Darkness Must Prevail

Obscure

05/11/2019

Xtreem Music

Il n’est jamais facile de voir le jour à une époque où tout était encore possible et envisageable, et de sortir son premier album à une époque où tout a déjà été fait et réalisé. C’est ce qui est arrivé aux espagnols d’OBSCURE, qui en 1988 n’auraient sans doute jamais imaginé devoir attendre plus de trente ans pour enfin pouvoir publier leur premier long. Tout avait pourtant bien commencé pour eux, avec une première démo célébré dans l’underground des fanzines (Disgusting Reality), et parfaitement en phase avec son temps. S’ensuivirent des efforts pour singulariser leur son, en accordant leurs guitares quelques tons plus bas, et accoucher d’une seconde maquette, plus professionnelle (Curse the Course, 1991, leur achèvement semble-t-il), avant d’en proposer une dernière plus technique et peaufinée l’année suivante (Non Existendi Cultus, 1992). Et alors que leur voie semblait toute pavée vers les abysses d’un Death Metal vraiment torride et passionné, le destin décidément chafouin décida de les rappeler à leur simple condition d’êtres humains soumis aux aléas d’une vie trop prosaïque. Entre des problèmes de local de répétition, et les exigences d’un boulot alimentaire inévitable, le groupe sombra, jetant les armes avec haine, certainement fort déçu de ne pas pouvoir continuer une aventure si bien entamée. Dès lors, entre d’autres conceptions, des tentatives de reformation avec un line-up différent, et une certaine lassitude, les musiciens retournèrent dans une ombre qu’ils n’avaient pas méritée, sans toutefois renoncer à leurs rêves putrides. Et c’est ainsi qu’en rappelant dans le giron les formateurs, et en leur associant de nouveaux visages, OBSCURE put enfin rattraper son histoire et nous offrir ce premier album qui aurait dû voir le jour quelques décennies plus tôt, mais qui en 2019 nous réjouit de sa philosophie nostalgique et de son approche caverneuse…

Ce sont donc les nationaux d’Xtreem Music qui s’occupent aujourd’hui du cas des originaires de Valence, permettant à ce Darkness Must Prevail de bénéficier d’une exposition non négligeable. Et sous une pochette superbe se cache donc l’un des LP revival les plus crédibles de cette année, qui non seulement se paie le luxe de ne pas trahir les dogmes d’origine, mais qui en sus profite de l’allant d’une vague old-school qui à n’en point douter, saura charrier dans son sillage cette vague de violence non édulcorée apte à inonder les côtes européennes, et surtout, suédoises. En connaissant légèrement les débuts du groupe, on reconnaît immédiatement ce son si grave qui conférait à leurs deux dernières démos cette patine si démoniaque. Ce son hérité des maîtres à penser suédois et nordiques, les GRAVE, ENTOMBED, DISMEMBER, et qui lorsqu’il ralentit la course se rapproche aussi d’INCANTATION. D’ailleurs, ce sont des influences que le groupe admet partiellement, citant dans sa liste BOLT THROWER, CARCASS, DEMIGOD, mais aussi les rois de l’Indus Metal GODFLESH, histoire de ne pas se retrouver prisonniers d’une étiquette trop bien collée. Un peu de tout donc dans cette musique aussi sérieuse qu’elle n’est ludique, mais surtout, et par-dessus tout, du Death Metal, tel qu’on le pratiquait à l’orée des nineties et durant toute la décennie. On en retrouve ici les codes, et plus que tout l’épaisseur de la production, qui sur Darkness Must Prevail se veut aussi caverneuse et épaisse que claire et précise. Tout ça nous permet d’apprécier une technique instrumentale rodée, et l’acuité de musiciens (Guitare : Rafa C., Batterie: Enri Sanchis, Basse : Anselmo Roca, Guitare : Voris Ortiz et Chant : Xavier Beleth) qui connaissent par cœur les figures imposées. Et pour cause, puisqu’ils étaient là en même temps que les autres, contemporains des PESTILENCE, NIHILIST, OBITUARY et MORBID ANGEL. Certes, ils n’ont pas bénéficié de la même aura, n’ont pas joui du même écho de gloire, mais la qualité de leur musique aujourd’hui leur permettra de se faire une place à la lune des abimes infernaux d’un Death vraiment profond, solide, qui se montre aussi incorruptible qu’il n’est catchy.

Pour faire simple, OBSCURE a signé avec ce premier album une sorte d’archétype, un symbole, et mieux, la quintessence d’un Death Metal d’antan qui a toujours sa place aujourd’hui. On retrouve dans leur approche tout ce que l’on a toujours adoré dans ce style, cette ambiance glauque et macabre, ces guitares d’outre-tombe, ce chant si caractéristiquement grave et scandé, et cette rythmique évolutive mais puissante. Osant mélanger toutes les composantes d’un sous-genre, les espagnols nous livrent huit compositions sans compromis, qui valsent entre la lourdeur la plus pesante d’un Doom Death suintant et empestant les caves (« Through Self-Repulsion »), et la vélocité raisonnable des premiers DEATH/ENTOMBED (« Darkness Must Prevail »). Mais c’est évidemment du côté de la Suède qu’il faut chercher l’influence la plus marquante, même si l’atmosphère générale n’est pas sans rappeler le nihilisme et la misanthropie de la scène Hollandaise de la fin des années 80. Les plus pointus argueront du manque de précision si particulier de l’école US, ce qui ternit un peu la vision d’ensemble que cherche à atteindre Darkness Must Prevail, mais ce manque se verra vite comblé par une perfection indéniable qui permet à chaque titre d’atteindre une véritable apogée de violence. Sourd mais intelligible, massif mais détaillé, ce premier album vient enfin couronner un parcours erratique, et offre aux espagnols une revanche bien méritée. Il n’y a formellement rien à reprocher à ce premier effort qui cherche même la variété en aérant ses riffs et sa rythmique (« After Life »), et qui termine sa course par un sprint en boulet de canon (« Blessing of Malignancy »). Une vraie révélation venue du passé et trouvant écho dans un présent friand de nostalgie, qui se repaîtra d’une bonne pièce d’histoire en carpaccio de bestialité froide. OBSCURE risque donc de contredire son nom et de se retrouver exposé à la lumière d’une scène Death Metal old-school qui ne rechigne jamais à braquer les projecteurs de la mort sur ses représentants les plus vivaces et vivants.    

