On avait la NWOBHM, la NWOAHM, la NWOSDM, et quelques autres exemples plus ou moins probants, mais voici que débarque les NWOC, les New Waves Of Cynicism, qui ne viennent ni d’Amérique, ni d’Angleterre, mais bien de…Bretagne. Il est certain que le cynisme est en vogue depuis quelques années, le dernier exemple en date étant notre cher Bruno Le Maire appelant à sabrer dans les comptes publics pour faire des économies alors que sa propre épouse a occupé un emploi fictif pendant un bon moment…Le cynisme a ceci de particulier qu’il se nourrit du malheur des autres pour faire son propre bonheur. Pourtant, aucun cynisme chez les SLAVES OF IMPERIUM, bien au contraire.
Une belle franchise, et surtout, une façon de tout vous balancer à la tronche sans édulcorer le propos, mais sans non plus hurler comme un bambin braillard de chez braillard.
Le quintet (Cedric Sebastian: chant, David Pene: guitare, Kristen Gachet: batterie, Matthew Barry: guitare, Raphael Fournier: basse), présent sur la scène depuis 2019 nous avait déjà prévenus par le biais d’un tonitruant Observe Analyse Sanitize il y a deux ans, et ce premier méfait avait des airs d’oracle de destruction, dans un créneau de métissage assez équilibré. Entre Thrash et Death, la bande n’avait pas choisi, et se sentait bien dans l’entre deux, pourvu qu’il soit nappé de mélodies discernables et de pauses notables. Néanmoins, l’avertissement manquait encore de maturité. Nous attendions donc que le moment soit venu pour juger avec plus de recul et de méticulosité ces capacités remarquées, et l’heure est aujourd’hui la bonne. L’heure du cynisme dans toute sa splendeur, mis en musique avec pugnacité et motivation.
Cette teinte bleutée qui repose le regard cache en fait l’un des albums les plus explosifs de ce mois de mars. La poignée de main hypocrite de la pochette est en quelque sorte la métaphore parfaite pour désigner notre époque, et les chansons proposées par les bretons sont une bande-son très crédible de leur énergie palpable et de leur furie en contrôle total.
David et Matthew s’en donnent donc à cœur joie en multipliant les riffs qui citent le Death, le Thrash, le Melodeath et même le Black par instant, bien que l'instrumental reste tout à fait raisonnable, mais quand même méchamment Heavy. Si le répertoire est classique, l’ambiance n’en est pas moins froide, comme une promesse cachant un sale coup fourré. Jouant sur des registres différents, SLAVES OF IMPERIUM rappelle parfois nos chers NO RETURN, et plus généralement, les années extrêmes du Metal français de l’orée des nineties, lorsque nos représentants éclataient à un niveau européen. Mais on trouve aussi des traces de MACHINE HEAD, de GRIP INC, et plus simplement, les éléments cités par la courte bio disponible sur le site du label.
Sont ainsi nommés BEHEMOTH, AT THE GATES, HAVOK, mais aussi dans le domaine littéraire Poe, Zola, Nietzsche, Freud et Lovecraft, pour offrir un packaging complet aux fans. Les thématiques, repérables par les intitulés des titres sont évidemment liées à note société, l’individu qui se croit au centre des débats, l’ego, les sentiments contraires, et évidemment l’égoïsme dont font preuve les hommes lorsque le temps des fleurs sur les tombes est venu.
Mais pas de dénonciation facile, pas de slogan choc ou de formule toute faite, SLAVES OF IMPERIUM est au-dessus de tout ça, et bien trop talentueux pour céder au plus évident. En écoutant le superbe « Beating Session » justement, on pense à OPETH, mais aussi à PARADISE LOST, MY DYING BRIDE, sans que le quintet ne sombre dans les affres du Gothique ou du spleen Doom. Le champ d’action est aussi large qu’un éventail andalou, et l’ennui s’ennuie justement ferme, bloqué devant la porte du studio, et interdit de séjour. Les bretons attaquent, observent, analysent, et attaquent de nouveau au bon moment, grâce au talent d’un batteur qui n’a pas les baguettes plantées dans son biniou.
On pourra toutefois regretter que le tempo ne s’emballe pas plus souvent, pour nous procurer des sensations plus fortes, mais la tension permanente, les arrangements éthérés et les mouvements de biais permettent d’éviter l’écueil de la redite maladroite, sans glisser le long du toboggan de l’expérimentation.
« Parasites » en forme d’accueil direct dans le foie est d’une efficacité incroyable, « Aftermath » est cruel comme du CELTIC FROST période Pandemonium croisé avec AT THE GATES, tandis que « Awakening Of The Cynic » pulvérise tout sur son passage. Le métrage est donc intelligemment composé, proposant un nombre conséquent de déviations et digressions, procédé qui se cristallise sur « Equation Of The Void » au parfum très HEXX de fin de première carrière.
Explosif mais réfléchi, épidermique mais lucide, New Waves Of Cynicism est un deuxième album très crédible, rond, au son sec, mais aux rebonds profonds. Le choix de privilégier parfois un chant clair nostalgique permet aux titres de taquiner la vague Néo-romantique gothique des années 90, mais la mainmise des growls garde le cap de la violence sans que la boussole ne tourne folle.
Bien vu de la part des bretons d’avoir jeté leurs forces dans une guerre de position, alternant les blitzkriegs et les tranchées avec beaucoup de clairvoyance. Quelques soli notables, des breaks tout sauf jetables, un lick mémorable, et New Waves Of Cynicism de s’imposer sans forcer, mais avec des armes bien huilées.
Titres de l’album:
01. Parasites
02. Sarmat
03. Open The Gates Of Madness
04. Mating Season
05. Beating Session
06. Aftermath
07. Awakening Of The Cynic
08. Equation Of The Void
09. God Is A Son Of A Bitch
10. Toxic Consciousness Of Self Destruction
11. Observe, Analyse, Sanitize (Acoustic Version)
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