De la nostalgie, encore et toujours. Les philosophes auraient certainement beaucoup de choses à dire sur cette vague rétrograde qui n’a de cesse de revenir aux origines de notre style de prédilection, mais faisons-fi de ces analyses sur canapé pour nous concentrer sur le meilleur : les souvenirs que dégage cette musique certes traditionnelle et déjà entendue des dizaines de fois, mais qui a su garder ce caractère cathartique en cette période plus que troublée. Et avec la sortie de ce premier album, c’est une double naissance que nous célébrons, celle du groupe KONQUEST en lui-même, mais aussi celle de son label polonais Iron Oxide Records qui sort donc ses deux premiers produits avec le LP des américains de MIDNIGHT SPELL. Fondé par le passionné Bart Gabriel, promoteur, Iron Oxide Records se place donc immédiatement sous des auspices vintage, et nous dévoile les deux premiers poulains de son écurie, qui ont tout de pur-sang prêts à cavaler sur le monde. Mais aujourd’hui, c’est du côté de l’Italie que nous allons séjourner, à Prato plus précisément, pour tenter de percer le mystère KONQUEST. A la base, le projet était encore une fois un one-man-band monté par Alex Rossi, guitariste, bassiste, batteur, chanteur, compositeur et auteur, qui a d’ailleurs composé et enregistré tous les morceaux de cet album avant de s’entourer d’un vrai groupe pour pouvoir arpenter les scènes du monde entier. Né en 2019, le concept a d’abord proposé une démo l’année dernière avant qu’Alex ne se jette à l’eau et nous offre ce The Night Goes On qu’il aurait pu baptiser The Knight Goes on. Car en tant que chevalier aux ordres du roi Heavy Metal, le musicien se pose là et prouve son allégeance à la cause.

Pas de tergiversation ou d’aiguillage sur une fausse piste, les choses sont claires dès le départ. Il faut dire qu’avec une production maison assurée par Alex, et un mastering soigné par le vétéran Heavy Bart Gabriel (CIRITH UNGOL, PAGAN ALTAR, SORTILEGE), The Night Goes On ne pouvait pas induire les auditeurs en erreur. Nous avons donc droit à une charge formelle de Hard-Rock n’Heavy de l’orée des années 80, lorsque THIN LIZZY influençait encore les groupes anglais de ses tierces et de ses mélodies, et le résultat est bluffant de crédibilité. Par sa production tout d’abord, qui semble émaner des années 79/81, mais aussi par ses compositions, simples, franches, harmonieuses, mais délicatement hargneuses. Les riffs sont immédiats et aiguisés, la rythmique mid mais appuyée, le chant un peu fluet mais délicieusement lyrique, et le tout exhale d’un parfum HEAVY LOAD assez appuyé, ce qui ne sera pas pour déplaire aux plus esthètes des puristes. A l’image du HAUNT américain, les italiens de KONQUEST assument leur passion à fond, ne cherchent pas à travestir le son d‘origine pour le restituer tel quel, et nous enchantent de chansons qui en sont vraiment, avec des couplets qui fédèrent et des refrains auxquels on adhère.

Pas de longue digression à la MAIDEN, mais un subtil parfum épique qui pique les naseaux et envoute les tympans. Une simplicité de ton qui le confine à la fraicheur d’un musicien qui reste fasciné par cette période fertile durant laquelle le Heavy Metal entamait sa transformation majeure sous l’impulsion de quelques groupes anglais plus téméraires et moins Punk que la moyenne. Ainsi, ce premier jet est d’une sincérité indéniable, et si son propos porte sur des thèses passéistes déjà largement éprouvées, la qualité de son écriture permet d’occulter ce formalisme de surface. Et c’est après une courte intro instrumentale que nous découvrons l’univers de KONQUEST via « The Night Goes on », title-track imparable et boogie qui nous renvoie au meilleur de cette époque charnière. La guitare est légère, la distorsion tamisée, mais l’énergie est là, et l’enthousiasme est contagieux. Le tout est impeccablement produit, ce qui confirme qu’Alex a tous les talents, trépidant comme une seconde jeunesse qui renvoie les soucis au placard, et les morceaux s’enchaînent sans temps mort ce qui permet de garder la pression à chaud.

Pas vraiment d’acmé à mettre en avant, même si la tension provoquée par l’intro galopante de « Fall Of The Konqueror » nous injecte un surplus d’adrénaline, en rappelant les débuts de MAIDEN et ces fameuses guitares à la tierce héritées du LIZZY. On se prend à rêver de ces duos célèbres, de ces paires de guitaristes complémentaires qui ne privilégiait pas encore la puissance à la mélodie, et avec un sens de l’à-propos rythmique très affuté, The Night Goes On perce nos lignes de méfiance une à une pour parvenir à entrer dans le château de nos certitudes.

C’est du travail extrêmement bien fait, terriblement allusif, et même pluriel, puisque « Helding Back The Tears » n’hésite pas à s’éloigner du Heavy Metal pour se rapprocher d’un Rock à la DEF LEPPARD, sans perdre en intensité pour autant. Les arrangements vocaux, sobres, permettent de garder prise sur la réalité des faits musicaux, et systématiquement, la guitare trouve le lick qui tue, pour nous entraîner dans un voyage dans le temps salvateur. Très loin des photocopieurs habituels de la vague old-school, KONQUEST propose un véritable répertoire construit et agencé, et se laisse même aller lors d’une clôture plus ambitieuse, avec les sept minutes bien tapées de l’épilogue « The Vision ». Condensé d’énergie, ce dernier morceau prouve que le groupe italien à de belles années à venir devant lui, et en tant que première signature pour les polonais d’Iron Oxide Records, The Night Goes On représente un coup d’éclat. Un album qui se dévore dans tous les sens, et vers lequel on revient pour embrasser de nouveau une adolescence de découverte et d’affirmation de sa personnalité.  

Une nuit éternelle et agitée qui rendra bien des rêves plus concrets.                

Titres de l’album:

01. Theme Of The Konqueror

02. The Night Goes on

03. Too Late

04. Keep Me Alive

05. Fall Of The Konqueror

06. Helding Back The Tears

07. Heavy Heart

08. The Vision

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