J’ai bien failli ne pas m’atteler à cette chronique. La presse dithyrambique, les posts Facebook élogieux m’avaient convaincu que les SETH n’avaient pas besoin de ma petite publicité pour répandre la bonne parole dans l’underground et au-dessus. Et puis, je me suis dit que me priver d’un bon album était une punition trop personnelle pour être acceptée. Après tout, les bordelais avaient-ils déjà déçu leur auditoire depuis leur émergence au milieu des années 90 ? Ne faisaient-ils pas partie de l’avant-garde BM nationale aux côtés des fameuses légions noires ? Et surtout, n’attendions nous pas cet album depuis huit ans et la sortie du mitigé The Howling Spirit qui n’avait pas convaincu tout le monde de son optique un peu trop mécanique ? Alors, finalement, j’ai écouté La Morsure Du Christ, comme tout le monde (ayant déjà fait l’impasse sur GOJIRA, je ne pouvais me permettre deux impairs consécutifs), et j’y ai découvert un excellent album de Black traditionnel, subtilement traduit dans son époque, qui effectivement, rappelle les premières années du groupe, mais qui n’offre rien de plus que ce que la discographie du combo n’offrait déjà.
Je ne serai donc pas aussi enthousiaste que certains de mes collègues chroniqueurs qui y ont vu un retour en grâce, et une atteinte des sommets autrefois gravis par Les Blessures de l'Âme. Proposé en live il y a deux ans, cet album séminal avait défini les contours du SETH de début de parcours, et il est lénifiant de dire que le sextet s’en est retourné pour y puiser son inspiration. Enregistré au Studio Sainte Marthe à Paris (REGARDE LES HOMMES TOMBER, SINSAENUM, LOUDBLAST, HANGMAN'S CHAIR), enregistré, produit, mixé et masterisé par Francis Caste, La Morsure Du Christ est en effet un comeback aux fondamentaux d’une musique qui a beaucoup évolué depuis son explosion nordique des années 90. Un album formel, classique, efficace, bourré de riffs, de lignes vocales revanchardes, et enrobé dans une pochette gentiment provocante, un peu potache sur les bords, mais splendide de ses tonalités rougeoyantes qui nous rappellent ce triste incendie ayant ravagé Notre Dame et sa flèche.
Mettons les choses au point. Ce sixième album de SETH est d’une qualité supérieure, inatteignable par bon nombre d’autres groupes pourtant référentiels. Il empeste l’essence noire du Black Metal le plus impérieux et véhément, et est toujours porté par le jeu tentaculaire du batteur/leader Alsvid, notre Hellhammer national et ses fills diaboliques. Malgré des changements de line-up constants, le groupe est donc parvenu à trouver un équilibre stable depuis quelques années, la dernière rotation nous ayant introduit au bassiste Esx Vnr (VORKREIST, ARKHON INFAUSTUS (live), ex-GLORIOR BELLI, ex-MERRIMACK, ex-PURGE). Outre Alsvid en tant que membre d’époque, on retrouve également le clavier et la guitare de Heimoth, fidèle au poste lui aussi, et un reste de formation stabilisée depuis 2018. Saint Vincent (chant), Drakhian (guitare) et Pierre Le Pape (claviers) complètent donc le sombre tableau, et il est assez utile de préciser que l’intégralité des participants à cet album livre une prestation au-dessus de tout soupçon. Si évidemment Alsvid et Saint Vincent restent les centres d’attraction de SETH sur cet album, l’un par ses pulsions rythmiques morbides, et l’autre par son chant raclé et incantatoire, c’est la cohésion d’ensemble qui frappe, comme si SETH avait justement compris qu’il lui fallait frapper un grand coup pour rallumer le brasier de la passion. Ce qui nous dispense d’intro grandiloquente, et qui permet au title-track « La Morsure du Christ » d’imposer son rythme de croisière dès les premières secondes, pour rendre le propos plus clair. Je l’avoue, le son, immense et aéré permet d‘apprécier tous les détails, et ces espaces laissés entre les instruments donne du souffle à l’album, comme un incendie ayant désespérément besoin d’oxygène pour se répandre. SETH a donc choisi de composer la bande-son idéale à l’écroulement de notre société, et cogne sans relâche sur la bienséance pour nous ouvrir les yeux, utilisant l’image de cet incendie comme une métaphore sur les derniers vestiges de l’humanité brulant dans les flammes de l’enfer de la cupidité.
En étant tout à fait objectif, La Morsure Du Christ n’est rien de moins qu’un excellent album, aux humeurs variées, aux tempi alternés, et à l’approche plurielle dans la déférence aux enseignements les plus bruts du BM. Il n’est pas le chef d’œuvre prié à genoux que certains se sont plu à décrire, mais il reste une étape importante pour le groupe, qui joue son va-tout en restant dans des balises de sécurité. Il enterre une bonne partie de la production antérieure mais ne peut clairement pas se mesurer aux Blessures de l'Âme, et ce pour plusieurs raisons. D’une l’effet de surprise est passé. De deux, l’époque n’est pas la même, et les musiciens non plus. Mais il reste une tentative intéressante pour boucler la boucle, et unir le nouveau siècle et son prédécesseur dans un élan de violence très probant.
Les compositions utilisant des éléments très traditionnels (accélérations sans pitié, mélodies amères qui reviennent comme des mantras, riffs circulaires qui nous transportent aux origines nordiques, poésie macabre), se montrent efficaces et juste assez créatives pour ne pas tomber dans le piège de l’autocitation, et la puissance de « Sacrifice de Sang » suffit à justifier l’écoute d’un album qui contrairement à sa pochette, ne joue pas avec le feu. Ce conformisme a semblé déranger certains, qui attendaient de SETH un grand œuvre à la hauteur de sa légende, mais après plus de vingt-cinq ans de carrière, SETH préfère justement continuer à faire ce qu’il a su faire de mieux il y a plus de vingt ans, oublier les expérimentations hasardeuses, et nous offrir l’album parfait que nous méritions en tant que fans.
On aurait aimé plus de culot, mais fort heureusement, la seconde partie de l’album comble quelque peu une partie de nos attentes, avec ce dramatique « Hymne Au Vampire (Acte III) » qui met l’emphase sur la noblesse de la brutalité, ou « Les Océans du Vide » qui de ses claviers parvient à nous emporter dans les pires cauchemars de MAYHEM et DIMMU, sans forcément se montrer trop allusif aux deux références.
La Morsure Du Christ est donc une reprise de contact de toute beauté, qui sans dépasser les attentes, les satisfait avec classe et application. Pas forcément la meilleure excuse à toutes ces années de silence, mais un bon moyen de remercier les fans pour leur patience.
Titres de l’album:
01. La Morsure du Christ
02. Métal Noir
03. Sacrifice de Sang
04. Ex-Cathédrale
05. Hymne Au Vampire (Acte III)
06. Les Océans du Vide
07. Le Triomphe de Lucifer
Faudra que je lui laisse plus sa chance, relativement déçu, vraisemblablement par trop d'attentes. Howling ne m'a pas du tout laissé un sentiment "mitigé" en revanche, du haut niveau.
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