The Shadow Inside

Sadus

12/10/2023

Nuclear Blast

SADUS, au même titre que ses contemporains ATHEIST, CYNIC et DEATH a bénéficié d’une aura particulière dans les nineties, presque christique, tout du moins dans l’esprit des amateurs de technique mise au service d’une violence fatale et létale. Toutefois, de ce quatuor ressortent plus facilement les trois noms déjà cités, et SADUS, malgré une personnalité forte et un niveau stratosphérique n’a jamais vraiment pu se hisser au niveau de la concurrence en termes de rayonnement et d’exposition. Mais les vrais savent à quel point ses trois premiers albums sont des pierres de rosette de l’alchimie Thrash/Death.

Reformé en 2017 après deux ans de hiatus (ou plus selon les biographies), le duo d’Antioch en Californie n’a eu de cesse de planifier son sixième longue-durée, quitte à prendre un temps fou pour lui donner corps. Aujourd’hui, six ans après cette réunion, le groupe peut enfin partager les fruits de son dur labeur avec sa fanbase, qui ne sera certainement pas déçue d’avoir eu à attendre si longtemps.

Jon Allen (batterie) et Darren Travis (guitare/chant), les deux membres originaux ont appris de leurs erreurs et de leurs errances, et ont tourné le dos à cette approche Progressive soft qui les avait guidés dans les années 2000. Exit les synthés et les facilités groovy, et adieu Out for Blood, tentative malhabile de se conformer aux désirs de son époque. Le SADUS 2023 renoue avec ses racines, même si la magie d’antan a cédé la place à un professionnalisme calibré qui ne permet pas d’éviter les facilités ou les redites, malgré le niveau phénoménal de ces dix nouveaux morceaux.

Enregistré avec l’aide de Juan Urteaga (EXODUS, TESTAMENT, MACHINE HEAD) aux Trident Studios, The Shadow Inside est un monstre qui rapproche encore plus le duo de ses concurrents de l‘époque. Toujours aussi habile pour complexifier la violence et pour malmener la technique, SADUS fonce et lit sa partition en diagonale pour bousculer l’auditeur et lui faire perdre ses repères. Et dans le marigot des sorties nostalgiques de ces dix dernières années, avoir des héros qui renouent avec leur passé en niquant au passage la nouvelle génération fait un bien fou et même, rassure.

Alors évidemment, aussi bombastic et cruel soit-il, The Shadow Inside peut difficilement être comparé aux chefs d’œuvre Swallowed in Black ou A Vision of Misery. Il n’en a ni le culot ni la facilité d’exécution, mais il reste une sacrée torgnole Death/Thrash de première bourre, loin des pilotages automatiques de certaines références des années 80. A la manière d’un OPPROBRIUM calé en solfège, SADUS piétine sans arrêt la frontière séparant le Techno-Thrash du Death fin et racé, et nous offre un tracklisting noir comme le jais. Et comme on ne peut faire meilleure impression qu’en décochant un énorme parpaing dans la tronche à peine la porte de vos hôtes ouverte, le duo nous assène en guise de retrouvailles un « First Blood » à faire passer Rambo pour un chef scout au totem ridicule.

En moins de sept minutes, SADUS nous fait comprendre à quel point il nous a manqué dans sa configuration historique. Intro mélodique et sobre, riff qui s’impose sur fond de toms malmenés avec classe, embardée sans ceinture de sécurité, les réflexes du passé sont toujours là, et toujours aussi efficaces. On se laisse glisser le long de la pente de la complexité instrumentale, coincé entre deux artisans de la douleur auditive qui connaissent bien le marché pour l’avoir alimenté durant de longues années.

Jon et Darren n’ont donc rien perdu de leur clairvoyance, et alignent les figures de style comme à la parade d’un Death/Thrash toujours pas apaisé depuis son émergence. On pense évidemment à l’ATHEIST le plus féroce, celui de Piece of Time et Unquestionable Presence, mais on se remémore aussi les exactions de ce combo californien plus hargneux que ses petits camarades, et le jeu de basse de Steve DiGiorgio qui fait parfois cruellement défaut sur ce sixième album. Mais son absence n’est pas le seul handicap d’un disque qui cède parfois aux facilités d’usage, en répercutant des plans d’un titre à l’autre sans les modifier suffisamment.

Ainsi, « No Peace » semble s’ingénier à reproduire tous les arguments antérieurs en y ajoutant un souffle mélodique insuffisant, et bride ainsi sa vélocité et son agressivité en refusant de s’aventurer hors des routes battues. 

Cette réflexion vaut pour quelques morceaux, plus faciles que la moyenne (et considérant le long processus de création dont le groupe a usé depuis sa reformation, privilégiant la spontanéité et la liberté au travail forcé), et qui tirent The Shadow Inside vers une moyenne haute, l’empêchant de fait de décoller vers des cimes qu’il aurait pu défier.

Mais ne soyons pas trop dur, puisque ce disque survole la quasi-totalité de la production Thrash/Death old-school de ces cinq ou six dernières années. Toujours maîtres dans l’art de l’alambiqué torturé, les deux hommes lâchent tout, mais savent aussi construire une évolution passionnante et vénéneuse, à l’image de « The Devil In Me », qui même exorcisé de sa formidable partie de batterie restera toujours un vilain démon aux mains agiles.

Et si la voix de Darren n’est plus aussi vicieuse et fielleuse qu’avant, elle reste un médium de communication intraitable, qualité qu’elle partage avec Kelly Shaefer, entre autres points plus que communs.

