Defragments Of Insanity

Necrodeath

05/04/2019

Scarlet Records

Sins n’avait suscité chez moi qu’une indifférence polie, me permettant d’affirmer avec un certain dédain que les italiens n’étaient pas maîtres en la cause Thrash, la faute à une approche trop primitive et linéaire qui les empêchait depuis toujours de rivaliser avec leurs cousins germains et américains. Il faut dire que cet album était loin de déclencher l’euphorie que l’on est toujours en droit d’attendre d’un album du cru, se contentant la plupart du temps de répéter des formules convenues, la plupart déjà énoncées par le groupe sur ses premiers albums que certains considéraient pourtant comme des classiques. N’ayant jamais vraiment posé genou à terre pour prêter allégeance aux chevaliers de la table ronde transalpine, mais reconnaissant des qualités débridées aux séminaux BULLDOZER, ce constat ne m’étonnait pas plus que ça, et c’est avec générosité que je lâchais un modeste six sur dix à cet album anecdotique. Cinq années plus tard, et ayant volontairement fait l’impasse sur un The Age Of Dead Christ que ne je jugeais pas digne de mon temps, c’est avec appréhension que je me décidais à rencontrer à nouveau ces originaires de Gênes, qui à peine un an après leur dernier effort décidaient de remettre le couvert. Ayant déjà préparé la poche de restes pour un doggy bag cheapos à refiler à des potes moins exigeants, j’acceptais d’écouter d’une oreille distraite ce Defragments of Insanity, qui me mettait quand même la puce à l’oreille de son titre en forme de clin d’œil. Sans avoir plus d’informations, j’y voyais une suite possible au second LP des italiens, ce Fragments of Insanity qui en 1989 avait agité la planète Thrash de ses soubresauts agressifs, me disant à tort que les italiens, conscients de ne rien proposer de très probant depuis les eighties avaient choisi la voie du classicisme en jetant sur la table une suite des évènements passés que je jugeais d’ors et déjà anecdotique.

Et mon instinct me trompa de très peu, puisque ces NECRODEATH chafouins ont en effet décidé de se tourner vers leur (moyennement) glorieux passé, non pour le pérenniser et y ajouter de nouveaux chapitres en continuant l’histoire initiale, mais pour en reprendre l’un des épisodes les plus notables, histoire de lui accorder un coup de jeune sous une lumière plus contemporaine. C’est ainsi que trente ans après la parution de ce que leurs fans considèrent comme son plus haut fait d’arme, le quatuor (Peso - batterie, Flegias - chant, Pier Gonella - guitare et GL - basse) nous offre une relecture moderne de Fragments of Insanity, qui non seulement tient largement la comparaison temporelle, et qui se permet même de transcender les influences d’origine en leur offrant un son à décorner les bœufs de Sicile. En acceptant que le line-up d’origine se limite aujourd’hui à la présence au kit de Peso, seul membre des primes années, on pourrait presque considérer ce Defragments of Insanity comme un nouvel album, si nous ne connaissions déjà ses morceaux qui en faisant preuve d’objectivité, représentent ce que le combo italien a pu produire de plus effectif depuis son émergence au milieu des années 80. Ridiculisant tous les jets originaux produits depuis, Defragments of Insanity rappelle qu’à une époque, NECRODEATH aurait pu jouer les premiers rôles de la scène Thrash européenne, si celle-ci ne glissait pas déjà sur la pente savonneuse du Death en 1989. Prouvant qu’ils avaient des armes efficaces sous la main, les quatre italiens nous refont un coup classique, celui du lifting qui permet de fêter un anniversaire à moindre frais, rejoignant donc les EXODUS, SODOM et autres cadors du Thrash mondial dans les rangs des nostalgiques de l’âge d’or. Sauf qu’en dépit de ce formalisme facile, autant admettre les choses, qui mènent à un constat plein d’ambivalence. En optant pour un travail d’exhumation/restauration, les italiens livrent leur meilleur travail depuis… Fragments of Insanity, ce qui peut se montrer aussi flagrant que gênant, considérant que depuis, le groupe a quand même publié pas moins de dix albums.

