The Chessboard

Delta Tea

29/02/2020

Autoproduction

Il est toujours très difficile pour un groupe de proposer une musique entièrement instrumentale. Spécialement lorsque le dit groupe évolue dans les sphères Rock, style qui se dispense assez difficilement d’un chanteur, tout du moins d’un frontman. Hors, les DELTA TEA se lancent justement dans cette aventure en 2020 après avoir proposé une campagne de financement participatif pour graver leur premier EP, The Chessboard. Mais si les DELTA TEA sont Rock, ils sont loin de s’en contenter, ce qu’ils précisent dès leur bio, pour ne laisser planer aucun sous-entendu. Cette franchise assumée, il leur reste toutefois un écueil de taille à éviter, l’absence de point de focalisation. En effet, le but de cette formation n’est pas de satisfaire l’ego d’un guitariste ou d’un quelconque instrumentiste, mais bien de proposer une cohésion d’ensemble qui pourra rebuter les amateurs de figure centrale. A l’image des formations de Jazz, ce groupe de Cergy s’appuie sur les compétences globales de tous ses membres. Les musiciens affichent en effet un parcours impeccable et un CV enviable, qui leur permet de se reposer sur des compétences individuelles mises au service d’un collectif. Et voilà donc la qualité principale de ce jeune groupe fondé en 2018. Des atouts personnels indéniables, mais une osmose générale palpable. A l’écoute de ces cinq compositions originales, on est tout de suite bluffé par le talent des musiciens, qui chacun à leur poste méritent des louanges, mais ne les cherchent pas. Depuis un peu moins de deux ans, le quatuor formé par deux frères et rejoint par deux autres passionnés (Oscar : Basse, Clovis : guitare,

Kilian : batterie, Antoine : Claviers) a donc peaufiné son approche pour essayer d’approcher la perfection, même si cette dernière n’est qu’une chimère. Et à l’écoute de The Chessboard on ne peut que s’incliner face au résultat obtenu, qui se permet de résumer quatre décennies de musique progressive et des années de métissage artistique.

Du jazz au Metal, DELTA TEA s’est construit autour des influences et de la technicité de ses musiciens pour mettre en scène une musique épique digne d'une BO de space opéra rock.

Telle est donc la présentation choisie, et autant admettre que si elle exagère un peu le côté « space Rock », elle n’en est pas éloignée de la vérité pour autant. Admettant de vastes influences qu’ils citent en partie (DREAM THEATER, HAKEN, STEVE VAI, MICHEL CAMILO, CHICK COREA, PINK FLOYD, DAFT PUNK, GOJIRA, DEEP PURPLE, OPETH), les DELTA TEA assument leur hétéroclisme et déroulent les notes sans risquer l’overdose. Immédiatement, on est frappé par la pureté d’un son qui respecte les finesses mais donne de l’ampleur et de la puissance. Mixé au studio du Chat Perché à Cergy, ce premier EP est d’une clarté incroyable, sans pour autant le sacrifier à l’épaisseur. On est ainsi frappé par la distorsion agressive de Clovis qui s’intègre très bien à des arrangements plus ciselés et cristallins. Il est évidemment inutile de dire que chaque morceau mérite une attention particulière, et qu’il est très ardu d’en mettre un en avant, tant tous prônent des valeurs semblables. De la musicalité, des mélodies prononcées, des tendances aux chromatismes et à la polyrythmie, mais aussi des surprises plus symptomatiques de la scène Jazz avant-gardiste et progressive française des années 70. Ainsi, les chœurs évanescents et désincarnés ne sont pas sans évoquer MAGMA, tandis que les passages plus calmes et mystiques rappellent les errances de PULSAR ou CATHARSIS. La technique pointue des quatre protagonistes leur permet aussi de réconcilier LIQUID TENSION EXPERIMENT et TRIBAL TECH, dans une version moins synthétique et démonstrative, tandis que le Steve VAÏ de Flex-Able pointe le bout de ses arrangements iconoclastes sur le long mais fascinant « Until Dust ».

Un peu de tout donc, mais pas de généraliste et surtout pas du n’importe quoi. S’il est difficile d’affilier complètement le projet au Metal, on peut tout de même associer les noms de Steven Wilson, de PORCUPINE TREE au collectif qui de la même manière, aime taquiner la Pop et le Rock pour mieux imposer de grandes envolées puissantes. Les constructions en elles-mêmes, libres, répondent à une logique de progression qui tout en évoquant la théâtralité de la scène de Canterburry, en évitent les pièges emphatiques. Et entre les cocottes de guitare qui deviennent des riffs charnus, les prouesses de Kilian à la batterie, qui remplit mais ne fait pas déborder, et cette basse ondulante et ronde, le mélange est équilibré, et permet même aux claviers de ne pas sonner trop datés et de trouver une approche vraiment novatrice. Ici, pas de solo à rallonge, pas de break interminable, mais une optique collégiale qui renvoie au meilleur des percussionnistes inventifs (NOMEANSNO, PEROPERO, ZEUS), et une sorte d’épure sur les improvisations de LIQUID TENSION EXPERIMENT, la complaisance en moins et la pertinence en plus. On aime particulièrement ces passages qui renvoient aux tentatives instrumentales Hard des années 80 replacées dans un contexte de Progressif ouvert des années 90 (école SPOCK’S BEARD), mais surtout ces idées qui prennent le temps de se développer, et cette tactique Jazz qui consiste à broder sur un thème pour l’enrichir, l’épaissir, le faire dévier, avant de revenir à l’idée initiale (« Share »). Il est en effet rare de tomber sur des musiciens capables d’impressionner mais qui préfèrent procurer un réel plaisir, et encore plus de dénicher un EP d’un tel professionnalisme sachant rester frais et abordable. Et si le Jazz, le Rock, le Metal, et toute forme de musique vous sied à partir du moment où elle ne reste pas pure dans son coin, jetez-vous immédiatement sur The Chessboard. Car de cette partie d’échecs, tout le monde sort gagnant, et les fous y sont rois.           

