Une nouvelle créature infâme fait son apparition à la surface de la terre. Nous sommes habitués à ce genre d’éclosion néfaste, l’actualité étant chargée en productions bruitistes, pesantes et non lubrifiées. Mais le purgatoire de l’underground est une réserve inépuisable de condamnés qui continue d’alimenter le bestiaire de l’horreur, en permettant à des maniaques de jouer une musique toujours plus sombre, agressive, et éprouvante.
Et en termes d’épreuve, les américains de THRA en connaissent un rayon. Et pas seulement celui des alcools bon marché.
THRA de Phoenix, Arizona nous a déjà contacté via un formulaire de deux EP’s, en 2019 et 2020. Depuis, le quatuor patientait dans l’ombre, attendant le bon moment pour nous assommer d’un premier longue-durée, qui étonnamment au regard du style, reste très raisonnable en termes de durée. Moins de quarante minutes pour un Sludge très noir, c’est assez peu, mais les morceaux fonctionnent sans problème, en insistant sur les réflexes les plus agressifs d’un genre peu porté sur la complaisance. Ici, le feedback est évidemment roi, le chant cryptique, la rythmique lancinante, et l’ambiance étouffante, autrement dit, tout ce qu’on cherche dans un disque de cet acabit qui se veut aussi dangereux qu’addictif.
Blackened Sludge/Death Metal
Une formulation qui en dit long tout en restant vague. Une ligne explicatrice qui finalement laisse tellement de zones d’ombre que l’on préfère laisser parler la musique. Et cette musique est désespérée mais pas désespérante, concentrique mais avec un but, et méchante comme une teigne accroché au pelage d’un vieux chien malade. Zach Nixon-Sandberg (basse/chant), Grey Smith (batterie), Matt Marquette (guitare) et Robert Wolfe (guitare/chant) connaissent donc leur boulot, et le font à merveille.
Ainsi, on ne perd pas de temps, et on rentre dans le vif du sujet sans passer par le pédiluve. Les pieds crado ne sont pas interdits dans ce marigot de l’âme, qui évoque plus volontiers les marais de La Nouvelle Orléans que le soleil de l’Arizona. Entre NOLA maladive et en stade terminal, et un Doom des années 90 passé au papier de verre d’un Desert Rock vraiment accablant, Forged in Chaotic Spew bouche les trous entre les persiennes, et observe la vie à travers une prison mentale.
Et le spectacle n’est pas joli-joli.
Enregistré et mixé par Josh Medina aux Old Hat Analog Studios et surtout masterisé par Brad Boatright à l’Audiosiege, Forged in Chaotic Spew dispose d’un son épais comme un glaviot de tuberculeux, et d’un équilibre des forces admirable. C’est ce qu’il fallait pour mettre en avant des morceaux aussi immondes que puissants, et répondant aux exigences d’un Death Sludge laid, déformé, sale et malpoli.
La rudesse du Death le plus corrosif, la pesanteur du Sludge le plus Heavy, les deux composantes sont parfaitement dosées, et le résultat donne des nausées. Pas vraiment le genre de fin d’après-midi qu’on passe à l’arrière du camion à siroter une bière plus ou moins fraîche, Forged in Chaotic Spew ressemble vu de loin à un frère jumeau d’AUTOPSY déguisé en père fouettard PRIMITIVE MAN, de quoi avoir quelques suées et vérifier que le loquet est bien fermé avant d’aller passer une nuit blanche.
Mais sous ces atours atroces, se cache un des albums les plus essentiels de cet été 2023. Avec un fond emprunté à NEUROSIS un soir de pleine lune, et une forme dérivant de la fusion de courants complémentaires (on peut même parfois se demander si ce premier long n’est pas une démo de Black Metal intelligemment emballée dans un plastique Sludge), THRA se joue des codes et des limites, et provoque, irrite, dérange, atteignant parfois le paroxysme de l’agacement sur le funéraire « Blistering Eternity », litanie de plus de sept minutes qui ne nous évite aucun symptôme grave.
