Sour

Sour

05/11/2020

Autoproduction

Oui mais en même temps, je ne pouvais pas savoir. Moi, j’ai juste regardé la pochette, vu le tag « Thrash » dessous, sans me demander ce que cette affaire cachait de sombres desseins. Je ne pouvais pas avoir connaissance du line-up du groupe ni de sa bio, et savoir que SOUR était en fait un duo constitué de « deux idiots de l’Illinois faisant de la musique ensemble ». Tout ça sonnait pro sur le papier, et j’étais même très étonné de constater que la page Facebook des dits « deux idiots » n’était suivie que par une centaine de personnes. Bon, je ne m’attendais pas à une production X-Treem, Metal Blade ou Roadrunner, mais je ne pensais pas non plus taper dans les sombres recoins de l’underground ricain non plus. Un truc entre les deux, un peu amateur, mais bien troussé, soutenu par un petit label ayant foi en ses poulains, enfin de quoi étancher ma soif quotidienne de Thrash bien moussu. Et finalement, après écoute du produit en question, je me suis rendu compte que les deux musiciens impliqués dans cette arnaque n’étaient pas vraiment des idiots, mais bien de véritables passionnés, à même de jouer avec professionnalisme cette musique que j’aime tant. D’ailleurs, ce premier album n’a rien d’une arnaque, puisque l’approche de Daniel "The Yellow Dart" Schwartz (guitare/chant) et Juanangel "Nacho Libre" Perez (batterie/chant) est la meilleure, à savoir respecter les fondamentaux tout en y insufflant un méchant vent de folie très personnel passant par la fenêtre ouverte de la cave de leur maison d’Aurora, Illinois. Deux crétins, Aurora, Illinois, voilà de quoi réveiller les mémoires et nous rappeler les exactions hilarantes de Wayne et Garth, et autant dire qu’en matière d’enthousiasme et de fun, Daniel et Juanangel n’ont rien à envier à nos deux personnages préférés. Mieux, ils auraient pu enflammer leur radiocassette de leur barouf sympathique, et leur permettre un headbanging autrement plus corsé que le « Bohemian Rhapsody » de QUEEN.

Bon sinon, SOUR, c’est presque du tout bon, même si le jeu de batterie de Juanangel a parfois du mal à se caler sur la croche, à la manière des batteurs de Thrashcore ou de Witchhunter de SODOM à ses débuts. Mais la puissance développée à l’occasion de ces dix morceaux permet d’excuser bien des erreurs, d’autant que les deux imbéciles n’ont pas choisi l’approche la plus classique. Leur Thrash, loin d’être générique, est trépidant, hystérique et délicatement sombre, loin de la simple copie des modèles de la Bay-Area ou de la Ruhr. On comprend d’ailleurs assez vite que les deux gus n’ont pas envie de sonner comme des élèves modèles, dès « Stalker » et son intro à la MORTICIAN. Enregistré, mixé et masterisé par Pablo Espana et Pedro Gonzalez aux Basement Studios de Chicago, Sour est une affaire de bestialité comme on en fait rarement, et se démarque dans le flot de productions vintage qui nous mordent les mollets trois ou quatre fois par jour. Pour être persuadé du caractère corrosif et unique du combo, il suffit d’écouter le massacre « Man », qui pendant cinq minutes dévoile tous les travers de ces deux olibrius, entre les charges accélérées et corsées, les breaks fait maison, et l’ambiance gentiment cloisonnée qui colle parfaitement à notre époque de confinement. Carré dans le rendu - enfin plus ou moins - ce premier album s’appréhende comme un premier film d’un bon réalisateur en devenir, un machin bricolé avec les moyens du bord, mais débordant justement d’imagination et d’entrain. Inutile donc de chercher le riff qui tue, le break qui pue, mais bien de s’imprégner de l’odeur générale, qui témoigne d’une certaine fascination pour MORTAL SIN et l’underground US des années 80, avec en tête de gondole HEXX, INDESTROY, et tous ces groupes qui ne désiraient pas rentrer dans le rang.

D’ailleurs, SOUR atteint même parfois l’hystérie de l’écurie Earache, à l’occasion de la torpille « Pyromaniac » qui n’est pas sans rappeler les logorrhées musicales de CEREBRAL FIX, OLD et autres tarés toujours sur la brèche du chaos. Mais cette folie n’empêche pas le chaland de distinguer des qualités d’interprétation, et beaucoup de passion, comme on le remarque en traquant ces accumulations de plans et d’enchaînements qui témoignent d’une réelle connaissance du genre. Les intros sont certes faciles, mais ce qui suit est atomique, pour le moins, et laisse votre âme comme un pauvre gosse de Tchernobyl exposé aux radiations. Du Thrash légèrement toxique donc, aux émanations gazeuses, et qui profite de cette dualité de chant pour répandre sa mauvaise parole au travers du haut-parleur du mauvais goût violent (« Mosquito Jesus », tellement intense qu’il en devient bordélique). Je le reconnais aisément, certaines pistes auraient pu être expurgées de quelques minutes, et la redondance commence à pointer le bout de son nez aux deux tiers du métrage, mais si l’on met de côté ces quelques répétitions tout sauf fâcheuses, l’ensemble tient debout, sans avoir besoin d’un échafaudage. Se basant la plupart du temps sur une entame en mid tempo solide, le groupe dévie rapidement sur une vélocité de circonstance, sauf lorsque la double pédale écrase tout sur son passage (« Truth Be Told »).

On pense même parfois à un MACABRE plus ambitieux, et on moshe, on slamme, on en redemande, et on fait l’hélicoptère au son de l’impitoyable « I've Had Enough ». En clôture, le duo prouve même qu’il a quelques ambitions, et lâche un title-track de plus de huit minutes, qui démontre s’il en était besoin que le talent est là, et qu’il doit encore être domestiqué. Mais tout y passe sur « Sour », des blasts qui sortent de nulle part aux riffs noirs et velus, en passant par la possession vocale et les déviances les moins recommandables mélodiquement parlant. Alors il est certain qu’en photo, Daniel et Juanangel ont l’air de deux crétins des Alpes exilés dans l’Illinois. Mais leur savoir-faire maison, leur jolie pochette signée Jason Barnett et leur folie douce leur permettent de se distinguer de la masse, même s’il reste pas mal de travail à faire pour balayer les quelques partitions gâchées qui traînent encore sur leur perron.               

                                                                                                                          

Titres de l’album:

01. Stalker

02. Deceit

03. Man

04. Pyromaniac

05. Mosquito Jesus

06. Eve Of Your End

07. Truth Be Told

08. I've Had Enough

09. I'm Ruined / Spastic Suicide

10. Sour


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par mortne2001 le 08/08/2021 à 14:36
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