Les voyages forment la jeunesse. C’est un adage que l’on utilise souvent pour donner l’envie d’un ailleurs qui finalement, n’est pas plus intéressant qu’ici. La planète a déjà révélé tous les trésors qu’elle cachait ou non, et il devient alors inutile de prendre l’avion ou le train pour explorer des contrées déjà usées par les touristes et autres travellers. Le plus simple finalement, est de fermer les yeux, et de dessiner « son » ailleurs, le modeler à sa convenance, le peupler selon ses rêves, et finalement, procéder à une construction onirique assez proche de ce que l’on pouvait voir dans l’Inception de Christopher Nolan.
Mais les voyages peuvent aussi se faire en musique, et la destination est tout aussi fascinante. Les musiciens ont de tout temps proposé à leurs fans des trips incroyables, induits par la drogue ou plus naturellement l’imagination, et les australiens de BOLT GUN font partie de cette catégorie d’auteurs qui intègrent depuis leur émergence des éléments d’évasion, mais aussi de brutalité froide.
Et le nouveau déplacement proposé par The Tower nous entraîne dans une autre réalité, là où le temps s’écoule différemment, et où les silhouettes traversent un brouillard éternel à la recherche d’une rédemption, ou d’un purgatoire.
Définir l’approche artistique du quatuor austral est tâche ardue. On parle généralement de Black Metal, de Doom, de Post Black, d’Avant-garde, d’Ambient, ou pour faire plus simple et généraliste, de Black Metal expérimental. Mais les étiquettes, aussi vagues soient-elles ne sauraient restreindre la créativité de musiciens qui ont depuis longtemps refusé de se conformer aux normes. De fait, Begotten, lâché en 2020 nous précipitait dans un univers claustrophobe, anxiogène, en assumant ses faux airs d’adaptation de ce film incroyable réalisé en 1989 par E. Elias Merhige.
Ce film, muet, tendu, très contrasté et hermétique, s’est depuis constitué un cult-following impressionnant. Il faut dire que son abstraction et son refus d’une narration conventionnelle en ont fait un objet de désir qu’on fantasme bien avant de l’avoir vu. A la manière d’un David Lynch prenant la caméra sous l’égide d’une admiration pour Alain Resnais, Begotten dessinait des paysages cauchemardesques, utilisait des sons abrasifs, pour déranger, et provoquer un sentiment d’inconfort.
Et finalement, c’est bien The Tower qui se rapproche le plus de sa philosophie absconse.
En cinq morceaux de durée excessive égale, BOLT GUN joue sur les émotions, les cassures, les impulsions, mais aussi l’irritation. En incorporant des éléments de Post-Metal, de Jazz louche, de Rock occulte et de Black sourd et diffus, le quatuor australien tisse une toile nocturne dans laquelle les mouches que nous sommes viennent s’y constituer prisonnières. Nous engluant dans ses fils tendus entre deux murs, notre libre-arbitre perd de son poids, et nous acceptons alors que nos sensations prennent le relai. Inutile donc d’essayer d’expliquer les effets produits par cette situation grotesque, puisque chaque sensibilité projettera ses propres images.
Un gigantesque travail accompli sur le son, les arrangements, cette spontanéité qui souligne l’improvisation permanente, et cette douleur soude qui exsude des pores d’un album sans complaisance, transforment l’expérience en introspection, à la recherche de nos propre démons. Des démons qui ont visage humain, et qui nous ressemblent beaucoup, nous guidant sur le chemin de la contrition, tel un pêcheur portant sa propre croix.
Mais la croix est lourde, si lourde que les épaules finissent par lâcher dans la noirceur d’une nuit sans fin.
On peut évidemment ne pas adhérer au propos. Il est étrange, personnel, obscur et peu rassurant, et loin d’être universel. A la manière d’un NEUROSIS en tandem avec ALCEST, BOLT GUN laisse l’auditeur se faire son propre avis sur la lancinance et l’insistance, mais nous oblige quand même à dresser un bilan de vie. Un bilan de vie qui peut opter pour le statisme, ou au contraire, choisir de s’en aller là où personne ne parle ni ne juge.
Ce disque est donc hypnotique, pénétrant, attirant, et mortellement séduisant. Les idées, largement développées, se reposent souvent sur la confrontation entre de longues digressions mélodiques et de soudains accès de fureur qui surprennent autant qu’ils ne malmènent. Vous l’aurez compris, ici, chaque pas est mesuré, et la destination bien cachée.
Puisqu’elle dépend de votre propre imaginaire.
On ne peut nier que The Tower excelle dans un genre pourtant propice aux bavardages intempestifs ou autres hésitations pénibles. BOLT GUN, entre rêverie éthérée et cauchemar éveillé nous transporte dans une autre dimension, où seules les sensations importent, sans avoir à les identifier. N’étant plus très jeune, il m’est inutile dès lors de former ma jeunesse.
