Sã Mo

De Mal En Pire

15/03/2024

Autoproduction

DE MAL EN PIRE. Voilà un nom redoutablement bien choisi pour une époque qui laisse justement le pire arriver puisque le meilleur est déjà derrière elle. DE MAL EN PIRE, c’est une certaine vision du Post Hardcore traditionnel, mais chanté en français. Cette exigence pour s’éloigner de la standardisation US, mais aussi pour que les peuples francophones comprennent bien le message.


Seul, exclu, mort, vaincu.  


Rémi Brière-Aubé (guitare/chant), Mick Mongeau (guitare), Fred C. Smith (batterie) et Mat Laperle, entre France et Québec, nous assènent avec Sã Mo un gigantesque parpaing dans la tronche, pour mieux nous réveiller d’un rêve qui a depuis longtemps viré au cauchemar. En utilisant les codes les plus traditionnels du Post-Hardcore, le quatuor se révèle par petites touches, mais aussi par énormes coups de gueule. Et si les mots sont fins et précis, la musique quant à elle se veut d’une violence rare, soutenue par des mélodies pleines, mais qui laissent un goût amer dans la bouche.


Ravagées par la honte et la peur d'un mot.

Volant dans le néant à bord du grand radeau.

Un message, un grave danger.

 

CULT OF LUNA, DEFTONES, THE OCEAN et MORT MORT MORT sont les quelques influences revendiquées par une bio qui n’en souligne pas moins la singularité du projet. DE MAL EN PIRE assume son héritage, mais ne manque pas non plus de mettre en avant ses propres atouts. Des structures complexes, une puissance assourdissante, une production incroyablement claire, et des échanges vocaux traumatiques qui nous renvoient au meilleur de NEUROSIS. On se retrouve vite happé par un énorme vortex qui avale tout sur son passage, et qui laisse une note en bas de page comme ultime témoignage d’une époque rongée jusqu’à la moelle.

Le nom de l'album, Sã Mo, est dérivé d'un langage phonétique, faisant référence à des homophones inclus dans certains des titres (Cent Mots, Sans Maux, Cent Maux, Sans Mot). Est-ce à dire que nous sommes sans voix face à l’adversité ? Ou qu’au contraire, notre discours devient fleuve face à l’urgence de la situation ? Les deux, puisque les mots ont autant d’importance que le silence sur ce disque riche et truffé d’arrangements typiques, et si les strophes caressent l’originalité d’un langage précieux, les instruments se mettent au diapason pour produire une bande son aussi onirique que réaliste.

Avec une inspiration picturale dérivée du célèbre « Radeau de la Méduse » de Théodore Géricaul, Sã Mo évoque la dérive mentale de survivants devenus fous, se mangeant entre eux, se faisant passer par-dessus-bord, pour finalement être sauvés par hasard, alors qu’une infime partie de l’équipage était encore en vie. Cette métaphore décrit avec acuité l’actuelle dérive que subit l’humanité, en proie à ses propres démons consuméristes et sa vision à trop court terme. On retrouve dans ces syncopes millimétrées et ces contemplations mélodiques l’affrontement entre la résignation et l’espoir, celui qui anime encore quelques âmes persuadées de pouvoir inverser le cours des choses.

Tout en sachant qu’il est déjà trop tard.


Étrange nuitée à bord du grand radeau échoué.

Caressant les promesses des affres de nos vies.

 

Ce radeau, c’est aussi et surtout ce disque qui résonne de ses accords dissonants dans un écho sans réverbération. Les canadiens ont bien compris le lexique, la grammaire, et leur rhétorique musicale évite la redondance des longs discours stériles, pour mieux frapper d’une tournure de phrase assassine. On retrouve des vers qui se répercutent d’histoire en histoire, et ce concept album déguisé est certainement l’un des plus précieux que le Post-Hardcore nous ait donné ces deux ou trois dernières années. Alors que nombre de musiciens se regardent le nombril comme s’il était l’ultime merveille du monde, DE MAL EN PIRE se focalise sur l’intérêt général, et l’apocalypse mondiale.

Sans vraiment chercher à bousculer l’ordre établi, le quatuor ronge ses os, et livre une prestation définitive et ferme. Entre les titres concis qui explosent d’une rage infinie (« Anachorète », « Les Amants du Désordre »), et les longues suites introspectives (« Cent Maux », superbe et ample, « L’Astre de Velours » qui caresse l’âme), Sã Mo compte ses maux pour aligner ses mots, et nous délivrer d’une épidémie de sinistrose transformée en douleur aigue, mais identifiable.

On accepte donc les formules, on rejoint le point de vue, et on pénètre un univers fait d’oppression, de lourdeur, de fardeau à porter, et de litanies martelées comme des leitmotivs de fin de vie. Et si « L’apogée des Oubliés » se pose en acmé d’un disque relevé, de ses percussions sentencieuses, « Sans Mots » nous laisse dériver sur des courants qui nous entraînent vers les cascades les plus mortelles.

Un voyage cathartique, pour un disque qui sera la Némésis de tous les amateurs de franchise Metal. Ici, l’ambivalence est reine, la différence est revendiquée, et l’indifférence méprisée.

