Lorsque les musiciens ont plus d’une idée par morceau, ils se qualifient parfois de « progressifs ». Encore faut-il que ces deux idées s’assemblent avec pertinence et qu’elles soient fertiles. Sinon, on parle de Rock généraliste, de Metal simpliste ou de Pop en caricature. Mais lorsqu’un musicien compose une musique riche, pleine, désarmante et constamment surprenante, le qualificatif s’impose de lui-même, a posteriori. C’est le cas de l’omnipotent canadien Rudy M., qui avec son premier album donne une belle leçon à ceux moins humbles que lui, mais aussi beaucoup moins créatifs.
SUNLESS est donc présenté comme un concept de Doom progressif, ce qu’il est sans conteste. D’ailleurs, plus que de Doom, on peut parler de Metal extrême progressif, tant ces sept morceaux empruntent à différents vocables leur mode d’expression. Après un premier EP prometteur, Rudy s’est donc attelé à la composition d’un premier longue-durée, qui se présente sous une pochette sobre et superbe, et parfaitement en phase avec son contenu.
Avant toute chose, il est très difficile de croire que Grave Of The Lambs est le fruit de l’imagination d’un seul homme. Les nombreuses déviances, les dilutions magiques, et cette production claire comme de l’eau de roche, dénuée de tout artifice inutile poussent à croire à un enfantement collectif, comme si OPETH avait retrouvé ses envies de jeunesse tout en assumant sa maturité.
SUNLESS est donc une merveilleuse surprise. Alors que les albums du cru ont souvent tendance à patauger dans la même boue pendant quarante minutes, Grave Of The Lambs explore les environs, et en revient avec des sons aérés, des thèmes bucoliques, d’autres plus nostalgiques, parfois un peu morbides, mais jamais insistants, sinon ennuyeux.
Sur un tempo lourd caractéristique du Doom moderne, SUNLESS brode ses ornementations avant-gardistes, mélodiques, dissonantes et troublantes. On retrouve l’envie d’expérimenter de VIRUS, cette volonté de s’écarter des sentiers battus sans trop s’enfoncer dans une forêt inextricable, et ce résultat fantastique qui repousse les limites du style.
Influencé par le Heavy Metal classique, par le Black le plus excentré, le Metal progressif le plus barré et le Doom édulcoré, Rudy nous embarque dans une aventure hors du commun, se faisant conteur très capable, au phrasé clair et précis. On en prend acte dès l’entame « Lines in the Sand », qui laisse immédiatement augurer d’une œuvre imprévisible et attachante. Mais c’est « The Unceasing Burden » qui précise un peu les plans et les intentions, avec huit minutes de décadence mélodique agressive, avec discordances, stridences, chant décalé et humeur changeante. On se prend de passion pour cette narration non linéaire, et même si un schéma tactique se dessine titre après titre, il n’en reste pas moins que pour un premier jet, SUNLESS joue sur l’ouverture.
Ainsi, « Alive! » exhorte pendant quatre minutes l’auditeur à aller fouiller dans ses émotions les plus intimes, dans une séance de psychanalyse musicale étouffante, mais cathartique. Même constat pour « That We May Shine » qui a de faux airs d’épure magnifique des passages les plus contemplatifs de NEUROSIS, sous couvert d’une disharmonie globale étonnante, et pourtant éprouvante.
Disque précieux, Grave Of The Lambs propose autre chose. Un cheminement lent, une montée douloureuse, une quête sans réel but. Distordant la réalité pour lui faire adopter les contours d‘un onirisme illuminé, SUNLESS oppose l’oppression et les respirations, la distorsion et le son clean biscornu (« Grave of the Lambs », fausse ballade amère qui semble jouée par deux orchestres différents et pas forcément en harmonie), pour mieux nous faire entrevoir les possibilités de ce tunnel que la vie dessine une fois la mort proche.
« A Triumphant Odyssey » ne pouvait pas mieux résumer la philosophie de Grave Of The Lambs. Cette courte odyssée est en effet un triomphe, artistique et musical, qui nous emmène jusqu’au charnier macabre de ces agneaux que nous sommes tous. Une apocalypse Doom et progressive, qui contemple les catastrophes naturelles comme un photographe le dernier lever de soleil.
Un album qui réchauffe et refroidit à la fois. Voilà qui n’est pas ordinaire.
Titres de l’album:
01. Lines in the Sand
02. Ardor/Candor
03. The Unceasing Burden
04. Alive!
05. That We May Shine
06. Grave of the Lambs
07. A Triumphant Odyssey
Pardon pour les fautes, mais quitte à écouter ce genre de trucs, Anna von Hausswolff le faisait beaucoup mieux il y a 10 ans. C'est ce qu'on appelle l'avant-garde je suppose.
05/07/2025, 06:51
Le problème de de Kayo Dot c'est qu'il dépend de l'envie du moment de Toby Driver et de qui l'entoure, tu peux avoir un album de drone/post-rock suivit d'un album de death metal, il n'y a pas de groupe et aucune identité. C'est dommage parce(...)
05/07/2025, 06:47
Merci à Clawfinger pour ce grand moment de transgression validée par l’ordre moral dominant. C’est rassurant de voir que la “rébellion” moderne consiste à tirer sur une cible usée jusqu’à la corde, avec des punchlines dignes (...)
04/07/2025, 07:16
Il tourne pas mal chez moi ce disque, et c'était un vrai plaisir de revoir le groupe live récemment après les avoir un peu mis de côté. Un autre concert en tête d'affiche ne serait pas de refus !
03/07/2025, 16:57
Morceau décevant et sans surprise. La présence de Chris Kontos dans le groupe y fait pour beaucoup dans mon intérêt pour ce retour, mais pour le moment bof.
03/07/2025, 16:47
Je n'ai jamais aimé ce groupe, mais j'étais passé devant durant un Hellfest et en effet c'était juste insupportable toutes ces harangues (littéralement toutes les 10 secondes). Moi je m'en beurre la raie, mais pour les fans ça doit &ec(...)
03/07/2025, 12:55
Vu à Toulouse et je n'ai pas du tout accroché, pourtant vu 2 ou 3 fois depuis 2005. Et j'avais bien aimé. Rien ne surnage, ça bastonne mais pour moi aucuns titres ne sort du lot.Par contre j'ai adoré Slapshot
02/07/2025, 16:01
Votre article sur le kintsugi est un véritable hommage à l’art de reconnaître la beauté dans la fragilité et les cicatrices : mentionner son origine au XVe siècle et sa philosophie wabi‑sabi renforce(...)
02/07/2025, 15:38
@Abrioche91 : la canicule t'a trop tapé sur la tête, mon pauvre vieux. Parce que se faire à répondre aux trolls, je n'avais plus vu ça depuis VS.
02/07/2025, 12:25
@Ultra Pute, t'es bien limité comme garçon. Et tu dois sacrément bien te faire chier pour venir commenter connement ce que les autres écrivent.Moi aussi, j'aime bien les commentaires gratuits (la preuve) mais je suis surtout là pour commenter l&(...)
02/07/2025, 08:50
Pas trop mal dans l'idée.Vocalement on s'y tromperait aussi.A voir sur tout l'album, le précédent, mis à part l'opener, m'avait bien déçu
01/07/2025, 15:38
ça tartine ! bien cool cool cette grosse basse @niquetoncul oui ça doit te changer de Jinjer
01/07/2025, 14:19