J’ai beaucoup d’affection pour Bobby Liebling. D’abord, parce qu’avec une poignée d’autres musiciens, il a fait évoluer le Heavy Metal de BLACK SABBATH au point de pouvoir le baptiser Doom. Ensuite, parce que le bonhomme n’a pas eu une vie facile. Certes, quelques anicroches et autres problématiques furent de son propre chef, mais peut-on en vouloir à un homme rongé par les addictions et biaisé par les comportements erratiques le conduisant parfois derrière les barreaux ? N’oublions pas que le leader de PENTAGRAM est en activité depuis le début des années 70, et qu’il est encore là aujourd’hui, les yeux écarquillés, prêt à en découdre avec toute cette vague rétro venue de son pays et d’ailleurs.

Mais en 2025, l’homme est heureux. C’est lui-même qui le dit, puisqu’il a plus ou moins déclaré qu’il continuerait sa carrière jusqu’à sa mort. Il faut dire que Bobby a su s’entourer pour ce nouvel album, la crème de la crème, la team top notch, ce qui se fait de mieux sur le marché. Tony Reed (MOS GENERATOR, THE BIG SCENIC NOWHERE) à la guitare, Scooter Haslip (MOS GENERATOR) à la basse et Henry Vasquez (SAINT VITUS, BLOOD OF THE SUN, SPIRIT CARAVAN) à la batterie, de moins vieux briscards, à l’expérience non négligeable, d’autant que deux d’entre eux composent, écrivent, produisent et enregistrent.

Bien entouré et drivé, Bobby est donc en pleine forme. Difficile à croire, mais le musicien de 71 ans s’offre une nouvelle jeunesse, et paraît même avoir gagné quelques années au passage. Le voici le cheveu plaqué, le regard kohlé, le cuir poli et la position ferme, prêt à en découdre, en leader d’un répertoire renouvelé. Et comme PENTAGRAM a été plutôt pingre cette dernière double décennie, ce Lightning In A Bottle n’en est que plus apprécié.

POLICE envoyait des messages dans les bouteilles, PENTAGRAM y insère des éclairs. Eclairs de génie, éclairs de passion, puisque ces nouveaux titres suintent le plaisir des années 70. Sans surprise, PENTAGRAM louvoie toujours entre ce Heavy Rock qui a tant influencé la NWOBHM, et ce Doom un peu light que même les néophytes peuvent apprécier. Avec un line-up de compétition, Lightning In A Bottle déchaîne l’électricité, fait gronder le ciel, et nous envoie des stries de lumière en plein dans les tympans. Boogie, groovy, ce Rock mordant et sautillant est pratiqué par des experts, et sonne jeune, frais et dispo. Difficile de croire que le leader a dépassé les soixante-dix ans tant son enthousiasme est palpable, et ce, dès la doublette d’intro « Live Again » / « In The Panic Room ».

Production impeccable, mix légèrement muddy pour coller aux racines, amplitude maximum, pour un nouveau voyage dans le temps, back to 1972, lorsque le groupe se lançait en single. Si les compositions font la part belle à l’instinct et au ressenti, certains morceaux se concentrent sur une ambiance plus sombre, que BLACK SABBATH a imposé sur son album éponyme. Et c’est ainsi qu’après un « Dull Pain » totalement foudroyant et joyeux, « Lady Heroin » replonge dans les années de défonce qui ont bien failli coûter la vie à Bobby.

Le tour d’horizon est donc aussi complet qu’il peut l’être. Du Heavy, du Rock énervé, du Metal allégé, la fanbase est aux anges tant ce troisième longue-durée en vingt ans rattrape le temps perdu. 2004, 2015, 2025, un coucou toutes les décennies pour un groupe culte que tout le monde suit. Et aime. Mais comment ne pas aimer cette relecture de « Kick Out the Jams » qu’est « I’ll Certainly See You In Hell », ou cette petite bombe thrashy qu’est « Thundercrest ». Lorsque le groupe joue la lourdeur, Seattle sort les honneurs, tant le son du groupe a été pillé par ALICE IN CHAINS ou SOUNDGARDEN.

DOWN et la clique Nola sont aussi ravis, que l’un des précurseurs valide leur avis. Toujours raisonnable sur la durée, parfois sous influence non dissimulée (« Solve The Puzzle », je vous laisse deviner d’où vient ce riff syncopé), ou sec comme un coup de trique en plein été (« Spread Your Wings », que Zakk « no shower » Wylde aurait adoré accoucher), Lightning In A Bottle est un toast porté à la fidélité et la persévérance. On s’y plonge comme on feuillette un vieil album de famille, mélange de noir et blanc et de couleurs, de styles vestimentaires, de mauvais souvenirs et de bonne humeur.

PENTAGRAM reste cette icône que les Etats-Unis chérissent avec fierté. En tant que BLACK SABBATH américain, il s’en tire plus que bien, et nous pond un « Lightning In A Bottle » que Tony et Ozzy aurait pu incarner de concert. Moins perché et azimuté qu’HAWKWIND, plus ouvert et léger que TROUBLE ou ST VITUS, PENTAGRAM s’accorde très bien de son passé pour écrire son avenir, que l’on pressent assez fourni si la santé de Bobby reste ce qu’elle est.

Il en aura vécu des galères, des années de disette et de folie, il aura été le héros d’un documentaire, celui de musiciens adeptes de la lourdeur sur étagères, mais c’est bien en tant que chanteur que l’on préfère Bobby. Toujours crédible, toujours vert, et passionné par son sujet, Liebling est un personnage à part, de ces anti-héros qu’on adopte parce qu’ils nous ressemblent.                                    

Titres de l’album:

01. Live Again

02. In The Panic Room

03. I Spoke To Death

04. Dull Pain

05. Lady Heroin

06. I’ll Certainly See You In Hell

07. Thundercrest

08. Solve The Puzzle

09. Spread Your Wings

10. Lightning In A Bottle

11. Walk The Sociopath

12. Start The End (Bonus Track)

Site officiel

Facebook officiel