Le parcours des brésiliens de SEU ROQUE TUPINAMBA est exemplaire. Archétype du combo underground qui avance sans se soucier de la concurrence, SEU ROQUE TUPINAMBA et sa référence à ces tribus guerrières d’Amazonie d'origine tupi propose donc aujourd’hui son quatrième album, à compte d’auteur, pour lequel il nourrit quelques notables ambitions. La page Facebook du groupe compare donc au second degré Raízes Urbanas au Black Album de METALLICA, et cette analogie, bien innocente est pourtant assez pertinente une fois pris en compte le contenu de ce disque beaucoup moins prévisible que la plupart du reste de la production Thrash/Groove actuelle.
Quant à savoir si Raízes Urbanas aura un rayonnement proportionnel, il y a évidemment un fossé à ne pas enjamber. Et très loin du désir de standardisation de James et Lars à l’orée des nineties, SEU ROQUE TUPINAMBA garde son identité violente, tout en la nuançant d’une volonté mélodique originale et terriblement attachante. Ainsi, inutile d’attendre les éternels riffs samba tels que SEPULTURA ou ILL NINO ont pu les populariser en leur temps, puisque ce quatrième opus de la saga brésilienne est mystérieux, complexe, créatif, et diablement surprenant.
S’il est évident que l’aspect underground se ressent de la composition à l’interprétation en passant par la production (très claire et efficace au demeurant), ce désir de s’affranchir des obligations du Thrash moderne est remarquable, et demande à être encouragé. Et après une intro somme toute classique et un premier morceau frappant fort, le reste de l’aventure s’apparente plus à une exploration de la forêt amazonienne avec tous les dangers que cela entraîne. Et si « Cancerígenos » reste une calotte attendue, « Ferrugem e Fuligem » provoque rapidement la rupture, se servant dans les restes encore chauds de BLACK SABBATH, PANTERA et SYSTEM OF A DOWN. Grosse basse étrange, instrumental propre et calme, chant scandé en portugais natal, on se croirait presque sur un album de RATM partagé avec Carlinhos Brown, soudainement interrompu par les chœurs de BRUJERIA et BIOHAZARD.
L’originalité est donc de mise et ça fait un bien fou. SEU ROQUE TUPINAMBA évolue donc dans son propre univers, entre arrangements de synthé sur riff grognon, phrasé Rap de circonstance, pugnacité Hardcore et épaisseur Thrash nineties, ce que « Ordens do Sistema » résume à merveille. Loin du produit aseptisé pour faire plaisir aux masses peu exigeantes, Raízes Urbanas est un album pensé, agencé de façon très intelligente, et misant sur la curiosité de l’auditeur éventuel pour laisser opérer son charme rare.
Evidemment, les fans de brutalité facile et immédiate en seront pour leurs frais. Les morceaux sont rarement propices à un headbanging furieux, acceptent de nombreuses cassures, des reprises à un rythme pas forcément attendu, mais les soli très professionnels et harmonieux, ce chant assuré et juste, précis, revanchard, et ces constructions imprévisibles font de l’ensemble une belle découverte.
Comme un animal sauvage au comportement agressif mais attentif, Raízes Urbanas avance vite, se tapit, rugit, fond sur sa proie, avant de se dissimuler derrière un bosquet pour se faire oublier. Certes, parfois, la bestiole adopte un pas cadencé plus facile à suivre et pas forcément passionnant à constater (« No Bico do Urubu », qui montre les limites du chant mélodique et clair et de l’attitude d’ouverture), mais ses mouvements les plus fluides présentent un spectacle fascinant, assez proche parfois du SEPULTURA de « Ratamahatta » (« Carnaval Alterado (feat. Ryan Roots) »).
De l’autre côté du spectre, sur le versant le plus expérimental et culotté, « Suindara (Rasga Mortalha) » fait chauffer les idées, et propose une prolongation passionnante, avec chant feutré, riffs sournois, mélodies de biais et regard torve. Les capacités du groupe sont donc très bien mises en avant, et avec quelques moyens supplémentaires, SEU ROQUE TUPINAMBA pourrait se faire une bonne place dans le mainstream Metal, sa capacité à s’écarter des sentiers battus étant remarquable.