                

Titres de l’album :

01. Chessboard

02. Delocalized

03. Until Dust

04. Share

 05. Outro


Site officiel

Facebook officiel


par mortne2001 le 28/02/2020 à 17:41
85 %    1115

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Midnight + Cyclone + High Command // Paris

Mold_Putrefaction 24/04/2024

Live Report

DIONYSIAQUE + JADE @La Chaouée

Simony 23/04/2024

Live Report

Enslaved + Svalbard + Wayfarer

RBD 20/03/2024

Live Report

Voyage au centre de la scène : BLOODY RITUAL

Jus de cadavre 17/03/2024

Vidéos

Crisix + Dead Winds

RBD 20/02/2024

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Humungus

Putain !Si j'avais été au jus de cette date, j'aurai fait le déplacement boudiou...Pis je vois que tu causes de BARABBAS à Nancy ?!Et c'est... ... ... Ce soir.Re-Putain !

25/04/2024, 13:28

Tut tut!

25/04/2024, 12:44

Gargan

ça me fait penser à moi ivre mort parodiant Maurice Bejart, sur fond de Stravinski. Plus glucose, tu meurs. Mauriiiiice !

25/04/2024, 10:28

DPD

Mes confuses malgré mon instinct qui tapait dans le juste, rien avoir avec le gaillard à qui je pensais.

24/04/2024, 14:26

RBD

Vu récemment avec Napalm Death, et ça faisait plaisir de voir que beaucoup de gens connaissent leur Histoire du Death Metal car il y avait de vrais fans. Surtout, la formule D-Beat basique et efficace du père Speckmann fonctionne bien en live 

23/04/2024, 09:55

LeMoustre

Excellent disque avec un gros point fort sur le riffing atomique. La pochette m'évoque clairement celle de Nothingface, version bio-mécanique

22/04/2024, 18:04

Arioch91

Ca fleure bon le vieux Kreator période Pleasure to Kill ! Prod' crade, aux antipodes des trucs surproduits de certains groupes et quand ça speede, ça rigole pas.

21/04/2024, 19:52

Poderosos/Magnificencia/Técnica Suprema

Los Maestros del BRUTAL DEATH GRIND

21/04/2024, 19:50

Pomah

+1 Gargan, influence Mgla je trouve par moment. 

21/04/2024, 09:20

Jus de cadavre

Là clairement le label est dans son droit à 100%. Warner a racheté l'ancien label de Kickback, ils en font ce qu'ils veulent du catalogue. Après, l'élégance, une telle multinationale elle s'en beurre la raie. Mais je peux comprendre qu(...)

20/04/2024, 23:36

Tourista

Mouiii, pas faux. Les gonzes ont signé.Mais ça me rappelle Peter Steele qui avait voulu défenestrer un type dans les bureaux de Roadrunner après avoir découvert que le label ressortait les albums de Ca(...)

20/04/2024, 20:06

Tourista

Devinez où il se Lemmy. (ne me raccompagnez pas, je sors tout seul)

20/04/2024, 19:58

Grosse pute

Attention, les mecs ne se font pas "enfler". C'est juste que Warner ne leur a pas demandé leur avis pour rééditer le bazar et les mecs parlent donc d'édition pirate, alors que Warner a bien les droits sur le disque. Après, Kickback, ce ne son(...)

20/04/2024, 06:26

Tourista

Désolé pour les coquilles monstrueuses.  Merci la saisie automatique.

19/04/2024, 20:51

Tourista

Non bien sûr je plaisantais, M'sieur Heaulme. Un artiste qui se fait enfler a mille fois raison d'en parler !   Et je sais malheureusement de quoi je parle.Respect pour Kickback. Content que tu les pu voir ce docu.

19/04/2024, 18:08

Humungus

@Tourista :- "On s'en cogne"Bah non...- Tu t'es achement bien rattrapé avec ce docu qui était totalement passé à côté de mes radars.Exceptionnel.C'est pas C8 qui passerait ça bordel...

19/04/2024, 15:54

grosse pute

Au lieu d'aller baiser des gamines et des ladyboys à Bangkok, Stephan aurait dû apprendre à lire les contrats qu'il signe.

19/04/2024, 15:20

Humungus

Ouhlala miam miam !!! !!!! !!!

19/04/2024, 10:35

Tourista

Désolé, c'est bien SODOM et non....   Putain de correcteur !  

19/04/2024, 07:52

Tourista

On s'en cogne.   Non j'en profite juste pour dire à ceux qui ne l'auraient pas encor(...)

19/04/2024, 07:52