Frenchy but chic ?
Je me souviens de cette rubrique de Best ou Rock n’Folk mettant en avant des talents nationaux à même de rivaliser avec les plus grands. J’aimais y découvrir de nouveaux artistes, gravitant dans mon univers ou pas, mais admettons quand même que celui du Hard-FM et du Hard-Rock mélodique sont encore l’apanage de la Suède, des Etats-Unis, et de l’Amérique du Sud, avec quelque pointes de fraîcheur venant du Canada ou d’Italie. La France n’a jamais vraiment été reliée au genre, malgré quelques percées notables de temps à autres. Heureusement, les fans existent encore, et font même partie du gratin des musiciens.
J’en veux pour preuve ce second longue-durée de DEVOID, qui n’est autre que le bébé de Shad Mae (ex-SHADYON) petit prodige amoureux des performances mais surtout des harmonies, et qui avec ce second album propose une digression intéressante sur les thèmes si chers à sa maison de disques italienne. Quatre ans après un initial Cup of Tears, DEVOID continue donc son chemin, affine sa vision, se veut d’envergure européenne, et propose donc une musique tout à fait intemporelle, constellée de soli incandescents et de mélodies pures.
Shad ne cache pas ses intentions, et se montre d’une franchise imparable au moment de parler de Lonely Eye Movement. Il déclare à qui veut bien le lire que l’idée était de réaliser le mélange parfait entre ses influences les plus lourdes (EVERGREY, DEVIN TOWNSEND, SOILWORK) et les groupes AOR qu’il apprécie (WINGER, WHITE HEART, GIANT, STRANGEWAYS) afin de produire un album très accrocheur et intemporel. Et si la patte de SOILWORK n’a pas vraiment griffé la partition écrite par le guitariste français, si l’ombre de Devin se fait plus discrète qu’un latte de Ziltoïd, ce deuxième chapitre ne manque pas de puissance, et se pose comme un possible Hard Rock mélodique progressif, un genre à part entière, et qui s’apprécie dans toute sa finesse.
Rappelant parfois le lyrisme d’un Malmsteen des jeunes années (Trilogy en tête de gondole), un Steve Vaï chantant et moins expérimental, ou un JOURNEY en cure d’intoxication VANDEN PLAS, DEVOID est une excellente surprise, et un disque qui permet d’oublier les convenances d’une production trop timorée. Sans aller jusqu’à parler de Rock symphonique, la musique composée par Shad est quand même de proportions assez conséquentes, et d’une précision hors-normes. Bien entouré par un line-up constitué du chanteur Carsten « Lizard » Schulz, du guitariste Gwen Kerjan, du claviériste Jorris Guilbaud, du bassiste Geoffrey « Shob » Neau et du batteur Benjamin Lesous, Shad Mae s’en donne à cœur joie dans les envolées, sachant pertinemment qu’il peut compter sur la solidité d’un backing band de premier choix. Résultat, les couplets sont solides, les refrains fédérateurs et mémorisables, et les soli totalement enflammés, comme si DREAM THEATER se lançait à corps perdu dans le Mélodic Metal sans arrière-pensée Jazz.
Extrêmement puissant et féroce, Lonely Eye Movement se permet même des moments de fureur pure, sur le final dantesque de « Impostor », l’un des hits les plus improbables d’un LP imprévisible. Construit comme un hommage aux pionniers de l’harmonie, Lonely Eye Movement n’en séduira pas moins les amateurs d’un Heavy Metal musclé, qui aurait troqué ses clous contre de la soie et du daim. On apprécie ces intros qui mettent dans le bain et qui étalent les couleurs sur la toile vierge avant que les musiciens ne brossent une image exotique, intrigante, oppressante, ou urbaine. Prenant les accents les plus durs du Heavy et du Power Metal, et les inflexions les plus commerciales du Hard-FM et du Melodic Rock, DEVOID replace la dextérité au centre des débats, et prouve que des styles populaires peuvent aussi être joués de façon presque élitiste, en tout cas évolutive.
Il serait même possible d’envisager le groupe européen comme une version moderne et décomplexée du magique TRIUMPH, tant les aspirations techniques sont aussi importantes que chez les canadiens. Le nom de Jorn Lande et son ARK n’est pas non plus à négliger, ce qui vous fait pas mal de points de repère avant d’attaquer cette montagne de notes et d’harmonies. Complètement conscients de leur potentiel, les musiciens se lâchent donc et nous livrent des morceaux homériques et opératiques, comme cet axe central « Waiting For The Storm »/« In The Absence Of Holiness »/« Mirror Maze », ventre de l’album qui gonfle les abdos tout en laissant le cœur battre à un rythme rapide.
