On appelle ça le syndrome de la page blanche. Ce moment intense où rien ne se passe, ni dans la tête, ni dans le stylo et encore moins sur le clavier. Pas par manque d’envie ou d’inspiration mais plutôt par peur de ne pas être à la hauteur de ses attentes, de ses désirs. Les affres de la déception en quelque sorte. Pourquoi donc s’escrimer à rédiger une chronique si la finalité n’est pas à la hauteur de son intention initiale, celle de se faire plaisir à l’aboutissement de celle-ci ? Comment rendre la lecture d’une chronique agréable pour férus de musique si l’on a déjà du mal à exprimer ce que l’on ressent au fond de soi ? Pour être concis, comment faire plaisir au lecteur sans se faire plaisir avant tout ? « Je suis comme je suis », écrivait aussi pudiquement que merveilleusement Jacques Prévert en 1956, dans son recueil de poèmes Paroles. C’est exactement cela. A prendre ou à laisser. C’est de cette manière qu’a été initié le projet ARES…, un one-man-band relativement mystérieux, à l’aura vraiment singulière. Celui-ci m’a expressément été recommandé par un ami sur Facebook. Pour ma part, jamais je n’avais entendu parler de ce projet. Etant plutôt d’un naturel curieux, me voici donc à la recherche de quelques informations sur ce ARES… en question. Quelques clics et voici la page Bandcamp qui apparait sous mes yeux. Trois albums au compteur et trois artworks plutôt joliment troussés bien qu’assez similaires dans l’esprit. L’esprit… Il y en a dans cette musique. Et plutôt deux fois qu’une.
Difficile d’obtenir des informations concrètes s’agissant de ce musicien de l’ombre officiant donc à tous les postes inhérents à la conception d’un album. L’homme est aussi discret sur ses méthodes de travail ou de composition que sa musique est riche et intense. Aux quelques questions glanées au hasard d’échanges fort courtois et terriblement sincères via messenger, le musicien répond presque inlassablement : « tout est dans ma musique, aucun intérêt d’en rajouter ». En d’autres termes, impossible pour moi d’en savoir davantage. Qu’à cela ne tienne, la musique est un vecteur de communication paradisiaque. Me voici donc à l’entame de ce Black Hole paru en décembre dernier. On le sait désormais, le musicien s’est chargé de tous les instruments du disque en plus du mixage, de la production, du mastering et de l’écriture. Un travail absolument titanesque à saluer comme un seul homme tant le résultat est probant pour ne pas dire prodigieux. L’écriture tout d’abord. La musique proposée par ARES… est essentiellement instru-mentale, en ce sens que le vôtre -de mental - risque d’être mis à rude épreuve à l’écoute de cette musique luxuriante. Il vous faudra plusieurs écoutes pour comprendre l’essence du travail de cet excellent musicien et arrangeur, certaines d’entre elles effectuées au casque vous seront par ailleurs nécessaires afin d’en retenir toutes les subtilités. Les parties de guitares sont à ce point développées que l’attention de l’ouïe est requise à son potentiel le plus élevé. Les superpositions de six-cordes ont cela de passionnant qu’elles attrapent l’étrier pour ne plus le lâcher et poussent l’auditeur dans ses derniers retranchements. Car oui, l’écoute peut par moment s’avérer éprouvante pour qui n’a pas l’oreille un peu attentive et délicate. Il est parfois difficile de maintenir un niveau d’écoute aussi élevé que le niveau technique proposé. Mais dans un souci d’équilibre judicieusement travaillé en amont, l’auteur des partitions a su trouver quelques magnifiques moments d’une douceur bienvenue, de chatoyants oasis de fraicheur que l’on peut qualifier d’oxygénation du cerveau avant de repartir de plus belle à la découverte de cette jungle sonore encore vierge de tout coup de machette destructeur. ARES… pourtant ne détruit pas, bien au contraire. Il déconstruit nos certitudes pour remodeler à sa façon et de ses mains généreuses certains de nos fondements que l’on croyait volontiers inébranlables. Alors on progresse au son de ces rythmes souvent asymétriques à cinq ou sept croches, de