Ceci dit sans aucune méchanceté, puisque je n’ai pas grand-chose à reprocher à ce combo sympathique, quoique terriblement secondaire. Mais là où d’autres se sont méchamment vautrés en croyant pouvoir surmultiplier la puissance et la démence de leurs œuvres les plus mémorables, NECRODEATH réussit son pari, et fête trois décennies de parcours avec un faste de brutalité et de méchanceté instrumentale. Les originaux qui ne donnaient déjà pas dans la dentelle ne sont pas ramollis par le temps et le traitement contemporain, bien au contraire, et sonnent encore plus frais et déments qu’en 1989. Si l’on retrouve évidemment le charme des compositions initiales, qui au crépuscule d’eighties à l’agonie donnaient un coup de fouet au Thrash de papa en l’agrémentant d’un parfum Death très prononcé (école INCUBUS avec diplôme à la clef), le traitement 2019 apporte une nouvelle lumière de folie sur cette intensité qui ne s’est pas démentie, permettant au line-up le plus stable de la formation de frapper un grand coup et se replacer sous les feux des projecteurs. Totalement dans le contexte d’un mouvement nostalgique qui va certainement réserver à Defragments of Insanity l’accueil qu’il mérite, NECRODEATH rappelle qu’il était déjà là en même temps que toutes les autres références du genre, et qu’il a encore de quoi en remontrer aux nouvelles générations. Et dès le magique et foudroyant « Choose Your Death », la messe noire est dite, et le Thrash furieux replacé dans un contexte de crédibilité qu’une production énorme vient souligner de ses graves profonds et de ses médiums carton.

Pas de doute à avoir, les riffs sonnent plus tranchant qu’un saucisson coupé par Kerry King, et l’atmosphère générale se place en convergence des incendies déclenchés par Interstellar Experience d’ASSASSIN et Beyond The Unknown d’INCUBUS. Avec seulement trente-quatre minutes au compteur, Fragments of Insanity jouait la montre, et son digne successeur profite de cette brièveté pour donner quelques leçons aux nouvelles générations, accentuant les mid-tempi (« Thanatoid »), contraignant les mélodies à ventiler les segments les plus affolés (« Metempsychosis »), pour finalement rappeler à quel point SLAYER a représenté l’une des influences les plus marquantes de la scène italienne des années 80. Véritable plaisir même pas coupable, ce nouveau visage offert à une ancienne grimace de mort est un véritable bain de jouvence, d’autant plus que le LP original, réédité par deux fois en CD est devenu de plus en plus difficilement trouvable à des prix raisonnables. Voilà donc une bonne raison de vous jeter sur cette réactualisation d’un répertoire de saison, qui va peut-être donner aux  NECRODEATH l’impulsion indispensable pour renouveler leur répertoire plus contemporain.  


Titres de l’album :

                         1.Choose Your Death

                         2.Thanatoid

                         3.State of Progressive Annihilation

                         4.Metempsychosis

                         5.Fragments of Insanity

                         6.Enter My Subconscious

                         7.Stillbirth

                         8.Eucharistical Sacrifice

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par mortne2001 le 02/07/2019 à 17:34
88 %    897

Commentaires (2) | Ajouter un commentaire


Humungus
membre enregistré
03/07/2019, 08:07:39
Un monument.

LeMoustre
@77.146.224.133
04/07/2019, 20:41:53
Riff à la Voïvod vers 1'10", qui suit un autre qui rappelle par Slayer période Seasons, mais en fait non, ils avaient fait ça avant, héhé.
Si l'original est toujours préférable, voilà un second album, sans oublier le premier aussi excellent (Into the Macabre), qui nous rappelle que les Ritals étaient fort efficaces, avant leur split.

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