Diamond Baby Blues

Lee Aaron

27/04/2018

Metalville

J'ai eu envie d'enregistrer un album avec des réminiscences Blues classiques, des vibrations Heavy Rock, qui m'ont influencée quand j'étais jeune dans les années 70. Des chanteurs comme Paul Rogers, ou Janis Joplin, des groupes comme LED ZEPPELIN, DEEP PURPLE ou FLEETWOOD MAC...J'adore utiliser cette facette vocale, cette patine Soul de ma voix, je prends beaucoup plus soin de mes cordes vocales que lorsque j'étais plus jeune, parce que j'ai réalisé que c'était mon instrument après tout...

C'est ainsi que la belle canadienne LEE AARON présente son nouvel album aux fans et à la presse, et après tout, il n'y a aucun mal à dévier un peu de sa trajectoire...L'idée paraît d'ailleurs aussi bonne qu'elle n'est dans l'air du temps, à comptabiliser le nombre de groupes se réfugiant dans le passé pour écrire leur présent. Et après tout, depuis que le temps que Lee traîne dans le business, elle a bien le droit de faire ce qu'elle veut. Il est évident que ses fans les plus hardcore des années 80 auront bien du mal à reconnaître leur Metal Queen préférée, mais pas plus qu'ils n'en avaient lorsque la musicienne se consacrait à des ambiances plus jazzy...Plusieurs questions se posent au prime abord lorsqu'on découvre un album comme Diamond Baby Blues, dans les termes principalement, puisqu'en connaissant bien le parcours et la discographie de la vocaliste, on cherche sans vraiment trouver les éléments qui ont pu mener à un tel virage, sans même aller jusqu'à fouiller dans son passé le plus ancien. J'en étais personnellement resté à son dernier album en date, le très plaisant et modernement sautillant Fire & Gasoline, dont j'avais dit tout le bien Pop que je pensais de son Rock dans une chronique précédente, et le single « Tomboy » m'avait même pris par surprise, se posant comme le hit que Lee n'avait jamais vraiment réussi à écrire jusqu'à lors. C'est donc encore pris à revers que j'ai entamé l'écoute de ce Diamond Baby Blues, qui n'est pourtant ni un diamant, ni un bébé à proprement parler, mais qui dégage une jolie force Blues...Et sans aller jusqu'à tenir la comparaison avec Beth HART ni même Janis JOPLIN (nous en sommes même assez loin), autant dire qu'il fait assez bien le job, proposant un joli mélange de compositions originales et d'une poignée de reprises assez bien senties. Bien senties, mais un peu légères face aux originales, et autant évacuer la problématique d'emblée.

Lee se prenant pour une soul woman ou une bluesy warrior ? Le concept peut prêter à sourire, surtout pour ceux qui ont connu ses débuts balbutiants maltraitant un Heavy Metal basique, mais dans les faits, la canadienne s'en sort avec les honneurs, et n'a pas forcément à rougir de la comparaison avec certains groupes estampillés Vintage qui pillent sans vergogne le répertoire des grands anciens. Nous retrouvons donc ici quelques classiques réarrangés à la sauce Aaron/John Webster (le tandem de production), dont une puissante relecture de l'incontournable « Mistreated » de DEEP PURPLE, qui sans égaler la version de Burn du line-up Blackmore/Coverdale/Hughes/Lord/Paice, se hisse sans gros effort au niveau des belles réussites de ce nouvel album. « I'm A Woman », de Koko TAYLOR (déviation datée de 1978 de l’imputrescible « I'm A Man » de Bo Diddley) trouve ici une jolie lumière, bien plus blanche évidemment, mais striée d'un Hard Blues que le grand WHITESNAKE n'aurait pas renié...Les musiciens entourant Lee pour cette nouvelle entrée font d'ailleurs un travail de backing-band assez remarquable, et Sean Kelly tire de sa guitare des riffs bien gras, mais aussi des soli graciles et transpirant le Blues électrique par tous les micros, ce qui permet à ces quelques réappropriations de sonner relativement authentiques, sans que la voix de Lee n'égale celle de ses modèles. Mais la vocaliste fait ce qu'elle peut, et s'en tire bien, modulant avec sensualité pour soudain rugir avec fermeté, démontrant ainsi que ses années Jazz lui ont permis de peaufiner sa technique sans rien perdre de sa force, bien au contraire (le vers revanchard « I can cut you with a pin », grogné la bouche serrée avec beaucoup de conviction, montre que les dents de la brune sont encore bien aiguisées). Dernière reprise au tableau, la plus intéressante selon moi, et qui permet au groupe de se frotter à un domaine beaucoup moins familier...En délivrant une traduction très Stonienne du tube de Janet Jackson « Black Cat », Lee se permet une incursion très Rock dans le domaine de la Pop synthétique des années 80, et montre un visage très séduisant, retrouvant les impulsions modérées d'un timbre qui semble décidément plus à l'aise dans les médiums d'un Rock mainstream que dans l’âpreté d'un Blues Rock un peu trop rocailleux parfois pour ses propres possibilités. On retrouve d'ailleurs en cette occasion la facette plus crossover que la belle nous avait offerte sur Fire & Gasoline, ce qui permet d'assurer une transition toute en douceur.

