Old-School, vintage, nostalgique, quel que soit le nom donné à cette vague, il faut bien reconnaître qu’elle est devenue un style à part entière. Ce qui nous pousse à une mise en abime particulièrement intéressante conceptuellement, un peu comme si nous assistions en focalisation zéro à la fascination de groupes qui jouent la même musique que celle inventée par ceux qui les ont dépucelés lorsqu’ils étaient adolescents. Alors, évidemment, tout un chacun pourra se plaindre de l’absence d’innovation et du marasme créatif créé par les combos faisant partie de cette mouvance, mais autant admettre un plaisir pas si coupable que ça lorsqu’il l’est et reconnaître qu’en écoutant des combos de la trempe de KRYPTOS, l’effet « retour en arrière » agit à plein régime, et nous permet de ressentir à nouveau ces émotions qui ont fait de nous ce que nous sommes, à savoir des Metalheads assumés, et fiers de l’être. Mais il faut aussi accepter l’idée que ces originaires de Bangalore font assurément partie du haut du panier, eux qui ont commencé leur carrière il y a plus de vingt ans, et qui nous ont déjà régalés de quatre longue-durée, de qualité égale. Depuis 2004 et la parution de Spiral Ascent, KRYPTOS a connu une progression constante, atteignant son apogée (du moins c’est ce que tout le monde croyait) en 2016 et la sortie du référentiel Burn Up the Night, qui se voit aujourd’hui remplacé par un successeur nous obligeant à revoir notre jugement passé. On sentait les indiens capables de se recentrer sur l’essentiel, et cette capacité à synthétiser les riffs les plus catchy des années 80 trouve aujourd’hui son acmé avec la révélation de ce cinquième album, Afterburner, au titre en forme de clin d’œil, mais qui ne doit pas grand-chose à la référence ZZ TOP. Non, les influences des indiens sont toujours à chercher du côté du Heavy Metal le plus pur et dur, subtilement mâtiné de Thrash et de Speed, un peu comme un point de convergence entre toutes les scènes allemandes des eighties (KREATOR, ACCEPT, GRAVESTONE, DESTRUCTION), et la mouvance américaine plus fluide de la même époque.
Se cachant sous une pochette aux couleurs chamarrées, Afterburner pousse les qualités du trio (Nolan Lewis – guitare/chant, Rohit Chaturvedi – guitare et Ganesh K. – basse) au plus haut niveau, révélant les riffs les plus tranchants et aiguisés, mais aussi une grande diversité de compositions, allant du Heavy Speed le plus torride au Hard Rock accessible le plus musclé. Toujours prompts à épicer leur instrumental de rudesse Thrash, les trois indiens nous délivrent une copie parfaite, qui mixe le meilleur d’une décennie que nous avons bien connu, et les moyens dégagés par le label allemand AFM en disent long sur la confiance qui leur est accordée. Et pour ne laisser planer aucun doute, le groupe entame les hostilités par une ruade purement Heavy Speed dans la plus grande tradition des RIOT, GRAVESTONE et consorts, lâchant les licks les plus symptomatiques, et accrochant l’oreille de leur enthousiasme sans borne. On pense évidemment à une mouture plus raisonnable de DESTRUCTION, mais aussi à la première vague du Heavy Speed germain (RUNNING WILD, et aussi LIVING DEATH), et plus globalement, à la transformation du Heavy des années 83/84 en Thrash des années 85/86, avec toujours aussi présentes ces allusions au début de carrière de KREATOR, plus en filigrane qu’en référence avouée. Mais avec une énergie à faire rougir de honte timide tous les diables de la création, cette facilité à adapter les motifs de VENOM dans un vocable moins paillard et plus propre, et cette assomption des clichés les plus évidents, transformés en qualités indéniables, ce cinquième LP commence sous les meilleurs auspices, avec ses « Watch out ! » prononcés comme autant de leitmotivs. Bien sûr, tout est connu et reconnu, des « Burn in flames !! » aux guitares qui tournoient avant de s’abattre sur vos tympans, les figures imposées sont toutes respectées, mais en acceptant ces tendances old-school comme un style à part entière, autant dire que les indiens font jeu égal avec les allemands de l’époque, mais aussi les suédois plus contemporains, et ce Metal fatal et flamboyant parvient à se jouer des codes pour imposer un classicisme jouissif, et propulsé par une passion indéfectible. C’est ainsi que le très formel « Cold Blood » nous agite la tignasse et les cervicales, et que le non moins connoté « Dead of Night » s’amuse de la redondance d’un lick à la ACCEPT pour mieux le pervertir d’arrangements plus féroces.
