Quarante ans de carrière, ça se fête. Quarante bougies sur l’énorme gâteau d’anniversaire, pour un groupe qui n’a jamais perdu la foi et qui va les souffler à pleins poumons. On ne peut résolument pas ne pas aimer FM. Sa constance, cette recherche permanente de qualité, cette façon de satisfaire les fans sans renoncer à ses aspirations artistiques. Et cette fidélité envers un style qui n’a plus autant la cote qu’il y a quelques décennies. Dans les années 80, le Hard FM, l’AOR et le Rock mélodique étaient très prisés par les radios US, un peu moins par leurs homologues européennes, et FM a participé d’une certaine manière à la popularisation d’un pan entier de l’histoire américaine, en reprenant à son compte les formules de TOTO, JOURNEY, REO SPEEDWAGON, et BOSTON.
1984/2024. Quelle carrière. Malgré les hiatus, malgré les coups du sort et la perte d’êtres chers, le groupe est toujours là, fier défenseur d’un certain art de jouer, qui correspond d’ailleurs très bien aux attentes de leur label. Frontiers se réjouit de son Italie de pouvoir compter en ses rangs une telle légende, qui via des albums comme Indiscreet ou Takin' It To The Streets a défini l’approche anglais en matière de Hard-Rock souple et radio friendly.
Quarante ans de carrière, il fallait marquer le coup, et ne pas se louper. Le line-up, stable (Steve Overland – chant/guitare, Merv Goldsworthy – basse, Pete Jupp – batterie, Jem Davis – claviers et Jim Kirkpatrick – guitare) continue donc sa route sans trop se poser de questions, et nous offre deux ans après Thirteen un nouveau chapitre de sa longue saga, qui une fois encore ne décevra personne. Enregistré par Jim Kirkpatrick, Jem Davis et Pete Jupp, mixé par Jeff Knowler et masterisé par Jim Griffiths au Principal Audio, Old Habits Die Hard est une excellente livraison, d’une qualité indéniable, et d’une variété d’émotions appréciable.
Comme si le quintet avait voulu résumer sa carrière en une poignée de titres, Old Habits Die Hard rend hommage à la scène mélodique anglaise des années 80, avec un salut de la main à SHY, mais aussi la reconnaissance des influences les plus marquantes, telles que citées plus haut. TOTO donc, mais aussi FOREIGNER, parfois unis dans une même déclaration, à travers le single imparable « Out Of The Blue » qui ne donne vraiment pas l’impression d’être à la masse ou sorti de nulle part.
Les inflexions harmoniques, le chant toujours aussi puissant et dégoulinant de feeling de Steve Overland, la rudesse d’une guitare qui échange avec les claviers sans essayer de les étouffer, l’équilibre est très stable, et la route pavée d’or. Difficile de croire que l’on écoute le quatorzième album d’un groupe quadragénaire, tant la fraîcheur de ce nouvel opus saute aux oreilles. La passion conserve, les cœurs sont toujours purs, et la sincérité toujours brandie comme l’étendard d’une nation fictive, entièrement vouée aux gémonies d’un Rock assoupli, perméable à la Pop, et à l’Americana, à la manière d’un BON JOVI très adulte, mais fier de son passé (« Whatever It Takes »).
Un peu de POLICE, un brin de STRANGEWAYS, FIONA, AVIATOR, et la liste pourrait occuper tous les feuillets de cette chronique. Nous sommes clairement entre amis, le sourire aux lèvres, la joie de retrouver de vieux potes qui nous accompagnent depuis nos années lycée, et qui continuent de mettre en musique nos émotions, nos sensations, nos épreuves et nos doutes.
Evidemment très policé, Old Habits Die Hard est une vieille habitude qui sonne comme un réflexe moderne. La clarté du son, la beauté dans la simplicité des arrangements, et cette atmosphère confinée découlent sur des morceaux ouvragés, ombrageux, mais toujours porteurs d’espoir. A l’image du superbe et nuancé « Black Water », l’un des plus rudes du lot, mais qui sait garder intacte cette humilité qui caractérise les plus grands, qui n’ont plus rien à prouver.
Et FM n’a bien sûr plus rien à prouver depuis longtemps. Et pas seulement au regard de son parcours dans les années 80, qui a permis d’accoucher des œuvres maitresses. Les années 90 ont aussi été le terreau fertile d’un Rock light, coulant en oreilles et délicat en bouche. Et depuis sa reformation dans les années 2000, le quintet n’a loupé aucun coche, enregistrant album impeccable sur album impeccable, comme si la recette était des plus simples. On sent cette facilité sur l’épique « Cut Me Loose », qui suggère une vraie passion pour le FOREIGNER le plus adouci, sur « Leap Of Faith », que le Steve Lukather des nineties aurait pu composer entre deux tournées avec TOTO, et surtout sur le très malin « California » qui parvient à évoquer les palmiers, les highways, les radios libres et les soirées qui n’en finissent pas.
Aucune contrainte pour ces quatre décennies, aucun autre but que de composer des hymnes inoubliables, hiver comme été. La méthode est éprouvée depuis des siècles, et ne changera jamais, puisqu’elle satisfait le palais auditif des fans les plus exigeants. Il est juste sidérant de constater que le groupe anglais est toujours capable de maintenir un tel niveau de qualité sans se fourvoyer ou se répéter à outrance.
Tel un best-of d’une carrière entière, ce nouvel album est une mine de hits, qui garde en éveil jusqu’à son terme. Et son terme, c’est justement le sautillant et trépidant « Blue Sky Mind », qui combine le TOTO de « Home of the Brave » et le FOREIGNER de « Urgent ».
FM n’a donc rien de ce squelette de pochette. Le groupe est bien vivant, toujours opérationnel à un haut niveau, et pressé de partir en tournée pour fêter comme il se doit cet évènement. Gageons que ce tour procurera aux fans le grand frisson, lorsque les tubes d’hier côtoieront les hymnes d’aujourd’hui. Old Habits Die Hard, c’est vraiment le cas de le dire, et ces habitudes qui ont la vie dure sont notre plaisir précieux depuis une quarantaine d’années.
Merci messieurs, et encore une fois, un joyeux anniversaire.
Titres de l’album :
01. Out Of The Blue
02. Don’t Need Another Heartache
03. No Easy Way Out
04. Lost
05. Whatever It Takes
06. Black Water
07. Cut Me Loose
08. Leap Of Faith
09. California
10. Another Day In My World
11. Blue Sky Mind
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