Le reste de l'album ? A l'image, ou presque de ces covers qui n'apportent pas forcément de plus-value à un répertoire qui tient debout tout seul, et qui voit AARON, à l'aise dans ses baskets mélanger le Rock classique au Hard Rock moderne, sans trahir l'un des deux camps. « Diamond Baby Blues » accouche en entame d'un bébé plus chaloupé que bluesy, mais nous entraîne dans l'aventure sans avoir à trop tirer sur la couverture. On pense à un Hard-Rock californien de la fin des années 80, lorsque l'époque voulait qu'on troque son make-up pour un harmonica, et « American High » confirme cette tendance, en appuyant encore plus sur la Pop qui panse, pour un déhanché Modern Rock au refrain taillé pour des charts qui se feront bien sur un plaisir d'ignorer cet album. Singeant parfois les prétentions Hip-Hop d'AEROSMITH pour mieux les intégrer à un Hard Funky typique d'EXTREME (« Miss Mercy », à l'intro vraiment calée sur le party beat de « Walk This Way »), la canadienne, revigorée par cette orientation bichonnée n'en a pas pour autant oublié l'émotion sur un quai, et nous sert sur un plateau de larmes le plutôt beau « The Best Thing », qui joue la corde sensible sans exagérer le pathos. Et c'est vraiment dans ces instants que le chant prend toute son ampleur, révélant des nuances assez caressantes, et qui témoignent que les cordes de la belle sont plus adaptées aujourd'hui à la modération qu'à la puissante passion. Le tout se déguste donc avec un plaisir non feint et même pas coupable, puisque les standards de qualité, sans être trop élevés restent formellement respectables, suffisamment pour tenter le coup d'une inspiration Young sur le light mais sautillant « Hard Road ». La fin de l'album, loin de marquer un fléchissement joue la variété, et nous offre un mélange de Cabaret, de Jazz discret, de Rock endiablé, et du Classic Rock de « In The Bedroom », efficace mais peu loquace, jusqu'au mutin « My Babe » et son lick de basse félin, le temps passe très vite, à tel point qu'on est fortement tenté de remettre l’œuvre au début pour en être repu. Ce qui est toujours bon signe...

Lee AARON, sans signer le classique dont je ne la crois pas vraiment capable entérine son retour aux affaires Rock sans enterrer la concurrence, mais en se taillant une bonne place entre ses défenses. Si le virage Blues-Rock n'est pas entièrement assumé, il n'en apporte pas pour autant une caution crédibilité dont la canadienne n'a pas forcément besoin, puisque son propre répertoire est selon moi beaucoup plus malin. Une jolie pierre de plus s'ajoute donc à l'édifice de sa discographie, mais il va sans dire que la Lee 2018 est beaucoup plus attachante que celle des années 80, qui confondait alors Metal pour marins en peau de bête et Rock intelligent pour fortes têtes.


