Dans les années 70, Sylvie Vartan et son secrétaire, Carlos, vous promettaient deux minutes trente-cinq de bonheur. En 2016, un trio d’Atlanta vous offre dix morceaux et trente-cinq minutes de terreur. Le parallèle est biaisé, un peu osé, et pourtant, on pourrait imaginer l’image de ces musiciens affichés sur cette poubelle plaquée or, comme on voyait celui du jovial Carlos sortir miraculeusement du pavillon d’un vieux phonogramme. En dehors de ça, ici, point de bonhommie, point d’opération séduction, point de jeu de dupes entre une groupie lippue et son idole repue, juste…de la pesanteur, du bruit, quelque chose de si abrasif que même un lave-vaisselle réglé à pleine puissance ne saurait nettoyer.
Mais c’est le but.
Les MY BLOODY VALENTINE se plaignaient récemment du fait que les concerts n’étaient plus assez bruyants, plus assez menaçants. Ils voulaient pouvoir s’enivrer de watts à nouveaux, de cette essence fondamentale de basses qui vous fracassent le thorax pour vous enserrer le cœur. Je n’ai qu’un conseil à donner à cette bande hirsute dépenaillée.
Allez voir les WHORES en concert. Et tout devrait rentrer dans l’ordre, au risque de perdre quelques db d’audition au passage ainsi que quelques neurones.
Les WHORES, trio géorgien, c’est d’abord par définition trois mecs, qui jouent, ensemble. Christian Lembach (guitare/chant), Casey Maxwell (basse) et Donnie Adkinson (batterie), qui se connaissent et se pratiquent depuis 2010, qui arpentent les scènes locales et d’ailleurs, et qui affichent deux EP au compteur, mais des heures à répéter, à arpenter les planches pour les défoncer de leur groove salement plombé, gorgé de fuzz, de distorsion sale et rouillée, de chant désabusé et cramé.
Ce sont avant tout des héritiers, ceux d’une tradition Core qui refuse le polissage et l’arrondissement des coins, celui qui vous file le tétanos et qui vous projette par procuration dans une vieille ruelle sordide à chercher votre bouffe dans les poubelles.
Et croyez-moi, celles que vous examinerez pour vous trouver un vieux reste de sandwich ne seront pas en or…En plastique peut-être, au mieux…
Signés enfin sur un gros label après des stages chez Brutal Panda ou Amphetamine Reptile, les trois Coreux ne devaient pas se louper au moment de franchir le pas du premier LP, mais on pouvait au moins compter sur eux pour une chose, une seule. Ne pas diluer leur haine musicale, ne pas renier leurs fondements, et continuer à tracer leur route dans leur enfer personnel, qui est aussi le nôtre.
Alors, Gold. L’or. Lequel ? Celui que les putes portent au doigt, plaqué évidemment, payé par un mac qui les garde dans son giron ? Des putes ok, mais pas au service du business qui n’a cure de ce genre de Hardcore vraiment sale et méchant, qui capitalise sur des influences d’antan. Lesquelles ? Quelques secondes d’écoute vous suffiront à planter quelques drapeaux sur le bitume défoncé, ceux d’UNSANE, de JESUS LIZARD, des MELVINS, de FETISH 69, des SONIC YOUTH aussi dans les moments les plus dissonants (et il y en a ), mais aussi celui d’HELMET, et d’une certaine portion de la scène Sludge/Stoner qui n’a pas oublié qu’un mid tempo lardé de feedback est au moins aussi efficace qu’un marteau-pilon frappé à l’envi.
D’ailleurs, ils se dégagent de cette lourdeur emphatique qu’on finit par voir comme une figure imposée, sur un morceau comme « Charlie Chaplin Routine » qui ose le tempo up même pas chaotique, brisé en plein élan par des breaks qui pilonnent. Dans une sorte de transe boogie maladive, le trio se permet de synthétiser les pires idées Sludge, Hardcore, Loudcore, mais aussi Stoner et Psychedelic Rock pour aboutir à une sorte de Némésis ZZ TOP traumatisée par une cure de speed à la HAWKWIND/KYUSS de l’enfer…Pas mal pour de petits dégénérés, peu aptes à se sociabiliser…
Alors, dans un désir de raccourci facile, je pourrais résumer le tout à une formule mathématique du style, un tiers d’UNSANE, un tiers du LIZARD et un autre de HELMET. Mais il y a quelques chose de plus qui se dégage de Gold, un parfum du désert urbain, délocalisé, radicalisé, mais mélodique quand même. Un genre de ballade impromptue, qui reprendrait à son compte le radicalisme des SEEDS, des TROGGS, pour l’incarcérer dans une inspiration indie des 90’s. Un peu comme une adaptation de cette fameuse scène anglaise de la croisée des décennies, lorsque tout était possible du moment que tous les amplis soient bloqués sur onze.
Tiens, écoutez « Playing Poor », par exemple. On pourrait ramener ça à un hommage à Occupational Hazard par exemple, mais ce serait passer sous silence cette inspiration 70’s qui entache cette guitare fuzzée, ce regard vers les 13TH FLOOR ELEVATORS, cette rage sous-jacente qui musicalise le bruit pour le rendre encore moins apprivoisable.
Parfois, c’est plus limpide, et plus court, comme sur « Ghost Trash », et plus évident aussi, avec cette rythmique en contretemps, qui s’appuie sur une basse qui ne chancèle jamais.
Mais c’est aussi impénétrable, ou presque, lorsque la montre oublie d’arrêter le temps sur le final « I Have A Prepared Statement », qui puise dans le coffre des MELVINS pour en retirer une version étrange de Houdini, en mettant l’accent sur le malaise, mais en gardant le côté ludique de la torture.
« I See You Also Wearing A Black Shirt » se souvient des beats chaotiques d’il y a vingt ans, et fonce dans le tas, peu importe le contenu du texte et si le mec portait un t-shirt noir ou pas, puisqu’on sent une vraie colère sarcastique en arrière-plan, un riff porteur simple comme un bonjour de loin, et des roulements de caisse claire métronomiques.
Déluge de plomb estampillé YOUTH/UNSANE (« Mental Illness As Mating Ritual »), murs qui suintent de sang, d’urine, de peur et d’Induscore d’usine (« Bloody Like The Day You Were Born »), avec toujours cette grosse caisse profonde, défoncée à grands coups de nonsense larsené à la FLIPPER/NIRVANA et naissance gueulée à la LIZARD, et puis voilà, le compte est bon, mais seulement le vôtre.
Certes, tout ça est très traumatique, mais ce bruit mat et blanc nous rappelle les heures troubles que nous vivons, et observe le monde un peu goguenard. Malsain, évidemment, cathartique, visiblement, bruyant, par obligation.
Un lien vers un nulle part dans lequel on erre à la recherche d’une sortie qui n’existe pas. Dix titres et trente-cinq minutes d’horreur, de malheur, et finalement de prise de conscience.
Sauf qu’il n’y a pas de réveil possible au trip d’un junkie qui se shoote à la réalité.
Titres de l'album:
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08/07/2025, 06:08
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07/07/2025, 22:26
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07/07/2025, 17:42
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Oui c'est bien beau mais étaient ces gars durant l'ère Obama ou il a absolument tout trahis ? Trump on connait son histoire personnelle et ses financements. c'est sans surprise..
06/07/2025, 14:20
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03/07/2025, 16:57
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03/07/2025, 16:47
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03/07/2025, 12:55