En tant que fan vous aurez le plaisir de retrouver un groupe unique, qui n’a pas perdu grand-chose de son savoir-faire. Un groupe réduit à la portion congrue, mais qui sait toujours y faire en sur-mesure, via de petites merveilles de haine comme « Ride The Knife » ou le bien-nommé « Anarchy ». Quant à « The Shadow Inside », title-track et final orgiaque, il nous laisse sur un sentiment de satisfaction et de travail accompli, Darren et Jon pouvant se frotter les mains de leur collaboration renouvelée et remise sur les bons rails.

SADUS, comme tant d’autres héros de l’époque, se contente souvent d’un habile fan-service, mais remplit ses obligations, à l’image d’OBITUARY ou AUTOPSY. Les gardiens de la flamme sont bien vivants, et comptent bien jouer encore un rôle sur la scène extrême. Un rôle de premier plan s’entend, on ne colle pas les mythes en première partie, et on ne les laisse pas dans le placard se faire bouffer par les…mites.

    


Titres de l’album:

01. First Blood

02. Scorched And Burnt

03. It’s The Sickness

04. Ride The Knife

05. Anarchy

06. The Devil In Me

07. Pain

08. No Peace

09. New Beginnings

10. The Shadow Inside


Facebook officiel

Bandcamp officiel


par mortne2001 le 17/11/2023 à 16:37
85 %    855

Commentaires (2) | Ajouter un commentaire


ahaui
@5.51.210.183
18/11/2023, 10:16:40

Ils furent des second couteaux. Désormais ils ne sont simplement rien.


JP
@89.3.41.45
11/02/2024, 10:42:18

Leur musique perd beaucoup de son intérêt sans la griffe de Digiorgio !

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Anthems Of-Steel VII

Simony 30/05/2025

Live Report

Clinic LI-SA X et Paul GILBERT

mortne2001 29/05/2025

Live Report

The Sisters of Mercy + Divine Shade

RBD 21/05/2025

Live Report

Great Falls + Kollapse

RBD 04/05/2025

Live Report

Chaulnes MÉTAL-FEST 2025

Simony 27/04/2025

Live Report

Star Rider/Blaze Bayley

mortne2001 24/04/2025

Live Report

LOUDBLAST : 40 ans de carrière !

Jus de cadavre 20/04/2025

Vidéos

Big Brave + MJ Guider

RBD 12/04/2025

Live Report

Becoming Led Zeppelin

mortne2001 09/04/2025

Live Report

Klone

RBD 08/04/2025

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Simony

Ah ah ce message d'au revoir est magnifique"Je dois y aller maintenant… chercher un boulot et jouer à Roblox avec mon fils…"

31/05/2025, 09:12

mortne2001

@Gargan exact, oubli impardonnable...Mais que veux-tu, je suis une vieille baderne qui pense que DEEP PURPLE est de la musique de jeunes et que tout est pourri depuis la mort de Roy Orbison. Mais totalement d'accord pour "Whiter Shade of Pale", quel feeling....

30/05/2025, 09:39

Salmigondis

C'est toi qui deicide, mec.   

30/05/2025, 06:15

Gargan

Tu presses lecture, retour immédiat 35 ans en arrière ! 

29/05/2025, 22:47

Gargan

Bah tu as oublié la reprise finale de dragon ball par Lisa, question de génération hehe. Je ne connaissais pas tant que ça Paul Gilbert (un peu Mr Big et Racer X, mais pas plus), super bonhomme et musicien incroyable. Enorme panard sur la reprise de Procol Harum.

29/05/2025, 22:28

Rodimus

Excellent !!

27/05/2025, 13:11

Ivan Grozny

Cool qu'ils aient signé chez Osmose !

27/05/2025, 12:19

Humungus

J'avoue avoir délibérément censuré cette information de premier choix... ... ...

26/05/2025, 07:32

Oliv

Et Avatar lol 

25/05/2025, 20:35

Humungus

Et accompagné de PANTERA !!! !!! !!!

25/05/2025, 07:32

Boomer Killer

@LeMoustre : alors grand-père, t'as réussi à sorti des soins palliatifs?

24/05/2025, 07:15

Moshimosher

Une plaque bien méritée ! Mes deux premiers albums de death metal, Blessed are the Sick de Morbid Angel et Tomb of the Mutilated de Cannibal Corpse, deux albums que j'adore toujours autant, après  plus de 30 ans passés dans ma discothèque, y ont &eacut(...)

23/05/2025, 19:55

Humungus

Amen.

23/05/2025, 09:41

Jus de cadavre

Je chiais encore dans des couches à la grande époque du Morrisound, et pourtant si je fais un top 10 de mes albums de chevet tous styles confondus, la moitié (au moins) aura été enregistré dans ce studio. Le genre de lieu qui a marqué notre sc&egra(...)

22/05/2025, 17:52

RBD

On lui doit bien ça !

22/05/2025, 12:08

Humungus

Y nous en faut des comme ça en ZEP...

21/05/2025, 19:27

Jus de cadavre

Si ce qu'il dit est vrai c'est quand même bien bas comme méthode de "licenciement", surtout venant d'un groupe qui prône ouverture, tolérance et respect à longueur de show (ironiquement par sa propre voix en plus...). 

21/05/2025, 17:13

Moshimosher

J'aime bien ce groupe... c'est dommage que cette collaboration se termine ainsi... En tous cas, faut que je jette une oreille à Downstater...

21/05/2025, 16:13

Gargan

Ses élèves ne doivent pas moufter...   

21/05/2025, 14:31