Le décalage entre le côté abordable de l’instrumental et la voix vraiment rageuse et rauque de Nolan Lewis est toujours aussi remarquable, et lorsque l’ambiance se tamise et que les décibels s’amenuisent, on glisse sur le versant le plus soft des indiens, via un « Red Dawn » qui ose le mid tempo martelé sur fond d’harmonies parfaitement assumées. Pour être honnête, et malgré leur caractère convenu, chaque morceau semble incarner une sorte de perfection dans le style qu’il aborde, transformant ce cinquième essai en coup de maître et en achèvement d’une carrière riche. Postulat excessif au regard du caractère de copie appliquée de cet album, mais en admettant le principe qui de toute façon n’est plus sujet à la discussion depuis longtemps, autant reconnaître qu’un morceau aussi rond et mordant que « Mach Speed Running » se pose en quintessence d’un mélange entre la NWOBHM de papa et du Heavy allemand des années suivantes, avec une fois encore un don incroyable pour toujours trouver une accroche imparable et laisser l’auditeur en pleine béatitude rétrograde. Avec une production propre et parfaite à la suédoise, et des musiciens qui jouent leur va-tout comme s’ils souhaitaient mériter les louanges adressés, Afterburner est bien plus qu’un exercice de style, mais bien une confession musicale, et la juste récompense des efforts fournis depuis la fin des années 90. Vous n’éviterez pas bien évidemment quelques redondances, et des licks qui se répercutent d’un titre à un autre, mais la perfection des saccades, la cohésion des breaks, et cette constante opposition entre des mélodies flagrantes et ce chant hargneux et revanchard transforment ce cinquième LP en osmose parfaite entre un extrême raisonnable et un une radiophonie délicieuse, comme le démontre « On The Run » et ses harmonies lacérées.
En moins de quarante minutes, les KRYPTOS prouvent qu’on peut toujours faire du relifté avec du vieux, et recyclent, accommodent, subliment, et transcendent toutes les postures pour en faire des œuvres d’art d’un mimétisme troublant. Très humble dans l’attitude (les arrangements n’en font jamais trop), ce nouvel LP ose parfois s’écarter un peu de ses sentiers rebattus pour tomber dans une philosophie plus progressive, à l’image de ce final « Into The Wind », qui tente l’emphase d’un BATHORY light pour le déformer façon THIN LIZZY, soudainement plus violent que traditionnel. Cet éternel démarcage est donc la marque de fabrique d’un groupe qui a presque inventé un nouveau style à lui seul, et qui en tout cas mélange avec bonheur toutes les fragrances pour se poser en fils légitime d’eighties qui n’ont peut-être pas légué tout leur héritage. Mais plus simplement et prosaïquement, Afterburner n’est rien de moins qu’un nouveau classique nostalgique se hissant au sommet de la production actuelle, et l’assurance que la vague old-school n’en a pas encore fini avec ses récitations les plus appliquées.
Titres de l'album :
1.Afterburner
2.Cold Blood
3.Dead of Night
4.Red Dawn
5.On the Run
6.The Crimson Queen
7.Mach Speed Running
8.Into the Wind
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Putain je suis fan de Slayer mais c'était bien dégueulasse. Ça devient une parodie. Et oui merci pour tout Ozzy et tommy.
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