Voilà typiquement le groupe dans lequel j’adorerais jouer. Vraiment. Sauf qu’il y a un petit problème, et même : plusieurs. D’abord, je n’habite pas l’Australie, ensuite, je n’ai clairement pas le niveau pour me frotter à ces sagouins. Parce que ces résidents de Melbourne, en activité depuis le début des années 90 sont des bêtes de solfège, des prodiges de la triple croche, des experts en contretemps et des amateurs de polyrythmie aggravée. Et malgré mes années de pratique, je ne pourrais suivre ni leur énergie ni leur technique. Ce qui me rend infiniment triste. Mais heureux à la fois, puisque le cinquième album d’ALARUM est un monstre de puissance et de finesse.
J’emploie le terme « monstre » à dessein. Ce disque est au Techno-Thrash ce que Catherine Laborde était à la météo. Un golem, une créature irremplaçable, un flair de pacha, et une virtuosité cumulonimbusaire. Mais pour être totalement franc, je ne sais pas si on peut encore parler de Techno-Thrash à ce stade de jeu. Si le parallèle avec ATHEIST est assez frappant, notamment dans l’utilisation de plans purement Jazzy ou latino, ALARUM reste la plupart du temps en dehors des clous pour échapper à cette étiquette aussi restrictive qu’exigeante.
Aussi Death qu’il n’est Fusion, aussi Thrash qu’il n’est inclassable, Recontinue poursuit l’épopée entamée en 1994 avec la démo Another World, et passée professionnelle en 1998 via le premier album Fluid in Motion. Si des progrès assez conséquents sont à souligner en plus de vingt ans et bientôt trente, le fond lui n’a pas changé. Mettre son don au service d’une musique incroyablement riche, dont chaque instrumentiste polit les chromes jusqu’à se refléter. Quelque part dans la galaxie entre les plus grands VRP progressifs et les diplomates Thrash/Death, ALARUM se rappelle au bon souvenir de disques légendaires comme Elements ou Illusions, tout en ajoutant au mix une grosse louche de facilité Jazz sans passer pour des flagorneurs.
Mais de quoi traite ce nouvel album ? Il est décrit en ces termes :
Recontinue approfondit le thème de la régénération : la croissance à partir de ce qui semble mort ou endommagé, la résilience face à l’adversité et trouver la force dans les moments difficiles. Au niveau des textes, Recontinue explore des questions et des concepts centrés sur le comportement autodestructeur de l’humanité, nos connexions sociales et notre planète. C’est un appel aux armes pour tous les gens à continuer le combat : trouver de meilleures façons de se connecter, de résoudre les problèmes et prospérer - tout en acceptant les hauts et les bas inévitables de l’aventure humaine.
C’est peu ou prou la démarche adoptée par les australiens depuis leurs débuts. Avec un line-up qui a pas mal changé avec les années, conservant Scott Young à la guitare et Mark Palfreyman à la basse et au chant depuis 1995, rejoints en 2011 par la guitare de John Sanders, et récemment soutenus par la batterie prolixe et équilibriste de Jared Roberts (MUNITIONS, MUNT, DESECRATOR, ex-NETHEREALM, ex-EXIT WOUNDS (live), ex-VENOM INC. (live)). Le quatuor actuel semble avoir trouvé un équilibre très stable, ce qui lui permet d’expérimenter et de piétiner les frontières séparant le Jazz-Rock du Metal, dans un élan de créativité qui justifie amplement les débordements techniques omniprésents.
A la manière d’un TRIBAL TECH tombé dans le chaudron du Thrash progressif et évolutif, ALARUM joue avec les contrastes et les nuances, peint une toile sombre mais lumineuse à la fois, et n’hésite jamais à confronter un énorme passage Thrash à une digression jazzy blindée de chœurs et de cocottes de guitare en son clair (« Zero Nine Thirty », chef d’œuvre absolu qui donnerait des complexes au jeune SIEGES EVEN et à BELIEVER). La quintessence même de la pureté musicale qui ne glisse jamais d’un côté ou de l’autre, et qui profite de cette équidistance pour se permettre toutes les audaces. Fermement installé sur le toit du monde musical, le quatuor revisite les eighties démonstratives, les seventies culottées et les nineties chargées pour offrir une synthèse à Steve Vaï, Allan Holdsworth et MAHAVISHNU ORCHESTRA.