Mais une vieillesse ombragée sous les chênes de la vie me séduit assez. Surtout en si bonne compagnie.
Titres de l’album:
01. The Tower
02. The Vulture
03. The Sacred Deer
04. The Scapegoat
05. A Faint Red Glow
T'aimes ça hein le cuir et le metal salace, je préfère Patrick Sébastien, je le trouve moins pédé. Le petit bonhomme en mousse on s'en rappelle, ça c'est une chanson qu'on oublie pas, comme ce que te chantais ta maman..
10/07/2025, 21:36
@DPD : putain, cette merde de Chat Pile, de la noise bâtarde gay friendly qui pompe Godflesh et Korn. Et dans un autre post, tu parles de Deafheaven. Mais mec, arrête de donner des leçons et va donc faire une Bun Hay Mean.
10/07/2025, 21:20
Et ce qui s'est fait de marquant question death c'était le dernier Dead Congregation et le surprenant Reign Supreme de Dying Fetus. Et qu'on me parle pas de Blood Incantation tout est impeccable, il y a beaucoup de travail derrière, mais aucune symbiose entre les part(...)
10/07/2025, 15:17
L'underground est pas une qualité en lui-même, le dernier concert que j'ai vu t'avais les groupes qui enchaînent les plans thrash-death-black sans aucune cohérence, du sous Deathspell Omega (désolé mais dans le black dissonant tu seras toujou(...)
10/07/2025, 15:09
C'est à peu près le constat que nous sommes plusieurs à faire me semble-t-il, mais je mettrais tout de même Converge, The Dillinger Escape Plan ou Botch ailleurs que dans le metalcore. Mais pourquoi pas. ;-)@Jus de cadavre "Je crois qu'il faut acce(...)
10/07/2025, 14:34
@GPTQBCOVJe suis horrifié par l'idée de finir comme ça, voir Darkthrone se réduire aux lives jouant la fameuses trilogie pour payer les affaires courantes notamment des frais de santé, la social-démocratie m'en sauvera j'imagin(...)
10/07/2025, 14:16
Non mais même le metalcore t'avais la grande époque de Converge, Dillinger Escape Plan, Botch et compagnie...certains parleraient de hardcore chaotique mais bon. T'avais pas que de la musique lisse à refrain, ce n'est pas le diable que certains veulent peindre.&(...)
10/07/2025, 13:47
Si le Metalcore était à la mode il y a 20 ans, disons alors que (malheureusement) cela perdure car 1/4 des groupes jouant dans de gros et moyens fests ont un qualificatif se terminant par "core".
10/07/2025, 13:22
Cela m'espante toujours de voir des festivals complets (ou presque) un an à l'avance sans avoir annoncé aucune tête d'affiche.Le public est devenu très friand des gros festivals. Je pense évidemment à toute cette frange de festivalier(...)
10/07/2025, 12:23
Certains commentaires sont à côté de leur pompes, la grande mode du metalcore c'était il y a quoi ? 20 ans ? la bizarrerie c'est que pas mal de ces gens sont passés au black-metal pour une raison que j'ignore ce qui donne toute cette scene en -post(...)
10/07/2025, 12:04
Ce groupe est une pépite. Je reste encore sous le choc de The Crowning Quietus par exemple !
10/07/2025, 08:38
Et oui le Fall of que c'était dingue mais pas de monde pour pouvoir continuer
09/07/2025, 23:09
Je vais au Hellfest l'année prochaine depuis 2010 et je sais pertinemment que le métal extrême n'y a plus trop sa place et dieu sait que j'adore le black et le death mais je suis fan de musique et musicien avant tout et j'aime aussi cette diversité. (...)
09/07/2025, 23:07
Cette année, j'ai fait le Anthems of Steel et le Courts of Chaos. A l'automne, ce sera probablement le Muscadeath. Les festivals, ce n'est pas ce qui manque. D'ailleurs, plus ils sont passionnants dans la programmation, moins la fréquentation est importante. Biza(...)
09/07/2025, 21:39
Content de ne plus perdre mon temps, mon argent, mes nerfs et mes espoirs avec ce fest qui est devenu une totale foire aux neuneus.J'ai souvenir d'un site avant 2010/2011 avec encore peu de déco (c'est relatif mais comparé à ce que c'est devenu....)(...)
09/07/2025, 20:31
Je suis partagé. Je ne vais plus au Hellfest qui est devenu trop cher pour moi, et beaucoup trop peuplé. Pour autant, même si Muse ou Shaka Ponk suscitent le débat, ce n'est pas non plus archi-scandaleux. Les premiers ont toujours eu d'assez grosses guitares d(...)
09/07/2025, 18:22