Un groupe qui m’accueille avec une photo de tournage du Frankenstein de James Whale ne peut me vouloir que du bien. La culture bis est étalée en pleine page, et les intentions sont claires : faire des parias les héros d’une génération qui s’attache un peu trop à la réussite personnelle. Et quel meilleur vecteur d’expression qu’un Rock Garage joué simplement, à fond la caisse, en le pétrissant de références et de clins d’œil à vos altesses ?
Aucun. Et c’est tellement évident que j’en ai des CRAMPS.
Les 2SISTERS sont connus sur la scène Rock nationale. A la manière d’éboueurs musicaux, les parisiens collectent depuis des années des preuves à charge, et montent un dossier solide pour prouver que l’underground est toujours aussi actif. Et cette fougue nous manquait beaucoup, tellement qu’on arpentait les allées de l’actualité la mine basse et le clavier étonnamment mutique. Ici, pas de soucis de compression excessive, de distorsion propre comme un saoul neuf, de lignes de chant repassées et d’instrumental aseptisé. Non, les parisiens n’ont pas changé leur tri non-sélectif d’épaule, et traquent toujours le lick qui fait mouche, et qui les attire. Comme un fromage.
Ou un cadavre.
Charbel Azzam (batterie), André Chazeau (chant), Nicolas Miquel (guitare) et Sébastien Marchand (basse/chœurs) tiennent à nous faire revivre l’épopée teigneuse du Garage Rock des sixties, lorsque les TROGGS et les compilations Nuggets tiraient à bout portant sur la sophistication. Présentés comme les fils illégitimes de MOTORHEAD et des SONICS, ils se contentent souvent d’un riff pur jus, qu’ils pressent jusqu’à être repus. Adeptes du binaire qui tue, les quatre musiciens foncent bille en tête et ne ralentissent que pour jouer un tour pendable. Nous faire les poches, nous laisser les mioches, et ruiner le bal avec les gaz d’échappement de leurs mobylettes.
Et avec un hymne d’intro aussi ventru que « Go ! Go ! », pas de doute : les RAMONES, GIRSCHOOL, MCLUSKY, Jack WHITE sont invités à la fête, et portent les fringues de circonstance. Terriblement Rock dans le fond et la forme, sentant la sueur comme le tabac froid ou la bière encore tiède, She Likes Monsters avoue sa passion pour les monstres de la mythologie américaine, ceux que vénéraient aussi Ed Wood et les SONIC YOUTH.
Brut, honnête, fulgurant mais construit, cet album qui couronne une décennie d’agitation respecte les règles en vigueur et s’arrête sous la barre de la demi-heure. Pas question d’en donner plus, au risque d’en donner trop et de rogner sur l’urgence du propos. Non, les 2SISTERS passent, en mode drive-by-shooting, mais visent les poubelles, les boîtes aux lettres, les bicyclettes de gamin, et éventuellement les petits lapins. On les regarde s’éloigner dans la nuit, l’air hilare, et fiers de leur coup pendable. Mais comment en vouloir à des garçons qui ont une telle éducation qu’ils se permettent de citer les superhéros Garage avec une finesse consommée ? Tentez de faire la tronche en sautillant sur « Hammer », essayez de rester impassible sur le frénétique « Frank Bop a Lula », faites semblant d’avoir oublié vos clefs en encaissant « She likes Monsters », et vous comprendrez mieux le potentiel de séduction de ces marsouins.
Je concède, j’admets volontiers, le Metal est très éloigné des obsessions de ces sagouins. Mais après tout, le Hard-Rock est né du Rock’n’Roll, lui-même né du Blues, alors autant accepter ses racines et ne pas faire la fine bouche. Et ne vaut-il mieux pas se sevrer d’un Rock basique mais dynamité plutôt que se nourrir d’un Heavy Metal déjà tiède à en mourir ?
Ici, la chaleur règne, et les watts dépareillent. A bord de cet appareil, le temps de vol paraît trop court, puisque le point B est rejoint du point A en vingt-sept minutes. Mais « That’s the Way » ou « Shake Shake » font passer les secondes plus rapidement que l’anatomie d’une chute, et si le vol est court, il n’est guère à la bourre.