Recontinue propose donc des alternatives à notre mode de vie égoïste et capitaliste autocentré. Des voies à suivre, qui pourraient nous permettre de ralentir l’inexorable, et offrir encore quelques années de répit. Mais au-delà du message universel, c’est la portée artistique de l’œuvre qui laisse pantois. Tous les musiciens assez capables savent à quel point il est difficile de faire difficile sans donner l’impression de faire difficile. Ces mêmes musiciens savent que l’insertion de plans Jazz dans un contexte Metal est chose facile, mais qu’arriver à ce point de Fusion est quasiment impossible sans perdre du crédit d’un côté ou de l’autre.
Ces gageures sont relevées avec brio, et la voix toujours aussi granuleuse de Mark Palfreyman permet de rester accroché aux cicatrices Death, sans se montrer trop agressif ou trop doux. En parfait contrepoint d’un CYNIC qui n’a jamais vraiment réussi à satisfaire tout le monde, plus stable mais tout aussi extrême que le DEATH de fin de carrière, ALARUM déroule et dérouille avec l’énormissime « Unheard Words », teigneux comme un morpion, avant de se laisser exploser en plein vol au son évolutif de l’épilogue « Awaken by Fire », suite magique qui propose d’autres solutions qu’un banal résumé de fin de métrage.
Je les aime, et je les déteste à la fois. Ils jouent une musique qui me transcende et me frustre. Je n’aurai jamais les capacités pour produire une telle performance, alors, je reste en retrait et me contente d’admirer le travail. Il faut savoir rester à sa place. Et ronger tristement son frein.
Titres de l’album:
01. Introspective
02. Imperative
03. The Visitor
04. A Lifelong Question
05. Unresolve
06. Metanoia
07. Zero Nine Thirty
08. Unheard Words
09. Footprints
10. Into Existing
11. Awaken by Fire
Merci à Clawfinger pour ce grand moment de transgression validée par l’ordre moral dominant. C’est rassurant de voir que la “rébellion” moderne consiste à tirer sur une cible usée jusqu’à la corde, avec des punchlines dignes (...)
04/07/2025, 07:16
Il tourne pas mal chez moi ce disque, et c'était un vrai plaisir de revoir le groupe live récemment après les avoir un peu mis de côté. Un autre concert en tête d'affiche ne serait pas de refus !
03/07/2025, 16:57
Morceau décevant et sans surprise. La présence de Chris Kontos dans le groupe y fait pour beaucoup dans mon intérêt pour ce retour, mais pour le moment bof.
03/07/2025, 16:47
Je n'ai jamais aimé ce groupe, mais j'étais passé devant durant un Hellfest et en effet c'était juste insupportable toutes ces harangues (littéralement toutes les 10 secondes). Moi je m'en beurre la raie, mais pour les fans ça doit &ec(...)
03/07/2025, 12:55
Vu à Toulouse et je n'ai pas du tout accroché, pourtant vu 2 ou 3 fois depuis 2005. Et j'avais bien aimé. Rien ne surnage, ça bastonne mais pour moi aucuns titres ne sort du lot.Par contre j'ai adoré Slapshot
02/07/2025, 16:01
Votre article sur le kintsugi est un véritable hommage à l’art de reconnaître la beauté dans la fragilité et les cicatrices : mentionner son origine au XVe siècle et sa philosophie wabi‑sabi renforce(...)
02/07/2025, 15:38
@Abrioche91 : la canicule t'a trop tapé sur la tête, mon pauvre vieux. Parce que se faire à répondre aux trolls, je n'avais plus vu ça depuis VS.
02/07/2025, 12:25
@Ultra Pute, t'es bien limité comme garçon. Et tu dois sacrément bien te faire chier pour venir commenter connement ce que les autres écrivent.Moi aussi, j'aime bien les commentaires gratuits (la preuve) mais je suis surtout là pour commenter l&(...)
02/07/2025, 08:50
Pas trop mal dans l'idée.Vocalement on s'y tromperait aussi.A voir sur tout l'album, le précédent, mis à part l'opener, m'avait bien déçu
01/07/2025, 15:38
ça tartine ! bien cool cool cette grosse basse @niquetoncul oui ça doit te changer de Jinjer
01/07/2025, 14:19
Tiens, le retour du papy boomer! Normal, quand du thrash de croulant, il sort de l'ehpad. Et si c'est pas signé, c'est que c'est nul à chier, pépé!
30/06/2025, 19:47
Si seulement Spiros pouvait arrêter d'haranguer le public toutes les 30 secondes avec ses "come on my friends", les lives de Septicflesh y gagneraient beaucoup.
30/06/2025, 11:36