Un groupe classique qui ne l’est pas totalement, ça vous tente ? Un groupe qui reprend à son compte des décennies d’influences pour tenter de les restituer d’une façon plus personnelle, mais pas moins efficace que ses aînés ? Un groupe catchy mais inventif, pertinent mais curieux, qui parvient dans un même élan à réunir les eighties sacrées, les nineties dévastées et le nouveau siècle ravagé par le recyclage forcé ? Si la réponse est positive, n’allez pas plus loin, vous lisez la bonne chronique. Et c’est encore le nord de l’Europe qui nous envoie ses fils prodigues, ces JUSTIFY REBELLION qui en effet, semblent mener une saine rébellion contre le Metal timoré ou trop dilué dans ses compromissions. Fondé en 2014, ce quatuor (Lukas Rautenberg - guitare/chant, Nikolaj Madsen - guitare, Stephen Torpe Andersen - basse et Nikolaj Ersbøll Ross - batterie) nous a déjà exposé ses vues sur un premier et rageur LP, Unleashing The Beast qui effectivement lâchait les chiens de la rage sur la piste des traîtres de la cause Heavy. Quelques années plus tard, voici donc de nouveau les danois remontés comme des poignets cloutés, et prêts à asservir le public Hard de leurs revendications légitimes et classiques, via une suite tout à fait logique sous la forme de neuf nouveaux morceaux qui ne dévient en rien de la trajectoire initiale. Dans le fond, The Ends Justify The Means est d’un classicisme désarmant. Il reprend à son compte les différentes formules élaborées par les maîtres du Heavy US et européen, et se cale sur la ligne du parti agressif sans gêne ni honte. On retrouve donc une simplicité érigée en vertu cardinale, et une efficacité de tous les instants. Dans la forme, les choses sont un peu plus complexes. Car à force de mixer dans un même bol des références différentes, le groupe parvient à se dessiner une identité plus personnelle, sorte d’enfant illégitime de la vague Heavy des années 80 et de la mouvance alternative des années 90, sans perdre sa foi en route.
Les sempiternels arguments promotionnels adressent le quatuor au bon vouloir des fans de METALLICA, VOLBEAT, et SLAYER. Si le cas de ces retraités derniers est complètement hors-sujet, les deux autres rentrent dans le cadre. Mais il est évident que le champ d’action des danois ne s’arrête pas à ces deux mentions. On trouve aussi dans leur musique l’urgence des ALMIGHTY, la puissance de la vague NOLA, et la pertinence mélodique des CORROSION OF CONFORMITY, ainsi que des traces de modernité nordique. En somme, l’adjonction du formalisme de la scène Hard n’Heavy d’il y a trente ans, et la volonté mélodique d’ouverture de la décennie suivante pour une bordée d’hymnes à rendre fiers leurs voisins suédois. Enregistré et produit par Christian Bonde aux CB studios de Jutland, The Ends Justify The Means est donc cette fameuse fin qui justifie les moyens, et ces moyens sont simples. Vous faire headbanguer intelligemment sur des morceaux solides et méchamment construits, qui opposent des refrains collégiaux à des couplets virils et musclés. Et la variété d’approche est grande, ne le nions pas. Chaque titre possède sa propre patte et sa méthode de séduction, que le rythme soit syncopé et méchamment sudiste (« Crowd Control », que DOWN aurait pu composer pour honorer la mémoire du PANTERA de « Revolution is my Name), ou plus appuyé et symptomatique d’une optique thrashy (« Prisoner in Time », mélange de THE ALMIGHTY et EXODUS sans en avoir l’air, mais la chanson quand même). En gros, un savoir-faire intergénérationnel qui réconcilie les époques et les modes, sans opportunisme, mais avec beaucoup d’intelligence.
Simple, mais pas simpliste, tel pourrait être le résumé parfait de ce deuxième LP qui s’amuse beaucoup à revisiter ses classiques. On sent du METALLICA des années 90 sur « Prisoner in Time », du groove de la Nouvelle-Orléans sur « Shameless », mais aussi du boogie endiablé des seventies, et des aspirations un peu moins balisées et modérées sur le presque progressif « The Bringer of War ». A vrai dire, JUSTIFY REBELLION ne s’embarrasse pas de principes ni de querelles de voisinage. Son seul but est de proposer à des fans fidèles une image du Heavy Metal en 2019, qui n’a pas oublié les anciens clichés des générations antérieures. Il y a de la gravité dans cette musique, de l’agressivité, mais bien proportionnées, et surtout, le plus important, une bordée de riffs qui s’incrustent dans la mémoire et en électrisent encore plus les connexions synaptiques. Capables en tant qu’individualités, ces musiciens prennent toute leur ampleur dans le jeu collectif. C’est ainsi que les deux guitaristes jouent souvent à l’unisson, soutenant ainsi le chant véhément mais intelligible de Lukas Rautenberg. Le chanteur a d’ailleurs ce timbre de voix qui permet à peu près toutes les citations, et qui lui permet sans transition de passer d’une ruade lourde à une embardée méchamment Speed, sans avoir l’air de forcer son talent. Disposant d’une production puissante et claire, les quatre danois jouent sur du velours, et accumulent les figures imposées, qu’ils dégagent toutefois de leurs motifs les plus connotés. On sent la rage suinter des soli, et la hargne couler des cordes lorsque les riffs tranchent les chairs. Toujours à cheval entre la percussion immédiate et les ambitions plus évolutives, The Ends Justify The Means est un monstre d’efficacité nuancée, qui ose les aplatissements les plus étouffants (« Salvation », entre Stoner et Heavy, entre 7 WEEKS et PANTERA), le flow heurté et les textes hurlés, les licks addictifs et les revendications légitimes (« Syretrip »).
