Sidereus Nuncius

Hegemon

08/10/2021

Les Acteurs De L'ombre Productions

Si d’aventure vous aviez l’intention de tester votre chaîne hi-fi flambant neuve avec le dernier album d’HEGEMON, je préfère vous prévenir de suite : elle n’y résistera pas. Les enceintes vont commencer à trembler, l’ampli à grésiller, les membranes à se fissurer, avant que le tout n’explose dans un fracas abominable. Les voisins, pris de panique, se rueront sur votre maison pour connaître les raisons de cet accident sismique, et vous aurez beau tenter de leur expliquer l’incident, ce sera peine perdue puisque vous serez devenu complètement sourd et aveugle. C’est ça l’effet HEGEMON, et en 2021, le groupe semble encore plus puissant et létal qu’au début de sa haineuse carrière.

Le début de carrière des montpelliérains date justement des mid nineties, cette période si fertile pour le Black français, qui a vu l’émergence de talents incontestables, et même de franges extrêmes qui ont depuis influencé les artistes maudits du monde entier. Et en écoutant cette déflagration intolérable qu’est Sidereus Nuncius, on peine à réaliser que le quintet accuse vingt-cinq ans d’âge. Malgré un changement de batteur en 2012, avec l’arrivée d’ΑΔ, les membres d’HEGEMON sont resté les mêmes, avec les mêmes préoccupations, et la même haine qui suinte de leur cerveau malade. Impossible de penser que des gens sains d’esprit puisent produire une musique aussi lyrique, ample et maladive. Impossible de penser que des musiciens soient capables d’une telle violence traitée avec une intelligence rare. Et en jouant totalement franc-jeu avec toi lecteur, je suis bien obligé d’admettre que malgré des années de pratique des français, j’arrive encore à être surpris de leur énergie et de leur créativité dans le mal.

A l’heure de faire le bilan d’un cinquième album célébrant des décennies de présence sur la scène, il convient de rappeler toute l’importance d’un groupe que l‘on n’a pas forcément vu venir. Six ans après le monstrueux The Hierarch, qui bien sûr les plaçait au sommet de la hiérarchie BM, les mercenaires de l’horreur reviennent au premier plan avec certainement l’une de leurs œuvres les plus complètes et fascinantes. Là où d’autres se seraient égarés sur le chemin de l’expérimentation hasardeuse, là où d’autres auraient joué le trop plein d’information rébarbatif, HEGEMON reste compact, en rangs serrés, et lâche la bombe ultime.

Enregistré, mixé et masterisé par Pat Guiraud entre 2020 et 2021 au studio WSL, Sidereus Nuncius est le genre d’album qu’on ramasse en pleine face sans avoir une seule seconde pour parer le choc. Pourtant, le groupe n’a rien changé à sa formule magique : un Black d’une méchanceté phénoménale, noir comme une nuit roumaine, dilué de quelques nuances permettant de relancer la machine, mais toujours assez formel dans sa trame. Evidemment, outre ce bloc de granit qui tombe d’une falaise, on notera comme d’habitude le soin porté aux arrangements, les quelques samples placés au bon endroit, les accélérations phénoménales en cinéma dynamique, ces couches de chant diaboliques qui vomissent des textes pas forcément complaisants, et cette unité qui lie le groupe et lui permet de déambuler dans des enfers encore plus moites qu’un sauna lubrique chauffé à blanc. Et dès « Heimarménè » et son intro lyrique, la messe noire est dite, et la conclusion prématurée : HEGEMON pulvérise la concurrence comme les murs de la pièce, et ne laisse que ruines, visages hébétés, souffrance auditive, et douleur physique.

Plus qu’un album, Sidereus Nuncius est un sprint d’une durée de marathon, et la preuve supplémentaire s’il en fallait une que le genre peut encore se permettre le luxe de rester classique tout en surprenant de sa qualité. Car ce cinquième chapitre de la saga ne cache aucune surprise, ou ne dissimule aucun changement de cap. Il maintient la barre fermement, et se dirige toujours vers ce néant Noisy que le groupe a toujours cherché. Doté d’un son à décorner Belzébuth lui-même, Sidereus Nuncius sidère, et adresse même un message subliminal aux détracteurs se réfugiant parfois dans le Blackgaze ou autres styles :

Oculos Habent Et Non Videbunt.
Ils ont des yeux mais ne voient pas.

Mais NOUS avons des oreilles, et NOUS entendons. Les structures au millimètre ; les harangues vocales à renvoyer Glen Benton sur les bancs d’une école catholique, les riffs qui se succèdent et qui s’imbriquent comme autant de pièces d’un puzzle satanique, les dissonances qui contribuent à rendre l’ambiance poisseuse, le malaise permanent plaqué par une férocité vorace, cette double grosse caisse aux allures de panzer écrasant le moindre obstacle, mais aussi ces cassures très futées qui brisent le schéma font de cet album une véritable cathédrale sonore qui vous pousse dans vos derniers retranchements, vous obligeant à voir la réalité en face : le mal triomphe, s’apprête à savourer son ultime victoire, dont vous serez le prix.

HEGEMON nous avait prévenus depuis longtemps, mais le temps passant, ses avertissements deviennent des condamnations. Ils condamnent  la concurrence à se surpasser, chose qu’elle peinera à faire à l’écoute de ces chansons, qui à l’image sonore de « Mellonta Tauta » et « Black Hole Womb » la plongera dans un état catatonique et le désespoir le plus absolu. Comment parvenir en effet à dégager un tel souffle, comment faire preuve d’autant de lucidité au moment de plaquer des percussions sur fond de discours susurré, comment réussir à faire passer BATHORY et IMMORTAL pour de vulgaires facteurs du diable aux missives mal affranchies (« Shamanic Cosmocrator »), et surtout, comment synthétiser avec autant de flair tous les éléments inhérents au Black Metal le plus traditionnel sans oublier son époque contemporaine (« Ascendency Of Astral Chaos ») ?

Les mots sont vains au moment de justifier d’un tel dithyrambe. On pardonnera aux convertis leur foi aveugle, on excusera les fans de continuer à soutenir un groupe qui n’a jamais faibli, encore moins trahi, et on laissera les opposants se quereller pour tenter de trouver une faille à l’édifice. Mais rappelez-vous :

Ils ont des yeux mais ne voient pas.

               

                                                                                                                                                                                                       

Titres de l’album:

01. Heimarménè

02. Mellonta Tauta

03. Shamanic Cosmocrator

04. Ascendency Of Astral Chaos

05. Shape Shifting Void

06. Ad Astra Per Obscura

07. Black Hole Womb

08. Your Suffering, My Pillars


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par mortne2001 le 13/10/2021 à 15:23
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@80.215.250.2
05/06/2023, 00:20:42

Profond

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