Et malgré sa durée relativement étendue, ce quatrième album ne lasse jamais, tant chaque composition à son humeur et sa raison d’être. Quelques prétentions techniques sont affichées sur le superbe « Pau-De-Arara », et si quelques errances mélodiques mièvres viennent entacher les morceaux les plus faibles, les choses reviennent vite à la normale d’un lick sombre et catchy (« Serra Pelada »)
Sans parler de carton plein, ce qu’il n’est assurément pas, Raízes Urbanas est néanmoins une excellente surprise dans la normalisation old-school actuelle, et les SEU ROQUE TUPINAMBA peuvent en être fiers.
Estamos na América latina !!
Titres de l’album:
01. Intro
02. Cancerígenos
03. Ferrugem e Fuligem
04. Ordens do Sistema
05. Viver Morrendo
06. No Bico do Urubu
07. Carnaval Alterado (feat. Ryan Roots)
08. Suindara (Rasga Mortalha) (feat. E-manufaturado)
09. Pau-De-Arara
10. Ê, Meu Pai
11. Serra Pelada
12. A Última Balada
ça me fait penser à moi ivre mort parodiant Maurice Bejart, sur fond de Stravinski. Plus glucose, tu meurs. Mauriiiiice !
25/04/2024, 10:28
Mes confuses malgré mon instinct qui tapait dans le juste, rien avoir avec le gaillard à qui je pensais.
24/04/2024, 14:26
Vu récemment avec Napalm Death, et ça faisait plaisir de voir que beaucoup de gens connaissent leur Histoire du Death Metal car il y avait de vrais fans. Surtout, la formule D-Beat basique et efficace du père Speckmann fonctionne bien en live
23/04/2024, 09:55
Excellent disque avec un gros point fort sur le riffing atomique. La pochette m'évoque clairement celle de Nothingface, version bio-mécanique
22/04/2024, 18:04
Ca fleure bon le vieux Kreator période Pleasure to Kill ! Prod' crade, aux antipodes des trucs surproduits de certains groupes et quand ça speede, ça rigole pas.
21/04/2024, 19:52
Là clairement le label est dans son droit à 100%. Warner a racheté l'ancien label de Kickback, ils en font ce qu'ils veulent du catalogue. Après, l'élégance, une telle multinationale elle s'en beurre la raie. Mais je peux comprendre qu(...)
20/04/2024, 23:36
Mouiii, pas faux. Les gonzes ont signé.Mais ça me rappelle Peter Steele qui avait voulu défenestrer un type dans les bureaux de Roadrunner après avoir découvert que le label ressortait les albums de Ca(...)
20/04/2024, 20:06
Attention, les mecs ne se font pas "enfler". C'est juste que Warner ne leur a pas demandé leur avis pour rééditer le bazar et les mecs parlent donc d'édition pirate, alors que Warner a bien les droits sur le disque. Après, Kickback, ce ne son(...)
20/04/2024, 06:26
Non bien sûr je plaisantais, M'sieur Heaulme. Un artiste qui se fait enfler a mille fois raison d'en parler ! Et je sais malheureusement de quoi je parle.Respect pour Kickback. Content que tu les pu voir ce docu.
19/04/2024, 18:08
@Tourista :- "On s'en cogne"Bah non...- Tu t'es achement bien rattrapé avec ce docu qui était totalement passé à côté de mes radars.Exceptionnel.C'est pas C8 qui passerait ça bordel...
19/04/2024, 15:54
Au lieu d'aller baiser des gamines et des ladyboys à Bangkok, Stephan aurait dû apprendre à lire les contrats qu'il signe.
19/04/2024, 15:20
On s'en cogne. Non j'en profite juste pour dire à ceux qui ne l'auraient pas encor(...)
19/04/2024, 07:52