A l’aise dans leur costume trois-pièces (Metal, Hard Rock et Thrash light), les JUSTIFY REBELLION n’éprouvent plus le besoin de se justifier, et osent la composition la plus ambitieuse de leur jeune carrière. En final, « Throne of Greed » prouve que le groupe a de la ressource, et a les moyens de ses envies. En synthétisant toutes les propositions émises précédemment, ce monstrueux morceau de plus de sept minutes nous fait traverser les époques, augmente la pression avec des riffs supportant les 3 ou 4G, et nous permet de revisiter toutes les facettes d’une musique qui en trois ou quatre décennies à tout essayé pour ne pas se voir cantonnée au simple rôle de défouloir pour ados attardés. Avec son alternance de passages à rendre fous les HEATHEN et ses couplets à la JUDAS PRIEST, le groupe lâche les watts et joue son va-tout, remportant brillamment la palme du combo le plus percutant de ce début d’année 2020. Alors si un groupe classique ne l’étant pas totalement vous tente, ne vous gênez pas. Les JUSTIFY REBELLION seront votre bona fide.
Titres de l’album :
01 - Präeludium
02 - Crowd Control
03 - Prisoner in Time
04 - Shameless
05 - The Summoning
06 - The Bringer of War
07 - Salvation
08 - Syretrip
09 - Throne of Greed
Mes confuses malgré mon instinct qui tapait dans le juste, rien avoir avec le gaillard à qui je pensais.
24/04/2024, 14:26
Vu récemment avec Napalm Death, et ça faisait plaisir de voir que beaucoup de gens connaissent leur Histoire du Death Metal car il y avait de vrais fans. Surtout, la formule D-Beat basique et efficace du père Speckmann fonctionne bien en live
23/04/2024, 09:55
Excellent disque avec un gros point fort sur le riffing atomique. La pochette m'évoque clairement celle de Nothingface, version bio-mécanique
22/04/2024, 18:04
Ca fleure bon le vieux Kreator période Pleasure to Kill ! Prod' crade, aux antipodes des trucs surproduits de certains groupes et quand ça speede, ça rigole pas.
21/04/2024, 19:52
Là clairement le label est dans son droit à 100%. Warner a racheté l'ancien label de Kickback, ils en font ce qu'ils veulent du catalogue. Après, l'élégance, une telle multinationale elle s'en beurre la raie. Mais je peux comprendre qu(...)
20/04/2024, 23:36
Mouiii, pas faux. Les gonzes ont signé.Mais ça me rappelle Peter Steele qui avait voulu défenestrer un type dans les bureaux de Roadrunner après avoir découvert que le label ressortait les albums de Ca(...)
20/04/2024, 20:06
Attention, les mecs ne se font pas "enfler". C'est juste que Warner ne leur a pas demandé leur avis pour rééditer le bazar et les mecs parlent donc d'édition pirate, alors que Warner a bien les droits sur le disque. Après, Kickback, ce ne son(...)
20/04/2024, 06:26
Non bien sûr je plaisantais, M'sieur Heaulme. Un artiste qui se fait enfler a mille fois raison d'en parler ! Et je sais malheureusement de quoi je parle.Respect pour Kickback. Content que tu les pu voir ce docu.
19/04/2024, 18:08
@Tourista :- "On s'en cogne"Bah non...- Tu t'es achement bien rattrapé avec ce docu qui était totalement passé à côté de mes radars.Exceptionnel.C'est pas C8 qui passerait ça bordel...
19/04/2024, 15:54
Au lieu d'aller baiser des gamines et des ladyboys à Bangkok, Stephan aurait dû apprendre à lire les contrats qu'il signe.
19/04/2024, 15:20
On s'en cogne. Non j'en profite juste pour dire à ceux qui ne l'auraient pas encor(...)
19/04/2024, 07:52