ces tierces, de ces cartes à jouer en quintes et de ces claviers dignes d’un délicat effeuillage des choux. Les lignes de basse sont elles aussi de toute beauté et extrêmement bien mises en avant de le son globale de l’album. Un régal ! Les ambiances apportées à la structure des morceaux sont autant de ponts de traverse parfois sombres, souvent lumineux mais toujours judicieusement à propos. Pour définir la quintessence de ARES…, il est nécessaire d’aborder cette œuvre comme une musique de film dont il n’est pas question d’en couper le fil. A écouter d’une traite et sans temps mort. On pense parfois à Hans Zimmer pour une certaine grandiloquence, à Vangelis qui ne doit pas être très loin non plus, de même qu’à Eric Serra dans ce qu’il a pu proposer de plus percutant et musclé. La mise en son est globalement de très haut niveau même si cela peut sonner peut-être de temps à autres un peu froid, voire légèrement clinique. Un parti pris ? Nul ne le saura. Sans doute le musicien, seul maître à bord, manque-t-il de hauteur de vue, ce qui serait tout à fait compréhensible à la lumière du peu d’éléments dont je dispose pour la rédaction de cette bafouille. Peut-être l’avis d’un tiers lui aurait été bénéfique afin de capturer un petit supplément d’incandescence dans la mise à plat du son. Mais il serait bien présomptueux de ma part d’apporter un jugement aussi hâtif qu’abrupte et malvenu ! Il s’agit là d’un ressenti personnel bien maladroit, convenons-en. Les influences du musiciens, en plus de celles précitées, semblent aussi diverses que variées. Pour ma part, j’ai perçu quelques bribes de Sithu Aye, un soupçon de DEPECHE MODE, quelques larmes de Stanislas - oui le chanteur-auteur-compositeur français – et sans doute pas mal de Steve Vai ou Frank Zappa pour l’aspect audacieux et les relents plus que jazzy de certaines compositions. Attention ! Tout ceci n’engage que le rédacteur de ces quelques lignes. Chacun y trouvera sa fibre personnelle, sa connexion cognitive propre car la musique de ARES… est avant tout une invitation à l’introspection, au voyage intérieur et cérébral ainsi qu’à la main mise sur le vortex émotif. Black Hole laisse libre court à l’imagination de chacun tout en laissant percevoir ce qui est familier. C’est tout le paradoxe de cette musique. Ardue mais délicieusement attachante. Difficile d’accès de prime abord, elle se laisse néanmoins apprivoiser lorsque l’auditeur exigeant en perce le secret. D’autant que l’inverse est aussi très vrai en ce sens que tous les amateurs de metal ne parviendront sans doute pas au terme d’une première écoute, distraite de surcroit. Il faut être attentif, à l’écoute de ses pulsions naturelles en ouvrant ses chakras, son cœur et ses oreilles le plus largement possible. ARES… se mérite. Lorsque les conditions sont réunies, tout devient alors limpide et jouissif. Le metal n’est qu’un postulat de départ et il serait bien triste et complètement injuste d’enfermer cette musique dans ce carcan. Si l’auditeur se doit de l’apprivoiser, cette œuvre a elle aussi besoin de vous apprivoiser pour être votre amie. Elle ne se livre pas facilement. Elle est un peu sauvage, espiègle mais désireuse de montrer l’étendue de son affection débordante. On n’écoute pas la musique de ARES… comme celle d’un ascenseur sinon elle se braque et tourne les talons pour mieux vous snober avec panache. Bref, c’est une musique d’adultes consentants et de bonne foi. Tout le monde ne le sera pas et ce sera bien dommage car ARES… s’avère tout bonnement passionnant même si quelques défauts seraient peut-être à souligner, aucune œuvre n’étant par définition parfaite. D’autant que le tourbillon formant le trou noir de l’artwork n’a pas l’air commode, si vous voyez ce que je veux dire. Effrayant à regarder de peur de s’y précipiter. A moins que ce ne soit lui qui vous regarde…
Track listing
1 - Human Reality
2 - Wormhole
3 - Illusion Of Time
4 - Nebula
5 - Black Hole
6 - Earth Mother
7 - Sagittarius A
8 - Osmosis Stary
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