Les amateurs de cascades de guitare seront aux anges en découvrant les performances hallucinantes de Shad Mae, qui tout en étalant son potentiel impressionnant trousse des chansons qui en sont vraiment, et pas seulement de simples démonstrations d’ego en baudruche. Le morceau éponyme propose par exemple une prise de contact assez simple, avant d’aller plus en avant dans l’expérimentation. Sorte de Proto-AOR cybernétique et contemporain, ce titre d’ouverture est un tube en puissance, très intelligemment souligné d’un synthé ludique. Très en voix, Carsten « Lizard » Schulz donne du coffre et se taille une place de choix aux côtés de Steve Perry, Jorn Lande, Jeff Scott Soto, Jami Jamison et autres vocalistes de légende, tandis que la rythmique inépuisable du tandem Geoffrey « Shob » Neau/Benjamin Lesous propulse les idées de Shad avec une énergie presque palpable.
Parfois, la machine calme le jeu et adopte des inflexions plus classiques du Heavy mélodique (« Hands Of Salvation »), mais le gros morceau « Martial Hearts » et son jeu de mot assez fin d’asseoir définitivement les prétentions artistiques d’un album clairement à part. Grandiloquence, efficacité, préciosité, puissance, modulations, DEVOID abat ses cartes avec une belle fermeté, et nous offre un voyage assez unique en son genre, traversant de nombreuses galaxies. De quoi redonner ses lettres de noblesse à un genre en pilotage automatique depuis de nombreuses années. Spécialement chez Frontiers.
Titres de l’album:
01. Lonely Eye Movement
02. Man Without Fear
03. Impostor
04. Destination Heaven
05. Waiting For The Storm
06. In The Absence Of Holiness
07. Mirror Maze
08. Hands Of Salvation
09. Stroboscope Life
10. Martial Hearts
11. Wood And Wind
Pardon pour les fautes, mais quitte à écouter ce genre de trucs, Anna von Hausswolff le faisait beaucoup mieux il y a 10 ans. C'est ce qu'on appelle l'avant-garde je suppose.
05/07/2025, 06:51
Le problème de de Kayo Dot c'est qu'il dépend de l'envie du moment de Toby Driver et de qui l'entoure, tu peux avoir un album de drone/post-rock suivit d'un album de death metal, il n'y a pas de groupe et aucune identité. C'est dommage parce(...)
05/07/2025, 06:47
Merci à Clawfinger pour ce grand moment de transgression validée par l’ordre moral dominant. C’est rassurant de voir que la “rébellion” moderne consiste à tirer sur une cible usée jusqu’à la corde, avec des punchlines dignes (...)
04/07/2025, 07:16
Il tourne pas mal chez moi ce disque, et c'était un vrai plaisir de revoir le groupe live récemment après les avoir un peu mis de côté. Un autre concert en tête d'affiche ne serait pas de refus !
03/07/2025, 16:57
Morceau décevant et sans surprise. La présence de Chris Kontos dans le groupe y fait pour beaucoup dans mon intérêt pour ce retour, mais pour le moment bof.
03/07/2025, 16:47
Je n'ai jamais aimé ce groupe, mais j'étais passé devant durant un Hellfest et en effet c'était juste insupportable toutes ces harangues (littéralement toutes les 10 secondes). Moi je m'en beurre la raie, mais pour les fans ça doit &ec(...)
03/07/2025, 12:55
Vu à Toulouse et je n'ai pas du tout accroché, pourtant vu 2 ou 3 fois depuis 2005. Et j'avais bien aimé. Rien ne surnage, ça bastonne mais pour moi aucuns titres ne sort du lot.Par contre j'ai adoré Slapshot
02/07/2025, 16:01
Votre article sur le kintsugi est un véritable hommage à l’art de reconnaître la beauté dans la fragilité et les cicatrices : mentionner son origine au XVe siècle et sa philosophie wabi‑sabi renforce(...)
02/07/2025, 15:38
@Abrioche91 : la canicule t'a trop tapé sur la tête, mon pauvre vieux. Parce que se faire à répondre aux trolls, je n'avais plus vu ça depuis VS.
02/07/2025, 12:25
@Ultra Pute, t'es bien limité comme garçon. Et tu dois sacrément bien te faire chier pour venir commenter connement ce que les autres écrivent.Moi aussi, j'aime bien les commentaires gratuits (la preuve) mais je suis surtout là pour commenter l&(...)
02/07/2025, 08:50
Pas trop mal dans l'idée.Vocalement on s'y tromperait aussi.A voir sur tout l'album, le précédent, mis à part l'opener, m'avait bien déçu
01/07/2025, 15:38
ça tartine ! bien cool cool cette grosse basse @niquetoncul oui ça doit te changer de Jinjer
01/07/2025, 14:19