Titres de l'album:

  1. Diamond Baby Blues
  2. Mistreated
  3. American High
  4. I'm A Woman
  5. Miss Mercy
  6. The Best Thing
  7. Black Cat
  8. Hard Road
  9. In The Bedroom
  10. Cut Way Back
  11. You're No Good
  12. My Babe

Site officiel

Facebook officiel



par mortne2001 le 11/05/2018 à 14:07
78 %    1043

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Enslaved + Svalbard + Wayfarer

RBD 20/03/2024

Live Report

Voyage au centre de la scène : BLOODY RITUAL

Jus de cadavre 17/03/2024

Vidéos

Crisix + Dead Winds

RBD 20/02/2024

Live Report

Abbath + Toxic Holocaust + Hellripper

RBD 21/01/2024

Live Report

1984

mortne2001 10/01/2024

From the past
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Simony

C'est justement ce relent de Hardcore qui en fait du Thrashcore en condition live qui m'a dérangé. Le placement du chant fait vraiment moderne, c'est con mais ça m'a un peu rebuté, dommage parce que musicalement c'est vraiment pas mal.

28/03/2024, 16:07

Tourista

L'album de Pâques !  

27/03/2024, 19:56

MorbidOM

Découvert l'an dernier dans un mini festival à Toulon avec Aorlhac en tête d'affiche, j'avais bien accroché et acheté leur cd (le précédent du coup) qui m'avait un peu déçu (difficile de redre justice à une m(...)

27/03/2024, 00:16

Saul D

Ben si Cannibal Corpse est une légende, Immolation aussi, non? Ils avaient tourné ensemble en 1996 ( je les avais vus à la Laiterie, avec Inhumate en première partie...)...

26/03/2024, 13:16

Bulbe

Enorme !

26/03/2024, 08:06

Vivement le prochain Ep. Ça envoie du lourd

Putain c'est vachement bien 

26/03/2024, 00:15

Gargan

Je viens de tomber par hasard sur ce docu à leur sujet, je sais que deux-trois ici pourraient être intéressés : TULUS - 3 DECADES OF UNCOMPROMISING BLACK METAL (FULL DOCUMENTARY) (youtube.com)

25/03/2024, 20:05

Humungus

C'est très loin d'être pourri, mais j'préfère tout de même de loin "Ozzmosis", "Down to earth" ou "Black rain"...

25/03/2024, 09:21

RBD

Tout le mérite en revient à notre hôte, je n'ai influé en rien sur les choix successifs. Autrement dit, cela me convenait aussi.

24/03/2024, 19:53

Buck Dancer

J'aime beaucoup. Parcours sans faute jusqu'au septième morceau. Du death classieux moins extrême que le premier album mais plus varié. Les délires vocaux de Vincent passent aussi très bien (ce qui n'aurait pas été le cas chez Morbid).(...)

24/03/2024, 13:34

Humungus

Je plussoie à mort ta bande son d'after hé hé hé...

23/03/2024, 11:02

Antidebilos suce mon zob

@antidebilos : t'es vexé, sac à foutre.

22/03/2024, 15:49

Oliv

Et le plan r fest ! 

22/03/2024, 15:21

antidebilos

"groupe de petites gauchiasses qui crisent si on n'emploie pas le bon pronom" : allez, retourne écouter tes groupes de NSBM de fond de toilettes et épargne-nous tes commentaires ridicules

22/03/2024, 09:04

Ivan Grozny

Tournée vue à Paris, merci pour le report.

21/03/2024, 21:01

Orphan

Tres bonne news des le matin. 

21/03/2024, 08:08

LeMoustre

A minima c'est assez inutile, rarement intéressant même si l'idée n'est pas nouvelle. Voivod l'a fait y'a peu, c'est quand même assez anecdotique sur le rendu final. Les morceaux en version d'origine se suffisant a eux mêmes.

20/03/2024, 12:18

Gargan

Ce son de toms n’existe plus depuis schizophrenia

19/03/2024, 22:06

LeMoustre

Il prend corps au fil des écoutes, et s'il paraît moins immédiat que Firepower, il ne me déçoit pas tant les compositions restent solides et dignes du Priest. Pas encore totalement poncé mais j'encourage à y revenir et chaque écoute(...)

19/03/2024, 14:50

LeMoustre

Superbe ce papier avec un chroniqueur qui, ça se sent, a vécu l'époque Roadrunner et sa superbe compilation (a la non moins superbe pochette) Stars on Thrash.Achat obligatoire.P.S : Euh moi une ex m'appelle pour prendre de mes nouvelles et me proposer (...)

19/03/2024, 12:13