Vous avez dit Old-School Death Metal ? Ok, mais sortons un peu des sentiers battus du cimetière je vous prie. Alerté par l’infatigable Rob de Mind Eraser PR, j’ai pointé du doigt la quintessence du recyclage intelligent en rencontrant les HEADSHRINKER, originaires du Colorado, qui avec leur premier album Callous Indifference proposent une digression intelligente sur le Death de papa pour le rendre plus personnel et disons…plus actuel.
En écoutant ce premier album, on est immédiatement frappé par la maturité des compositions, et leur esprit aventureux et subtilement avant-gardiste. On se dit alors qu’on a eu la chance de dénicher des musiciens d’exception, avant d’aller plus en avant dans la bio des individualités. Et les noms se cachant derrière ce nouveau baptême ne seront certainement pas inconnus des amateurs underground de violence américaine. En effet, Young Werther, Scott Skopec, et Frank Lato, l’épine dorsale de HEADSHRINKER, jouaient déjà ensemble au sein de POLYPTYCH lorsqu’ils étaient encore basés à Chicago, et leur approche technique d’un Death déformé et remoulé selon leur volonté montrait déjà des signes de distanciation avec la facilité nostalgique en vogue depuis plus d’une quinzaine d’années. Les points communs entre les deux groupes seront donc nombreux, ne serait-ce que d’un point de vue instrumental, pour autant, HEADSHRINKER est loin d’être une simple extension de POLYPTYCH. D’abord, à cause du thème abordé qui rapproche ce Callous Indifference d’un concept, d’autre part, à cause d’une personnalité notable étant venue se greffer au line-up. On retrouve en effet derrière le kit le monstre percussif Pete Webber, frappeur chez les HAVOK, ce qui garantit à ce nouveau projet une exposition maximale, qu’il mérite amplement.
Du Death donc, que la boite de promotion conseille aux fans de PYRRHON, TOMB MOLD, ULTHAR, DISKORD, tout en citant benoitement d’autres noms plus illustres, dont ceux de AKERCOCKE, TRIPTYKON, CELTIC FROST ou CHELSEA WOLFE. Pour éviter toute vulgarisation trop grossière, je précise immédiatement que les quatre dernières références ne servent qu’à attirer le chaland. En effet, la musique des américains m’a plutôt fait penser à une mixture assez intelligente entre des références comme DISHARMONIC ORCHESTRA et PUGENT STENCH, le tout sous couvert d’aspirations artistiques à la DODECAHEDRON. Soit un Death Metal qui n’a pas peur de jouer avec les limites, de provoquer le Doom le plus poisseux pour en appeler au ressenti le plus cryptique. Ce qui en soit n’est pas illogique, puisque la santé mentale et les façons de partir à la dérive de la réalité constituent les points d’ancrage des thématiques.
Ce disque incarne le combat que j’ai dû mener contre la folie à travers les années, et s’inspire de cet acharnement à s’accrocher dans les périodes les plus sombres et cette envie de s’en sortir malgré un environnement hostile. Ses thèmes abordent l’isolation volontaire, la déconnection émotionnelle, le manque de confiance en soi, l’insomnie, les crises existentielles, mais chaque auditeur pourra en interpréter le sens selon sa propre expérience. Nous gérons tous la douleur à notre façon, et cet album accepte la douleur, et présente la maladie mentale autrement que par des stéréotypes et des symptomes. Après tout, nous luttons tous, et au final, seule la mort est réelle.
C’est ainsi que le groupe commente ce premier album, qui de sa musique complexe essaie de définir les contours du combat d’un homme contre ses propres démons, et son altération de la perception. Pour en arriver à un résultat plus ou moins concret et pertinent, il fallait évidemment aller piocher les éléments au plus profond de soi-même, et proposer une musique complexe, parfois schizophrénique, souvent inextricable, et ainsi personnifier les maladies mentales pour les rendre tangibles. HEADSHRINKER a donc brillamment accompli sa mission, en opposant des plans inverses, en reprenant parfois contact avec la réalité harmonique et rythmique, mais en usant de plans techniques et complexes pour nous entraîner dans les méandres d’une perception alternative.