Qui ose pénétrer la raison?

Les rêveurs abandonnés qui ont tué leur capitaine lors d’une mutinerie nocturne sous les étoiles.          

          

Titres de l’album:

01. L'Ancre de la Douleur Triangulaire

02. Anachorète

03. Cent Mots

04. Délire Mantique

05. Sans Maux

06. L'Astre de Velours

07. Les Amants du Désordre

08. Cent Maux

09. L'Apogée des Oubliés

10. Sans Mot


Facebook officiel

Bandcamp officiel


par mortne2001 le 04/03/2024 à 17:01
85 %    156

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Midnight + Cyclone + High Command // Paris

Mold_Putrefaction 24/04/2024

Live Report

DIONYSIAQUE + JADE @La Chaouée

Simony 23/04/2024

Live Report

Enslaved + Svalbard + Wayfarer

RBD 20/03/2024

Live Report

Voyage au centre de la scène : BLOODY RITUAL

Jus de cadavre 17/03/2024

Vidéos

Crisix + Dead Winds

RBD 20/02/2024

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
roulure

true norwegian roue libre

26/04/2024, 13:40

Simony

Yes, et demain samedi, c'est WITCHTHROAT SERPENT et ORBIS au Nirvana Pub-Club de Nancy.Si j'avais le temps de renseigner la partie gigs de ce site....

26/04/2024, 13:35

Simony

Yes, et demain samedi, c'est WITCHTHROAT SERPENT et ORBIS au Nirvana Pub-Club de Nancy.Si j'avais le temps de renseigner la partie gigs de ce site....

26/04/2024, 13:35

Humungus

Putain !Si j'avais été au jus de cette date, j'aurai fait le déplacement boudiou...Pis je vois que tu causes de BARABBAS à Nancy ?!Et c'est... ... ... Ce soir.Re-Putain !

25/04/2024, 13:28

Tut tut!

25/04/2024, 12:44

Gargan

ça me fait penser à moi ivre mort parodiant Maurice Bejart, sur fond de Stravinski. Plus glucose, tu meurs. Mauriiiiice !

25/04/2024, 10:28

DPD

Mes confuses malgré mon instinct qui tapait dans le juste, rien avoir avec le gaillard à qui je pensais.

24/04/2024, 14:26

RBD

Vu récemment avec Napalm Death, et ça faisait plaisir de voir que beaucoup de gens connaissent leur Histoire du Death Metal car il y avait de vrais fans. Surtout, la formule D-Beat basique et efficace du père Speckmann fonctionne bien en live 

23/04/2024, 09:55

LeMoustre

Excellent disque avec un gros point fort sur le riffing atomique. La pochette m'évoque clairement celle de Nothingface, version bio-mécanique

22/04/2024, 18:04

Arioch91

Ca fleure bon le vieux Kreator période Pleasure to Kill ! Prod' crade, aux antipodes des trucs surproduits de certains groupes et quand ça speede, ça rigole pas.

21/04/2024, 19:52

Poderosos/Magnificencia/Técnica Suprema

Los Maestros del BRUTAL DEATH GRIND

21/04/2024, 19:50

Pomah

+1 Gargan, influence Mgla je trouve par moment. 

21/04/2024, 09:20

Jus de cadavre

Là clairement le label est dans son droit à 100%. Warner a racheté l'ancien label de Kickback, ils en font ce qu'ils veulent du catalogue. Après, l'élégance, une telle multinationale elle s'en beurre la raie. Mais je peux comprendre qu(...)

20/04/2024, 23:36

Tourista

Mouiii, pas faux. Les gonzes ont signé.Mais ça me rappelle Peter Steele qui avait voulu défenestrer un type dans les bureaux de Roadrunner après avoir découvert que le label ressortait les albums de Ca(...)

20/04/2024, 20:06

Tourista

Devinez où il se Lemmy. (ne me raccompagnez pas, je sors tout seul)

20/04/2024, 19:58

Grosse pute

Attention, les mecs ne se font pas "enfler". C'est juste que Warner ne leur a pas demandé leur avis pour rééditer le bazar et les mecs parlent donc d'édition pirate, alors que Warner a bien les droits sur le disque. Après, Kickback, ce ne son(...)

20/04/2024, 06:26

Tourista

Désolé pour les coquilles monstrueuses.  Merci la saisie automatique.

19/04/2024, 20:51

Tourista

Non bien sûr je plaisantais, M'sieur Heaulme. Un artiste qui se fait enfler a mille fois raison d'en parler !   Et je sais malheureusement de quoi je parle.Respect pour Kickback. Content que tu les pu voir ce docu.

19/04/2024, 18:08

Humungus

@Tourista :- "On s'en cogne"Bah non...- Tu t'es achement bien rattrapé avec ce docu qui était totalement passé à côté de mes radars.Exceptionnel.C'est pas C8 qui passerait ça bordel...

19/04/2024, 15:54

grosse pute

Au lieu d'aller baiser des gamines et des ladyboys à Bangkok, Stephan aurait dû apprendre à lire les contrats qu'il signe.

19/04/2024, 15:20