Les 2SISTERS sont éventuellement la bande-son rêvée pour une Saint-Sylvestre animée. Mieux qu’une énième compilation des années 80, plus ludique qu’un bêtisier de nains, She Likes Monsters vous contamine de sa bonne humeur, et vous fait atteindre minuit au paradis. Mais attention : pas de bises ni de texto. Juste une bonne grosse claque dans la tronche, et du carburant pour dégager les bronches.
Le Rock n’est pas négociable.
Titres de l’album:
01. Go ! Go !
02. Death
03. She Likes Monsters
04. Your Song
05. She’s One Hell of a Lover
06. Shake Shake
07. Burn
08. Hammer
09. Frunk Bop a Lula
10. That’s the Way
11. Walker
2 sisters 1 cup ! haha joli pochette
Haaaa le Rock est tout sauf négociable !! Merci pour cette belle critique.
Chazz (2Sisters)
Ozzy sur sa chaise hé ben.Bon l'âge nous aura tous mais bon quand même c'est pas cool de voir ça.Moi ça m'aurait emmerdé.Autant un Anthrax, un Maiden ont toujours la peche après tant d'années (quitte &a(...)
07/07/2025, 13:18
j'ai eu l'occasion de les voir en première partie de Seum mi Juin. vraiment bien prenant !
07/07/2025, 12:48
Je m'attendais vraiment pas à ce qu'Ozzy tiennent 30 min sur chacun de ses shows...Bon, on peut pas dire que c'était "beau" à voir mais si j'avais eu la chance de gauler une place, j'aurai tout de même été bien con(...)
07/07/2025, 07:36
Putain je suis fan de Slayer mais c'était bien dégueulasse. Ça devient une parodie. Et oui merci pour tout Ozzy et tommy.
06/07/2025, 21:25
Oui c'est bien beau mais étaient ces gars durant l'ère Obama ou il a absolument tout trahis ? Trump on connait son histoire personnelle et ses financements. c'est sans surprise..
06/07/2025, 14:20
Pardon pour les fautes, mais quitte à écouter ce genre de trucs, Anna von Hausswolff le faisait beaucoup mieux il y a 10 ans. C'est ce qu'on appelle l'avant-garde je suppose.
05/07/2025, 06:51
Le problème de de Kayo Dot c'est qu'il dépend de l'envie du moment de Toby Driver et de qui l'entoure, tu peux avoir un album de drone/post-rock suivit d'un album de death metal, il n'y a pas de groupe et aucune identité. C'est dommage parce(...)
05/07/2025, 06:47
Merci à Clawfinger pour ce grand moment de transgression validée par l’ordre moral dominant. C’est rassurant de voir que la “rébellion” moderne consiste à tirer sur une cible usée jusqu’à la corde, avec des punchlines dignes (...)
04/07/2025, 07:16
Il tourne pas mal chez moi ce disque, et c'était un vrai plaisir de revoir le groupe live récemment après les avoir un peu mis de côté. Un autre concert en tête d'affiche ne serait pas de refus !
03/07/2025, 16:57
Morceau décevant et sans surprise. La présence de Chris Kontos dans le groupe y fait pour beaucoup dans mon intérêt pour ce retour, mais pour le moment bof.
03/07/2025, 16:47
Je n'ai jamais aimé ce groupe, mais j'étais passé devant durant un Hellfest et en effet c'était juste insupportable toutes ces harangues (littéralement toutes les 10 secondes). Moi je m'en beurre la raie, mais pour les fans ça doit &ec(...)
03/07/2025, 12:55
Vu à Toulouse et je n'ai pas du tout accroché, pourtant vu 2 ou 3 fois depuis 2005. Et j'avais bien aimé. Rien ne surnage, ça bastonne mais pour moi aucuns titres ne sort du lot.Par contre j'ai adoré Slapshot
02/07/2025, 16:01
Votre article sur le kintsugi est un véritable hommage à l’art de reconnaître la beauté dans la fragilité et les cicatrices : mentionner son origine au XVe siècle et sa philosophie wabi‑sabi renforce(...)
02/07/2025, 15:38
@Abrioche91 : la canicule t'a trop tapé sur la tête, mon pauvre vieux. Parce que se faire à répondre aux trolls, je n'avais plus vu ça depuis VS.
02/07/2025, 12:25