                           

Titres de l’album :

  • Curse of My Race
  • Darkness Must Prevail
  • After Life
  • End Destination
  • Sunk Into Oblivion
  • Through Self-Repulsion
  • Into Utter Darkness
  • Blessing of Malignancy

Facebook officiel


par mortne2001 le 16/02/2020 à 17:49
80 %    1064

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Voyage au centre de la scène : BLOODY RITUAL

Jus de cadavre 17/03/2024

Vidéos

Crisix + Dead Winds

RBD 20/02/2024

Live Report

Abbath + Toxic Holocaust + Hellripper

RBD 21/01/2024

Live Report

1984

mortne2001 10/01/2024

From the past

SÉLECTION METALNEWS 2023 / Bonne année 2024 !

Jus de cadavre 01/01/2024

Interview
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Gargan

Très cool de découvrir ce groupe ! La présentation est plus fluide mais il faudrait laisser la place à un extrait à mon avis et ça permettrait de mieux rythmer la vidéo.

19/03/2024, 08:17

Arioch91

Perplexe également.Dehydrated et Out of the Body (Out, pas Ovt sans déconner ! C'est quoi leur manie de remplacer les U par des V ?) sans Martin Van Drunen, j'ai même pas assez de curiosité pour écouter ce que ça peut donner.

19/03/2024, 07:52

Arioch91

J'avais aimé le premier Vltimas. Il fait partie de cette tonne d'albums que l'on oublie mais qu'on ressort de temps à autre pour se les repasser et se dire "ah ouais, c'est pas mal" avant de les remettre en place.J'ai écout&eacut(...)

19/03/2024, 07:43

Arioch91

Ils n'ont pas encore viré la "nouvelle chanteuse" ?

19/03/2024, 07:39

DPD

Tant mieux pour ceux qui aiment moi ils me font chier avec cette fétichisation du metal old school.

18/03/2024, 17:37

stench

J'aime bien le principe de réenregistrer des classiques pour voir ce que ca donne avec un son actuel. Le problème est double ici : réenregistrer des morceaux récents n'a que peu d'intérêt, et surtout en me basant sur le titre mis en é(...)

18/03/2024, 13:13

Gargan

Oui, et non. Dans le sens que s'ils veulent vendre leur compile qui sent très fort le réchauffé, il vaut mieux qu'ils écoutent un minimum la base de fans qui seraient potentiellement intéressés par l'objet (et ils ne sont pas Maiden qui peu(...)

18/03/2024, 08:05

pierre-2

Pourquoi tout ce venin ???Y font ce qu'ils veulent non ?

17/03/2024, 14:26

Fran

J ai adoré ce film qui m'a fait connaître ce groupe. Depuis je me repasse  leurs tubes.

17/03/2024, 14:07

Nounours dit grizzly le magnifique

J’ai pris la version cd version digipack plutôt que le vinyle car il y avait 3 titres bonus .trop tôt pour donner un avis mais je ne m’ennuie pas, sans être transcendant mais on peut pas exigeant avec ce groupe et une telle carrière. Cela dit il fai(...)

16/03/2024, 11:55

Sphincter Desecrator

UHL: un groupe qui, quand il n'est pas là, manque.Désolé...

14/03/2024, 19:31

Humungus

Bon...Pour l'instant, je ne l'ai écouté qu'une seule fois...Mais dans l'ensemble, j'ai été quelque peu déçu.La faute à un côté Power bien trop présent tout au long de l'album.

13/03/2024, 07:24

Désanusseur de mère

groupe de petites gauchiasses qui crisent si on n'emploie pas le bon pronom. FOUR

13/03/2024, 06:17

jo666

ça a l'air bien ce truc, en plus ils passent en mai à Grrrrnd Zero (69)

12/03/2024, 14:33

Cupcake Vanille

Vraiment une bien triste nouvelle...  RIP Blake 

12/03/2024, 08:25

MV

Sympa la fowce <3 

11/03/2024, 18:24

LeMoustre

Commande faite direct au label.Hâte d'écouter les nouvelles versions de The Song of Red Sonja ou The Thing in the Crypt.Meilleure nouvelle de la semaine,Merci pour la chronique en plus hyper favorable 

11/03/2024, 15:32

LeMoustre

Terrible.Déjà que le EP envoyait sévère dans la veine Wotan, early Blind Guardian ou Manowar, voici l'album !Achat obligatoire

11/03/2024, 14:55

senior canardo

toujours pas de Phobia à l'affiche.... j'y ai cru pour les 25 ans et tout  ...

11/03/2024, 07:39

LeMoustre

Miam

08/03/2024, 14:22