Neuropunk Boostergang

Expander

20/08/2020

Profound Lore Records

Alerté par les mots bienveillants d’un ami aux goûts très surs en matière de déviance instrumentale sur les réseaux sociaux, je décidais de m’intéresser au cas très étrange des texans d’EXPANDER. Connaissant les inclinaisons naturelles de l’ami en question pour VOÏVOD, les RESIDENTS, John ZORN, Coltrane et autres artistes pratiquement inclassables d’un bout à l’autre, je me doutais que l’affaire ne pouvait être qu’un simple exercice de style Thrash Metal et/ou Crossover classique, et mon instinct avait encore une fois raison. Car si les EXPANDER gravitent effectivement dans la galaxie de la fusion violente, ils ont bien retenu les leçons de leurs aînés les plus barrés pour composer leur musique, qui s’apparente à un voyage spatio-temporel assez indescriptible, faisant presque passer les CSSO pour de gentils petits grinders sans ambition aucune. Mais les texans ne FONT PAS de Grind, et j’insiste là-dessus, comme j’appuie le fait que leur musique aussi bruyante soit-elle est l’une des plus fertile de la production actuelle. Formé en 2014 à Austin, le Bled qu’ont si bien chanté les countrymen et autres amateurs de Rock sudiste bien gras, EXPANDER reste une énigme totale à l’heure actuelle, le genre de concept qu’on prend en pleine face où qu’on évite avec une savante glissade pour ne pas être éclaboussé. Et après deux moyens formats lâchés la même année 2015 (Laws of Power et Expander), le quatuor nous a pris de revers avec son premier long, Endless Computer, qui tentait de résumer la condition humaine de façon non binaire. C’est ainsi qu’on trouvait déjà dans le brouet de quoi faire du ragoût Thrash/Punk pour quinze, avec de gros morceaux de la Bay-Area mis à dégorger dans une réduction canadienne, le tout associé à des légumes new-yorkais. Difficile à imaginer comme goût ? C’est normal, c’est fait exprès.

Avec une intro pareille, vous devinez bien que les quatre zigues ne s’amusent pas à plagier METALLICA, SLAYER, MEGADETH et ANTHRAX, même si leur musique est construite et ne refuse pas un aspect ludique très prononcé. Non, le boucan des texans est plutôt du genre pluriel, et pour en définir les contours sans en avoir écouté la moindre note, il faut imaginer les DOOM japonais en stage dans l’écurie Touch & Go, sympathisant avec les JESUS LIZARD, tout en écoutant l’intégrale de KMFDM et BIG BLACK en loucedé après les cours, en fumant un bon gros joint aux herbes médicinales. Sur ce, les VOÏVOD se pointent avec leur diptyque Dimension Hatross/Nothingface, jouent les gros bras en défiant les MINISTRY sur une borne d’arcade, et soudain, un nouveau-né pousse son premier hurlement : EXPANDER a vu le jour, et remercie tous ses papas d’avoir contribué à sa bonne éducation. Et évidemment, avec des parents pareils, il fallait bien s’attendre à un baptême pour le moins bizarre. C’est ainsi que les quatre musiciens se sont vus affublés de pseudos assez chantants, avec General Ham au chant, Guzzler à la guitare, Keymaster à la batterie et Swirly à la basse, ce qui semble correspondre assez bien à l’optique choisie pour l’apprentissage. L’apprentissage justement, s’est décomposé en plusieurs étapes. La première, la bonne compréhension du Thrash pour pouvoir le déformer à loisir et le transformer. Rythmiques solides comme le Rock, riffs qui tranchent au vif, basse ronde et puissante, et voix évidemment légèrement rauque et grave. Ensuite, il a fallu aux quatre gamins comprendre l’attitude Punk. Alors, la vélocité, la liberté de ton, des textes refusant les lieux communs, et une franchise dans la simplicité d’exécution. Une fois ces deux étapes passées et leur diplôme obtenu, les quatre adolescents ont pu développer leur optique personnelle, et aborder le Blackened Thrash, le Cyber Punk, l’Indus des nineties, et écouter WHITE ZOMBIE, IMPALED NAZARENE, FETISH 69 et tout autre ensemble trop bizarre pour être rangé sur une étagère.

