These Tides, Our Tombs

Shark Infested Daughters

01/11/2016

Autoproduction

Dans la catégorie pourtant disputée des noms un peu branques et hermétiques, les canadiens de SHARK INFESTED DAUGHTERS remportent la palme de celui le plus incongru et digne d’un film d’horreur avec monstres aquatiques de série Z.

Mais c’est drôle et puis ça attire l’attention non ? Drôle, le patronyme l’est, mais la thématique et la musique beaucoup moins…

These Tides, Our Tombs est donc le premier effort longue durée de ce sextette venu de Calgary, composé de Dan McCormick (guitare et chant), Chris Thorensen (chant), Yannick Mathieu (batterie), Erika Leah (claviers et chant), Oliver Carter-Wells (guitare) et Dustin Wolfe (basse), et dont le but avoué est « de faire tomber les barrières et mélanger les styles ».

Leitmotiv ambitieux pour un ensemble évoluant dans le créneau ultra surchargé du Metalcore moderne, genre qui tourne en rond depuis ses origines et qui a du mal à trouver le velux pour aérer la pièce qui commence à sentir le moisi.

Oui je sais ce que vous allez dire, et vous aurez parfaitement raison. Un truc du genre « Hé, vieux con, si tu n’aimes pas tu n’écoutes pas, fais toi une raison et lâche nous les moignons ». Non, le Metalcore n’a jamais été ma canette de soda préférée, même si le style pétille de grosses guitares sous accordées giclant de riffs syncopés avec précision, de lignes de chant éructées comme pour évacuer un trop plein de gaz, et de breaks mélodiques comme des bulles qui éclatent sur votre palais.

Dans l’exercice, et pour un jeune groupe sans label, je suis bien obligé d’admettre que les SHARK INFESTED DAUGHTERS sont plutôt doués. Très même.

Evidemment, leur désir de faire tomber les barrières séparant l’arrière-garde de la nouvelle génération est voué à l’échec dès le départ, puisqu’ils n’ont pas encore les armes pour fédérer deux publics bien distincts. Leur musique, très inspirée des courants violents en vogue pioche un peu à droite à gauche, chez les LINKIN PARK, les BRING ME THE HORIZON, THE DEVIL WEARS PRADA et autres UNDEROATH ou BETWEEN THE BURIED AND ME, mais en même temps, dans un créneau pareil, difficile de faire table rase des influences pour dresser un banquet inédit. Alors plutôt que de rechercher en vain l’originalité, les Canadiens ont misé sur l’efficacité, et de ce côté-là, la mission est plutôt réussie.

En jugeant objectivement ce premier album et en mettant de côté mes inimitiés, je dois admettre que l’œuvre est finement ciselée, truffée de riffs bien incendiés, et de lignes de chant hurlées à plein poumons cramés par l’ambition.

Et si le concept tourne toujours autour des mêmes obsessions, l’amour, la perte, le chagrin et la dépression, il illustre notre monde en le dessinant comme une succession de vagues formant le cours de la marée, qui finissent par nous emporter et nous enterrer dans des sépultures d’oubli maritimes et côtières.

L’éternel débat, le sempiternel refrain sur l’amour et la mort, Eros et Thanatos, on connaît par cœur, comme la plupart des pistes de ce LP qui ne ménage aucune surprise, sinon quelques montées en puissance intéressantes, et une poignée d’arrangements électroniques ludiques qui soulignent des refrains mélodiques entonnés de la très jolie voix planante d’Erika.

Si le schéma de chaque morceau est sensiblement le même, il arrive que les six jeunes Canadiens se mettent un peu plus en colère, et frisent les cimes du Neo Death et celles d’un Deathcore cybernétique et harmonique (« Half-Life », sorte de crossover entre la rage des AT THE GATES/SOILWORK et l’intuition mélodique des BULLET FOR MY VALENTINE, pas si éloigné que ça d’une démarcation d’un CHTHONIC en fait…), ce qui apporte quand même un surplus d’énergie à une succession de titres un peu trop prévisibles pour surprendre qui que ce soit.

Le travail est d’école, propre, millimétré mais parfois, souvent même, un poil trop stérile pour faire se dresser les poils sur les bras. On retient comme d’habitude des parties de guitare précises, un son énorme, une rythmique plombée qui peut se faire plus élastique que la moyenne, et évidemment, une dualité vocale douceur/brutalité d’usage, avec ce petit contrepoint de voix féminines qui séduisent sans vraiment chercher le coup de foudre. Nonobstant le fait que je suis assez hermétique à ces démonstrations de professionnalisme extrême un poil trop téléphonées, il convient de préciser que These Tides, Our Tombs ne fait pas partie des tentatives les plus originales du style, mais qu’il se montre plus intéressant dans sa deuxième partie, qui laisse enfin la violence instrumentale crue s’exprimer, sans que les musiciens ne cherchent à trop l’édulcorer.

J’ai donc particulièrement apprécié « Kyubi », qui en effet joue salement avec les frontières séparant le Metalcore du Deathcore mélodique sans jamais franchir complètement la limite, « Hyperion », qui franchit les mêmes balises et se laisse aller à des parties limites Metalcore symphonique par moments, et le final « Hitokiri » qui lui aussi semble vraiment empreint de culture asiatique et de la scène Core locale, tout en retrouvant les tics de début d’album lorsque les chœurs féminins interviennent.

Non que la première moitié de l’album soit complètement insipide, mais ses morceaux sont encore un peu trop formatés pour vraiment convaincre les amateurs de nouveauté. Trois minutes et quelques de timing pour des figures imposées, qui parfois sont exécutées avec brio et intensité (l’ouverture «Tidebringer »), mais souvent un peu trop manichéennes dans leur approche d’une dualité agression/séduction (« White Fang »).

Sans jouer les grincheux, restons objectif, et affirmons que These Tides, Our Tombs saura plaire à tous les fans d’un Metalcore un peu plus joueur que la moyenne, mais qu’il n’a aucune chance de séduire les réfractaires ou les désabusés des répétitions trop crispantes.

En l’état, et pour un premier jet, cette initiation des SHARK INFESTED DAUGHTERS reste une jolie démonstration de professionnalisme, mais manque encore d’audace de caractère pour prétendre révolutionner un style un peu trop cloisonné.

 Du gros son, mais ces mêmes vagues risquent d’emporter les Canadiens vers leur propre tombe s’ils ne jouent pas un peu plus avec les cycles lunaires.


Titres de l'album:

  1. Tidebringer
  2. Glass Kingdom
  3. To Those Who Have Hurt
  4. Whitefang
  5. DeadEye
  6. Half-life
  7. Kyubi
  8. Lifestream
  9. Hyperion
  10. Hitokiri
  11. Tidebringer (Acoustic version)

Bandcamp officiel


par mortne2001 le 17/11/2016 à 16:21
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