De la lointaine Australie nous provient une déflagration énorme présentée sous la forme d’une démo conjointement élaborée par deux misanthropes Black Metal. D’un côté Drugoth, aka Austin Smith, batteur et vocaliste du groupe du même nom, de l’autre, Drøüyn aka Valdyr, musicien omnipotent au sein d’ALDER GLADE, pour une nouvelle entité diabolique baptisée SIGHTBLINDER, qui effectivement annihile les sens et provoque une cécité mélodique assez corsée. Cette première démo autoproduite arrive donc à point nommé pour officialiser la collaboration entre ces deux musiciens et créatifs, et malgré le petit quart d‘heure de jeu, on sent déjà d’énormes possibilités sauvages derrière ces six morceaux. Objectivement, SIGHTBLINDER ne propose rien de neuf qui nait déjà été hurlé par la génération scandinave des années 90, et on sent des influences assez évidentes dans la musique du tandem, qui pioche dans les œuvres de DARKTHRONE de quoi constituer son matériel malfaisant. Dotée d’un son bien sur très cru, Relinquishing Light est un travail de fond assez convaincant bien que très formel, et si le duo n’a pas cherché à enjoliver sa vérité, il ne l’a pas non plus travestie d’une production infecte pour sonner encore plus evil que ses concurrents.

Sonnant comme captée sur une bande fatiguée, cette démo fait la part belle à une sauvagerie très coutumière des premières années de rage du Black Metal le plus incorruptible. Pour autant, SIGHTBLINDER ne tombe pas dans les excès, et n’essaie pas d’imiter les méthodes d’enregistrement de BURZUM. Ceci dit, le climat est froid malgré la provenance australe du produit en question, et on s’imagine bien s’échanger sous le manteau cette maquette pour convertir des âmes égarées.

Rien de très original à dire à propos de ces chansons qui en sont vraiment et pas qu’une simple suite de sons stridents insupportables. Pas de feedback pour couvrir la pauvreté instrumentale, pas de chant émanant d’une vieille cave suintante et péniblement captée par un micro Fisher Price, mais de l’authenticité dans la cruauté, et des riffs traditionnels qui font admirablement bien le job. J’ai particulièrement apprécié cette fluctuation dans le roulement de la bande qui donne le sentiment d’avoir chopé un artefact des années 92/93, et la puissance qui se dégage de « Porcine King » trahissant une volonté de s’éloigner du rachitisme lo-fi. Certes, la batterie ne jouit d’aucun effet, la caisse claire sonne comme un vieux baril de lessive, la grosse caisse est nature, sans faux-cils, mais le tout s’ingurgite avec beaucoup de facilité, rappelant que malgré son côté parfois mainstream, le BM a su rester underground sans se corrompre dans des exactions pathétiques.

La voix de Drøüyn, très criarde nous ramène à la grande époque de la découverte d’un style nihiliste, et si le tout empeste effectivement le DARKTHRONE le plus historique, certaines idées plus personnelles permettent de se détacher de la référence. Ainsi, les arpèges clairs de ce même morceau suggèrent une mélodie un peu maladive ou mélancolique, tandis que l’outro lugubre « Winds Of Joper » nous ramène au cœur du blasphème avec ses arrangements digne du CELTIC FROST des débuts.

Avec une intro et une outro réussies, cette démo propose donc dans les faits quatre véritables morceaux de durées variées, mais tous sous la barre des quatre minutes, et répondant à un besoin viscéral simple. Retrouver l’impulsion du véritable Black Metal, un peu cheap sur les bords, mais convaincant. On espère maintenant que les deux larrons vont s’entendre comme s’ils étaient à la foire pour nous gratifier d’un véritable album (ou tout du moins d’un EP) dans un futur très proche, Relinquishing Light mettant la bave aux lèvres et inversant deux ou trois croix au passage.           

Titres de l’album:

01. Descending The Bore

02. Crystalline Embers Arise To The Full Moon

03. Relinquishing Light

04. Usurper Of The Pantheon

05. Porcine King

06. Winds Of Joper

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