En résulte évidemment une musique unique, bouillonnante, fertile, zarbi à outrance, constellée de breaks, de cassures, évoluant sur des tempi mouvants, osant le chant schizo à fond les ballons, le tout sur fond de Fusion bizarroïde mais incroyablement attachante et addictive. Et l’un dans l’autre, sans vouloir user de comparaisons trop restrictives, Neuropunk Boostergang à de faux airs de bal de l’enfer, avec aux platines un DJ ayant usé ses vinyles sur les bancs de la fac, des vinyles de tous les groupes cités dans cette chronique, avec quelques ajouts de dernière minute, dont FRONTLINE ASSEMBLY, O.L.D, THE BERZERKER, j’en passe et des plus obscurs. Mais ne prenez pas pour autant la bande pour un joyeux foutoir à peine organisé. Les morceaux de ce second LP sont mûrs, bien composés, savamment agencés, mais subtilement sauvages pour ne pas sonner trop propre. Ainsi, l’entame « Wretched Warez » rappelle une union entre FETISH 69 et les groupes bestiaux sud-américains, tandis que « Megacorp » évoque un BIG BLACK perdu dans les méandres d’un Thrash underground des années 91/92. Le tout sonne donc maousse, massif, énorme, mais libre, et donne des envies d’ailleurs, là où la cohérence règne toujours, mais sans se compliquer la vie avec une logique trop serrée. Les riffs tondus par les tifs de Guzzler sont sombres, le chant incroyable de General Ham est Punk à souhait, parfois un peu Death sur les bords, et la section rythmique à bien compris les avantages d’un Crossover entre Thrash et Indus. Régularité, puissance, folie, tous les ingrédients sont là, et pourtant le tout sonne méchamment homogène. Ne cherchez pas à comprendre, c’est inutile.

Aussi Indus qu’il n’est Thrash, Neuropunk Boostergang s’assimile peu ou prou aux fameux et sinistres électrochocs administrés dans les asiles jusque dans les années 70, et vous vrille les neurones plus rapidement qu’un discours d’Al Jourgensen. Avides de Rock comme ils sont en manque de Punk, les sagouins se permettent de transposer la pureté de MOTORHEAD dans un contexte trashy, avec en exergue l’irrésistible « Waste Ranger » qui sonne comme du STRAPPING YOUNG LAD en pleine descente de speed. Alors, je ne vais surement pas me fader un track-by-track qui me fatigue d’avance, et je vous laisse apprécier les arrangements underground et EBM de « Cryptosteal » qui ferait presque passer le « Drug Against War » de KMFDM pour une berceuse, mais aussi le final évanescent et cryptique de « C.O.III: Quest for a Future », qui pendant huit longues minutes résume et explore, histoire de dégager des pistes.

                                                           

Vous n’avez pas du tout suivre mais moi non plus. Tout ce que je sais, et la seule chose importante, c’est que les EXPANDER sont la sensation la plus excitante du moment. Que vous soyez Punk, Thrash, Metal, Indus ou expérimental. Et merci à Tanguy des T.H.I.N.K pour le tuyau, décidément un homme de goût.                                          

                                                                  

Titres de l’album:

01. Wretched Warez

02. Megacorp

03. Hyper-Flesh Aedificium

04. Waste Ranger

05. Cryptosteal

06. Loyalty Illusion (R.A.T.)

07. Rejunkulizer

08. Neuropunk Boostergang

09. Obsoletor

10. C.O.III: Quest for a Future


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par mortne2001 le 04/10/2020 à 18:59
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