Aéré par des transitions un peu plus légères, Forged in Chaotic Spew reste digeste malgré des dosages un peu excessifs, et des répétitions inévitables. Si on a parfois le sentiment d’avoir entendu tel ou tel plan quelques minutes avant, si on sent que les digressions sont minimes et millimétrées, on se laisse happer par ce vortex de violence sourde qui nous enfile dans le trou noir comme un suppositoire dans un sphincter.
La suite ?
Logique. Le suppositoire fond, et diffuse ses particules actives. Sauf que ce suppositoire-là est énorme, et qu’il met vachement de temps à se dissoudre.
Titres de l’album:
01. Flame Lurker
02. Fracture
03. Terror Vessel Pt. 1
04. Drag
05. Blistering Eternity
06. Vesuvian
07. Primordial Engorgement
08. Cosmic Scourge
09. Terror Vessel Pt. 2
Pardon pour les fautes, mais quitte à écouter ce genre de trucs, Anna von Hausswolff le faisait beaucoup mieux il y a 10 ans. C'est ce qu'on appelle l'avant-garde je suppose.
05/07/2025, 06:51
Le problème de de Kayo Dot c'est qu'il dépend de l'envie du moment de Toby Driver et de qui l'entoure, tu peux avoir un album de drone/post-rock suivit d'un album de death metal, il n'y a pas de groupe et aucune identité. C'est dommage parce(...)
05/07/2025, 06:47
Merci à Clawfinger pour ce grand moment de transgression validée par l’ordre moral dominant. C’est rassurant de voir que la “rébellion” moderne consiste à tirer sur une cible usée jusqu’à la corde, avec des punchlines dignes (...)
04/07/2025, 07:16
Il tourne pas mal chez moi ce disque, et c'était un vrai plaisir de revoir le groupe live récemment après les avoir un peu mis de côté. Un autre concert en tête d'affiche ne serait pas de refus !
03/07/2025, 16:57
Morceau décevant et sans surprise. La présence de Chris Kontos dans le groupe y fait pour beaucoup dans mon intérêt pour ce retour, mais pour le moment bof.
03/07/2025, 16:47
Je n'ai jamais aimé ce groupe, mais j'étais passé devant durant un Hellfest et en effet c'était juste insupportable toutes ces harangues (littéralement toutes les 10 secondes). Moi je m'en beurre la raie, mais pour les fans ça doit &ec(...)
03/07/2025, 12:55
Vu à Toulouse et je n'ai pas du tout accroché, pourtant vu 2 ou 3 fois depuis 2005. Et j'avais bien aimé. Rien ne surnage, ça bastonne mais pour moi aucuns titres ne sort du lot.Par contre j'ai adoré Slapshot
02/07/2025, 16:01
Votre article sur le kintsugi est un véritable hommage à l’art de reconnaître la beauté dans la fragilité et les cicatrices : mentionner son origine au XVe siècle et sa philosophie wabi‑sabi renforce(...)
02/07/2025, 15:38
@Abrioche91 : la canicule t'a trop tapé sur la tête, mon pauvre vieux. Parce que se faire à répondre aux trolls, je n'avais plus vu ça depuis VS.
02/07/2025, 12:25
@Ultra Pute, t'es bien limité comme garçon. Et tu dois sacrément bien te faire chier pour venir commenter connement ce que les autres écrivent.Moi aussi, j'aime bien les commentaires gratuits (la preuve) mais je suis surtout là pour commenter l&(...)
02/07/2025, 08:50
Pas trop mal dans l'idée.Vocalement on s'y tromperait aussi.A voir sur tout l'album, le précédent, mis à part l'opener, m'avait bien déçu
01/07/2025, 15:38
ça tartine ! bien cool cool cette grosse basse @niquetoncul oui ça doit te changer de Jinjer
01/07/2025, 14:19