Le bordelais est fascinant. Le vignoble bien sûr, ses villages pittoresques, sa capitale fort prisée des parisiens, son musée du vin, ses ruelles de pavés, son port international, et ses quais si fréquentés. Il y a de quoi écrire bien des histoires sur ces âmes qui ont un jour adopté la Gironde, ou l’inverse, et qui de chemins en routes ont perdu tout autre repère que celui régional. Je connais moi-même très bien la région. Et ses virages au cordeau. Ses paysages vert et bleu, sa réserve de fûts, mais aussi, ses musiciens.
Il y en a beaucoup. Comme à Rennes, Nantes, Reims, Lille, Strasbourg, Brest, et d’autres cités qui inspirent les artistes au point de leur faire inventer un nouveau langage, plus ou moins propre. Et les locaux d’ENDLESS FLOODS font partie des plus fameux dans notre petit cercle d’initiés. Il paraît même qu’ils en ont découvert la quadrature. En tout cas, ils ne tournent plus en rond depuis longtemps.
Benjamin Sablon (batterie, percussion, synthétiseurs, chant), Louise Dehaye (chant), Stéphane Miollan (guitare, basse, chant) et Thibault Laisney (guitare) accusent cette année une décennie d’activité. Une décennie marquée par cinq longue-durée qui ont su séduire la frange la plus nonchalante mais tendue de notre public. Entre la tristesse du Doom, la brutalité sourde du Sludge, et la beauté diaphane de l’atmosphérique, le quatuor a voyagé, trouvé son équilibre, et nous propose aujourd’hui de repartir pour un voyage venteux, rythmé par la houle et les souvenirs qui remontent à la surface.
Le tout est un peu jauni, les couleurs ont laissé place à la poussière, et le cheminement est calme. En apparence. Rites Futurs cite de nombreuses influences, NEUROSIS, ISIS, CULT OF LUNA, MONARCH ou RECITATION, mais son vocabulaire est personnel. « L’Eclair » le souligne en un, qui frappe un cépage avec une violence rare. Le ciel est électrique, la terre gronde, mais les éléments se déchainent dans un ordre parfait. Nuages, pluie, tonnerre, éclairs, et puis, plus rien. Le silence. Cette musique suit donc une logique naturelle, exposée brillamment sur le processionnel « Décennie », qui à en croire son titre parle de ses concepteurs. Une décennie. C’est long et court à la fois. Tout dépend de votre perception du temps.
Les bordelais l’envisagent comme une unité de mesure libre, qu’ils manipulent à leur guise. Et c’est sans doute pour ça que même les envolées les plus durables restent digestes et paraissent plus courtes qu’elles ne le sont. Avec de multiples arrangements sobres et émanant d’instruments exploités à plein régime, Rites Futurs est une cérémonie intime réservée à un public d’initiés, qui connaît les gestes et les incantations. A la lune levée, les mains se joignent, et les mots s’échappent en notes, que l’on peut toucher du doigt.
Des notes souvent parcimonieuses mais harmonieuses, en son clair et éthéré, ou en distorsion contrôlée. Mais la beauté du geste réside dans cette capacité à se contenter de l’essentiel. Ainsi, l’interlude « Forge » se satisfait très bien de quelques arpèges sublimés par des voix féminines sépulcrales. Chorale d’église qui refuse les diktats de la religion et de la bigoterie, ce cinquième album est affranchi de toute obligation. Les musiciens se moquent des querelles de voisinage, n’épient pas leur prochain pour détecter un comportement troublant et s’occupent de leurs affaires. Des affaires qui nécessitent de longues minutes pour être traitées, mais qui terminent toujours par la même conclusion.
Tant qu’une idée est vivante, on la laisse respirer.
« Muraille », qui aurait pu construire un mur vous séparant de l’onirisme, préfère dessiner une porte que l’on emprunte pour passer de l’autre côté, où tout est permis, pour peu que les intentions soient poétiques mais lucides. Car ENDLESS FLOODS l’est, et sait très bien que le Doom, le Sludge sont des termes inventés par des journalistes en manque de labels, et qui détestent les esprits affranchis. On pourrait parler de Post-Hardcore, de Sludge atmosphérique, de Post-Rock enhardi, mais finalement, autant parler de musique. Une musique lancinante, qui confronte l’école 4AD à l’écurie Peaceville, et qui insère des humeurs à la DEAD CAN DANCE/THIS MORTAL COIL dans un contexte rude et âpre à la MY DYING BRIDE/KATATONIA.
Si vous aimez les symboles, la pochette vous en offre un sur un plateau. Un bûcher qui va s’allumer, non pour brûler des sorcières, mais bien pour fêter un nouvel âge. Un âge d’acceptation, presque de résignation face à l’inéluctable, et une reconversion, d’espèce dominante à terreau fertile pour de nouvelles espèces à venir. Rendons la terre à qui elle appartient, et cédons la place au lendemain.
Ce déluge éternel pourrait bien durer des années, des siècles, des millénaires. Et le bordelais disparaitra comme tout le monde, emporté par des torrents d’eau incontrôlables. Mais pas avant d’avoir arpenté une dernière fois ces quais de nulle part, que les touristes confondent avec un promontoire de luxe. « Rites Futurs » scelle leur destin, et ne laisse que les âmes les plus pures et les moins vénales envisager un adieu de circonstance.
Titres de l’album :
01. L’Eclair
02. Décennie
03. Forge
04. Muraille
05. Rites Futurs
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