Très élaboré, précis au millimètre, ce premier album pourrait s’apparenter à une dérive nocturne de David Lynch sur les routes sinueuses de Mulholland Drive, avec toutefois un but clair : transposer la douleur en musique, et illustrer le combat moral en plans rythmiques percussifs, rapides, épileptiques, ou totalement absents.
Guitares en mélodies stridentes et dissonantes, basse proéminente et ronflante, batterie en mouvement constant, chant atonal qui prend soudainement des accents maladifs, les éléments sont pertinents et utilisés à bon escient. Ne cherchez donc pas un riff simple et morbide auquel vous raccrocher, puisque ces gimmicks ne sont placés qu’à intervalles très irréguliers, lors de breaks plus synthétiques que la moyenne, ou des transitions vers des passages vraiment complexes et traumatiques.
Avec des parties de cordes électriques en distorsion moite, des inserts plus harmonieux, des instants de folie instrumentale pure, ce premier album ressemble clairement à une analyse enregistrée pour permettre aux médecins de réfléchir aux conséquences possibles de l’affrontement psychologique. Entre Death acrobatique et plus expérimental qu’avant-gardiste, Doom/Death poisseux et psychotique (« Haunted By Your Reflection », très justement titré), et fulgurances plus épidermiques (« Suffocating Tomb »), Callous Indifference s’éloigne de la masse old-school avec une sincérité rare, et présente un visage multiple qui séduira les amateurs de Death innovant et risqué. L’expérience POLYPTYCH continue donc sous des auspices encore plus étranges et personnels, et en un seul disque mature HEADSHRINKER impose son nom et laisse augurer d’une guérison longue, mais cathartique pour tout le monde.
Titres de l’album:
01. The Burn Of Indifference
02. Cadaver's Mind
03. Immolated Witches
04. Wretched Soul
05. Lost To This Insomnia
06. Haunted By Your Reflection
07. Suffocating Tomb
08. No Lineage Shall Follow
C'est le groupe du chanteur de feu Paean. Il faut que j'essaie l'album de 2022.
15/03/2025, 15:41
Franchement Alcest mérite mieux qu'un de ces énièmes groupes de post-rock ou post-metal à la con ou tout est recraché.
15/03/2025, 11:50
Très bon groupe de Death grind,que je viens de découvrir moi qui aime la musique extrême je ne suis pas déçu !Je le conseille à tous
12/03/2025, 10:09
Va vraiment falloir arrêter ces commentaires politiques systématiques, c'est d'un redondant, même si, je conviens que pour le présent groupe ce soit peu évitable. Mais un peu de sérieux, le capitalisme honni se réjouit justement des luttes (...)
12/03/2025, 08:01
Oui il y avait des tensions je pense. Hinds voulait clairement une orientation moins "Metal" depuis quelques temps pour Masto... Et dernièrement il était très critique sur le concert d'adieu de Black Sab' auquel Masto va participer. Il avait po(...)
11/03/2025, 20:35
Du tout bon ça !!!PS : L'intro de la chro c'est pour de vrai mortne2001 ou juste pour la beauté du texte ???
11/03/2025, 19:29
Apparemment Hinds était moins impliqué dans le groupe ces derniers temps mais c'est vraiment dommage cette séparation.
11/03/2025, 07:47
Perso, à part leurs deux premiers albums qui sont vraiment géniaux, le reste est quelconque et prétentieux.
08/03/2025, 16:08
Tout comme Gargan, bien plus ADIPOCERE que HOLY à l'époque.HOLY étant bien trop atmo-avant-garde-mélo-musique-du-monde pour moi.Pout autant, GLOOMY GRIM et TRISTITIA ont été de très grandes révélations au mili(...)
08/03/2025, 10:09
Le catalogue était culte avec ses descriptions d'albums !!! ("la batterie va à 1000 km/h", "l'album de la maturité",...) Ma discothèque s'est constituée au début en grande partie grâce à eux.
07/03/2025, 16:48
@ Mortne2001 :J'ai maté les films que tu conseillais et que je n'avais pas encore vu (voir même entendu causer...) :- ODDITY : Mouuuais... ... ...Idée de base pas mal mais des incohérences scénaristiques qui gâche totalement t(...)
04/03/2025, 12:25