Morgöth Tales

Voivod

21/07/2023

Century Media

Au moment de dresser un état des lieux de toutes ces aventures musicales vécues, il sera de bon ton de n’oublier personne. Et surtout pas ceux qui ont fait avancer les choses à leur manière, sans jamais se trahir ou décevoir leur fanbase. Et à ce petit jeu de chaises musicales pour la postérité, il est évident que nos canadiens chéris de VOÏVOD auront une place spéciale à la table des légendes.

Quarante ans de carrière. Enorme pour un groupe jouant une musique aussi casse-gueule et osée, et qui a muté à chaque étape de son existence. Des débuts forts en gueule et presque Punk jusqu’au Progressif des années 90/2000, le quatuor canadien aura revêtu bien des masques, mais avec toujours cette volonté d’authenticité et de sincérité qui sont l’apanage des plus grands. Alors, comment fêter un anniversaire aussi important, certainement célébré de par le monde par tous les freaks, les space-acids, les warmongers, et autres créatures du vide intersidéral que VOÏVOD a affrontées, mais qui lui témoignent encore d’un profond respect ? Une simple compilation ? Un coffret exhaustif ? Un live ? Des rééditions ?

Non, VOÏVOD mérite mieux que tout ça, d’autant qu’il a suffisamment de compilations et de rééditions sous le coude pour s’offrir autre chose de plus créativement stimulant. Car le quatuor a toujours fonctionné à la créativité. Graphique, littéraire et musicale. Et donc, avec Morgöth Tales, ils nous déballent le présent le plus précieux qu’ils pouvaient nous présenter, avec une dizaine de classiques de leur répertoire actualisés en mode 2023. Nouveau son, anciennes compositions, dans la plupart des cas, ça sent le recyclage moisi, le lifting qui lisse les rides et tend trop la peau, ou l’arnaque commerciale en mode « ils vont l’acheter de toute façon ».

Mais nous connaissons VOÏVOD. Et VOÏVOD n’est pas du genre à arnaquer ses fans fidèles, d’autant que je doute qu’un album les ait déjà rendus riches. Mais l’argent, on s‘en fout n’est-ce pas ? Ce qui compte, c’est le plaisir. Et celui partagé par ces mecs-là est au moins équivalent à une exemption du service militaire lorsqu’il s’étalait encore sur deux années.

Le menu ? Pas assez copieux malheureusement, tant le répertoire est vaste, et d’importance. Alors, puisqu’il fallait choisir, on a pioché dans l’évidence, mais aussi dans la déviance. Ainsi, « Condemned To The Gallows » témoigne de la première partie de carrière, avant le deal, et avant tout le reste. On note immédiatement le son bien gonflé, mais pas surcompressé, la voix inimitable de Snake, le John Lydon du Thrash futuriste, le tranchant de la guitare de Chewy, musicien aussi humble que talentueux, et évidemment, la batterie d’Away qui frappe tous azimuts. Le tout est méchamment bien équilibré, et retrouve une seconde jeunesse, spécialement sur les morceaux les plus anciens. Et si on peut regretter que la production de chaque album soit abandonnée au profit d’une cohésion d’ensemble, cette cohésion apporte justement une continuité dans l’histoire qui donne à Morgöth Tales de faux airs de nouvel album.

Ce qui est le comble pour une telle entreprise de nostalgie, et qui prouve que la musique de VOÏVOD est toujours en avance sur son temps, même quatre ou trois décennies après sa publication d’origine.

Evidemment, la bataille rangée pour savoir si tel ou tel titre n’aurait pas eu sa place plutôt qu’un autre va faire rage, surtout chez les die-hard. J’ai moi-même regretté la présence de « Pre-Ignition » en lieu et place de l’immense « The Unknown Knows », tout en me délectant des immortels « Killing Technology » et « Macrosolutions To Megaproblems », bonnes pioches qui nous rappellent à quel point Killing Technology et Dimension Hatross étaient des piliers de l’avant-garde de la seconde moitié des années 80. J’aurais à l’inverse échangé sans regrets « Thrashing Rage » contre « To The Death », mais après tout, je ne décide de rien, et VOÏVOD a eu raison d’éviter les facilités, ce qui les caractérise depuis leur émergence.

Et puis, faites-vous à l’idée que Morgöth Tales n’est pas un best-of, mais bien un travail de fond, un dépoussiérage des étagères de la gloire pour faire briller les volumes entre deux incunables. Et les nouvelles versions proposées rendent hommage aux originaux, en ne les dénaturant pas, et en ne les nivelant pas par le haut du volume. Ainsi, le fragile et gracile « Nuage Fractal » garde son ambiance onirique et psychédélique, et « Fix My Heart » reste Rock’n’Roll jusqu’au bout de sa basse grondante.

On retrouve deux invités de luxe, déjà présents à l’époque, ce cher Jason donnant de ses graves sur « Rebel Robot » tandis qu’Eric Forrest se prête volontiers au jeu sur « Rise ». La famille est donc réunie pour souffler sur les bougies, et cette célébration à quelque chose de très émouvant. En vieillissant, VOÏVOD n’a rien perdu de sa générosité et de son génie de composition, et ses derniers albums en témoignent, surtout le gigantesque The Wake.

En explorant leur propre passé, Michel et Denis s’offrent un regard panoramique sur une œuvre inattaquable, sans bomber le torse ou se jeter des fleurs. Pourtant, ils le pourraient facilement et avec toutes les excuses du monde, tant leurs contemporains se sont usés à la vitesse grand V, nous assommant désormais de productions surchauffées et standardisées sans aucun intérêt.

Car même en retravaillant d’anciens morceaux que l’on connaît tous par cœur, VOÏVOD se montre plus intéressant que les cadors d’époque, les KREATOR, DESTRUCTION, SODOM qui relèvent les compteurs sans se fatiguer, mais dont les originaux ne chatouillent même pas la plante des pieds des canadiens en termes de crédibilité et de jouissance.

VOÏVOD est unique n’est-ce pas ?

Oui, et en nous lâchant un inédit accompagné d’une vidéo superbe (« Morgöth Tales »), ils nous récompensent pour notre fidélité. Mais cette fidélité est logique, et proportionnelle à l’amour que nous éprouvons pour un groupe qui n’a eu de cesse de se réinventer, pour finalement faire partie du cénacle.

VOÏVOD, l’un des meilleurs groupes de Metal, tous styles confondus ? Si vous hésitez à répondre, alors vous n’avez rien à faire là.

  

   

Titres de l’album:

01. Condemned To The Gallows (2023 Version) [Originally on Metal Massacre V Compilation, 1984]

02. Thrashing Rage (2023 Version) [Originally on Rrröööaaarrr, 1986]

03. Killing Technology (2023 Version) [Originally on Killing Technology, 1987]

04. Macrosolutions To Megaproblems (2023 Version) [Originally on Dimension Hatröss, 1988]

05. Pre-Ignition (2023 Version) [Originally on Nothingface, 1989]

06. Nuage Fractal (2023 Version) [Originally on Angel Rat, 1991]

07. Fix My Heart (2023 Version) [Originally on The Outer Limits, 1993]

08. Rise (2023 Version, feat. Eric Forrest) [Originally on Phobos, 1997]

09. Rebel Robot (2023 Version, feat. Jason Newsted) [Originally on Voivod, 2003]

10. Morgöth Tales [New Song]


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par mortne2001 le 01/08/2023 à 17:46
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