puisque la création a fait fi de toute notion d’appartenance pour prêcher au nom de sa propre église de blasphème. Mais peu importent les appellations pourvu que la musique soit bonne, et malgré une tendance à la redondance, et quelques répétitions un peu nauséeuses, puisque la bande-son proposée est vraiment digne d’un opéra transformé en happening bruitiste, un peu comme si un Verdi dévoyé revenait d’entre les morts pour voir sa réémergence mise en scène par Dario Argento et Pier Paolo Pasolini.
Mais concrètement, à quoi ressemble donc le tableau qui se déroulera sous vos ouïes au moment où vous glisserez cette œuvre dans votre lecteur ? A un amas de riffs tous plus inextricables les uns que les autres, parfois secs et nerveux, parfois emprunts d’une certaine sensibilité Black n’Roll, à des enchevêtrements de lignes vocales sourdes (masculin) et lyriques (féminin), à des tapis de rythmiques synthétiques martiales, pour un mélange contre nature entre MERCYFUL FATE, DEATHSPELL OMEGA, DEATH SS, Paul CHAIN, Diamanda GALAS, situé en convergence du BM, de l’agit-prop à tendance chaotique, de l’Industriel sombre à la IN SLAUGHTER NATIVES/LUSTMORD, le tout joué dans un vieux théâtre abandonné qui fut autrefois le témoin d’un massacre horrible sous les yeux d’un public médusé. Un genre de « Lac du Cygne » pour membres de l’Ordre du Temple Solaire ayant troqué leurs dogmes contre des lance-flammes en état de marche. Et vous en dire plus reviendrait à trahir le secret de ce crescendo de violence qui vous emportera au-delà de votre condition de pauvre humain attendant son dernier jugement, ce que je me refuse évidemment à faire. Et pour finir de boucler la boucle, pensez à faire vos ablutions avant d’écouter Music For The Endtimes. C’est un conseil que l’intro ne vous donne pas à la légère.
Titres de l’album :
1. Ablutions
2. Spiritual Immanifest
3. Degenerate
4. Fornicating Angel
5. Harlot Flesh
6. Melancholy Loves The Dark
7. Heroin
8. Throat Of The False Prophet
9. Parish Apothecary
10. Requiem Ex Abyssus
Très bon album avec 3/4 titres vraiment excellent et un bon niveau global.Quelques Slayeries comme sur Trigger Discipline mais rien de méchant. D'autant que le titre Gun Without Groom est vraiment terrible, en effet. Un très bon cru
08/07/2025, 23:59
Pour moi je vois c'est l'équivalent que de voir 2pac en hologramme (qui était homosexuel), peut-être même pire parce que l'illusion tiens mieux le coup, je reste sur cette position.
08/07/2025, 22:44
Les bénéfices du concert était entièrement reversés à une œuvre caritative. Aucun des groupes présents n'a palpé pour leur concert (en même temps c'était 20 minutes de live par groupe...). Après ça (...)
08/07/2025, 22:42
@SalmigondisJe sais pas si tu veux quelque chose qui fait plus l'unanimité j'ai vu Morbid Angel au bout et c'était de la merde, une prestation robotique au possible, j'ai pris plus de plaisirs sur des trucs plus locaux à la con. Il faut savoir tourn(...)
08/07/2025, 22:28
Mais quelle bande de clodos...tout le monde se branle du batteur sans déconner. Se faire du fric de cette manière c'est franchement pathétique. Massacra est mort et enterré...qu'il le reste pour conserver son statut CULTE. Honte &agrav(...)
08/07/2025, 21:54
Avant d'aller me faire voir ailleurs, je partagerai avec vous cet hommage Fernandelien :"Aux adieux de Black Sabbath, il tremblait pas mal d'la patte.Fais l'Ozzy, assis."
08/07/2025, 21:31
Ben tu m'étonnes, DPD, d'être passé à autre chose. En même temps, quand on a eu ces groupes là comme entités fétiches, on ne peut qu'aller de l'avant. C'est comme partir de zéro (je plaisante
08/07/2025, 21:26
Je comprends juste pas cette envie adolescente permanente de revoir ses groupes de jeunesse. Je veux dire je suis de la génération qui est passé par Korn Slipknot et compagnie mais je suis passé à autre chose.
08/07/2025, 19:55
Lors du dernier concert de Motorhead auquel j'ai assisté, Lemmy était... pathétique (mais pas loin). Et pourtant il était planté sur ses quilles. Alors jouer assis avec Parkinson en bandoulière ? Business is business, la machine à biftons DEVA(...)
08/07/2025, 19:23
@HumungusJe fais une exception pour Motörhead (que je n'apprécie pas plus que ça) parce que Lemmy était sous un haut dosage de drogue/alcool pour tenir le coup et pas s'écrouler sur une chaise.
08/07/2025, 17:31
Je vois pas ce qui est légendaire à un trubo grand-père qui tiens péniblement sur une chaise. Je dois manquer quelque chose. Pour ma part c'est autant ridicule que les concerts avec des stars mortes en hologrammes. Faut vraiment être con.
08/07/2025, 17:18
@LeMoustre : espèce d'abruti... le but du concert, outre le fait que c'était un évènement caritatif, c'était qu'Ozzy puisse faire des adieux en bonne et due forme à la scène, chose qu'il n'avait pas pu réaliser (...)
08/07/2025, 06:08
J'ai pas encore tout regarder mais y a t'il un groupe qui a joué le morceau Black Sabbath ?LeMoustre, pour ce concert je pense que l'émotion et la communion entre groupes et public était plus importante que le reste. A voir les vidéos j(...)
07/07/2025, 22:26
La dernière du Madman ! Déjà vu en live debout et il chantait moins bien que la !
07/07/2025, 18:34
@LeMoustre :Effectivement... Point de vue totalement respectable que celui de ne pas vouloir payer un prix de dingue pour mirer un show proche du pathétique.Mais perso, face à des légendes comme celles-ci, je mets mon impartialité de côté et (...)
07/07/2025, 17:42
Ozzy sur sa chaise hé ben.Bon l'âge nous aura tous mais bon quand même c'est pas cool de voir ça.Moi ça m'aurait emmerdé.Autant un Anthrax, un Maiden ont toujours la peche après tant d'années (quitte &a(...)
07/07/2025, 13:18
j'ai eu l'occasion de les voir en première partie de Seum mi Juin. vraiment bien prenant !
07/07/2025, 12:48
Je m'attendais vraiment pas à ce qu'Ozzy tiennent 30 min sur chacun de ses shows...Bon, on peut pas dire que c'était "beau" à voir mais si j'avais eu la chance de gauler une place, j'aurai tout de même été bien con(...)
07/07/2025, 07:36